Pyrrhus (également Pyrrhos, c. 319 - 272 av. J.-C.) était le roi d'Épire, dans le nord de la Grèce, entre 306 et 302 av. J.-C. et à nouveau entre 297 et 272 av. Ayant remporté de grandes victoires contre les armées de Macédoine et de Rome, il est considéré comme l'un des meilleurs commandants militaires de l'histoire et fut favorablement comparé à Alexandre le Grand par des généraux de renom tels qu'Hannibal. En raison des pertes importantes subies au cours de ses batailles, il a donné son nom à l'expression "victoire à la Pyrrhus", qui désigne tout succès militaire dont le coût est élevé pour le vainqueur.
Jeunesse
Plutarque (c. 45-c. 125 de notre ère), l'historien grec, écrivit dans ses Vies des Hommes Illustres une biographie sur Pyrrhus et la plupart des informations dont nous disposons sur le grand général proviennent de cette source divertissante, bien que parfois peu fiable. Par exemple, on nous dit que "les traits de Pyrrhus étaient plus susceptibles d'inspirer la peur à celui qui les regardait que de lui donner un sentiment de majesté"(Pyrrhus, 386).
La position de Pyrrhus en tant qu'héritier du trône molossoïde d'Épire fut sérieusement compromise presque dès sa naissance lorsque, vers 319 avant notre ère, Cassandre, roi de Macédoine, renversa son père Éacide. Pyrrhus fut contraint de se réfugier en Illyrie où il fut protégé par Glaucias. En 306 avant notre ère, Pyrrhus put retourner en Épire et revendiquer son droit d'aînesse. Cependant, son règne en tant que mineur fut de courte durée puisqu'il fut contraint, une fois de plus, de fuir sa patrie en 302 avant notre ère.
Les guerres des Diadoques
Pyrrhus participa aux longues querelles pour le contrôle de l'empire d'Alexandre, connues sous le nom de guerres des Diadoques. Aux côtés de Démétrios Ier Poliocrate de Macédoine, il participa à la bataille d'Ipsos en 301 avant notre ère. Puis, dans le cadre d'un accord entre Démétrios et Ptolémée Ier, Pyrrhus fut remis à ce dernier en tant qu'otage et fut emmené à Alexandrie. Il se lia d'amitié avec le souverain de la partie égyptienne de l'empire et épousa même sa belle-fille Antigone; Pyrrhus fut autorisé à retourner en Épire en 297 avant notre ère. Puis, après avoir éliminé son co-dirigeant Néoptolème, Pyrrhus commença à prendre son destin en main.
Pyrrhus fit de Dodone son centre religieux et y fit construire un immense théâtre de 17 000 places et une enceinte à colonnades avec de nombreux temples de qualité. Il organisa également des jeux athlétiques quadriennaux, le festival des Naïa, en l'honneur de Zeus. Pyrrhus étendit son royaume au sud de l'Illyrie et absorba plusieurs provinces comme Amphilochie, Parauaea et Tymphaia, limitrophes de la Macédoine. À la mort de sa femme Antigone, Pyrrhus fit des mariages diplomatiques avec la fille d'Agathocle, tyran de Syracuse (acquérant ainsi Corcyre et Leucas) et Audoléon, le souverain de Péonie. Une alliance avec Bardylis, le roi des Dardaniens, renforça davantage encore sa position.
Puis, lors d'une campagne contre Démétrios, Pyrrhus réussit à gagner la loyauté de l'armée macédonienne et à s'imposer comme souverain de la Macédoine avec son allié Lysimaque (un autre roi successeur) en 288 avant notre ère. Cette situation ne dura que quelques années, après quoi l'ambitieux Lysimaque chassa Pyrrhus de Macédoine en 284 avant notre ère.
Pyrrhus contre Rome
Pyrrhus établit sa réputation de grand commandant non pas par les machinations compliquées des guerres de succession, mais par ses victoires contre la nouvelle puissance montante de la Méditerranée, Rome. Le conflit entre les deux se développa à la suite des projets ambitieux de Pyrrhus de construire un empire englobant la Grande Grèce et les anciennes colonies grecques qui s'étaient étendues en Sicile et dans le sud de l'Italie. Plutarque rapporte les propos suivants de Pyrrhus, lors d'une conversation avec le philosophe Cinéas:
La Sicile est proche, elle nous tend les mains, c'est une île qui regorge de richesses et d'hommes, très facile à conquérir, car il n'y a là, Cinéas, que factions, anarchie dans ses villes et démagogues excités... et nous nous en servirons comme d'un préliminaire à de grandes entreprises. Car qui pourrait nous éloigner de la Libye ou de Carthage... ? (Pyrrhus, 399)
À cette fin, et comme son oncle avant lui, Pyrrhus répondit à un appel à l'aide de Taras (l'actuelle Tarente), située dans le talon de la péninsule italienne. La ville étant sous le coup d'une attaque romaine imminente, Pyrrhus traversa l'Adriatique avec son armée de 25 000 fantassins en 280 avant notre ère. Utilisant 20 éléphants de guerre et une force de cavalerie supérieure de 3 000 hommes, Pyrrhus remporta des victoires à Héraclée en 280 avant notre ère et à Ausculum en 279 avant notre ère.
Lors de ces batailles, Pyrrhus utilisa plusieurs innovations. Sachant que la faiblesse de la phalange grecque traditionnelle était son manque de mobilité et sa difficulté à maintenir sa formation, en particulier sur un terrain accidenté, il utilisa efficacement des troupes locales pour combler les vides qui se produisaient lorsque la phalange engageait l'ennemi. Il réussit également à protéger ses flancs en utilisant les mêmes contingents locaux. Ces troupes légères (thureophoros), dotées d'un grand bouclier ovale pour la défense et d'un javelot et d'une épée pour l'attaque, seraient plus tard introduites par Pyrrhus dans la guerre en Grèce. Un autre ajout à la manière de combattre des Grecs fut l'utilisation d'une cavalerie armée de javelots (connue sous le nom de Tarentins par la suite), ce qui augmenta considérablement la mobilité et le potentiel d'attaque de son armée. Les victoires coûtèrent néanmoins cher en vies humaines aux vainqueurs et ces batailles ne furent pas décisives, d'où l'expression durable de "victoire à la Pyrrhus". Plutarque rapporte la réplique de Pyrrhus aux félicitations d'un ami pour sa victoire: "Une autre victoire comme celle-là sur les Romains nous détruira complètement!".(Pyrrhus, 409)
L'un des résultats positifs des victoires de Pyrrhus est qu'il se fit de nombreux nouveaux alliés parmi les tribus du sud de l'Italie, en particulier les Bruttiens, les Locriens, les Lucaniens, les Samnites et des villes comme Crotone. Le roi grec resta en Italie même lorsque le trône macédonien fut remis en jeu après la mort de Ptolémée Kéraunos en 278 avant notre ère. Pyrrhus se tourna alors vers une nouvelle menace: les Carthaginois.
Pyrrhus en Sicile
La décision de Pyrrhus de rester en Italie et d'aider Syracuse s'avéra rapidement judicieuse lorsqu'il fut nommé roi de Sicile. Cependant, au cours d'une longue et vaine campagne de siège contre Lilybaeum (aujourd'hui Marsala) sur la côte ouest de l'île, la menace de Carthage s'accentua - elle n'était manifestement pas prête à laisser le champ libre à Pyrrhus. En conséquence, le roi grec devint de plus en plus tyrannique dans les parties de l'île qu'il contrôlait. Cela finit par provoquer une rébellion et Pyrrhus s'enfuit vers l'Italie continentale. Il y retrouva ses vieux ennemis, les Romains, et perdit cette fois à la bataille de Maleventum (rebaptisée Beneventum par les Romains) en 275 avant notre ère. Avec son camp envahi, la perte de la plupart de ses éléphants et un ennemi capable de résister à d'énormes pertes et de reprendre le combat, il était temps pour Pyrrhus de quitter l'Italie.
Retour en Grèce et mort
Pyrrhus retourna en Grèce après avoir perdu les deux tiers de l'armée qu'il avait emmenée en Italie. Après une brève incursion en Macédoine, où il pilla tristement les tombes d'Aigai, il s'installa en 273 avant notre ère dans le Péloponnèse, d'où il espérait arracher le trône de Macédoine à Antigone II Gonatas. Cependant, Sparte, aidée par des tranchées défensives, résista obstinément à ses attaques, même s'il fut aidé par le roi spartiate en exil, Cléonyme. En 272 avant notre ère, Pyrrhus se tourna donc vers le nord, en direction d'Argos, où il espérait rencontrer Antigone sur le terrain. Avant que cela ne se produise, Pyrrhus fut tué lors d'un étrange incident dans la ville d'Argos lorsque, dans le feu de l'action, une vieille dame sur un toit lui jeta une tuile à la tête. Étourdi, le grand commandant fut alors impitoyablement abattu par l'ennemi. Ce fut une fin ignominieuse pour un général qui avait participé à tant de batailles et qui avait toujours dirigé ses hommes depuis le front, dans les parties les plus féroces du champ de bataille. Comme le dit Plutarque, "l'opinion générale à son sujet était que pour l'expérience de la guerre, l'audace et la vaillance personnelle, il n'avait pas d'égal parmi les rois de son temps"(Pyrrhus, 414).