Chevalerie Médiévale

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 14 mai 2018
Disponible dans ces autres langues: anglais, portugais
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Duke Heinrich von Breslau in the Codex Manesse (by Meister des Codex Manesse (Nachtragsmaler I), Public Domain)
Le duc Heinrich von Breslau dans le Codex Manesse
Meister des Codex Manesse (Nachtragsmaler I) (Public Domain)

Dans l'Europe médiévale, un code d'éthique connu sous le nom de chevalerie se développa, code qui comprenait des règles et des attentes selon lesquelles la noblesse devait se comporter. La chevalerie était, en outre, un code religieux, moral et social qui contribuait à distinguer les classes supérieures des classes inférieures et qui permettait aux chevaliers de se forger une réputation favorable afin de pouvoir progresser dans leur carrière et leurs relations personnelles. À partir de la fin du 11e siècle, les qualités chevaleresques essentielles dont il fallait faire preuve étaient le courage, les prouesses militaires, l'honneur, la loyauté, la justice, les bonnes manières et la générosité, en particulier envers les personnes moins fortunées que soi. Au 14e siècle, la notion de chevalerie était devenue plus romantique et idéalisée, en grande partie grâce à une pléthore de littérature sur le sujet. Le code perdura donc tout au long de la période médiévale, avec des renaissances occasionnelles par la suite.

Fonction et promotion

La chevalerie, dérivée du français cheval et chevalier, était à l'origine un code purement martial destiné aux unités de cavalerie d'élite. Ce n'est que plus tard qu'elle acquit ses connotations plus romantiques de bonnes manières et d'étiquette. Le clergé encouragea vivement la chevalerie, le code exigeant des chevaliers qu'ils prêtent le serment de défendre l'église et les personnes sans défense. Cette relation entre la religion et la guerre ne fit que s'accentuer avec la conquête arabe des terres saintes et les croisades qui en résultèrent pour les reconquérir pour la chrétienté à partir de la fin du 11e siècle. L'État perçut également les avantages de la promotion d'un code par lequel les jeunes hommes étaient encouragés à s'entraîner et à se battre pour leur monarque. La discipline du code chevaleresque devait également être utile lorsque les armées étaient sur le terrain (mais pas toujours), tout comme l'accent mis sur l'exhibition; les chevaliers se pavanaient sur le champ de bataille comme des paons avec des épées ornées de bijoux, des armures incrustées, des casques à plumes, des chevaux en livrée et des bannières d'armes colorées. La vue magnifique d'une troupe de chevaliers lourdement armés galopant sur le champ de bataille permit de gagner de nombreux conflits médiévaux avant même qu'ils ne commencent.

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LA CHEVALERIE AVAIT UN AUTRE BUT QUE DE RENDRE LES GENS BIEN ÉLEVÉS: SÉPARER CLAIREMENT LES NOBLES DES GENS DU PEUPLE.

Des romans, des poèmes et des chansons romantiques (chansons de geste) furent écrits pour promouvoir encore davantage l'idéal de la chevalerie avec leurs histoires passionnantes de demoiselles en détresse, d'amour courtois (l'amour non partagé et inaccessible d'une dame aristocratique mariée) et de champions héroïques et errants combattant les étrangers et les monstres - qui ne faisaient essentiellement qu'un. La diffusion de la littérature sur la figure légendaire du roi Arthur et de ses chevaliers de la Table ronde à partir du 12e siècle contribua tout particulièrement à inculquer des idéaux d'honneur et de pureté dans l'esprit des nobles du Moyen Âge: dans les contes arthuriens, seuls les bons et les purs pourraient trouver le Saint Graal. Parmi les autres personnages historiques qui devinrent des exemples à suivre et qui apparaissent dans la littérature chevaleresque, citons Hector de Troie, Alexandre le Grand et Charlemagne. Il se développa même une littérature de guides de chevalerie utiles pour les chevaliers, tels que le poème français L'Ordre de la Chevalerie (vers 1225) qui examine le processus d'initiation correct pour la chevalerie, le Livre de l'Ordre de la Chevalerie de l'Aragonais Ramon Llull (1265) et le Livre de la Chevalerie du chevalier français Geoffroi de Charny (publié vers 1350). La plus importante de toutes les sources sur la chevalerie, du moins pour les historiens ultérieurs, est sans doute les Chroniques de l'historien Jean Froissart, écrites dans la seconde moitié du 14e siècle.

La chevalerie avait un autre objectif que de rendre les gens bien élevés: séparer clairement les nobles des gens du peuple. Après la conquête normande de 1066 en Angleterre, par exemple, les divisions sociales étaient devenues un peu plus floues et la chevalerie devint donc un moyen pour la noblesse et les aristocrates terriens de se persuader qu'ils étaient supérieurs et qu'ils avaient le monopole de l'honneur et des bonnes manières. La chevalerie devint ainsi une sorte de club privé où la richesse, la lignée familiale et l'accomplissement de certaines cérémonies d'initiation permettaient à une personne d'entrer dans la clique et d'afficher ensuite ouvertement son sentiment de supériorité aux yeux des masses.

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Knight Battling the Seven Sins
Un chevalier aux prises avec les sept péchés capitaux
Unknown Artist (Public Domain)

Pour maintenir les normes de la chevalerie, certaines restrictions se développèrent au fil du temps concernant les personnes qui pouvaient devenir chevaliers. En 1140, Roger II, roi de Sicile, interdit par exemple à toute personne susceptible de troubler la paix publique de devenir chevalier. En 1152, un décret du royaume d'Allemagne interdit à tout paysan de devenir chevalier. L'empereur du Saint Empire romain germanique Frédéric Ier adopta une loi similaire en 1186, interdisant dans tout l'Empire aux fils de paysans ou de prêtres de devenir chevaliers. Bel et bien révolus étaient les premiers jours de la chevalerie lorsque quiconque faisait preuve d'un grand courage au combat avait une chance d'être fait chevalier par un seigneur ou un monarque reconnaissant. Au 13e siècle, s'imposa l'idée que seul un descendant de chevalier pouvait le devenir. Il y eut des exceptions, notamment en France et en Allemagne au XIVe siècle, lorsque la vente de titres de chevalier devint un moyen pratique pour les rois d'augmenter les coffres de l'État, mais en général, l'opinion qui prévalait désormais était que l'honneur et la vertu ne pouvaient être qu'hérités, et non acquis.

Punition et rétrogradation

Il y avait un inconvénient à parader dans la campagne en déclarant à tous et à chacun combien on était honorable, car le code chevaleresque prévoyait également des sanctions pour ceux qui ne respectaient pas ses normes. Un chevalier risquait de perdre son statut et de voir son nom sali à jamais s'il se rendait coupable de délits graves, comme fuir une bataille, commettre une hérésie ou une trahison. Il existait même une règle interdisant à un chevalier de dépenser son argent de manière trop frivole. Si l'impensable arrivait à un chevalier, on lui enlevait ses éperons, on brisait son armure et on lui enlevait ses armoiries ou on lui donnait un symbole honteux ou on le représentait à l'envers.

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Les ordres chevaleresques

LES ORDRES CHEVALERESQUES virent LE JOUR - SOUVENT À L'INITIATIVE DES MONARQUES - POUR CRÉER UNE HIÉRARCHIE DANS LE MONDE DES CHEVALIERS.

Alors que la chevalerie devenait un symbole de statut social de plus en plus important et que la loyauté envers l'église était remplacée par la loyauté envers la couronne, des ordres spécifiques apparurent, souvent à l'initiative des monarques, pour créer une hiérarchie dans le monde des chevaliers. Le roi anglais Édouard III (r. 1327-1377) se distingua tout particulièrement par son soutien aux tournois et au culte de la chevalerie. Lors d'un tournoi organisé par le roi au château de Windsor en 1344, 200 chevaliers furent invités à rejoindre une confrérie chevaleresque, puis en 1348, il créa l'Ordre de la Jarretière, encore plus exclusif, pour 24 chevaliers choisis, plus le roi et son fils, le Prince Noir, qui portaient tous fièrement une jarretière bleu foncé. Cet ordre et les honneurs qui l'accompagnent existent encore aujourd'hui. Déjà, en Hongrie, en 1325, le roi Charles avait fondé l'ordre de Saint-Georges et, en 1332, le roi Alphonse XI de Castille et Léon avait créé l'ordre de la Bande. En France, en 1351, le roi Jean le Bon (r. 1350-1364) fonda l'ordre chevaleresque de l'Étoile dont les objectifs spécifiques étaient de promouvoir la chevalerie et l'honneur. L'Ordre de l'Étoile imposait également à ses membres une clause de "non-retraite au combat", ce qui était peut-être très chevaleresque mais qui, dans la pratique de la guerre, s'avéra souvent un vrai désastre - la moitié de l'ordre fut tuée lors d'une bataille en Bretagne en 1353.

L'initiation dans les ordres spécifiques pouvait impliquer que le chevalier élu prenne un bain, revête des robes symboliques et soit béni dans une chapelle sous le regard des chevaliers de l'ordre. Le nouveau chevalier pouvait également être tenu de veiller dans la chapelle pendant la nuit et, au matin, après un autre service religieux et un copieux petit-déjeuner, l'initié était cérémonieusement habillé par deux chevaliers. C'est alors qu'il recevait ses éperons, son armure, son casque et son épée fraîchement bénie. La dernière étape de cette cérémonie élaborée consistait à ce que le chevalier le plus ancien de l'ordre donne une ceinture à la nouvelle recrue, puis lui frappe les épaules avec sa main ou son épée.

Jousting Re-enactment
Reconstitution historique de joute
National Jousting Association (CC BY-SA)

Le tournoi médiéval

L'un des meilleurs endroits, outre le champ de bataille, où un chevalier pouvait montrer toutes ses qualités chevaleresques était le tournoi médiéval. Lors de la mêlée (bataille de cavalerie simulée) ou des joutes individuelles, on attendait d'un bon chevalier qu'il possède et démontre les qualités suivantes :

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  • prouesse martiale (prouesse)
  • courtoisie
  • bonne éducation (franchise)
  • noblesse des manières (débonnaireté)
  • la générosité (largesse)

Compte tenu de l'importance de la chevalerie, ceux qui, entre autres délits, avaient calomnié une femme, avaient été reconnus coupables de meurtre ou avaient été excommuniés étaient interdits de compétition. Ceux qui gagnaient aux tournois pouvaient gagner à la fois honneur et richesse. Le fait que les autres nobles aient suivi le tournoi et peut-être aussi une dame de la cour dont le chevalier s'était entiché ou dont il arborait les faveurs sur sa lance étaient autant d'incitations supplémentaires pour les concurrents à accomplir de grands actes de bravoure et de chevalerie.

Guerre et chevalerie

Si la vie d'un homme d'armes était en soi considérée comme une noble activité, il est peut-être important de noter que si la chevalerie était mise en avant en temps de paix, elle était largement absente lors des guerres. Le massacre des ennemis, le meurtre des prisonniers, le viol et le pillage se poursuivaient de manière aussi tragique que pendant des millénaires avant la naissance du concept de chevalerie. Pourtant, du moins en théorie, les chevaliers étaient censés faire la guerre pour l'honneur, la défense de la foi chrétienne ou de leur monarque plutôt que pour le simple gain financier.

The Sack of Constantinople in 1204 CE
Le sac de Constantinople en 1204 CE
Palma Le Jeune (Public Domain)

Un certain code de conduite éthique se développa dans la guerre, en particulier le traitement humain et gracieux des prisonniers, mais, bien sûr, ces idéaux ne furent pas suivis par tous les chevaliers dans tous les conflits. Même des incarnations du comportement chevaleresque comme Richard Ier d'Angleterre étaient connues pour avoir massacré des prisonniers sans défense pendant la troisième croisade (1189-1192). Il est certain qu'à l'époque de l'acrimonieuse guerre des Roses en Angleterre, au XVe siècle, le bon nom et le statut social d'un chevalier n'étaient pas de nature à lui garantir un traitement chevaleresque s'il se trouvait du côté des perdants, et un nom de famille noble pouvait même être une condamnation à mort en soi, compte tenu des rivalités familiales de l'époque. Néanmoins, il existait certains éléments typiques de la chevalerie par exemple l'avertissement d'un siège par des hérauts afin que les résidents de la ville puissent se rendre ou que les non-combattants puissent fuir. Parfois, les citoyens étaient même autorisés à quitter la ville en plein siège pendant une trêve générale. Si et quand une ville tombait, on s'attendait également à ce que les églises et le clergé ne soient pas touchés.

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Étant donné que les armées contenaient de nombreux autres éléments outre les chevaliers, il était souvent impossible pour les nobles de s'assurer que les règles de la chevalerie étaient respectées par tous, surtout dans le chaos de la victoire. Il y avait certainement, aussi, une différence de chevalerie selon l'identité de l'ennemi. Les infidèles pendant les croisades, par exemple, n'étaient pas considérés comme dignes d'un traitement de galanterie, tandis que les guerres civiles contre des compagnons chevaliers pouvaient encourager un plus grand degré de chevalerie de la part des combattants. Enfin, le code chevaleresque était parfois en contradiction avec la caractéristique essentielle de toute armée performante: la discipline. Les chevaliers avaient été imprégnés de l'idée de valeur et de gloire personnelles à tel point que leur désir de faire preuve de courage pouvait les conduire à prendre des risques inconsidérés et à ne pas tenir compte de la nécessité pour l'armée dans son ensemble d'agir en tant qu' unité de combat disciplinée. L'un de ces cas tristement célèbres concerne les Templiers lors du siège d'Ascalon (dans l'actuel Israël) en 1153, lorsque 40 chevaliers tentèrent de prendre d'assaut les remparts eux-mêmes et empêchèrent même des unités de leur propre camp de se joindre à l'attaque. En fin de compte, les Templiers furent vaincus et leurs têtes furent suspendues aux murs de la ville. Parfois, la discrétion est vraiment le meilleur composant de la bravoure, même pour les glorieux chevaliers.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2018, mai 14). Chevalerie Médiévale [Medieval Chivalry]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-17015/chevalerie-medievale/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Chevalerie Médiévale." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mai 14, 2018. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-17015/chevalerie-medievale/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Chevalerie Médiévale." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 14 mai 2018. Web. 20 nov. 2024.

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