Jordanie Ancienne

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 05 mars 2018
Disponible dans ces autres langues: anglais, arabe
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The Monastery in Petra (by Carole Raddato, CC BY-NC-SA)
Le 'Monastère' à Pétra
Carole Raddato (CC BY-NC-SA)

La Jordanie est un pays du Proche-Orient bordé par Israël, la Syrie, l'Irak et l'Arabie saoudite, qui faisait partie du pays de Canaan dans l'Antiquité. Le pays doit son nom au fleuve Jourdain, qui coule entre la Jordanie actuelle et Israël et dont le nom signifie "descendre" ou "couler vers le bas". La région a une longue histoire en tant qu'important centre de commerce pour tous les grands empires de l'Antiquité à nos jours (de l'empire akkadien à l'empire ottoman) et de nombreux sites du pays sont mentionnés dans la Bible.

Alexandre le Grand (r. de 336 à 323 av. J.-C.) fonda des villes dans la région (comme Gérasa) et les Nabatéens y sculptèrent leur capitale, Petra, dans des falaises de grès. Très tôt dans son histoire, la région attira et inspira des commerçants, des artistes, des philosophes, des artisans et, inévitablement, des conquérants, qui ont tous laissé leur empreinte dans l'histoire du pays actuel.

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La Jordanie, officiellement connue sous le nom de Royaume hachémite de Jordanie, est une nation indépendante depuis 1946 après avoir été pendant des milliers d'années un État vassal d'empires étrangers et de puissances européennes. Elle est devenue l'une des nations les plus stables et les plus riches en ressources du Proche-Orient. Sa capitale, Amman, est considérée comme l'une des plus prospères au monde et constitue une destination très prisée des touristes. L'histoire de la région est vaste, puisqu'elle remonte à plus de 8 000 ans et retrace l'ascension et la chute des empires, ainsi que l'évolution de l'État moderne.

Jéricho, qui est considérée comme la plus ancienne ville habitée en permanence au monde, fut fondée il y a environ 9 000 ans avant notre ère.

Histoire ancienne

Les fouilles archéologiques font remonter l'occupation humaine de la région de Jordanie à l'âge paléolithique (il y a environ deux millions d'années). Des outils tels que des haches à main en pierre, des grattoirs, des forets, des couteaux et des pointes de lance en pierre, datant de cette période, ont été trouvés dans divers endroits du pays. Les habitants étaient des chasseurs-cueilleurs qui menaient une vie nomade, se déplaçant d'un endroit à l'autre à la recherche de gibier. Avec le temps, ils commencèrent à construire des établissements permanents et à établir des communautés agricoles.

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Le Néolithique (c. 10 000 av. J.-C.) vit l'apparition de communautés sédentaires stables et le développement de l'agriculture. Ces petits villages finirent par devenir des centres urbains dotés de leur propre industrie et commencèrent à commercer avec d'autres. De grands centres urbains se développèrent, comme la ville de Jéricho, considérée comme la plus ancienne ville habitée en permanence au monde, dont la date de fondation est approximativement de 9 000 ans avant notre ère.

Selon le spécialiste G. Lankester Harding:

[Des villes comme Jéricho témoignent] d'une culture bien plus élevée que nous ne l'avions soupçonné jusqu'à présent, car il ne s'agissait pas simplement d'un village de maisons bien construites avec des sols en plâtre, mais d'un grand mur de pierre tout autour de l'établissement, avec un fossé ou une douve sèche devant lui. Cela implique un haut degré d'organisation communautaire, de subordination des intérêts personnels à ceux du plus grand nombre. (29)

Les intérêts communs sont également évidents dans les monuments anciens érigés à cette époque. Tout au long de l'âge néolithique, les peuples construisirent des dolmens mégalithiques à travers le pays (très similaires à ceux d'Irlande par leur taille, leur forme et les méthodes utilisées). On pense que ces dolmens sont des monuments aux morts ou peut-être des passages entre les mondes. Ces dolmens se trouvent souvent dans des champs de pierres encerclées dont la signification n'est pas connue, mais il est évident que les bâtisseurs ont dû travailler en groupe pour une cause commune afin de créer ces sites.

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Lime Plaster Statue from Ain Al-Ghazal
Statue en plâtre à la chaux d'Ain Al-Ghazal
Osama Shukir Muhammed Amin (Copyright)

Les dolmens étaient très probablement de nature religieuse et les habitants des villes voisines s'y rendaient pour le culte, la divination et les fêtes. La plus grande colonie du Néolithique en Jordanie était Ain Ghazal, située au nord-ouest (près de la capitale actuelle d'Amman). Habité vers 7000 avant notre ère, Ain Ghazal était une communauté agricole dont les artisans créèrent certaines des statues anthropomorphes les plus frappantes de l'histoire ancienne. Les statues trouvées à Ain Ghazal sont parmi les plus anciennes, sinon les plus anciennes, du monde actuel.

La communauté comptait plus de 3 000 citoyens et s'adonnait au commerce et à la fabrication de poteries, ce qui augmentait la richesse des habitants individuellement et de la ville collectivement. Ain Ghazal demeura une colonie prospère pendant 2 000 ans, entre environ 7 000 et 5 000 ans avant notre ère, date à laquelle elle fut abandonnée, très probablement en raison de la surexploitation des terres.

Les Hyksôs et les Égyptiens

Les âges du Chalcolithique et du Bronze (respectivement vers 4500-3000 et 3000-2100 av. J.-C.) virent se développer l'architecture, l'agriculture et la céramique. La culture ghassulienne, centrée autour du site de Talailat Ghassul dans la vallée du Jourdain, s'imposa à l'âge chalcolithique en faisant preuve d'une grande habileté dans la fonte du cuivre et la fabrication de céramiques, ainsi que d'une grande complexité dans la conception de l'architecture.

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La colonie de l'âge du bronze de Khirbat Iskandar (fondée vers 2350 av. J.-C.) s'éleva sur les rives du Wadi al-Wala et était une communauté commerciale prospère jusqu'à l'arrivée d'envahisseurs qui détruisirent des villes, des villages et des cités dans toute la Jordanie vers 2100 avant notre ère. L'identité de ces agresseurs est inconnue, mais il s'agit très probablement des armées des Gutis dont les invasions renversèrent l'empire akkadien fondé par Sargon le Grand (r. de 2334 à 2279 av. J.-C.) à partir de 2193 avant J.-C. ; la région de la Jordanie faisait bien sûr partie de cet empire. Certains chercheurs ont suggéré que les envahisseurs auraient été les Peuples de la mer, mais la date est trop précoce pour leurs incursions dans la région.

Peu importe qui ils étaient, ces envahisseurs furent chassés par un autre groupe qui migra dans la région (peut-être dès 2000 av. J.-C.), les Hyksôs, qui apportèrent une culture complètement différente en Jordanie et qui s'imposèrent comme classe dirigeante. Avec le temps, les Hyksôs de Jordanie acquirent suffisamment de pouvoir pour conquérir l'Égypte et conservèrent les deux pays jusqu'à ce qu'ils ne soient chassés par les Égyptiens vers 1570 avant notre ère par Ahmôsis Ier (c. 1570-1544 av. J.-C.). Certains spécialistes affirment que les Hyksôs (appelés ainsi par les Égyptiens; le nom par lequel ils se désignaient eux-mêmes est inconnu) étaient indigènes en Jordanie, tandis que d'autres affirment qu'il s'agissait d'envahisseurs étrangers; quoi qu'il en soit, ils changèrent de façon permanente la vie en Jordanie en introduisant le cheval, l'arc composite et le char dans les conflits armés, en introduisant de meilleures méthodes d'irrigation et en développant de meilleurs systèmes de défense pour les villes fortifiées.

Map of the New Kingdom of Egypt, 1450 BCE
Carte du Nouvel Empire d'Égypte, 1450 avant notre ère
Andrei Nacu (CC BY-SA)

La région de la Syrie, de la Jordanie, du Liban et d'Israël actuels (le Levant) entretenait des échanges continus avec d'autres régions et civilisations tout au long de ces périodes. L'écriture se développa en Mésopotamie vers 3 500 avant notre ère comme moyen de communication à longue distance dans les échanges commerciaux. Pourtant, ces régions, qui étaient alphabétisées depuis au moins 3 000 avant notre ère, n'adoptèrent un système d'écriture que vers 2 000 avant notre ère, pour des raisons qui ne sont pas connues. Des inscriptions telles que des signes et des symboles furent créées, mais aucun script complet ne semble avoir été formulé. L'écriture ne se développa en Jordanie qu'après le renversement des Hyksôs par les Égyptiens, vers 1570 avant notre ère.

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La région connut un tel essor que la Bible la décrivit comme une terre glorieuse "où coulent le lait et le miel".

Une fois les Hyksôs chassés d'Égypte, les Égyptiens les poursuivirent à travers la Jordanie, établissant des postes militaires qui devinrent des communautés stables. Sous le règne de la reine égyptienne Hatchepsout (1479-1458 av. J.-C.) et de son successeur Thoutmôsis III (1458-1425 av. J.-C.), le commerce prospéra. Thoutmôsis III établit des souverains égyptiens dans toute la région de Canaan, apportant stabilité, paix et prospérité. La région connut un tel essor qu'elle fut décrite comme une terre glorieuse "ruisselant de lait et de miel" des siècles plus tard dans plusieurs livres de la Bible.

La Jordanie dans la Bible et l'âge du fer

Les villes de Gérasa et Gadara (aujourd'hui Jerash et Umm Qais, respectivement) sont mentionnées dans le livre de Marc 5:1-20 et dans le livre de Matthieu 8:28-34. Ces deux passages relatent l'histoire de Jésus chassant les démons des personnes possédées vers un troupeau de porcs. Le récit de Marc, considéré comme le plus ancien des deux, situe l'événement à Gerasa, tandis que la version de Matthieu le situe à Gedara. Marc mentionne qu'après le miracle, l'homme qui avait été possédé par un démon raconte le miracle à tous les habitants de la Décapole; la Décapole était le terme désignant les dix villes situées à l'extrémité orientale de l'Empire romain à cette époque, et Gérasa et Gadara en faisaient toutes deux partie.

La région de l'actuelle Jordanie est mentionnée à plusieurs reprises dans l'Ancien Testament de la Bible, dans le cadre des récits qui constituent les livres de la Genèse, de l'Exode, du Deutéronome, des Nombres, de Josué et d'autres, concernant le pays des Israélites, leur esclavage en Égypte et leur délivrance vers une terre promise qui doit alors être conquise. Les événements relatés sont censés s'être produits durant la dernière partie de l'âge du bronze (c. 2000-1200 av. J.-C.), bien qu'il y ait des divergences entre les récits bibliques et les archives archéologiques.

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Parmi les divergences les plus fréquemment relevées par les spécialistes, on peut citer le fait que la région du Jourdain mentionnée dans les livres de l'Exode, des Nombres et de Josué est clairement habitée, alors que les archives archéologiques indiquent un pays en grande partie inoccupé. Les batailles qui auraient été livrées par les Hébreux dans les livres des Nombres et de Josué ne semblent pas non plus avoir laissé de traces archéologiques. Il convient toutefois de noter que la ville de Jéricho, célèbre pour sa chute aux mains de Josué (Josué 6:1-27), présente des traces d'une destruction violente vers 1200-1150 avant notre ère, pendant l'effondrement de l'âge du bronze.

Walls of Jericho
Murailles de Jéricho
Daniel Case (CC BY-SA)

Le mont Nébo, en Jordanie, est l'endroit où Moïse aurait pu entrevoir la Terre promise avant de mourir (Deutéronome 43:1-4). La Jordanie était le pays des Madianites où Moïse se réfugia après sa fuite d'Égypte dans l'Exode (Exode 2:15) et la région où il trouva le buisson ardent qui le renvoya dans sa mission de libérer son peuple de l'esclavage (Exode 3:1-17). Il parait qu'il serait enterré sur le mont Nébo, qui était à l'origine un site sacré pour les Moabites et leurs dieux.

Le début de l'âge du fer (c. 1200-330 av. J.-C.) dans la région fut marqué par l'invasion des Peuples de la mer, une culture mystérieuse dont l'identité est encore débattue par les spécialistes. Certains ont affirmé qu'il s'agissait des Philistins de la Bible, tandis que d'autres ont suggéré qu'ils étaient étrusques, minoens, mycéniens ou d'autres nationalités. Aucune affirmation permettant de les identifier n'a été largement acceptée et il est peu probable qu'elle le soit dans un avenir proche, car les inscriptions existantes indiquent seulement que ces peuples venaient de la mer, mais pas de quelle mer ni même de quelle direction.

Les peuples de la mer arrivèrent sur la côte de Canaan vers 1200 avant notre ère avec une connaissance avancée de la métallurgie et leurs armes en fer étaient bien supérieures aux lames et aux lances en pierre et en cuivre de leurs adversaires. Alors que les peuples de la mer envahissaient par le sud, la Bible relate de grandes batailles entre les Israélites et les Moabites et les Madianites dans le livre des Juges, ainsi que des raids menés par les Ammonites du nord de la Jordanie contre les colonies israélites. Les royaumes jordaniens d'Edom au sud, de Moab au centre et d'Ammon au nord ont tous gagné en puissance à cette époque.

La stèle de Mesha (également connue sous le nom de pierre moabite, vers 840 av. J.-C.) relate une bataille entre Mesha, roi de Moab, et trois rois d'Israël. Le récit de la stèle correspond à celui de l'événement relaté dans II Rois 3, dans lequel Joram d'Israël et Josaphat de Juda entrèrent en guerre pour réprimer une rébellion moabite. La stèle de Mesha est l'un des artefacts les plus connus corroborant un récit biblique, même si certains chercheurs ont remis en question sa signification et même son authenticité.

Mesha Stele - Moabite Stone
Stèle de Mesha
Henri Sivonen (CC BY)

La controverse sur la question de savoir si la stèle de Mesha corrobore le récit biblique est typique des discussions sur l'interprétation non seulement des objets, mais aussi des textes anciens. Les chercheurs qui assimilent les Peuples de la Mer aux Philistins interprètent les Livres de I et II Samuel, qui présentent de manière significative les Philistins, comme un récit des Peuples de la Mer. Ces livres racontent l'histoire de l'ascension du roi Saül (c. 11e siècle av. J.-C.) sur les Israélites et la défaite de David face aux Philistins, qui tua leur champion, Goliath, en combat singulier.

L'essentiel de ce que l'on sait des Peuples de la Mer provient de documents égyptiens qui affirment qu'ils furent vaincus par Ramsès III en 1178 avant notre ère, près de la ville égyptienne de Xois, et qu'ils disparurent ensuite des annales historiques. Si cette affirmation, ainsi que les dates traditionnelles de Saül et de David, sont acceptées, les Philistins pourraient être les peuples de la mer qui envahirent l'Égypte après leurs batailles avec Saül et David. Cette hypothèse est cependant loin d'être certaine et aucun consensus n'a été atteint à ce sujet.

Les chercheurs sont également divisés sur la question de savoir si les Peuples de la mer sont responsables de la dévastation des villes de la région de Canaan ou si cette dévastation est due au général Josué et à ses campagnes de conquête dans la région, revendiquant la terre promise pour son peuple (livres des Nombres et de Josué). Quoi qu'il en soit, l'introduction d'armes en fer dans la région changea la dynamique des batailles, favorisant ceux qui en étaient équipés, comme le prouva si bien la machine militaire assyrienne lorsqu'elle s'empara du pays. Les Assyriens étaient considérés comme invincibles au combat, en grande partie grâce à la supériorité de leur armement.

Les grands empires et les Nabatéens

L'empire assyrien et son successeur, l'empire néo-assyrien, utilisaient tous deux des armes en fer pour leurs conquêtes et devinrent la plus grande et la plus vaste puissance politique du monde jusqu'à cette époque. Sous le roi assyrien Tiglath Phalazar Ier (1115-1076 av. J.-C.), la région du Levant était fermement placée sous le contrôle de l'Assyrie et resterait au sein de l'empire jusqu'à sa chute en 612 avant notre ère.

L'empire babylonien prit alors possession du pays jusqu'à ce qu'il ne soit repris par Cyrus le Grand, fondateur de l'empire achéménide (549-330 av, J.-C.), également connu sous le nom d'empire perse, qui tomba ensuite aux mains d'Alexandre le Grand en 331 avant notre ère et devint une partie de son empire naissant. Avant l'invasion d'Alexandre, une culture unique se développa en Jordanie, dont la capitale devint l'une des images les plus reconnaissables du monde antique et une attraction touristique très prisée de nos jours: les Nabatéens et leur ville de Petra.

Les Nabatéens étaient des nomades du désert du Néguev qui arrivèrent dans la région de l'actuelle Jordanie et s'établirent quelque temps avant le IVe siècle avant notre ère. Leur ville de Pétra, taillée dans des falaises de grès, fut peut-être créée à cette époque, mais peut-être plus tôt. Les Nabatéens avaient tiré leur richesse du commerce sur les routes de l'encens, qui reliaient le royaume de Saba, dans le sud de l'Arabie, au port de Gaza, sur la mer Méditerranée. Lorsqu'ils fondèrent Pétra, ils contrôlaient également d'autres villes le long des routes de l'encens et étaient en mesure de taxer les caravanes, d'assurer leur protection et de contrôler le lucratif commerce des épices.

La célèbre façade de Pétra, connue aujourd'hui sous le nom de Khazneh (Trésor), était très certainement à l'origine une tombe ou un mausolée et, contrairement à ce que l'on imagine, elle ne mène pas à un labyrinthe complexe de couloirs, mais seulement à une pièce assez courte et étroite. Les habitations plus spacieuses qui constituent le reste de la ville sur la falaise témoignent de la richesse des Nabatéens en tant que commerçants qui disposaient d'un revenu disponible et d'une main-d'œuvre suffisants pour s'offrir une construction aussi complexe et opportune.

Le nom "Petra" signifie "rocher" en grec; la ville s'appelait à l'origine Raqmu (peut-être d'après un des premiers rois nabatéens) et est mentionnée dans la Bible et dans les œuvres d'écrivains tels que Flavius Josèphe (37-100 de notre ère) et Diodore de Sicile (1er siècle av. J.-C.). À l'apogée du royaume nabatéen, la région du Jourdain connut une grande prospérité, et pas seulement dans la ville de Pétra et ses environs. Les Nabatéens étaient certainement les plus riches, mais des personnes d'autres nationalités partageaient également leur bonne fortune.

Nabataean Tombs of Petra
Tombes Nabatéennes de Pétra
Carole Raddato (CC BY-NC-SA)

Vers 200 avant notre ère, le gouverneur d'Ammon, Hyrcanus, fit construire son palais-forteresse Qasr Al-Abd ("Château du serviteur"), qui devait nécessiter un énorme revenu disponible. Flavius Josèphe décrit le palais (qu'il considère comme une forteresse) en termes élogieux, comme "entièrement construit en pierre blanche" à grande échelle, avec un grand bassin réfléchissant, et comme ses murs étaient sculptés "d'animaux d'une ampleur prodigieuse", ainsi que de salles de banquet et de logements alimentés en eau courante (Merrill, 109). Des ruines de cette structure subsistent aujourd'hui près d'Araq al-Amir, dans un état bien moindre qu'à l'époque de Josèphe, mais témoignant toujours de la richesse et de la vision de l'homme qui la commanda.

Le premier roi nabatéen historiquement attesté est Arétas Ier (c. 168 av. J.-C.). Ainsi, bien que les Nabatéens se soient établis dans la région des siècles auparavant, le royaume de Nabatée est daté de 168 avant notre ère à 106 de notre ère, date à laquelle il fut annexé par Rome. Les Nabatéens avaient une culture très développée dans laquelle l'art, l'architecture, les sensibilités religieuses et le commerce étaient florissants. Les femmes jouissaient de droits presque égaux, pouvaient faire partie du clergé et même régner en tant que monarques autonomes. Les divinités les plus importantes du panthéon nabatéen étaient des femmes et il est fort probable que des femmes aient été leurs grandes prêtresses.

Pour résoudre le problème de l'approvisionnement en eau dans cette région aride, les Nabatéens construisirent une série de puits, d'aqueducs et de barrages dont l'efficacité était inégalée à l'époque. Grâce à l'accès à l'eau et à leur implantation dans certaines des zones les plus inaccessibles de la région, les Nabatéens purent repousser les agresseurs attirés par leur richesse. Ils ne purent cependant pas résister longtemps à la puissance supérieure de Rome qui s'empara progressivement de leurs territoires et absorba leurs routes commerciales pour finalement prendre le royaume tout entier et rebaptiser la région Arabia Petrea en 106 de notre ère, sous l'empereur Trajan (98-117 de notre ère).

Rome, l'islam et l'État moderne

Les Romains revitalisèrent une grande partie de la région (bien que les villes nabatéennes telles que Petra et Hegra aient été négligées), créant un puissant centre de commerce à Gérasa et un autre appelé Philadelphie sur le site d'Ammon, aujourd'hui Amman, la capitale de la Jordanie moderne. La ville de Gadara prospéra sous les Romains. Elle fut le lieu de naissance du poète et éditeur romain Méléagre (1er siècle de notre ère) et avait déjà inspiré l'œuvre du philosophe et poète épicurien Philodème (c. 110-35 av. J.-C.). Les Romains profitèrent certainement des ressources de la région, ainsi que des recrues qu'ils enrôlaient dans leurs armées en tant que conscrits et auxiliaires, mais ils améliorèrent également la région en construisant des routes, des temples et des aqueducs qui transformèrent de vastes zones de la région en paysages fertiles et encouragèrent un commerce prospère. Gérasa devint l'une des villes provinciales les plus riches et les plus luxueuses de l'Empire romain à cette époque.

Theatre of Petra
Théâtre de Pétra
Carole Raddato (CC BY-NC-SA)

Malgré cela, Rome commença à décliner peu à peu au cours du IIIe siècle de notre ère et dut faire face à de sérieux défis au début du IVe siècle. Alors que Rome se débattait avec des difficultés internes et des invasions, la région qui allait devenir la Jordanie souffrait comme toutes les autres provinces. Les Tanukhides, semi-nomades, prirent le pouvoir dans la région et ses environs au IIIe siècle de notre ère et leur chef le plus célèbre, la reine Mavia (alias Mawiya, c. 375-425 de notre ère), mena une révolte contre Rome, très probablement provoquée par l'insistance de l'empire à recruter des auxiliaires tanukhides pour l'armée.

Comme les Tanukhides faisaient à l'origine partie de la confédération tribale nabatéenne, on pense qu'elle aurait contrôlé les régions qui constituaient auparavant le royaume nabatéen. Quoi qu'il en soit, elle était suffisamment puissante pour défier Rome, négocier une paix à ses propres conditions et, plus tard, envoyer des unités de cavalerie pour participer à la défense de Constantinople après la défaite de Rome à la bataille d'Andrinople en 378 de notre ère.

Lorsque Rome tomba à l'ouest (476 de notre ère), la partie orientale se poursuivit sous la forme de l'Empire byzantin, qui régnait depuis Constantinople. Au VIIe siècle de notre ère, l'invasion arabe balaya la région, convertissant la population à l'islam, ce qui entraîna un conflit avec les Byzantins. La région de la Jordanie moderne fut rattachée à l'empire omeyyade, la première dynastie musulmane, qui régna de 661 à 750 de notre ère. Sous l'empire omeyyade, la Jordanie prospéra mais fut négligée par la maison régnante suivante, les Abassides (750-1258), qui retirèrent leur soutien à la région, déplaçant la capitale de Damas, juste au nord de la Jordanie, à Koufa, puis à Bagdad, beaucoup plus loin.

Le califat fatimide (909-1171, absorbé par les Abbassides) s'empara de la Jordanie au cours de son expansion et entreprit de rénover les temples, les bâtiments et les routes, tout comme l'Empire ottoman (1299-1923) qui succéda aux Abbassides. Les armées ottomanes vainquirent les forces de l'Empire byzantin en 1453, mettant fin à l'influence occidentale dans la région.

Pendant la Première Guerre mondiale (1914-1918), les Ottomans se rangèrent du côté de l'Allemagne et des puissances centrales. La révolte arabe de 1916, qui débuta en Jordanie, affaiblit considérablement l'empire ottoman qui luttait contre les puissances alliées et, après leur défaite, l'empire fut dissous en 1923. La Jordanie devint alors un mandat de l'Empire britannique jusqu'à ce qu'elle n'obtienne son indépendance en 1946 après la Seconde Guerre mondiale. Aujourd'hui, la région est connue sous le nom de Royaume hachémite de Jordanie, un État autonome à l'avenir prometteur - et au passé long et illustre.

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Auteur indépendant et ex-Professeur de Philosophie à temps partiel au Marist College de New York, Joshua J. Mark a vécu en Grèce et en Allemagne, et a voyagé à travers l'Égypte. Il a enseigné l'histoire, l'écriture, la littérature et la philosophie au niveau universitaire.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2018, mars 05). Jordanie Ancienne [Ancient Jordan]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-11630/jordanie-ancienne/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Jordanie Ancienne." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mars 05, 2018. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-11630/jordanie-ancienne/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Jordanie Ancienne." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 05 mars 2018. Web. 20 sept. 2024.

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