Pausanias était un auteur, historien et géographe grec du IIe siècle de notre ère, qui voyagea beaucoup en Grèce et consigna ces voyages dans son Periegesis Hellados ou Description de la Grèce. Ses dix volumes d'observations sont très appréciés des historiens et des archéologues pour leur description approfondie de la Grèce antique. Pausanias était bien plus qu'un simple géographe; ses carnets de voyage ne décrivaient pas seulement les monuments, l'architecture et les œuvres d'art d'une région, mais aussi son histoire, y compris la vie quotidienne de ses habitants, les rites cérémoniels, les coutumes, les légendes et le folklore. L'œuvre de Pausanias a influencé le développement de l'archéologie classique plus que tout autre texte.
Sa Vie
Bien que l'on sache peu de choses sur les débuts de la vie de Pausanias et que son année de naissance soit difficile à déterminer (les spéculations varient entre 110, 115 et 125 de notre ère), il semble qu'il soit né à Magnésie du Sipyle (Manisa actuelle, Turquie), une ville de la province de Lydie située dans l'ouest de l'Asie Mineure. En raison de sa capacité à beaucoup voyager, beaucoup supposent qu'il était bien éduqué et issu d'une classe privilégiée. Les avis sont partagés sur la date à laquelle il commença sa Description de la Grèce. Certains pensent qu'elle put être commencée dès 143 de notre ère (ce qui lui aurait donné moins de 20 ans), tandis que d'autres avancent la date plus vraisemblable de 155 de notre ère. Cependant, Pausanias semble avoir terminé ses écrits avant 180, car aucun événement postérieur à 176 n'est mentionné, et sa mort est généralement placée en 180.
Si les avis divergent quant à la date du début de ses voyages, il ne fait aucun doute que sa jeunesse se déroula sous le règne de l'empereur romain Hadrien (117 - 138), qui était un admirateur de tout ce qui était grec, en particulier des monuments de la Grèce antique des périodes archaïque et classique.
Le fait que l'empereur encourageait un renouveau de la culture grecque allait avoir un effet profond sur le jeune Pausanias (et avec lui beaucoup d'autres); au lieu de se concentrer sur les événements de son époque, Pausanias était attiré par les monuments et les histoires de l'apogée des cités-États grecques indépendantes.
Description de la Grèce
Avant d'écrire sa Description de la Grèce, qu'il aborde sous l'angle géographique, Pausanias parcourut la Méditerranée - Asie Mineure, Syrie, Palestine, Égypte et même Italie - pour étudier ses habitants et leurs coutumes. Curieusement, son récit de voyage ne couvre pas toute la Grèce, mais seulement une partie importante de ses parties centrale et méridionale, principalement le Péloponnèse, sans l'Étolie et les îles. Ses dix volumes comprennent des sections sur les cités-États d'Attique (dont Athènes), de Corinthe, d'Argolide, de Laconie, de Messénie, d'Élis, d'Archéa, d'Arcadie (dont Olympie), de Béotie, de Phocide (dont Delphes). Pausanias s'intéressait principalement à tout ce qui était unique dans une région - monuments, coutumes et folklore - et, en raison de son grand intérêt pour l'aspect religieux des choses, comme les temples et les sanctuaires, sa Description pourrait ressembler davantage à un "pèlerinage" qu'à un récit de voyage pour certains lecteurs. Parmi ses observations sur le folklore, on peut citer ses commentaires sur une statue d'Apollon à Athènes:
Après le temple de Jupiter (Zeus) Olympien, et dans son voisinage, est la statue d'Apollon Pythien, ainsi qu'un autre temple d'Apollon surnommé Delphinien. On raconte que ce temple étant achevé, à l'exception du toit, Thésée vint à Athènes, où il était absolument inconnu : sa tunique descendait jusqu'aux talons, et sa chevelure était tressée avec élégance ; lorsqu'il passa devant le temple, les ouvriers qui travaillaient au toit lui demandèrent en raillant, comment il se faisait qu'une jeune fille en âge de se marier, courut ainsi les champs toute seule. (1.19.1)
Pausanias montrait aux hellénophones éduqués qui vivaient sous la domination romaine ce qui était important en Grèce, et il était également prompt à donner des conseils à ses lecteurs. En parlant de la grotte des Coryciennes, par exemple, il met en garde : " L'ascension de la grotte des Coryciennes est plus facile pour un marcheur actif que pour des mules ou des chevaux " (10.32.2). C'est toutefois l'attention portée par Pausanias aux détails qui fait de lui un tel trésor pour les archéologues. On peut le constater, entre autres, lorsqu'il décrit des objets que d'autres auraient pu omettre, comme dans ce passage où il commente Athènes et ses habitants :
Il y a sur la place publique d'Athènes, plusieurs monuments peu remarqués en général, entre autres l'autel de la Pitié, divinité la plus utile de toutes dans les diverses vicissitudes de la vie, et que les Athéniens seuls honorent d'un culte particulier ; ils se sont distingués en effet non seulement par leur humanité, mais encore par leur piété envers les dieux, car ils ont érigé des autels à la Pudeur, à la Renommée et à la Valeur. (1.17.1)
Fiabilité
Compte tenu des nombreux voyages qu'il effectua dans les lieux dont il souhaitait parler et des études approfondies qu'il mena sur les sujets qu'il choisit, Pausanias est généralement considéré comme un témoin oculaire précieux lorsqu'il s'agit du statu quo de son époque. Les informations qu'il donne sur les sites et les monuments sont certainement facilement vérifiables, car ils étaient et sont toujours très accessibles aux visiteurs. Pour revisiter les anciens mythes et coutumes de certaines régions, Pausanias dut s'appuyer sur ses recherches (et donc sur d'autres personnes fournissant ces informations), et son exactitude dépend donc de ses sources, mais dans l'ensemble, ses interprétations ont résisté à l'épreuve du temps. Dans l'ensemble, compte tenu de son statut inestimable en tant que source archéologique, Pausanias semble être assez fiable. Cependant, il faut noter que Pausanias fit une sélection stricte de ce qu'il inclut dans sa Description, n'incluant que les sites et monuments qu'il jugeait les plus remarquables, ce qui, pour lui, signifiait souvent pencher plus vers l'apogée de la Grèce et le côté religieux des choses que vers sa propre époque.
De plus, Pausanias était lui-même, comme tout un chacun, marqué par son éducation et le contexte politique et culturel dans lequel il avait grandi: il était grec, alors que la Grèce était sous domination romaine. Bien avant la naissance de Pausanias, Rome avait conquis la Grèce lors des guerres de Macédoine. Et si les Romains aimaient tout ce qui était grec, allant jusqu'à prendre des tuteurs grecs pour leurs enfants et à étudier la philosophie et la rhétorique à Athènes, de nombreux Grecs n'appréciaient pas leur présence. Dans son livre SPQR, l'historienne Mary Beard affirme que l'auteur et orateur grec Publius Aelius Aristides fit l'éloge de la domination romaine dans un discours prononcé devant l'empereur Antonius Pius, affirmant que Rome avait surpassé tous les empires précédents, apportant paix et prospérité au monde entier. Selon Beard, Pausanias, cependant, donna à Rome une évaluation différente; il ignora toute mention de bâtiments construits par des Romains ou avec de l'argent romain, dans une tentative de revenir en arrière et de recréer l'image d'une Grèce sans Rome. Ainsi, aussi approfondies qu'aient été ses études, ses écrits comportent une attitude anti-romaine évidente, dont il faut tenir compte lorsqu'on utilise l'ouvrage comme source.
L'exception à la règle anti-romaine dans son œuvre est lorsque Pausanias reconnaît les contributions de l'empereur romain Hadrien (qui aimait la Grèce):
C'est l'empereur Adrien qui a fait ériger la nef du temple de Jupiter (Zeus) Olympien, et une statue de ce dieu, admirable, moins par sa dimension, (car à l'exception des colosses qu'on voit à Rhodes et à Rome, les autres statues colossales sont à peu près de la même taille,) que parce qu'elle est entièrement d'or et d'ivoire, et que malgré sa grandeur, elle est travaillée avec beaucoup d'art. (1.18.6)
Plus tard, il dit qu'Hadrien construisit d'autres bâtiments pour les Athéniens - un temple pour Héra et Zeus ainsi que "cent piliers de marbre phrygien" (1.18.9).
Héritage
Bien que l'on sache peu de choses de sa vie en dehors de ses écrits, l'œuvre de Pausanias a fini par influencer le développement de l'archéologie classique plus que tout autre texte. Ses descriptions détaillées donnent à ses lecteurs un aperçu d'une Grèce dont les monuments anciens ont disparu depuis longtemps ou sont tombés en ruine. À ce titre, Pausanias contribue à illustrer la complexité du monde de la Grèce antique.