L'écriture de la vallée de l'Indus constitue la plus ancienne forme d'écriture connue dans le sous-continent indien. L'origine de cette écriture est mal comprise: ce système d'écriture reste indéchiffré, il n'y a pas d'accord sur la langue qu'il représente, aucun texte bilingue n'a été trouvé jusqu'à présent et son lien avec les systèmes d'écriture indiens proprement dits (par exemple le Brahmi, le Devanagari et l'écriture bengali) est incertain. C'est la principale raison pour laquelle la civilisation de la vallée de l'Indus est l'une des moins connues des premières civilisations importantes de l'Antiquité.
C'est au cours de la phase harappéenne précoce (c. 3500-2700 av. J.-C.) que l'on trouve les premiers exemples connus de signes d'écriture de la vallée de l'Indus, attestés sur les poteries de Ravi et de Kot Diji excavées à Harappa. Étant donné qu'un seul signe figure sur la surface de la poterie, ces exemples représentent un stade prématuré du développement de cette écriture. Son plein développement fut atteint pendant la période urbaine (c. 2600-1900 av. J.-C.), lorsque des inscriptions plus longues furent consignées. Des milliers d'inscriptions sont connues grâce à une soixantaine de sites de fouilles: la plupart d'entre elles sont courtes, la longueur moyenne est de cinq signes et aucune ne dépasse 26 signes.
Matériau, forme et utilisation
Des exemples d'écriture de la vallée de l'Indus ont été trouvés sur des sceaux et des empreintes de sceaux, des poteries, des outils en bronze, des bracelets en grès, des os, des coquillages, des louches, de l'ivoire et sur de petites tablettes en stéatite, en bronze et en cuivre. Les sceaux carrés sont la forme dominante des supports d'écriture de l'Indus; ils ont normalement un pouce de côté (2,54 centimètres) et présentent l'écriture elle-même sur le dessus et un motif animalier au centre. Ils sont principalement faits de stéatite, certains d'entre eux comportant une couche d'un matériau lisse et vitreux, mais il existe également des exemples de sceaux en argent, en faïence et en calcite. Les sceaux étaient pressés sur une surface souple (par exemple de l'argile) afin de reproduire leur image.
Comme l'écriture de la vallée de l'Indus n'a pas encore été déchiffrée, son utilisation n'est pas connue avec certitude et tout ce que nous pensons savoir est basé sur des preuves archéologiques uniquement. Certains sceaux ont pu être utilisés comme amulettes ou talismans, mais ils avaient aussi une fonction pratique de marqueur d'identification. Comme l'écriture dans l'Antiquité est généralement associée aux élites qui tentent de noter et de contrôler les transactions, on pense également que l'écriture de la vallée de l'Indus était utilisée en tant qu'outil administratif. Il existe également des exemples d'utilisation de cette écriture sur des étiquettes d'argile attachées à des paquets de marchandises échangées entre marchands; certaines de ces étiquettes d'argile ont été trouvées dans la région de la Mésopotamie, bien au-delà de la vallée de l'Indus, ce qui témoigne de l'ampleur des déplacements de marchandises dans l'Antiquité.
L'écriture de la vallée de l'Indus était également utilisé dans le contexte de "l'imagerie narrative": ces images comprenaient des scènes liées à des mythes ou à des histoires, où le script était combiné avec des images d'humains, d'animaux et/ou de créatures imaginaires représentés dans des poses actives. Ce dernier usage ressemble à l'usage religieux, liturgique et littéraire qui est bien attesté dans d'autres systèmes d'écriture.
Tentatives de déchiffrement
Un peu plus de 400 signes de base ont été identifiés comme faisant partie de l'écriture de la vallée de l'Indus. Seuls 31 de ces signes apparaissent plus de 100 fois, les autres n'étant pas utilisés régulièrement. Cela amène les chercheurs à penser qu'une grande partie de cette écriture aurait été rédigée sur des matériaux périssables, tels que des feuilles de palmier ou de bouleau, qui n'ont pas survécu à la destruction du temps. Cela n'est guère surprenant si l'on considère que les feuilles de palmier, le bouleau et les tubes de bambou étaient largement utilisés comme supports d'écriture dans le sud et le sud-est de l'Asie. Certains chercheurs affirment que les quelque 400 symboles peuvent en fait être réduits à 39 signes élémentaires, le reste n'étant que des variations de style et des différences entre les scribes.
Plusieurs facteurs empêchent les chercheurs de percer le mystère de l'écriture de la vallée de l'Indus. Tout d'abord, certaines langues de l'Antiquité, comme l'égyptien, ont pu être déchiffrées grâce à la récupération d'inscriptions bilingues, c'est-à-dire en comparant une écriture inconnue à une écriture connue. Malheureusement, aucune inscription bilingue n'a encore été trouvée pour permettre de comparer l'écriture de la vallée de l'Indus à un système d'écriture connu.
Un autre obstacle à son déchiffrement est lié au fait que toutes les inscriptions trouvées jusqu'à présent sont relativement courtes, moins de 30 signes. Cela signifie que l'analyse des motifs récurrents des signes, une autre technique qui peut aider à dévoiler la signification d'un système d'écriture, ne peut pas être effectuée avec succès pour l'écriture de la vallée de l'Indus.
La dernière raison importante pour laquelle elle reste indéchiffrée, et peut-être la plus controversée de toutes, est que la langue (ou les langues) représentée(s) par l'écriture reste(nt) inconnue(s). Les chercheurs ont suggéré un certain nombre de possibilités: L'indo-européen et le dravidien sont les deux familles de langues les plus couramment privilégiées, mais d'autres options ont également été proposées, telles que l'austroasiatique, le sino-tibétain, ou peut-être une famille de langues perdue. Sur la base de la culture matérielle associée à la civilisation de la vallée de l'Indus, un certain nombre de chercheurs ont suggéré que cette civilisation n'était pas indo-européenne.
Que sait-on de l'écriture de la vallée de l'Indus?
Bien qu'il n'ait pas encore été possible de déchiffrer l'écriture de la vallée de l'Indus, la majorité des chercheurs qui l'ont étudiée s'accordent sur un certain nombre de points:
- L'écriture de la vallée de l'Indus était généralement écrite de droite à gauche. C'est le cas dans la plupart des exemples trouvés, mais il y a quelques exceptions où l'écriture est bidirectionnelle, ce qui signifie que le sens de l'écriture est dans une direction sur une ligne et dans la direction opposée sur la ligne suivante.
- La représentation de certaines valeurs numériques a été identifiée. Une unité unique était représentée par un trait vers le bas, tandis que des demi-cercles étaient utilisés pour les unités de dix.
- L'écriture de la vallée de l'Indus combinait à la fois des signes verbaux et des symboles à valeur phonétique. Ce type de système d'écriture est connu sous le nom de "logo-syllabique", où certains symboles expriment des idées ou des mots tandis que d'autres représentent des sons. Ce point de vue s'appuie sur le fait qu'environ 400 signes ont été identifiés, ce qui rend peu probable que l'écriture de la vallée de l'Indus ait été uniquement phonétique. Cependant, si l'hypothèse selon laquelle les centaines de signes peuvent être réduits à 39 seulement est vraie, cela signifie que l'écriture de la vallée de l'Indus pourrait être uniquement phonétique.
Déclin de l'écriture de la vallée de l'Indus
Vers 1800 avant notre ère, la civilisation de la vallée de l'Indus commença à décliner. Dans le cadre de ce processus, l'écriture commença à disparaître. La civilisation de la vallée de l'Indus s'éteignit en même temps que l'écriture qu'elle avait inventée. La culture védique qui allait dominer l'Inde du Nord pendant les siècles à venir n'avait pas de système d'écriture et n'adopta pas non plus l'écriture de la vallée de l'Indus. En fait, l'Inde devrait attendre plus de 1 000 ans pour voir le retour de l'écriture.