Yomi

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 15 mai 2017
Disponible dans ces autres langues: anglais, Turc
X
Susanoo & the Dragon (by Joe Mabel, CC BY-SA)
Susanoo et le Dragon
Joe Mabel (CC BY-SA)

Yomi, ou Yomitsu kuni, est le monde souterrain de la religion shintoïste, même s'il ne fait pas partie de la théologie shintoïste et n'apparaît que dans les mythes anciens racontés dans le Kojiki du VIIIe siècle, notamment l'histoire des dieux créateurs Izanami et Izanagi. Le Shinto se préoccupe essentiellement du présent des vivants, de sorte que Yomi, contrairement à la notion chrétienne d'enfer, n'a qu'une signification limitée liée à la décomposition physique des croyants après la mort.

Yomi dans la mythologie

Yomi ("Terre des ténèbres"), également connu sous le nom de Ne no kuni ("Terre des racines") ou de Soko no kuni ("Terre creuse"), était considéré comme l'endroit sous la terre où se rassemblaient les âmes des morts. On pensait qu'il y avait deux entrées au Yomi, l'une, un simple trou dans le sol dans la province d'Izumo bloqué par un rocher, et une autre entrée plus spectaculaire où toutes les mers plongent dans la terre.

Supprimer la pub
Publicité

Izanami et Izanagi

Yomi figure en bonne place dans deux mythes shintoïstes. Le premier concerne Izanami et Izanagi, les dieux qui créèrent les îles du Japon. Le couple engendra également de nombreux autres dieux, mais la naissance de certains d'entre leur coûta fort cher. Izanami fut terriblement brûlée lorsqu'elle donna naissance à Kagutsuchi, le dieu du feu, et l'on dit que de nombreux autres dieux naquirent de ses larmes alors qu'elle souffrait de ses blessures jusqu'à ce qu'elle ne finisse par mourir.

Izanagi, incapable de vivre sans sa femme bien-aimée, la suivit imprudemment dans le monde souterrain. Malheureusement, il ne put la sauver car elle avait déjà mangé de la nourriture à Yomi et il lui était donc interdit de retourner dans le royaume des vivants. Cependant, Izanami supplia les dieux de faire une exception et fit promettre à Izanagi d'être patient et de ne pas essayer de la voir dans son état actuel. Le processus de libération étant long, Izanagi, impatient, ne put attendre davantage et tenta de regarder sa bien-aimée. Il eut un choc, car lorsqu'il la vit, le corps de la déesse était déjà en train de se décomposer. Izanami fut plus que mécontente de voir son mari briser sa promesse et la voir dans un tel état, mais pire encore, les huit tonnerres et les vilaines femelles qui sortirent des cheveux d'Izanami chassèrent le dieu du monde souterrain. Dans d'autres versions, Izanagi s'enfuit, terrorisé par la vue repoussante d'Izanami. Au cours de sa retraite, Izanagi arrêta les poursuivants en lançant son bâton (kunado-no-kami) sur leur chemin et en brandissant trois pêches, un fruit censé posséder des propriétés magiques. Lorsqu'il atteignit enfin le monde extérieur, Izanagi bloqua l'entrée de Yomi avec une énorme pierre, et Izanami fut abandonnée à son sort.

Supprimer la pub
Publicité
En arrivant dans le monde extérieur, Izanagi bloqua l'entrée de Yomi avec une énorme pierre, et Izanami fut abandonnée à son sort.

Heureux de sortir indemne d'un endroit aussi terrible, le dieu dut accomplir un rituel de purification dans la rivière Woto pour se débarrasser des impuretés de Yomi. C'est au cours de ces rituels que naquirent différents dieux: Amaterasu, la déesse du soleil, lorsqu'il se lava l'œil gauche, Tsuki-yomi, le dieu de la lune, lorsqu'il se lava l'œil droit, Susanoo, le dieu de l'orage, lorsqu'il se lava le nez, et Shina-tsu-hiko, le dieu du vent, qui naquit du souffle d'Izanagi. En outre, lorsqu'il jeta ses vêtements souillés dans la rivière, douze autres dieux naquirent des douze morceaux. En référence à cet épisode, la pratique du harai ou de la purification avant d'entrer dans un sanctuaire sacré (jinja) est devenue un élément important du rituel shintoïste, où la propreté et la purification sont particulièrement appréciées.

Susanoo et Okuninushi

Le deuxième mythe qui met en scène Yomi est l'histoire des dieux Susanoo et Okuninushi. Dans certaines versions, Susanoo réside à Yomi aux côtés de sa mère Izanami, dans un palais situé près de l'entrée du monde souterrain. Le dieu de la tempête y avait été banni parce qu'il avait manifesté un chagrin excessif à la suite du décès de sa mère. Susanoo reçut un jour la visite d'Okuninushi, un dieu et descendant de sixième génération du dieu de l'orage. Okuninushi était perturbé par ses 80 frères et vint demander conseil à Susanoo.

Supprimer la pub
Publicité

En arrivant au palais, Okuninushi fut distrait par la beauté de la fille de Susanoo, Suseri-hume, et l'épousa rapidement. Susanoo, furieux de découvrir ce qui s'était passé sans sa permission, imposa une épreuve redoutable à son nouveau gendre. Okuninushi dut dormir dans une pièce remplie de serpents, d'abeilles et de mille-pattes, des créatures fortement associées à Yomi. Heureusement, Suseri-hume sauva son mari de cette épreuve, mais Susanoo demanda ensuite à Okuninushi de lui peigner les cheveux et de lui chercher des poux en signe de respect. Okuninushi s'exécuta et trouva non pas des poux, mais des mille-pattes mortels qui rampaient dans les cheveux de son beau-père. Une fois de plus, il fut sauvé par sa femme, qui lui donna de l'argile rouge et des noix qu'il mâcha et recracha, faisant ainsi croire qu'il débarrassait Susanoo de ses mille-pattes. Lorsque le dieu de la tempête s'endormit, Okuninushi attacha ses cheveux à la charpente et s'échappa avec Suseri-hume vers la terre des vivants. Avec l'épée et l'arc de Susanoo, qu'il avait volés, Okuninushi put vaincre ses 80 frères et s'établir en tant que souverain du monde, un règne qui dura jusqu'à ce qu'Amaterasu n'envoie son petit-fils Ninigi pour prendre sa place.

Shinto: La vie après la mort

Aucune source textuelle ancienne du shinto n'explique qui va à Yomi et pourquoi. Certains historiens suggèrent que le concept d'une vie après la mort n'était pas familier aux anciens Japonais et qu'il ne prit forme qu'avec l'introduction du bouddhisme en provenance de Chine au VIe siècle. Yomi occupe certainement une place très limitée dans la pensée shintoïste, où la vie après la mort n'est que vaguement évoquée et où il n'y a pas de concept général de punition et de récompense pour les âmes dans la prochaine vie, comme c'est le cas dans de nombreuses autres religions. La seule souffrance des âmes dans Yomi, si tant est qu'il y en ait une, est leur séparation d'avec leurs proches vivants. Le célèbre érudit et théologien shintoïste Hirata Atsutane (1776-1843) explique ainsi Yomi et sa signification limitée:

Les vieilles légendes selon lesquelles les âmes mortes se rendent à Yomi ne peuvent être prouvées. On peut donc se demander où vont les âmes des Japonais lorsqu'ils meurent. Il ressort clairement des légendes anciennes et des exemples modernes qu'elles restent éternellement au Japon et servent dans le royaume des morts gouverné par Okuninushi-no-kami. Ce royaume des morts ne se trouve pas dans un endroit particulier du monde visible, mais étant un royaume des ténèbres et séparé du monde actuel, il ne peut être vu...

L'obscurité, cependant, n'est que comparative. Il ne faut pas s'imaginer à tort que ce royaume est dépourvu de lumière. On y trouve de la nourriture, des vêtements et des maisons de différentes sortes, semblables à ceux du monde visible. On en trouve la preuve dans les récits [...] dans lesquels une personne est revenue de temps à autre pour parler du royaume des morts.

Supprimer la pub
Publicité

Après la mort, l'âme quitte le corps et réside dans la région de la tombe, un fait attesté par d'innombrables récits [...] des temps anciens et modernes d'événements miraculeux survenus par les esprits à proximité des tombes [...] Certains disent que l'âme va dans le royaume immonde de Yomi, mais il n'y a pas l'ombre d'une preuve que ce soit le cas. (Scott Littleton, 94)

This content was made possible with generous support from the Great Britain Sasakawa Foundation.

Supprimer la pub
Publicité

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2017, mai 15). Yomi [Yomi]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-16015/yomi/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Yomi." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mai 15, 2017. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-16015/yomi/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Yomi." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 15 mai 2017. Web. 16 sept. 2024.

Adhésion