Ancienne Nara

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 31 mai 2017
Disponible dans ces autres langues: anglais
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Main Hall, Horyuji (by Martin Falbisoner, CC BY-SA)
Pavillon principal, Hōryū-ji
Martin Falbisoner (CC BY-SA)

Nara, située à environ 30 km au sud de l'actuelle Kyoto, fut la capitale de l'ancien Japon entre 710 et 784. Elle donna son nom à l'époque de Nara (710-794), bien que son nom ait été Heijo-kyō au cours du VIIIe siècle. Inspirée de la capitale chinoise des Tang, elle devint une ville impressionnante dotée d'un grand palais royal, de larges avenues et de nombreux temples importants. Aujourd'hui, Nara compte huit sites classés au patrimoine mondial de l'UNESCO, ce qui en fait l'un des meilleurs endroits pour découvrir l'architecture de l'ancien Japon.

Une nouvelle capitale

Nara, ou plus exactement Heijo-kyō ou Heijo, comme on l'appelait à l'époque, devint la capitale du Japon en 710, sous le règne de l'impératrice Gemmei (r. de 707 à 715), bien que la décision ait été annoncée dans un édit royal de 646. La capitale précédente se trouvait à Fujiwara (alias Fujiwara-kyō), à quelque 20 km au sud, mais Nara avait l'avantage d'être plus centrale, située au sud de l'actuelle Kyoto, et de disposer d'un accès fluvial à la mer qui séparait le Japon du continent asiatique. Le changement régulier de capitale était jusqu'alors une caractéristique de la vie de la cour, puisque le palais royal et la capitale politique ne faisaient qu'un; à la mort d'un empereur, le palais était considéré comme impur et un nouvel emplacement était recherché. Plus tard, les historiens ont donné le nom de la nouvelle capitale à la période allant de 710 à 794, même si, lors de la dernière décennie, elle n'était plus la ville japonaise la plus importante.

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Plan et architecture

Nara fut construite sur le modèle chinois de Chang'an, la capitale des Tang, et présentait donc un plan régulier et bien défini, deux moitiés symétriques et les bâtiments publics dans le style de l'architecture chinoise. Une différence importante avec les villes chinoises est que Nara n'avait pas de remparts, même si elle possédait deux portes symboliques: la porte Rashomon au sud et la porte Suzakumon au nord. Les aristocrates possédaient leurs propres grandes résidences, généralement de style japonais (plancher en planches de bois, cadres de soutien en bois et toit de bardeaux ou de chaume), et leur taille était strictement déterminée par le rang social de leurs propriétaires. Avec ses larges avenues et son architecture basse, la ville devait être très ouverte. Un palais royal tentaculaire composé de deux enceintes fut construit, et la bureaucratie de l'État fut étendue à quelque 7 000 fonctionnaires. L'empereur Shomu (r. de 724 à 749) rendrait le complexe palatial encore plus grandiose.

La population totale de Nara atteignait peut-être 200 000 habitants à la fin du VIIIe siècle.

Une université dédiée à la tradition confucéenne fut créée peu après le transfert de la capitale. Les jeunes hommes y étaient formés pour devenir des fonctionnaires dans la bureaucratie de l'État et y apprenaient le chinois, les mathématiques, les textes classiques de Confucius et leurs principes relatifs au gouvernement. En 728, le programme fut élargi pour inclure la littérature chinoise et le droit.

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Outre les étudiants, les fonctionnaires et les membres de la cour accompagnés de leurs domestiques, la population de la ville s'enrichit d'un grand nombre d'étrangers, en particulier de Chine et de Corée. Environ 20 à 30 % des résidents étaient des non-Japonais, qui s'installèrent à Nara où leurs compétences dans le tissage de la soie, la métallurgie, la construction et les arts étaient terriblement recherchées. Ainsi, la population totale de Nara atteingnait peut-être 200 000 habitants à la fin de la période, et la ville couvrait une superficie de 5 x 4 km, bien plus grande que celle de son prédécesseur Fujiwara.

Déclin

La cour impériale japonaise était en proie à des conflits internes pour l'obtention de faveurs et de postes au sein de l'aristocratie. L'empereur Kammu (r. de 781 à 806) était également préoccupé par l'influence grandissante des puissants monastères bouddhistes autour de la ville. Kammu décida donc de déplacer la capitale à Nagaoka-kyō en 784, puis, après quelques décès malencontreux à la cour, la déplaça à nouveau à Heian-kyō (Kyoto) en 794. Ce fut le début de la période Heian, qui durerait jusqu'au XIIe siècle, et Heian-kyō resterait la capitale du Japon pendant les mille années suivantes. La population de Nara déclina rapidement, mais la ville resta un lieu de pèlerinage grâce à ses splendides temples. Bien qu'elle ait beaucoup souffert pendant la première année de la guerre de Genpei (1180-1185), des travaux de restauration furent entrepris peu de temps après. Aujourd'hui, la ville reste l'une des principales attractions touristiques du Japon pour ses exemples d'art et d'architecture anciens.

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Great Buddha Hall, Todaiji
Pavillon du grand Bouddha, Tōdai-ji
James Blake Wiener (CC BY-NC-SA)

Caractéristiques architecturales

Nara possède de nombreux exemples d'architecture japonaise ancienne (bien que reconstruite), notamment des palais, des temples, des salles, des pagodes et des portes monumentales. Les huit sites décrits ci-dessous sont classés au patrimoine mondial de l'UNESCO.

Palais Heijō

Le palais Heijō fut fondé en 710 et occupait autrefois 5 % de la superficie totale de la capitale. L'enceinte fortifiée comportait 12 portes et abritait non seulement les résidences royales et les salles de banquet, mais aussi un grand nombre de bâtiments gouvernementaux et de bureaux. Les bâtiments royaux étaient de style japonais, avec du bois simple et des toits en bardeaux, tandis que les bâtiments gouvernementaux avaient le bois peint en rouge et les tuiles vertes de l'architecture Tang. Abandonné après le déplacement de la capitale, le site fut négligé et même utilisé pour la culture du riz, mais des fouilles menées au milieu du XXe siècle ont permis de retrouver certains des anciens bâtiments et leurs fondations. Aujourd'hui, le site a été entièrement reconstruit et la salle d'audience impériale, le jardin du palais de l'Est et la porte de Suzaku offrent aux visiteurs un aperçu parfait de l'architecture royale de l'ancienne Nara.

Tōdai-ji

Le temple bouddhiste du Tōdai-ji fut fondé près de Nara en 752, à l'est du palais impérial, d'où son nom de "Grand temple de l'Est". Le site possédait le plus grand bâtiment en bois du monde à l'époque et couvrait 16 pâtés de maisons de la ville. La salle du Grand Bouddha ou Daibutsuden se devait d'être grande car elle contenait une statue en bronze de 15 mètres de haut du Bouddha assis, la plus grande statue de ce type au monde, pesant environ 500 tonnes. Le Tōdai-ji fut partiellement détruit par un incendie pendant la guerre de Genpei (1180-1185), mais il fut restauré pour retrouver sa gloire d'antan, bien qu'à une échelle légèrement plus petite, avec le nouveau Daibutsuden abritant l'énorme statue de Bouddha partiellement restaurée et toujours aussi impressionnante: 48 mètres de haut et 57 mètres de long.

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Daibutsuden, Todaiji
Daibutsuden, Tōdai-ji
James Blake Wiener (CC BY-NC-SA)

Parmi les autres bâtiments du Tōdai-ji figurent le Nandai-mon (Grande porte sud), le Shōrō (Beffroi), le Nigatsu-dō (Salle du deuxième mois), le Hokke-dō (Salle du troisième mois), le Shōsō-in (Trésor) et deux pagodes de 100 mètres de haut, cette dernière ayant malheureusement été détruite par un tremblement de terre et n'ayant jamais été reconstruite. Une grande lanterne octogonale en bronze, toujours présente entre la porte Daibutsuden et la porte Chumon, date de la fondation du temple.

Kōfuku-ji

Le temple Kōfuku-ji, qui signifie "temple du bonheur", fut fondé en 669, à l'époque où il était connu sous le nom de Yamashina-dera. Le complexe était le siège religieux du puissant clan Fujiwara et comptait autrefois plus de 150 bâtiments. En grande partie détruit par des incendies à la fin du XIIe siècle, il fut partiellement reconstruit et bénéficia d'un autre programme de reconstruction en 1881. L'attraction principale est la pagode à cinq étages qui fut construite sur le site en 725. Détruite à plusieurs reprises, la structure actuelle date de 1426. Construite selon des techniques traditionnelles et sans aucun clou, elle atteint une hauteur impressionnante de 50 mètres ou 164 pieds. Parmi les autres bâtiments remarquables, citons le pavillon principal de l'est (Tokondo), dont la première construction remonte au VIIIe siècle et dont la version actuelle date de 1415, le pavillon octogonal du nord, dont la version actuelle date de 1210 alors que l'original fut construit en 721, et le pavillon octogonal du sud, qui fut construit en 813 et dont la structure actuelle date de 1741. Ces bâtiments et un musée sur le site contiennent tous des exemples précieux d'art bouddhiste ancien.

Yakushi-ji

Le temple Yakushi-ji, siège de la secte bouddhiste Hosso, fut fondé en 680 à Fujiwara, mais fut transféré à Nara en 718. La pagode orientale à trois étages est d'origine et s'élève à une hauteur de 33 mètres, mais la pagode occidentale et les autres bâtiments, notamment le Kondo (salle principale), le Daikodo (salle de conférence) et le Toindo (salle orientale), ont tous été reconstruits au XXe siècle après qu'un incendie eut détruit les originaux en 1528.

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Main Hall, Toshodai-ji
Pavillon principal, Toshodai-ji
663highland (CC BY-SA)

Toshodai-ji

Le Toshodai-ji est un temple bouddhiste de la secte Risshu. Fondé en 759 par le moine chinois Ganjin, il possède le plus grand bâtiment de la période Nara qui nous soit parvenu. Il s'agit du pavillon principal ou Kondo, dont la façade est composée de huit colonnes en bois. Le site contient le tumulus de Ganjin et de nombreux objets d'art et objets sacrés importants - 17 trésors nationaux et 200 biens culturels importants - dont des reliques du Bouddha rapportées par Ganjin de la Chine des Tang.

Gango-ji

Le Gango-ji fut fondé en 593, ce qui en fait le plus ancien temple bouddhiste du Japon. Il fut transféré (bâtiments compris) d'Asuka à Nara en 718. Le complexe comprenait sept salles et pagodes. Une fois de plus, le feu fut le grand ennemi de l'architecture japonaise, et le temple fut en grande partie détruit en 1451, puis au XIXe siècle. L'actuel pavillon principal ou Gokurakudo, aménagé à partir des chambres des moines, date de la période Kamakura (1186-1333). Le pavillon et une petite pagode sont tous deux des trésors nationaux du Japon.

Horyu-ji

Le temple Horyu-ji, près de Nara au Japon, fut fondé en 607 par le prince Shotoku et est le seul monastère bouddhiste de la période Asuka à avoir survécu dans son état d'origine. Le complexe, composé de 48 bâtiments classés, dont une pagode de cinq étages, possède les plus anciens bâtiments en bois du Japon.

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Central Gate & Pagoda, Horyuji Temple
Porte centrale et pagode, temple Hōryū-ji
Horyuji Chumon Warizuka (CC BY-SA)

Le Pavillon principal ou Kondo (alias Pavillon d'or) du complexe est un bâtiment en bois de deux étages, dont l'intérieur est conçu pour ressembler à la vision bouddhiste du paradis, grâce à des peintures murales aux couleurs vives sur les quatre murs. Il y a 12 panneaux distincts, chacun mesurant 3 x 2,5 mètres (10 x 8,5 ft) et représentant des scènes avec le Bouddha et les bodhisattvas. Malheureusement, les peintures murales originales du VIIIe siècle ont été détruites par un incendie en 1949, mais elles ont depuis été restaurées à l'identique. Il y a quatre gardiens célestes (Shitennō), chacun debout sur un démon prosterné, de nombreuses sculptures bouddhistes en bronze, et les objets de culte les plus importants du site, la triade de Shaka de 623 représentant le Bouddha et deux bodhisattvas debout.

Il y a aussi une pagode à cinq étages, le Trésor ou Daihozoden, qui contient d'autres trésors importants tels que des portraits du prince Shōtoku, l'amphithéâtre ou Daikodo, un clocher avec une base évasée caractéristique et une cloche de la période de Nara (710-794), et la salle octogonale des rêves ou Yumedono, construite en 739 sur le site du palais de Shōtoku, qui contient la statue de Kannon en bois et en feuilles d'or attribuée à Shōtoku, ainsi que le "Bouddha caché", rarement vu, connu sous le nom de Guze Kannon.

Stone Lanterns, Kasuga Shrine
Lanternes en pierre, sanctuaire de Kasuga
James Blake Wiener (CC BY-NC-SA)

Kasuga Taisha

Un autre temple important de la période Nara est le Kasuga Taisha, un sanctuaire shinto situé dans une forêt à l'est de Nara, qui fut officiellement fondé en 768, bien que les historiens préfèrent la date de 710. Selon la légende, Il fut fondé par le clan Fujiwara après l'apparition sur le site d'une divinité chevauchant un cerf, ce qui explique également pourquoi des cerfs sont encore aujourd'hui laissés en liberté dans le temple. Le site comprend un sanctuaire dédié à l'ancêtre fondateur des Fujiwara. Le chemin menant au sanctuaire est bordé de lanternes en pierre offertes par les fidèles au fil des siècles. Un grand nombre de ces 2 000 lanternes sont décorées de l'image d'un cerf. Un millier d'autres lanternes en bronze sont suspendues autour des sanctuaires et des portes du site. Toutes les lanternes de Kasuga sont allumées lors de cérémonies spectaculaires qui ont lieu chaque année en février et en août.

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This content was made possible with generous support from the Great Britain Sasakawa Foundation.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur, à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que partagent toutes les civilisations. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2017, mai 31). Ancienne Nara [Ancient Nara]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-15926/ancienne-nara/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Ancienne Nara." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mai 31, 2017. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-15926/ancienne-nara/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Ancienne Nara." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 31 mai 2017. Web. 25 mars 2025.

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