Gouvernement Phénicien

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 29 avril 2016
Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol
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Eshmunazar II (by Eric Chan, CC BY)
Eshmunazar II
Eric Chan (CC BY)

Les gouvernements des villes phéniciennes telles que Tyr, Sidon et Byblos étaient dirigés par des monarchies héréditaires tout au long de leur histoire. Ces villes agissaient généralement de manière autonome les unes par rapport aux autres et ne formaient que rarement des alliances mutuelles. Le pouvoir absolu des rois phéniciens, même s'ils disposaient d'un conseil des anciens pour les consulter, est attesté par diverses sources anciennes, y compris les prophètes hébreux de l'Ancien Testament. Au-dessous du roi, les questions de gouvernement étaient également traitées par une classe sacerdotale et par les ménages d'élite qui contrôlaient le commerce international sur lequel la Phénicie prospérait tant.

Un ensemble de cités-états

La Phénicie n'a jamais été une entité politique unique, mais plutôt un ensemble de villes culturellement similaires situées sur l'étroite bande du Levant. Chaque ville avait son propre système de gouvernement indépendant, qui contrôlait la ville et son territoire environnant. À certaines époques, une ville pouvait être plus dominante qu'une autre dans la région, mais l'autonomie individuelle n'était pas nécessairement compromise. Sidon domina aux 12e et 11e siècles avant notre ère, tandis qu'ensuite c'est Tyr qui fut la ville phénicienne la plus puissante. Ce n'est que très rarement qu'une cité phénicienne forma une alliance formelle avec une autre. Même lorsque les villes agissaient dans le même sens, elles le faisaient individuellement. Par exemple, au Ve siècle avant notre ère, les villes phéniciennes fournirent des navires à la flotte perse de Xerxès, mais chaque groupe agit sous les ordres de son propre commandant.

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Les rois des cités phéniciennes exercèrent un pouvoir absolu jusqu'au 7e siècle avant notre ère.

Monarchies héréditaires

Les rois phéniciens nimmortalisèrent pas leurs règnes ou leurs réalisations dans l'art et les inscriptions comme dans d'autres cultures, de sorte que les informations sont souvent rares, non seulement sur les rouages du gouvernement, mais aussi sur des éléments de base tels que l'identité des souverains et la date de leur règne. Nous savons, grâce à certaines inscriptions tombales et à des sources éparses provenant d'autres cultures contemporaines, que les monarchies des cités phéniciennes exercèrent un pouvoir absolu jusqu'au VIIe siècle avant notre ère. Contrairement à d'autres sociétés antiques où la richesse d'un souverain était généralement acquise par une forme d'imposition sur la production agricole, les rois phéniciens, qui ne disposaient pas d'un territoire aussi vaste, acquéraient leur richesse soit en s'engageant eux-mêmes dans des expéditions commerciales, soit en taxant le commerce de l'élite des marchands de la ville.

La monarchie était généralement héréditaire, même s'il y eut parfois des révoltes, des guerres et des changements spectaculaires de dynastie. Des mariages de convenance avec les maisons royales d'autres villes étaient également organisés pour maintenir et accroître le pouvoir du roi. Les inscriptions suggèrent qu'une longue lignée ancestrale était une marque de prestige. Une inscription figurant sur le cercueil du roi Ahiram de Byblos nous donne la liste des rois suivante:

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  • c. 1000 av. J.-C., Ahiram
  • 980 av. J.-C., Ithobaal
  • 940 av. J.-C., Abibaal
  • 920 av. J.-C., Yehimilk
  • 900 av. J.-C., Elibaal
  • 880 av. J.-C., Shipitbaal

Les annales de Tyr et d'autres sources complémentaires fournissent la liste suivante des rois ayant régné sur Tyr:

  • 969-936 av. J.-C., Hiram Ier
  • 935-919 av. J.-C., Baal-eser Ier
  • 918-910 av. J.-C., Abdastrato
  • 909-898 av. J.-C., Methustratos
  • 897-889 av. J.-C., Astharymos
  • 888 av. J.-C., Phelles
  • 887-856 av. J.-C., Ithobaal Ier
  • 855-830 av. J.-C., Baal-asor II
  • 829-821 av. J.-C., Mattan II
  • 820-774 av. J.-C., Pygmalion
  • 750-740 av. J.-C., Ithobaal II
  • 739-730 av. J.-C., Hiram II
  • 730-729 av. J.-C., Mattan II
  • 729-694 av. J.-C., Elulaios
  • 680-640 av. J.-C., Baal Ier
  • Fin du 7e siècle av. J.-C.,(dates précises inconnues), Ithobaal III
  • Baal II
  • Mattan III
  • Hiram III

Il n'existe aucune preuve que des reines aient régné seules, mais une inscription à Sidon décrit une reine Unmiashtart qui aurait régné en tant que régente pour son fils Yatonmilk au cours du 5e siècle avant notre ère. Les sources mentionnent une autre dirigeante forte, la figure semi-mythique de Didon, sœur de Pygmalion, le roi de Tyr. Mécontente de la politique de son frère, elle aurait rassemblé un groupe de nobles partageant les mêmes idées et aurait quitté Tyr pour fonder sa propre ville, Carthage, sur la côte nord de l'Afrique.

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La prêtrise

Une autre classe était celle des prêtres qui s'occupaient des temples et accomplissaient les rituels. Là encore, les membres étaient issus de la famille royale et des grandes familles de marchands. Il existait parfois un lien direct entre la classe royale et la classe sacerdotale. Par exemple, Ozbaal, roi de Byblos, était le fils de Paltibaal, prêtre de Baalat, selon une inscription figurant sur son cercueil. Le monarque avait également une fonction sacerdotale, peut-être même celle de grand prêtre, et l'un des titres secondaires du roi était "prêtre d'Astarté". C'est sans doute pour cette raison que les rois tenaient à ce que leurs actes soient à la hauteur des titres additionnels de « juste “ et de ” droit » fréquemment utilisés, en faisant construire des temples et des monuments en l'honneur de divinités telles qu'Astarté, Baal et Melqart. Il est également vrai que certains rois véhiculaient l'idée d'être le représentant du dieu dans leur nom même, par exemple Baalbazer qui signifie "serviteur de Baal" ou Abdastratus, "serviteur d'Astarté". Certains rois durent aller plus loin et affirmer être réellement le dieu sur terre, une allégation très critiquée par les prophètes hébreux, comme le montre le livre d'Ezéchiel dans la Bible.

Phoenician Religious Sacrifice
Sacrifice religieux phénicien
O.Mustafin (Public Domain)

Hauts fonctionnaires

Le roi de Tyr pouvait consulter un conseil des anciens, mais on ne sait pas si cet organe se réunissait régulièrement pour discuter de la politique à suivre, ni quels étaient ses pouvoirs. Selon l'historien Arrien, le conseil pouvait prendre des décisions si le roi n'était pas disponible. Le livre d'Ezéchiel mentionne des "anciens" à la cour de Byblos, ce qui pourrait bien faire référence à un conseil similaire. Enfin, Diodore de Sicile, l'historien du 1er siècle avant notre ère, décrit un conseil de 100 membres à Sidon, mentionnant qu'ils prenaient parfois des décisions contraires à celles du roi. Les membres de ces conseils étaient probablement réservés aux membres de la famille royale et aux principaux marchands qui contrôlaient les activités commerciales de la ville.

Au-dessous du roi, il y avait deux postes importants: le gouverneur et le commandant de l'armée. Le premier était chargé de superviser la cour et l'administration de la ville. Ce titre est mentionné dans les textes d'Ougarit, d'El Amarna et de Chypre, mais là encore, les détails manquent.

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Autres formes de gouvernement

Les annales de Tyr mentionnent une période de gouvernement particulière, quoique brève, au cours du VIe siècle avant notre ère, pendant laquelle la ville était dirigée par une paire de juges appelés suffètes. Plus tard, ce système serait adopté par Carthage. Lorsque les cités phéniciennes passèrent sous domination assyrienne au VIIe siècle avant notre ère, le roi dut gouverner aux côtés d'un gouverneur assyrien qui guidait la politique. Le roi ne pouvait même pas ouvrir une correspondance officielle sans être en présence de ce gouverneur. Une exception à cette double gouvernance fut Simira, où il n'y avait même pas de roi et où le gouverneur assyrien gouvernait seul. Un arrangement similaire fut appliqué au VIe siècle avant notre ère, lorsque le roi babylonien Nabuchodonosor II imposa un ministre pour co-gouverner avec le roi à Tyr, et de nouveau sous la domination perse du siècle suivant.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2016, avril 29). Gouvernement Phénicien [Phoenician Government]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-14717/gouvernement-phenicien/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Gouvernement Phénicien." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le avril 29, 2016. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-14717/gouvernement-phenicien/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Gouvernement Phénicien." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 29 avril 2016. Web. 21 oct. 2024.

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