Le Christianisme est la plus grande religion du monde, avec 2,8 milliards d'adeptes. Il est considéré comme l'une des trois religions monothéistes ou abrahamiques de la tradition occidentale, avec le Judaïsme et l'Islam. Le terme ‘Chrétien’ est dérivé du grec christos, pour massiah (‘l’oint’) en hébreu. Christianoi, ‘adeptes du Christ’, devint le nom d'un groupe qui suivait les enseignements de Jésus de Nazareth dans l'Israël du 1er siècle et qui proclamait qu’il était le messie prédit par les prophètes.
Le Christianisme fusionna les croyances du Judaïsme ancien avec des éléments de la culture dominante de l'Empire Romain. Les textes sacrés sont rassemblés dans la Bible chrétienne et comprennent les Écritures juives (considérées aujourd'hui comme l'Ancien Testament) et le Nouveau Testament (les Évangiles, les lettres de Paul et le Livre de l'Apocalypse). Cet article examine les origines de ce mouvement qui devint finalement une religion indépendante.
Le Contexte du Judaïsme Antique
Le Judaïsme antique partageait de nombreux éléments avec d'autres cultures et leurs conceptions religieuses. Les Juifs croyaient que les cieux contenaient différents niveaux de pouvoirs divins qui affectaient directement leur vie quotidienne. Ce qui distinguait les Juifs de l'Antiquité de leurs voisins était le commandement de leur Dieu d'Israël de ne faire des sacrifices (offrandes) qu'à lui seul; en ce sens, ‘adorer’ signifiait faire des sacrifices. Les Juifs avaient aussi des marqueurs d'identité ethnique distincts : la circoncision, des lois alimentaires et l'observance du sabbat (suspension de tout travail chaque septième jour de la semaine). On croyait qu’un ancien chef, Moïse, avait reçu un code de lois directement de Dieu pour organiser les Juifs en tant que nation sous sa loi (la Loi mosaïque). Ceux-ci établirent un royaume en Canaan sous les auspices des rois David et Salomon, qui construisirent le Temple de Jérusalem (1000-920 av. J.-C.).
Les Juifs subirent plusieurs désastres nationaux au cours des siècles. L'Empire Assyrien conquit et détruisit le Royaume d'Israël du Nord en 722 av. J.-C., puis Jérusalem et le Temple furent détruits par l'Empire Néo-Babylonien en 587 av. J.-C.. Les prophètes d'Israël (les oracles) rationalisèrent ces désastres en affirmant que Dieu avait puni les Juifs pour avoir intégré l'idolâtrie dans le pays. Cependant, les prophètes offraient un message d'espoir: à l'avenir, Dieu devait intervenir une dernière fois dans l'histoire de l'humanité, dans les derniers jours. À ce moment-là, Dieu lèverait un messie issu de la lignée du roi David, et certains Gentils (c’est à dire des non-juifs) se tourneraient alors vers le Dieu d'Israël pour l'adorer. Il devrait y avoir une bataille finale contre les nations, et Israël devrait retrouver sa gloire d'antan. Israël devait servir de modèle de nation juste pour le reste du monde, en élevant son Dieu au-dessus de tous les autres.
Occupations Grecque et Romaine
Au 1er siècle av. J.-C., les Juifs furent gouvernés par l'Empire Séleucide. Le roi Antiochos IV Epiphane (r. de 175 à 164 av. J.-C.) interdit les coutumes juives et ordonna aux Juifs de sacrifier aux dieux de la religion grecque. Les Juifs, sous la direction d'une famille hasmonéenne, se soulevèrent lors de la Révolte des Maccabées et chassèrent les Séleucides. Comme relaté dans 2 Maccabées, leurs souffrances introduisirent deux nouveaux concepts dans le Judaïsme :
- le concept de martyr (‘témoin’), pour celui qui mourait pour ses croyances.
- celui que tous les martyrs seraient récompensés en étant instantanément ressuscités et voués au paradis.
Rome conquit la Judée en 63 av. J.-C.. Diverses sectes juives, telles que les Pharisiens, les Sadducéens, les Esséniens et les Zélotes, réagirent à l'occupation de différentes manières. Ces groupes partageaient les traditions de base, mais différaient dans la manière de répondre au nouvel oppresseur et à la culture dominante de l'Empire Romain.
Au cours du 1er siècle de notre ère, de nombreux concurrents messianiques tentèrent d'encourager la rébellion parmi les foules lors des fêtes. La réponse typique de Rome était de tuer le chef et autant de partisans qu'elle pouvait trouver. Prôner un royaume qui n'était pas celui de Rome était équivalent à une trahison, pour laquelle la punition était la crucifixion.
Jésus de Nazareth
Jésus, un prédicateur itinérant de Nazareth, devint le centre d'intérêt d'une secte de Juifs qui se rassemblaient pour écouter ses sermons dans la région de la Galilée. Dans la lignée des prophètes d'Israël, il déclarait que le royaume était imminent; Dieu devait bientôt intervenir et rendre justice à tous. Il choisit douze disciples (élèves) comme symbole des douze tribus d'Israël. Selon les évangiles (récits sur Jésus écrits entre 70 et 100 de notre ère), il devint célèbre pour ses miracles, et ses disciples déclaraient qu'il était le messie promis.
Les évangiles rapportent que, lors d'un voyage à Jérusalem pendant la Pâque (vers 30-33 de notre ère), Jésus fut mis en jugement par le Sanhédrin (le conseil de gouvernement à Jérusalem) pour avoir prétendument prêché contre les pratiques du Temple. Condamné, il fut remis au procurateur romain, Ponce Pilate, qui le crucifia pour avoir prétendu être le roi des Juifs. Le procès et la crucifixion de Jésus de Nazareth finirent par faire partie de la liturgie chrétienne (rituels de l'église) par la reconstitution ces événements chaque année, pendant la semaine de Pâques.
Cette secte de Juifs se distinguait des autres par ses revendications messianiques concernant Jésus: bien qu'il fut tué, il fut ressuscité des morts le dimanche suivant sa mort. Selon Luc, il monta physiquement au ciel. Ce qui distinguait cette secte de Juifs des autres était son enseignement selon lequel ceux qui suivaient Jésus participeraient également à la résurrection des morts.
Les auteurs des évangiles eurent aussi à faire face à un problème, à savoir qu’alors que Jésus était sur terre, le royaume ne s’était pas encore réalisé. Un des premiers adeptes conçut alors l'idée de la parousie (‘seconde apparition’), selon laquelle Jésus reviendrait sur terre dans le futur, réalisant alors toutes les prédictions des prophètes. Les Chrétiens modernes s’attendent toujours au retour du Christ.
Les Missions des Gentils
Selon Actes des Apôtres 2, lors de la fête juive de la Pentecôte, le Saint-Esprit descendit sur les disciples et les dotèrent du pouvoir de transmettre le message de Jésus à d'autres villes en tant que missionnaires. Le rituel d'admission était le baptême, un rituel de l'eau qui symbolisait que l'on s'était repenti et tourné vers Dieu. Ce rituel avait été initié par un contemporain de Jésus, un homme connu sous le nom de Jean Baptiste.
Lorsque les premiers missionnaires chrétiens transmirent leur message à d'autres villes, ils furent surpris de constater que les Gentils étaient plus nombreux que les Juifs à vouloir rejoindre le mouvement. Une réunion se tint à Jérusalem (vers 49 de notre ère) pour décider si ces Gentils devaient d'abord se convertir au Judaïsme. Le Conseil Apostolique décida que ces Gentils n'avaient pas à adopter les coutumes d'identité ethnique des Juifs (circoncision, lois alimentaires, sabbat), mais qu'ils devaient cesser de manger de la viande trouvée dans la nature, des aliments sacrifiés aux idoles, et suivre les codes juifs sur l'inceste.
L’Apôtre Paul
En tant que Pharisien, Paul s'opposa d’abord au nouveau mouvement. Il reçut ensuite une vision de Jésus (désormais appelé "Christ") qui lui dit qu'il devait être son apôtre (‘messager’) auprès des Gentils. Paul voyagea dans les villes orientales de l'Empire romain, prêchant les traditions qu'il connaissait concernant le Christ, mais y ajoutant l'abolition complète de l'idolâtrie pour ses adeptes. Pendant des milliers d'années, les cultures anciennes avaient considéré que les idées religieuses étaient inscrites dans le sang, transmises par les ancêtres qui les avaient eux-mêmes reçues des dieux. Paul bouleversa cet ancien système, en affirmant que la foi (pistis, ‘loyauté’) en les enseignements du Christ était tout ce qui était nécessaire pour le salut (soter, ‘être sauvé’). Les lettres de Paul, l'apôtre des Gentils, mentionnent qu'il fut souvent arrêté et emprisonné pour cet enseignement.
Paul dit que le péché d'Adam apporta le châtiment de la mort dans le monde et que la mort du Christ apporta la vie éternelle. Le Christ expia le péché d'Adam, le ‘recouvrant’, et en ‘réparant’ la violation qu’il constituait. En appliquant des analogies avec les tribunaux, Paul enseigna que les adeptes étaient acquittés (‘redressés’) et n'avaient pas à subir le châtiment du péché, à savoir la mort. Plus tard, Augustin d'Hippone (354-430 de notre ère), Père de l'Église, affirma que le péché originel d'Adam et Ève laissa une tache sur le premier humain par le biais des rapports sexuels, tache qui fut ensuite transmise à tous les humains. Ceci introduisit le concept chrétien de la sexualité humaine en tant que péché, et conduisit également à la conviction que personne ne pouvait être sauvé sans le baptême.
Paul dit que lorsque le Christ reviendra, les croyants seront transformés en corps spirituels et rejoindront le Christ pour diriger le royaume de Dieu sur terre. Comme les décennies passaient et le Christ ne revenait pas, on ajusta cela à la conviction que même si les croyants mouraient encore physiquement, ils devraient pouvoir partager la vie au-delà au ciel.
Le Christ en tant que Dieu
Une innovation majeure par rapport au Judaïsme fut la prédication de Paul (Philippiens 2) selon laquelle le Christ était présent à la création et était descendu du ciel comme une manifestation de Dieu lui-même sous un corps humain. En tant que tel, le Christ était désormais digne d'être adoré, avec le titre de ‘Seigneur’, et équivalent à Dieu. Pour les Gentils, cette idée s'accordait bien avec leurs histoires de leurs propres dieux voyageant sur terre déguisés, mais pour beaucoup de juifs, cet enseignement était offensant et blasphématoire.
La Grande Révolte Juive de 66 de notre ère aboutit à la destruction de Jérusalem et du Temple par le général et futur empereur romain Titus en 70 de notre ère. Cet événement devint le cri de ralliement des Chrétiens contre les Juifs, qui n'avaient pas accepté Jésus comme le messie; Dieu les avait punis en utilisant Rome pour détruire leur système de croyance.
Les enseignements novateurs du Christianisme primitif furent peut-être les principaux facteurs de la propagation du mouvement dans tout l'Empire. N'étant plus liés à la géographie ou à des ancêtres ethniques, les croyants de toutes les provinces et de toutes les classes sociales se retrouvaient dans un ensemble de concepts religieux partagés. Au IIème siècle de notre ère, on pouvait trouver des Chrétiens depuis la Grande-Bretagne (et l'Europe continentale) jusqu’à l'Afrique et à des régions d'Asie.
La Persécution des Chrétiens (90-312)
Dans la Rome antique existaient des collegia, c'est-à-dire des groupes de personnes qui partageaient les mêmes affaires ou le même commerce et qui se réunissaient sous les auspices d'une divinité. Cependant, le groupe devait avoir l'autorisation du Sénat romain pour se réunir, un permis d'assemblée. Jules César (100-44 av. J.-C.) accorda aux Juifs le droit de se réunir et les exempta des cultes d'état de Rome, mais les Chrétiens n'avaient pas le même droit parce qu'ils n'étaient pas Juifs (non circoncis).
Sur la base du concept grec d'apotheosis (‘déifier’), Auguste (r. 27 av. J.-C. - 14 de notre ère) institua le culte impérial et, à partir de Jules César, les empereurs morts étaient supposés comme étant auprès des dieux. Ceci évolua vers l'élévation des empereurs vivants en tant que responsables des prescriptions des dieux et fut utilisé comme propagande dans tout l'Empire Romain. Les Chrétiens refusèrent d'y participer, et la réponse de Rome à la propagation du Christianisme consista à les accuser du crime d'athéisme, ‘manque de respect aux dieux’. Le fait de contrarier les dieux menaçait la prospérité de l'Empire Romain, et c'était ainsi l'équivalent d'une trahison. C'est pour cette raison que les Chrétiens étaient exécutés dans les arènes, avec l’expression "Les Chrétiens aux lions !" Pendant les 300 années suivantes, les dirigeants chrétiens adressèrent continuellement des pétitions aux empereurs pour qu'ils leur accordent la même exemption des cultes d'état qu’aux Juifs, mais ceci leur fut refusé jusqu'en 313 de notre ère.
Les Chrétiens adoptèrent le même concept que les Maccabées, affirmant que toute personne qui mourait pour sa foi était instantanément transférée devant Dieu en tant que martyr. Le martyre absolvait tous les péchés, et plus tard, une littérature légendaire connue sous le nom de martyrologie décrivit les détails de leurs épreuves. Cependant, les persécutions étaient sporadiques et limitées aux périodes de crise. Les tremblements de terre, les pestes, l'inflation, la famine, la sécheresse et les invasions aux frontières signifiaient que les dieux étaient en colère, et les Chrétiens devenaient un bouc émissaire commode pour ces désastres. Les persécutions les plus graves eurent lieu sous le règne de Dèce (251 de notre ère) et de Dioclétien (302/303 de notre ère).
Création de l'Église & de la Hiérarchie Institutionnelle
Au milieu du IIe siècle de notre ère, des décennies s'étaient écoulées et le royaume de Dieu n'était toujours pas arrivé. Les Chrétiens croyaient toujours au retour du Christ, mais celui-ci était désormais reporté à plus tard. Dans l'intervalle, les assemblées chrétiennes s’institutionnalisèrent par l'élection de dirigeants et s’organisèrent avec l'idée que les croyants devaient vivre comme si le royaume était déjà là; le royaume devait se trouver dans l'Église (le grec ecclesia, ‘assemblée’, fut finalement traduit par ‘église’). Très peu de Judéo-Chrétiens restaient dans les communautés chrétiennes. Les dirigeants chrétiens furent des convertis éduqués issus de la culture dominante.
Ceux-ci ayant été rétrospectivement considérés comme les Pères de l'Église, leurs écrits et opinions devinrent le dogme chrétien, un ensemble de croyances acceptées par le groupe :
- Élection du clergé - Empruntant un niveau administratif au gouvernement provincial romain, les évêques (responsables d’un diocèse) furent élus par les communautés. Des diacres furent également élus pour aider les évêques à distribuer la charité. Les diacres finissaient par devenir des prêtres et, ensemble, ces deux niveaux constituaient le clergé chrétien.
- L'Esprit de Dieu - L'esprit de Dieu avait imprégné le Christ de la capacité de pardonner les péchés sur terre. Il était entendu qu'il avait été accordé d'abord à son disciple, Pierre, puis aux autres. Ils transmirent l'esprit aux anciens qu'ils nommèrent, et le clergé chrétien reçut le pouvoir unique de pardonner les péchés sur terre.
- Philosophie chrétienne - Les philosophes partageaient une croyance commune en l'existence d'un dieu supérieur, un être premier éthéré qui émanait les différentes puissances de l'univers. Du dieu émana ensuite un concept connu sous le nom de logos (souvent traduit par "verbe") pour organiser la matière dans l'univers. Les auteurs chrétiens affirmaient que le dieu supérieur était le Dieu d'Israël, de qui émanait le Christ sous la forme du logos.
- Célibat du clergé - Appliquant une analogie avec la discipline des athlètes, l'ascesis, l'ascétisme (ne pas céder au corps) devint un important idéal chrétien. Le clergé chrétien était exhorté à rester célibataire (pas de mariage) et chaste (pas de rapports sexuels), ce qui élevait les prêtres au-dessus de la communauté en tant que martyrs vivant, sacrifiant une vie normale pour le bien de l'Église.
- Orthodoxie/Hérésie - Une autre innovation majeure apparut avec les concepts jumeaux d'orthodoxie (‘croyance correcte’) et d'hérésie (du grec haeresis, une école de philosophie). Au milieu du IIème siècle EC, des communautés chrétiennes regroupées sous le terme générique de ‘Gnostiques’ sont apparues. Les Gnostiques prétendaient posséder des connaissances secrètes sur la nature de Dieu, de l'univers et du Christ. Leurs idées remettaient en question l'enseignement chrétien traditionnel sur le salut trouvé dans la crucifixion et la résurrection du corps. La réaction contre les Gnostiques se traduisit par la production d'un énorme corpus de littérature exposant les croyances correctes (orthodoxie) par opposition aux croyances incorrectes (hérésie) de ces groupes. Ces enseignements devinrent la base ultérieure des principes chrétiens. La déclaration d'hérésie des évangiles gnostiques marqua le début de la canonisation finale de seulement quatre évangiles dans le Nouveau Testament : Marc, Matthieu, Luc et Jean.
- Séparation du Christianisme du Judaïsme - En 135 de notre ère, les Juifs se révoltèrent contre Rome, et lorsque la Révolte de Bar-Kokhba échoua, les dirigeants chrétiens s’empressèrent de convaincre Rome que les Chrétiens étaient des citoyens patriotes qui obéissaient à la loi romaine. Dans leurs appels visant à mettre fin aux persécutions, les dirigeants chrétiens demandèrent aux empereurs de reconnaître l'ancienneté des Chrétiens, en tant que verus Israel, les vrais Juifs de l'alliance originelle de Dieu. Pour démontrer l'ancienneté des Chrétiens, le procédé littéraire philosophique de l'allégorie fut appliqué aux Écritures juives. Le testament des Juifs et les prophètes d'Israël étaient supposés avoir tous indiqué le Christ. Partout où Dieu apparaissait dans les Écritures, c'était sous la forme d'un Christ préexistant.
Le Christianisme était désormais un système religieux qui n'était plus ethniquement juif, ni aligné sur la culture dominante, mais un système unique comportant des éléments des deux.
La Christianisation de l'Empire Romain
La vie changea de façon inattendue pour les Chrétiens en l'an 312. Dans son objectif de devenir le seul dirigeant de l'Empire Romain, Constantin Ier (r. de 306 à 337) se heurta à un autre prétendant de l'Empire d'Occident, Maxence. La nuit précédant la Bataille du pont Milvius à Rome, Constantin reçut une vision de soit le signe de la croix, soit des deux premières lettres du nom du Christ, chi/rho, avec les mots en toutoi nika ("en ce signe, conquiers !") écrits en dessous. Vainqueur de Maxence, Constantin attribua sa victoire au dieu chrétien.
L'édit de Milan (313) accorda enfin aux Chrétiens la permission de se rassembler. La conversion de Constantin au Christianisme ne rendit pas l'Empire chrétien du jour au lendemain, mais le Christianisme avait désormais un statut légal. Constantin favorisa les Chrétiens en exemptant le clergé de taxes, en nommant des Chrétiens comme magistrats et en finançant la construction d'églises.
Pendant la persécution de Dioclétien, certains évêques chrétiens commirent l'apostasie en sacrifiant aux dieux. Le débat sur la question de savoir si les évêques déchus devaient être pardonnés divisa les Églises, elles firent alors appel à Constantin comme médiateur. Afin de promouvoir l'unité de l'Empire, il ordonna une politique de ‘pardon et d'oubli’ et devint le chef officiel de l'Église en tant que patron suprême du Christianisme. Il adopta le point de vue des Pères de l'Église et utilisa le même concept que lorsque Rome persécutait les Chrétiens: toute personne en désaccord avec le Christianisme était considérée comme hérétique et coupable de trahison.
Le Concile de Nicée
Lorsque les disciples de Jésus commencèrent à l'adorer comme un dieu, les Chrétiens furent confrontés à un problème lié à leur prétention à hériter du monothéisme juif. Dès le début, les Chrétiens avaient adoré Jésus comme un dieu et se faisaient baptiser "au nom du Père, du fils et du Saint-Esprit" (Didachè 7:5). Au début du IVème siècle, un presbytre de l'église d'Alexandrie nommé Arius proposa que si l'on croit que Dieu a créé tout ce qui existe dans l'univers, alors à un moment donné, en tant que créateur, il doit avoir créé le Christ. Ceci ramenait le Christ au rang de subordonné, de créature de Dieu. Des émeutes éclatèrent à ce sujet à Alexandrie et dans d'autres villes. En 325, Constantin convoqua une grande conférence pour régler cette question et invita 217 évêques dans la ville de Nicée (Iznik, en Turquie actuelle).
Après plusieurs jours de débats, la conférence décida que Dieu et le Christ étaient identiques en essence (partageant la même substance éthérée) et qu'ils existaient depuis le tout début des temps. Lorsque de Dieu émana le logos (en tant que Christ), celui-ci se manifesta dans le Jésus terrestre. Le Christ étant identique à Dieu, l'héritage chrétien du monothéisme du Judaïsme traditionnel était conservé, et désormais défini comme la croyance en un seul Dieu. Jusqu'au retour du Christ, l'Empereur chrétien le remplacera sur terre. En tant que substitut du Christ, les portraits de Constantin et de ses successeurs portent une auréole au-dessus de leur tête.
Tous les évêques étant là, Constantin leur fit rédiger ce qui deviendra le Credo (ou Symbole) de Nicée, une autre innovation chrétienne (credo vient de son premier mot ‘Credo’, ‘je crois’, en latin). Dans le monde antique, le concept de credo n'existait pas car il n'y avait pas d'autorité centrale pour dicter la conformité. En tant que chef de l'état et de l'Église, Constantin imposa ce que chaque Chrétien devait croire afin de ne pas tomber dans le péché d'hérésie.
Constantin ordonna la distribution de 50 exemplaires des évangiles, ce qui détermina très probablement la reconnaissance officielle de ce qui devint les quatre évangiles canoniques. Certaines communautés chrétiennes suivaient le calendrier lunaire juif pour célébrer Pâques, tandis que d'autres variaient. Constantin fixa donc la date officielle comme ils le firent à Rome: Pâques serait honorée le premier dimanche après la première pleine lune suivant l'équinoxe de printemps. Plus tard, il choisit le 25 décembre comme date d'anniversaire de la naissance du Christ (Noël), en incorporant de nombreuses traditions trouvées dans la célébration romaine des Saturnales en décembre.
Tous les évêques n'étaient pas satisfaits du Credo de Nicée. Au cours des siècles suivants, plusieurs conciles se réunirent pour débattre des détails, et cela se poursuivit tout au long du Moyen Âge et au-delà. Théodose Ier (r. de 347 à 395) est considéré comme un grand champion de l'orthodoxie. Il publia un édit en 381, qui marqua la fin officielle des cultes indigènes dans le monde antique. Théodose interdit les Jeux olympiques (qui étaient dédiés aux dieux) en 396, ils ne devaient réapparaître qu'en 1896. Tous les temples et sanctuaires autochtones furent détruits ou transformés en églises. C'est à cette époque que les Chrétiens inventèrent le terme pagianoi (‘païens’, équivalent d'ignorants), insulte à l'encontre de ceux qui ne s'étaient pas encore convertis.
Le Monachisme et le Culte des Saints
Le monachisme naquit en Égypte au milieu du IIIe siècle de notre ère, et finit par devenir une institution majeure dans les communautés catholiques et orthodoxes orientales. Antoine d'Égypte (251-356) fut le premier à renoncer aux conventions traditionnelles de la vie dans ce monde pour s'isoler et se consacrer entièrement à Dieu. Il se retira dans une grotte dans le désert pour passer sa vie en prière. Rapidement, d'autres hommes et femmes le suivirent pour vivre en ermites dans le désert. Ces reclus, appelés ‘Pères et Mères du désert’, sont devenus des modèles de piété qui donnèrent finalement naissance aux ordres monastiques du Moyen Âge.
Les Chrétiens empruntèrent les idées anciennes des cultes des héros grecs et le concept de relations patron/client. Les cultes de héros avaient été établis par des villes qui prétendaient posséder les tombes des héros. Les gens se rendaient en pèlerinage sur ces sites, demandant aux héros (maintenant auprès des dieux) d'agir en leur nom et de leur fournir des bienfaits. À partir du IVème siècle, les tombes des martyrs passés, en tant qu'intersection sacrée entre le ciel et la terre, devinrent l'objet de pèlerinages, et les Chrétiens adressaient des demandes au martyr mort par le biais de chants et de prières. Les martyrs et les moines morts devinrent des saints patrons, et les villes où se trouvait la tombe d'un martyr devinrent des lieux de pèlerinage célèbres.
Afin d'éliminer les traces d'idolâtrie dans les bâtiments publics devenus des églises, les Chrétiens commencèrent à exhumer les ossements des martyrs morts et à les placer dans les murs des bâtiments. On croyait que ces reliques contenaient un pouvoir spécial qui faisait de l'édifice un espace sacré. Le commerce des reliques (ossements et objets ayant touché les martyrs passés) devint un phénomène dans tout l'Empire et resta important dans l'Église catholique.
L'Émergence de l'Institution de la Papauté
Après le sac de Rome, en 410 de notre ère, par Alaric Ier, roi des Wisigoths, ce fut le début de la chute de l'Empire Romain d'Occident. En 450, Attila le Hun envahit l'Italie, mit à sac plusieurs villes et se dirigea vers Rome. L'évêque Léon Ier (400-461), ou Léon le Grand, est connu pour avoir négocié avec Attila pour épargner la ville. En tant qu'évêque de Rome, il assuma les responsabilités séculaires, ce qui donna naissance à l'institution de la papauté. Léon se vit accorder le titre de ‘Patriarche d'Occident’, avec la première utilisation du titre de ‘Pape’ pour Léon. Le mot "popa" est dérivé du mot grec pour ‘père’. La validation du pouvoir du pape fut tirée de la primauté de Pierre, par la proclamation rétroactive de Saint Pierre en tant que le premier pape de Rome.