Junon

Définition

Donald L. Wasson
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 08 avril 2015
Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol, Turc
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Juno, Ny Carlsberg Glyptotek (by Carole Raddato, CC BY-SA)
Glyptothèque Juno, Ny Carlsberg
Carole Raddato (CC BY-SA)

Junon était la déesse romaine qui protégeait la nation dans son ensemble mais avait également une attention particulière sur tous les aspects de la vie des femmes. Elle est souvent considérée comme la version romaine de la déesse grecque de l'amour et du mariage, Héra. Junon était l'épouse et la sœur de Jupiter, le dieu romain en chef, et les deux étaient adorés avec la déesse Minerve au Quirinal à Rome.

Introduction historique

Après une longue série de guerres contre la Macédoine, l'armée romaine conquit la péninsule grecque et, par conséquent, la culture hellénique — art, littérature et philosophie — infiltra une grande partie de la vie romaine. Cette infiltration comprenait la religion romaine. Bien que leurs noms n'aient pas changé, les dieux romains commencèrent à s'associer de plus en plus à leurs homologues grecs: Vénus s'inspira de plus en plus d' Aphrodite, Pluton de Hadès, Neptune de Poséidon et, enfin, Jupiter de Zeus. Les mythes et légendes de la mythologie romaine se déformèrent progressivement, et de nombreux dieux romains commencèrent à perdre leur identité et leur individualité. Cependant, on oublie vite que les dieux romains avaient existé bien avant l'arrivée des Grecs, avant qu'ils ne perdent leur unicité. Et cette perte se distingue mieux avec la femme et la sœur de Jupiter, Junon, qui ne doit pas être confondue avec son homologue grec Héra. Junon était, en tout point, une déesse à part entière.

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Origines et rôles de Junon

Bien que son origine exacte soit inconnue, Junon était l'une des plus anciennes divinités romaines, c'est-à-dire l'un des trois dieux originaux — Jupiter, Junon et Minerve — honorés au Quirinal (plus tard sur le Capitole). Un grand temple fut construit par l'étrusque Lucius Tarquinus Pricus pour rendre hommage aux trois étroitement associées à la trinité étrusque: Tini, Uni et Menura. Certains anciens auteurs affirment que Junon arriva à Rome au Ve siècle avant notre ère de la ville étrusque de Veiès (Veii), au nord de Rome, sous le nom de Juno Regina, un mot signifiant reine. Elle reçut un temple sur la colline aventine et servit de divinité civique, protectrice de l'État.

Capitolium, Thuburbo Majus
Capitolium, Thuburbo Majus
Carole Raddato (CC BY-SA)

Entre autres identités, elle était connue de beaucoup sous le nom de Juno Sospita, la divinité principale de Lanuvium (Lanuvio moderne), une ville située dans le Latium au sud-est de Rome. Elle était la protectrice des personnes confinées, souvent photographiée portant une peau de chèvre, portant une lance et un bouclier. Elle était Juno Lucina, un mot signifiant lumière, la déesse de l'accouchement. Aucune offrande ne pouvait être faite à son temple à moins que tous les nœuds ne soient dénoués parce que la présence d'une ceinture pourrait entraver l'accouchement de l'enfant de la femme. Enfin, elle était Juno Moneta, la déesse de la lune, qui était un personnage unique à Rome.

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Quel que fût le nom sous lequel elle était connue, Junon présidait tous les aspects de la vie d'une femme. Elle était la protectrice des femmes légalement mariées. Pour d'autres, elle était la déesse qui aidait les gens à se souvenir, la déesse qui alertait. Ses oies sacrées étaient gardées sur le Capitole et une légende raconte qu'elles avertirent l'armée romaine sous la direction de Manlius Capitolinus lorsque les envahisseurs Gaulois tentèrent de prendre Rome en 390 av. JC. Finalement, elle aurait plusieurs sanctuaires construits en son nom; cependant, son temple ou citadelle primaire fut construite sur l'Arx (Arx Capitolin), la partie nord de la colline du Capitole. Ce sanctuaire était situé à côté de l' hôtel de la monnaie romaine; le mot argent vient de son nom, Moneta.

Junon présidait tous les aspects de la vie d'une femme.

Les Matronalia

Comme beaucoup de dieux ou de déesses, elle avait son propre festival, le 1er mars, les Matronalia, qui était une période de renouveau et du réveil de la nature. C'était un jour où les maris étaient censés offrir des cadeaux à leurs épouses. La journée était censée fêter l'anniversaire de son fils Mars, le dieu de la guerre. Aussi étrange que cela puisse paraître, Jupiter n'était pas le père de Mars, mais plutôt une fleur magique. Certains auteurs affirment que le festival célébrait en fait l'anniversaire de la fin de la guerre romaine contre les Sabins et honorait le rôle joué par les femmes. Après l'enlèvement des Sabines par Romulus, la guerre éclata, mais les femmes rétablirent l'harmonie lorsqu'elles s'interposèrent entre les factions belligérantes.

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Junon et Carthage

Selon la légende, il y avait un lien entre Junon et la ville de Carthage où elle était identifiée à la déesse Tanit. Et, selon le poète romain Virgile, auteur de L'Énéide, Junon avait un autre lien avec la ville en jouant un rôle majeur dans la fondation de Rome ou, plus précisément, dans le retard de la fondation de la ville. L'histoire d'Énée et son destin comme fondateur de la ville de Rome est un autre exemple du lien étroit entre les mythes grecs et romains. Bien que Virgile ait utilisé Junon comme antagoniste de l'histoire (il était, bien sûr, romain), Héra aurait pu tout aussi facilement la remplacer. Selon Virgile, il y avait peu d'amour entre Énée, le héros troyen de l'histoire, et la déesse romaine. Junon aimait la ville de Carthage et, selon la prophétie, sa ville bien-aimée serait un jour détruite par Rome, une ville fondée par Énée. Virgile a écrit: «Cette ville, disent-ils, était la maison préférée de Junon, préférée à toutes les terres... C'est là qu'elle avait ses armes, son char... elle chérissait l'idée qu'elle devait être, si le destin le permettait, la métropole de toutes les nations». Dans l'esprit de Junon, si l'on arrêtait Énée, la ville de Rome ne serait jamais établie: Carthage accomplierait son destin et contrôlerait la Méditerranée. Virgile s'interroge sur la «colère menaçante de Junon». Il demanda:

Muse, rappelle-moi quelle cause, quelle offense à sa volonté, quel chagrin

poussa la reine des dieux à imposer à un héros d'une piété si insigne

de traverser tant d'aventures, d'affronter tant d'épreuves ?

Les âmes des dieux éprouvent-elles de si grands ressentiments ?

Junon aimait donc Carthage et ne voulait pas qu'elle soit détruite par une future Rome. Il y avait cependant une deuxième raison à sa colère: le fait que le prince troyen Paris croyait Hélène plus belle, et la beauté de Junon était «méprisée».

Harbour of Carthage
Port de Carthage
carinemahy (Copyright)

Ainsi, grâce aux manigances de Junon, Énée et ses hommes débarquèrent à Carthage où la reine Didon tomba amoureuse d'Énée et le supplia de rester; cependant, la mère du guerrier troyen, Vénus, avait d'autres projets. Junon dit :

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... que la reine puisse se mettre au service d' un mari phrygien,

et, en guise de dot, qu'elle remette les Tyriens entre tes mains

La déesse Vénus avait compris

que les paroles de Junon dissimulaient

son propos de détourner un royaume italien vers les rives libyennes

La querelle s'intensifia entre les deux déesses. Heureusement pour Rome, mais malheureusement pour la reine Didon, le dieu Mercure rappella à Énée quel était son destin . Il quitta Carthage et navigua vers l'île de Sicile, abandonnant la pauvre Didon à son chagrin qui la poussa à se suicider. Junon fit de nouvelles tentatives pour arrêter Énée — en Sicile, les femmes de Troie furent persuadées de brûler les bateaux. Ensuite, une tempête en mer, créée par Junon, tourna court lorsque Neptune y nit son grain de sel, non pas pour l'amour d'Énée, mais en raison de son courroux face à l'ingérence de Junon dans ce qui était de son ressort. Selon Virgile, « le sort de Junon fut brisé » et les hommes débarquèrent en toute sécurité sur le sol italien. Le reste, bien sûr, tombe dans le domaine du mythe de la fondation de Rome et de la naissance de Romulus et de Rémus.

Après l'arrivée de la culture grecque, la mythologie de la religion romaine et les identités de ses dieux s'embrouillèrent. Les histoires sur les dieux, romains ou grecs, s'entremêlèrent. Junon, malgré une association étroite avec Héra la grecque, était, à part entière, une déesse importante. Elle était la protectrice des femmes, l'épouse (et la sœur) du tout-puissant Jupiter. Elle était la mère du dieu de la guerre Mars. Cependant, peu à peu, toute la mythologie entourant les dieux — Jupiter, Junon, Neptune et tout le reste — disparut avec l'émergence du christianisme. Cependant, l'importance et la pertinence de Junon vivront tant que les gens liront L'Énéide ou raconteront les histoires des grands dieux du passé.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Donald L. Wasson
Donald a enseigné l’histoire antique et médiévale ainsi que l’histoire des États-Unis à Lincoln College (Illinois). Éternel étudiant en Histoire depuis qu’il a découvert Alexandre le Grand, il met toute son énergie à transmettre son savoir à ses étudiants.

Citer cette ressource

Style APA

Wasson, D. L. (2015, avril 08). Junon [Juno]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-12806/junon/

Style Chicago

Wasson, Donald L.. "Junon." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le avril 08, 2015. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-12806/junon/.

Style MLA

Wasson, Donald L.. "Junon." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 08 avril 2015. Web. 16 nov. 2024.

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