Martyr

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Définition

Rebecca Denova
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 15 février 2022
Disponible dans ces autres langues: anglais, arabe
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Martyrdom of Saints Cosmas and Damian (by Antonio Balestra, Public Domain)
Martyre des saints Côme et Damien
Antonio Balestra (Public Domain)

Un martyr est une personne qui meurt volontairement pour une cause religieuse ou laïque. Le mot vient du vocable grec signifiant témoin et s'apparente à un témoin au tribunal qui témoigne de ses croyances ou de sa vérité, malgré le risque encouru. En tant que tel, il est considéré comme l'un des plus grands sacrifices qu'une personne puisse faire.

Le titre et le statut de martyr sont attribués par la société, qui commémore la personne ou l'événement par des récits et des monuments. Le martyre est le plus souvent juxtaposé à une vision sociale ou religieuse dominante ou à un gouvernement oppressif. Dans la tradition occidentale, le concept de martyr et de martyre s'inspire des récits gréco-romains d'une mort noble (culte des héros), de la révolte juive des Maccabées de 167 avant notre ère et de la persécution des chrétiens par Rome.

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Concepts gréco-romains de mort noble

La Grèce antique avait créé le concept de culte des héros, avec l'apothéose, c'est-à-dire la déification des individus après leur mort.

L'acte de mort volontaire, le suicide, n'a jamais été condamné dans l'Antiquité, mais la raison de la mort était débattue en termes d'honneur et de nécessité. La mémoire sociale est un concept essentiel de l'au-delà; sans mémoire, il n'y a pas d'existence. Dans les écoles philosophiques, le modèle de la mort noble était l'histoire de Socrate (469-399 av. J.-C.), racontée par son élève Platon. Socrate avait été jugé à Athènes pour avoir corrompu la jeunesse et avait été condamné à être exécuté. Malgré les plans de ses amis, Socrate refusa de fuir Athènes et accepta son sort. En buvant la ciguë, il démontra qu'il était maître de son propre destin, et non le gouvernement grec d'Athènes.

La Grèce antique avait créé le concept de culte des héros, avec l'apothéose, c'est-à-dire la déification des individus après leur mort. L'accomplissement de grandes actions dans la vie était récompensé par une présence parmi les dieux après la mort, dans les champs élysées. Le dieu Héraklès/Hercule était un modèle. Les gens se rendaient en pèlerinage sur les sites des tombes présumées des héros et pouvaient leur demander des avantages. Rome mit du temps à adopter cette idée, mais elle devint un moyen populaire d'honorer les grands généraux tels que Scipion l'Africain, qui vainquit Hannibal lors de la deuxième guerre punique (218-201 av. J.-C.).

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La révolte des Maccabées

Après la mort d'Alexandre le Grand (r. de 336 à 323 av. J.-C.), l'empire séleucide s'installa en Syrie. En 167 avant notre ère, Antiochos IV Épiphane (r. de 175 à 164 av. J.-C.) prit une mesure sans précédent en interdisant aux Juifs de pratiquer leurs coutumes. Sous l'égide de la famille hasmonéenne, les Juifs se révoltèrent et vainquirent les Grecs. Connue sous le nom de "révolte des Maccabées", l'histoire est relatée dans quatre livres qui sont maintenant placés entre les deux testaments dans les Bibles modernes. Le livre 2 Maccabées servit de modèle à plusieurs innovations qui sont devenues fondamentales pour le judaïsme, le christianisme et l'islam. Nous avons l'histoire d'Hannah, une mère qui dut assister à la torture et à l'exécution de ses sept fils qui refusaient d'adorer les dieux grecs.

Martyrdom of the Seven Maccabee Brothers and Their Mother
Martyre des sept frères macabées en présence de leur mère
Dirck Vellert (Copyright)

Le terme "martyr" fut introduit pour la première fois, en tant que "témoin" de la raison pour laquelle ils préféraient la mort. Avant de mourir, chaque fils prononça un discours, affirmant qu'il mourait pour les péchés de la nation. La nation devait avoir péché, sinon Dieu n'aurait pas laissé les Grecs l'opprimer; il devait s'agir d'une forme de discipline divine. Leur mort est comprise comme un sacrifice à Dieu, comme une expiation (une couverture ou une réparation d'une violation), et comme la justification des justes. Ils étaient heureux de mourir pour leurs croyances, disaient-ils, parce qu'ils savaient que leur Dieu les ressusciterait (anastasis en grec, "résurrection" en français). Telle est l'origine de la récompense du martyre, le corps et l'âme étant instantanément transportés dans la présence de Dieu au ciel.

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Culte impérial et persécution des chrétiens

Après l'assassinat de Jules César en 44 avant notre ère, son héritier, Auguste (de 27 av. J.-C. à 14 ap. J.-C.), organisa ses funérailles à Rome. Peu de temps après, une comète fut aperçue et les gens du peuple affirmèrent que César faisait désormais partie des dieux. Le Sénat romain céda à la demande populaire et déifia officiellement le défunt Jules, qui pouvait, en tant que tel, être vénéré. Des temples et des prêtrises furent créés pour le Jules désormais divinisé. Auguste étendit ensuite l'idée au culte de Roma (la personnification de Rome), qui incluait l'hommage à la famille impériale (qui pouvait désormais se prévaloir d'ancêtres divins). À sa mort, Auguste fut également divinisé par le Sénat.

À la fin du 1er siècle de notre ère, le second fils de Vespasien (r. de 69 à 79 de notre ère), Domitien (r. de 82 à 96 de notre ère), reprit toutes les anciennes politiques qui faisaient habituellement mourir les empereurs. Il dépensa rapidement le trésor et chercha des moyens d'augmenter ses revenus lorsqu'il se souvint de l'impôt juif que son père avait ordonné à titre de réparation pour la grande révolte juive de 66 de notre ère. Or, apparemment, la perception de cet impôt juif avait été négligée à Rome et dans les provinces.

LES CHRÉTIENS s'approprièRENT L'HISTOIRE DES MARTYRS MACCABÉES: QUICONQUE MOURAIT POUR SES CROYANCES ÉTAIT RÉCOMPENSÉ EN SE RETROUVANT INSTANTANÉMENT EN PRÉSENCE DE DIEU.

En effectuant des descentes dans les immeubles de Rome, la garde prétorienne rencontra des chrétiens qui affirmaient ne pas devoir d'impôt parce qu'ils n'étaient pas juifs (c'est-à-dire non circoncis). Jules César avait accordé aux Juifs de souche le privilège de ne pas avoir à se conformer aux cultes d'État de Rome, mais ce nouveau groupe était déroutant. Ces chrétiens vénéraient le même Dieu que les Juifs, honoraient les Écritures juives, mais n'étaient pas des Juifs ethniques. Tout comme les Juifs, les chrétiens n'avaient pas le droit d'adorer les dieux traditionnels de l'Empire romain, y compris le culte impérial. Ce fut très probablement la cause principale du début de la persécution des chrétiens dans l'Empire romain.

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Le refus de participer aux cultes d'État de l'Empire constituait un "athéisme", c'est-à-dire une incrédulité à l'égard des dieux. Comme les dieux étaient responsables de la prospérité de l'Empire romain, l'incrédulité et la non-participation étaient les équivalents antiques de la trahison. La trahison, toujours et partout, entraînait la peine de mort. C'est la raison pour laquelle les chrétiens étaient exécutés dans les arènes, avec l'expression "les chrétiens aux lions!". Les chrétiens s'approprièrent l'histoire des martyrs maccabées: quiconque mourait pour ses croyances était récompensé par une présence instantanée auprès de Dieu. Très tôt dans la tradition chrétienne, le modèle fut établi pour que les croyants agissent en imitant Jésus-Christ.

Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il renonce à lui-même, qu'il se charge de sa croix, et qu'il me suive. Car celui qui voudra sauver sa vie la perdra, mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de la bonne nouvelle la sauvera. (Marc 8:34-35).

A Christian Dirce
Dircé chrétienne
Franciszek Stolot (CC BY-SA)

Après la conversion de Constantin au christianisme en 312 de notre ère, le christianisme devint une religion légale, c'est-à-dire qu'il reçut une autorisation de rassemblement de la part du Sénat. Les occasions de martyre étaient limitées. Au lieu de cela, les nouveaux ordres d'hommes et de femmes du mouvement qui devint le monachisme (IIIe-IVe siècles de notre ère) devinrent des martyrs vivants. Les monastiques se retiraient de la société pour se consacrer à la prière et à un mode de vie ascétique dans le désert. Ils sacrifiaient à Dieu une vie normale (mariage et enfants).

À l'instar des cultes héroïques de la Grèce antique, les chrétiens se rendaient en pèlerinage sur les tombes des premiers martyrs chrétiens. Comprenant qu'ils étaient maintenant au ciel, on pouvait demander au martyr, en tant que médiateur, de bénéficier d'avantages terrestres. Des récits légendaires relatant les détails de leurs épreuves et de leur mort furent élaborés sous la forme de martyrologes, à l'intention des fidèles. C'est ainsi que naquit le culte des saints au Moyen Âge, un aspect important de l'Église médiévale.

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Le judaïsme

Les premiers rabbins définirent des critères pour la mise à mort d'une personne. La vie devait être préservée car les commandements avaient été donnés pour vivre et non pour mourir. Le comportement privé et public devait refléter le kiddush ha Shem, la "sanctification du nom". Il était permis de violer les rituels juifs quotidiens pour préserver la vie. Il existe trois exceptions (généralement en période de persécution):

  1. être contraint d'assassiner quelqu'un
  2. un comportement sexuel répréhensible
  3. l'idolâtrie (Tractate Sanhedrin 74a)

L'islam

Le même concept de martyre dans le judaïsme et le christianisme fut intégré à l'islam par le prophète Mahomet (570-632). Shahid est le terme pour "témoin", mais il est également lié au concept islamique de jihad ("lutte"). Le Coran enseigne deux niveaux de jihad. Le plus important est la lutte intérieure, la pratique quotidienne des concepts et rituels islamiques axés sur la relation avec Dieu. Le second jihad est la lutte pour défendre la foi de l'islam. Ce second djihad a été adopté par les groupes islamistes radicaux qui valident l'usage de la violence contre les autres, en invoquant la défense de leur foi.

Battle of Karbala by Al-Musavi
Bataille de Kerbala par Al-Musavi
Abbas Al-Musavi (CC BY)

Les martyrs de l'islam sont enterrés dans les vêtements dans lesquels ils sont morts et sont instantanément transportés au Paradis où une place spéciale leur est réservée. L'islam accorde également le statut de martyr à ceux qui souffrent dans cette vie, comme les victimes du cancer.

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Le martyre moderne

Les concepts modernes du martyre incluent ce que l'on appelle les martyrs laïques, c'est-à-dire les personnes qui sont prêtes à mourir pour une cause sociale ou politique. Parmi les exemples de martyrs modernes, on peut citer Abraham Lincoln, Dietrich Bonhoeffer, Gandhi et Martin Luther King Jr. Les funérailles des soldats sont conformes à celles des martyrs, car ils ont donné leur vie pour Dieu et leur pays. D'autres religions du monde ont un concept similaire, où les victimes de persécutions culturelles ou gouvernementales sont considérées comme des martyrs.

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Rebecca Denova
Rebecca I. Denova, Ph. D., est Professeur émérite de Christianisme Primitif au Département d'Études Religieuses de l'Université de Pittsburgh. Elle a récemment publié un ouvrage, "The Origins of Christianity and the New Testament" (Wiley-Blackwell).

Citer cette ressource

Style APA

Denova, R. (2022, février 15). Martyr [Martyr]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-11533/martyr/

Style Chicago

Denova, Rebecca. "Martyr." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le février 15, 2022. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-11533/martyr/.

Style MLA

Denova, Rebecca. "Martyr." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 15 févr. 2022. Web. 21 déc. 2024.

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