Langue Sumérienne

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Définition

Jason Moser
de , traduit par Caroline Martin
publié le 07 novembre 2015
Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol, suédois
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Cuneiform Tablets in Sumerian (by David Morgan-Mar, CC BY-NC-SA)
Tablettes Cunéiformes en Sumérien
David Morgan-Mar (CC BY-NC-SA)

La langue sumérienne était parlée dans le sud de la Mésopotamie avant le deuxième millénaire avant notre ère et ce fut la première langue à être écrite en caractères cunéiformes. Il s'agit d'une langue isolée, c'est-à-dire que nous ne connaissons aucune autre langue qui lui soit apparentée de manière ancestrale. Bien que certaines théories indiquent que le sumérien ferait partie des langues ouraliennes, comme le hongrois et le finnois, ou d'autres familles de langues, il s'agit d'une opinion minoritaire qui ne repose pas sur des preuves suffisantes pour l'affirmer avec certitude. La langue était parlée dans une région où l'on parlait également des langues sémitiques, en particulier l'akkadien, et elle finit par tomber en désuétude au profit de ces langues au tournant du deuxième millénaire avant notre ère. Cependant, une forme littéraire de la langue continua à être écrite pendant 2000 ans, et elle eut également des influences notables sur d'autres langues de la région en ce qui concerne leur lexique, leur grammaire et leur écriture.

Développement Historique de la Langue

On sait peu de choses sur la date d'arrivée des personnes parlant le sumérien dans le sud de la Mésopotamie, à supposer qu'elles n'en aent pas été originaires. Quoi qu'il en soit, le sud de la Mésopotamie connut très tôt un environnement multilingue comprenant des langues telles que le sumérien, une forme primitive de l'akkadien, d'autres langues sémitiques et le hourrite. Certains chercheurs ont évoqué la possibilité d'un substrat inconnu ou d'une langue influente dans la région, en raison de la présence de mots d'origine inconnue dans les écrits sumériens. Il a cependant été démontré que ces mots provenaient d'autres langues connues, qu'ils étaient des composés du sumérien ou des mots communs à de nombreuses langues dont l'origine n'est pas claire.

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La première trace écrite de la langue provient d'un groupe de textes datant de la période de l'Uruk récent (ou du niveau IV) (c. 3200 av. J.-C.).

La première trace écrite de la langue provient d'un groupe de textes datant de la période de l'Uruk récent (ou du niveau IV) (c. 3200 av. J.-C.). Il s'agit pour la plupart de textes administratifs, mais certains sont des listes de mots utilisées pour l'éducation des scribes. Il a été contesté que ces textes soient effectivement sumériens, en raison de l'abondance des idéogrammes, qui peuvent être lus dans n'importe quelle langue. Par exemple, trois traits accompagnés d'une représentation d'un bœuf peuvent être lus comme «three oxen» en anglais, «drei Ochsen» en allemand, «tres bueyes» en espagnol, etc. Le sens de l'écriture ne changerait pas. Cependant, il est presque certain que la langue était bien le sumérien car la présence de compléments phonétiques ainsi que des orthographes phonétiques indiquent au lecteur une prononciation réelle. Environ 400 ans plus tard, vers 2800 av. J.-C., le groupe de textes suivant que nous avons provient d'Ur. Là encore, il s'agit essentiellement de textes administratifs, accompagnés d'un certain nombre de listes de mots destinés à la formation des scribes.

Notre connaissance de la littérature sumérienne, qui est en fait la plus ancienne littérature connue, prend vie au cours de la période dynastique archaïque précoce (ou période dynastique III, ou période DA III), vers 2500 av. J.-C., en particulier sur les sites de Fara (anciennement Shuruppak) et d'Abu Salabikh. C'est là que nous trouvons les premiers exemples d'œuvres telles que l'hymne du temple de Kesh, les instructions de Shuruppak, Lugalbanda et Ninsun (les parents de Gilgamesh), qui dépassent les limites du domaine pratique de l'économie et de l'administration pour pénétrer dans la sphère de la mythologie et de la cosmologie. Bien que ces textes soient difficiles à lire, on peut y déceler des thèmes littéraires tels que la formation du monde, la construction de temples divins et d'autres activités divines, parfois en lien avec la vie des adultes. Dans ces textes, on trouve également un grand nombre de noms de scribes et de fonctions d'origine akkadienne, ce qui laisse supposer que les deux langues étaient très mélangées, comme nous l'avons dit plus haut. C'est à cette époque que l'influence mondiale des Sumériens était la plus grande, comme en témoignent les textes de Mari, Ebla, Tell Beydar et Tell Brak, qui utilisent l'écriture cunéiforme pour le sumérien ainsi que les langues sémitiques locales, en dehors du royaume mésopotamien.

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Nous n'avons pas beaucoup de preuves de l'existence de l'écriture sumérienne pendant la période sargonique (c. 2300 - 2100 av. J.-C.). Les scribes étaient formés de manière centralisée à Agade (Akkad), puis envoyés à l'extérieur pour aider à gérer les affaires de chaque partie du royaume, mais ils utilisaient l'akkadien comme langue, reléguant le sumérien à l'arrière-plan. Malgré cela, certaines villes locales utilisaient encore l'écriture sumérienne pour gérer l'administration locale.

L'écriture sumérienne connut une certaine résurgence au cours de la troisième dynastie d’Ur (ou Ur III) (c. 2100 - 2000 av. J.-C.), car les premiers rois de cette période, Ur-Nammu et Shulgi, utilisaient le cunéiforme sumérien dans leur administration. Cependant, à ce stade, la langue écrite n'aurait pas reflété une quelconque langue vernaculaire parlée. Dans le domaine de la littérature, Shulgi remplaça la tradition mythologique de la période dynastique archaïque précoce (ou DA III) par un nouveau cursus scribal introduisant des genres tels que les hymnes et les chants royaux et divins. C'est également à cette époque que des œuvres aussi célèbres que La malédiction d'Akkad et Le code d'Ur-Nammu furent composées pour la première fois. Le roi de Lagash/Girsu, Gudea, contemporain d'Ur-Nammu, est célèbre pour avoir été le point central des textes sur des cylindres et des statues. Selon un récit, le dieu de la ville, Ningirsu, lui serait apparu en rêve et lui aurait ordonné de construire le temple Eninnu (littéralement «50 maisons») à Girsu, ce qu'il fit consciencieusement bien sûr.

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Map of Sumer
Carte de Sumer
P L Kessler (Copyright)

À l'époque de l'ancienne Babylonie (c. 2000 av. J.-C.), la plupart des spécialistes s'accordent à dire que les gens avaient complètement cessé de parler le sumérien (si ce n'est plus). Cependant, même si la langue avait cessé d'être parlée, elle fut revitalisée par les scribes de l'ancienne Babylonie en tant que langue littéraire. En fait, la majeure partie de la littérature sumérienne qui nous est parvenue date de cette période. C'est pourquoi la question de savoir dans quelle mesure les versions de l'ancienne Babylone correspondaient à la réalité de la langue autrefois vivante fait l'objet d'un grand débat. Nombre de ces textes proviennent de sites du sud de la Babylonie, comme Ur et Nippur, mais seulement avant et pendant le règne de Samsu-iluna, sous lequel une rébellion conduisit à l'abandon de Nippur. Dans le nord de la Babylonie, la tradition ne fut pas interrompue avant l'invasion de Mursili Ier (c. 1595 av. J.-C.). Parmi les textes célèbres rédigés à cette époque ou copiés d'une période antérieure, citons La Liste Royale Sumérienne, La Lamentation sur Ur, La Descente d'Inanna aux Enfers et les mythes héroïques d'Enmerkar, de Lugalbanda et de Gilgamesh.

Écriture

Le sumérien est écrit en cunéiforme. En fait, c'est la première langue que nous connaissons à être écrite en cunéiforme et il est très probable que le cunéiforme ait été développé pour être utilisé pour cette langue. À l'origine, le langage était écrit avec des idéogrammes, des symboles qui expriment une idée plutôt qu'un mot ou un son, et qui peuvent donc techniquement être compris dans n'importe quelle langue. Cependant, au fur et à mesure que l'écriture se développait, les scribes sumériens ont attribué des valeurs syllabiques aux signes en fonction de la sonorité du mot dans la langue. Par exemple, l'image d'une bouche représentait le mot «ka» et le signe pouvait donc représenter la syllabe «ka» dans n'importe quel mot contenant cette syllabe.

Le système d'écriture sumérien repose sur les principes de polyphonie et d'homophonie. La polyphonie signifie que certains signes ont plusieurs possibilités syllabiques. Par exemple, le signe DU peut être lu soit «du», soit «ra», soit «ša4», etc. L'homophonie signifie qu'il existe plusieurs signes ayant la même possibilité syllabique. Vous avez peut-être remarqué l'utilisation d'indices (comme «2») dans les possibilités des signes. Cela s'explique par le fait que des syllabes telles que «ra» étaient rendues par plusieurs signes, comme RA, le DU susmentionné, et d'autres encore. Aussi incroyable que cela puisse paraître, certaines syllabes étaient représentées par plus de 10 signes différents.

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Ce principe d'homophonie et le fait qu'une syllabe en sumérien constitue souvent le mot entier ont conduit certains chercheurs à penser que le sumérien contenait un système tonal. Comment peut-il y avoir autant d'homophones sans qu'il y ait d'autres caractéristiques pour les distinguer? À l'inverse, d'autres chercheurs ont noté que ces syllabes uniques se distinguent souvent par leur consonne finale, qui n'est plus prononcée à la fin du mot. Par exemple, le signe pour le bœuf «gu4» a une autre valeur «gud», le «d» tombant à la fin du mot. Une autre suggestion est l'existence potentielle de groupes de consonnes, que le système d'écriture n'avait aucun moyen de représenter.

Des Dialectes ?

Il existe un système intéressant de variation de la possibilité des signes qui n'est apparu qu'au cours de la période dynastique archaïque précoce. Ce système est communément appelé UGN ou UD.GAL.NUN, en référence à ces signes. Cette manière d'écrire se caractérise par des lectures atypiques de certains signes. Par exemple, les signes UD.GAL.NUN se lisent anormalement diŋir.en.lil2, ce qui renvoie au dieu (diŋir) Enlil, ce qui n'a rien à voir avec la lecture typique des signes. Il existe un certain nombre d'exemples de ces lectures irrégulières, mais il semble que la pratique soit tombée en désuétude après cette période.

L'emesal est communément désigné comme un dialecte du sumérien par opposition à l'emegir15 ou «le dialecte principal» du sumérien. L'écriture de l'emesal est limitée aux textes rituels, en particulier les textes de lamentation des prêtres galle (ou gala), et aux paroles prononcées par certaines déesses, bien qu'en d'autres endroits ces déesses parlent l'emegir15. Comme le signe SAL peut être lu comme munus, qui signifie «femme», les chercheurs ont supposé que l'emesal était un genrelect ou un dialecte spécial pour les femmes. Cependant, le signe SAL peut également se lire sal, qui signifie «mince» ou «doux», et pourrait simplement faire référence à une variante spéciale pour les déesses ou les prêtres exécutant des rituels, comme indiqué précédemment. Une autre suggestion avancée est que les prêtres galle étaient des eunuques, mais il n'y a aucune preuve de castration dans l'ancienne culture mésopotamienne méridionale.

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Héritage du Sumérien

Comme nous l'avons vu plus haut, la langue sumérienne connut une résurrection à l'époque de l'ancienne Babylonie en tant que langue littéraire et liturgique. Les scribes de cette période considéraient la langue comme essentielle au maintien des traditions d'une période très ancienne, et ils voulaient retrouver une époque archaïque de magie et de légende. Après cette période, qui s'acheva vers 1595 av. J.-C., l'utilisation du sumérien par les scribes diminua considérablement. Le répertoire de textes fut réduit, en particulier les hymnes royaux/divins de la troisième dynastie d’Ur et même ceux qui ont été conservés n'ont été écrits que dans des versions bilingues avec l'akkadien et d'autres langues. Cependant, le sumérien était encore étudié dans les écoles de scribes et même chanté dans la liturgie pendant les périodes perse et hellénistique. Il existe même des tablettes d'exercices pour les étudiants, avec le cunéiforme d'un côté et le grec de l'autre. La dernière tablette cunéiforme connue est un ouvrage astronomique datant de 75 ap. J.-C. et provenant de Babylone, mais il est possible que l'écriture soit tombée en désuétude plus tard.

Aujourd'hui, le sumérien n'est enseigné que dans un nombre restreint d'universités à travers le monde. Au total, il n'y a probablement pas plus de quelques centaines de personnes qui ont une connaissance pratique de la langue et il y a encore beaucoup de débats sur les bases de la grammaire. Même les plus grands spécialistes de la question ne sont pas certains de la signification de certains passages. Le sumérien offre une énigme difficile mais fascinante sur la vie et la littérature de ceux qui ont été les premiers à immortaliser leurs paroles par écrit. C'est une langue vraiment intrigante, à l'image des personnes intrigantes qui l'ont écrite.

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Bibliographie

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Traducteur

Caroline Martin
Française, ayant vécu au Royaume Uni pendant 20 ans, Caroline Martin est totalement bilingue. Lectrice passionnée depuis son plus jeune âge, elle a développé un amour de l'histoire qui remonte a ses années sur les bancs de l’école. Elle s'intéresse maintenant beaucoup à l'histoire en général et à la géopolitique.

Auteur

Jason Moser
Programmeur et passionné d'histoire ancienne, plus particulièrement de langues anciennes.

Citer cette ressource

Style APA

Moser, J. (2015, novembre 07). Langue Sumérienne [Sumerian Language]. (C. Martin, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-14046/langue-sumerienne/

Style Chicago

Moser, Jason. "Langue Sumérienne." Traduit par Caroline Martin. World History Encyclopedia. modifié le novembre 07, 2015. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-14046/langue-sumerienne/.

Style MLA

Moser, Jason. "Langue Sumérienne." Traduit par Caroline Martin. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 07 nov. 2015. Web. 20 déc. 2024.

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