Sept contre Thèbes

Définition

Donald L. Wasson
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 25 mai 2018
Disponible dans ces autres langues: anglais
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Seven Against Thebes (by Carole Raddato, CC BY-SA)
Sept contre Thèbes
Carole Raddato (CC BY-SA)

Sept contre Thèbes est le troisième volet d'une trilogie écrite par l'un des plus grands tragédiens grecs, Eschyle, en 467 avant notre ère, et qui remporta le premier prix du concours des Dionysies. Malheureusement, il ne reste que des fragments des deux premières pièces, Laïos et Œdipe, ainsi que du drame satyrique Sphinx qui les accompagnait. Basée sur le mythe grec antique bien connu d'Œdipe roi de Thèbes, Sept contre Thèbes est centrée sur la rivalité entre Étéocle et Polynice, les deux fils d'Œdipe, qui accomplissent la malédiction de leur père, ne parviennent jamais à régler leur différend et, finalement, se s'entretuent. Comme le montre son œuvre la plus célèbre, l'Orestie, Eschyle est peut-être le seul tragédien à avoir traité ses trilogies en tant que pièce unique. Cette pratique est évidente dans Sept contre Thèbes, où il fait un certain nombre de références aux événements des deux premières pièces.

Eschyle

Considéré comme le père de la tragédie grecque, Eschyle vit le jour vers 525 avant notre ère dans une famille aristocratique d'Éleusis, une région située à l'ouest du centre d'Athènes. Athénien et fier de l'être, il se battit contre les Perses à la bataille de Marathon en 490 avant notre ère, où son frère fut tué. Certains spécialistes affirment qu'il aurait également participé à la bataille de Salamine en 480 avant notre ère. Il commença à écrire à peu près à la même époque, remportant son premier prix en 484 avant notre ère. De ses plus de 90 pièces, seules six ont survécu - la paternité d'une septième pièce, Prométhée enchaîné, est remise en question. Il est surtout connu pour son utilisation du chœur et l'introduction d'un deuxième acteur parlant, ce qui permet de donner plus de liberté au développement de l'intrigue. Ses deux fils, Euéon et Euphorion, étaient tous deux dramaturges.

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Aeschylus
Eschyle
Carole Raddato (CC BY-SA)

Dans son livre Antiquity, l'historien Norman Castor affirme que le but des pièces d'Eschyle n'était pas de raconter une histoire, mais d'explorer un problème. La classiciste Edith Hamilton, dans son ouvrage The Greek Way , affirme qu'il fut le premier poète à saisir "l'étrangeté déconcertante de la vie" (182). Elle ajoute qu'il était profondément religieux mais quelque peu radical, repoussant les pièges de la religion grecque traditionnelle. Dans ses pièces, les dieux sont perçus comme des ombres, "se demandant comment un dieu peut être considéré comme juste lorsque des gens sont autorisés à souffrir" (193). Vers la fin de sa vie, Eschyle se rendit en Sicile où il continua à écrire. Il y mourut vers 456 avant notre ère.

Le mythe

La plupart des spectateurs connaissent le mythe d'Œdipe et la malédiction du roi Laïos. Cependant, pour comprendre et apprécier pleinement la pièce, l'observateur occasionnel doit comprendre la situation critique de la famille du roi et la légende qui entoure la tragédie d'Œdipe. Avant sa naissance, un oracle prédit à son père, le roi Laïos, que son fils le tuerait un jour. Pour éviter cette tragédie, le bébé Œdipe est envoyé au loin avec l'ordre d'être tué. Malheureusement, le soldat chargé d'exécuter l'ordre n'y parvient pas et, par chance, l'enfant est élevé par le roi de Corinthe et sa femme. Des années plus tard, Œdipe adulte retourne à Thèbes, sa ville natale, et accomplit sans le savoir la prophétie en tuant son père et en épousant sa mère. Finalement, Œdipe, devenu roi de Thèbes, apprend qu'il a péché, s'aveugle et s'exile. Avec sa fille Antigone, il erre comme un paria pendant de nombreuses années jusqu'à ce qu'il ne s'installe à Athènes à la demande du roi Thésée. Avant de mourir, il jette une malédiction sur ses deux fils: ils ne pourront jamais régler leurs différends et mourront au combat. Sept contre Thèbes est centré sur la rivalité entre Etéocle et Polynice, les deux fils d'Œdipe. Bien que mentionné par son nom, Polynice n'apparaît pas et ne parle pas dans la pièce.

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étéocle, le dernier espoir de Thèbes, combat son frère à la septième porte, où tous deux sont tués.

Après l'exil d'Œdipe, les deux frères acceptent de se partager le trône de Thèbes, chacun ayant un règne alterné d'un an. Étéocle choisit de régner en premier, mais à la fin de son année, il refuse de céder le trône à son frère, obligeant Polynice à s'exiler. En représailles de la trahison de son frère, Polynice s'allie au roi Adraste d'Argos et une guerre s'ensuit. Encerclé par les Argiens, Étéocle est contraint de se battre et, un par un, il envoie ses sept champions les plus courageux à l'extérieur des sept portes de Thèbes contre les sept meilleurs d'Argos. Alors que la guerre est dans l'impasse, Etéocle, le dernier espoir de Thèbes, combat son frère à la septième porte et tous deux sont tués. Les assaillants sont repoussés et la guerre prend fin. Comme dans la pièce de Sophocle, Antigone tente d'enterrer son frère Polynice (considéré comme un traître), malgré les avertissements des dirigeants thébains. Bien que cela ne soit pas mentionné dans la pièce, selon la légende, la génération suivante d'Argos retourne combattre Thèbes et est victorieuse.

Personnages

Jusqu'à la toute fin, lorsqu'Antigone et Ismène font leur apparition, la majeure partie de la pièce est consacrée à Étéocle s'adressant au chœur. Il y a donc relativement peu de personnages:

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  • Étéocle
  • Antigone
  • Ismène (qui ne parle pas)
  • un messager
  • un héraut
  • et, bien sûr, le chœur.

Intrigue

La pièce s'ouvre sur Etéocle confronté à une foule de Thébains inquiets. Il est évident que Polynice et ses compagnons Argiens sont rassemblés à l'extérieur des murs de Thèbes et se préparent à la bataille. Les citoyens sont venus demander à leur roi de les rassurer. Celui-ci leur parle sur un ton de réconfort. Il les supplie de garder l'autel, d'aider les enfants et, enfin, d'aider la Terre nourricière. Il les informe qu'un prophète a annoncé que l'ennemi prépare un assaut et qu'ils doivent donc s'occuper des portes et des tours. Pour tenter d'apaiser leurs inquiétudes, il a envoyé des espions et des éclaireurs chez l'ennemi.

Un messager vient annoncer à Etéocle que sept commandants "féroces" s'approchent des portes et lui conseille de "mets la ville à l'abri avant que Mars ne souffle ses tempêtes ; déjà mugit, au pied de nos murailles" (trad. M. Pierrron). Le roi, nerveux, prie les dieux de protéger sa ville. Le chœur est troublé, demandant qui les protégera, qui sera leur champion. Quel dieu ou quelle déesse les protégera? Parlant de l'ennemi qui approche, ils s'exclament:

Les sept chefs de l'armée apparaissent, la lance à la main, le bouclier en avant, debout en face des sept portes, chacun au lieu fixé par le sort. (75, ibid)

Ils crient à Zeus, à Apollon et à Athéna. S'adressant au chœur, Étéocle est en colère et dit que beaucoup de gens dans la ville ont peur, les accusant d'être des lâches sans esprit. Il les insulte en les traitant de tribus de femmes. L'ennemi se renforce. Si les gens - hommes et femmes - n'obéissent pas à ses ordres, ils seront condamnés à mort. "l'obéissance aux ordres du chef est la mère du succès qui sauve.. (78, ibid) Il demande au chœur de ne pas laisser les citoyens devenir des lâches, de prier pour que les tours les retiennent, d'être calmes et de ne pas avoir trop peur. Le chef de chœur est inquiet et effrayé:

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Les remparts gémissent jusque dans leurs fondements; l'ennemi enveloppe la ville... Je tremble; le bruit redouble aux portes.. (79-80, ibid)

Étéocle tente de le consoler en lui disant que ce n'est pas à lui de s'inquiéter et, une fois de plus, lui demande de ne pas parler de ce qu'il entend à la ville. Le chef du chœur reste craintif et ajoute qu'il ne sera pas esclave. Étéocle expose ses projets au chœur:

Cependant, moi septième, avec six guerriers valeureux adversaires des ennemis, je cours défendre les sept portes de nos remparts. (81, ibid)

Il sort. Le chœur parle à haute voix du chaos qui règne derrière les murs de la ville; des cris, des bandes de pillards errants. Étéocle revient au moment où un messager arrive avec des nouvelles de l'ennemi; chaque champion argien se tient à la porte qu'il a désignée. Il demande au roi qui sera envoyé à la première porte, qui mérite leur confiance. Étéocle écoute le messager parler de la puissance du premier champion ennemi, mais il écarte rapidement la menace: aucun équipement humain ne le fera trembler. Il choisit son premier champion pour affronter l'ennemi.

Attic Oil Flask Depicting a Scene from Seven Against Thebes
Flacon à huile attique représentant une scène de Sept contre Thèbes
Metropolitan Museum of Art (Copyright)

Un à un, Étéocle choisit les champions pour affronter l'ennemi. Tous regardent les hommes se battre aux troisième, quatrième, cinquième et sixième portes. Enfin, le messager s'adresse à Étéocle. À la septième porte se trouve son frère, Polynice.

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Quelles imprécations il lance contre cette ville! quel sort funeste il lui prépare dans ses vœux! Monter sur les tours, se proclamer roi parla voix du héraut, entonner le chant qui célébrera notre ruine, te joindre, te donner la mort s'il périt, ou, si vous vivez, se venger sur toi d'un bannissement honteux par un exil qui te couvre de honte: voilà les menaces que nous fait Polynice. (93, ibid)

Étéocle s'écrie que la malédiction de son père s'est accomplie. Il demande à ce que ses jambières le protègent. Bien que le chef de chœur le supplie de ne pas partir, Étéocle insiste sur le fait qu'il doit le faire. Étéocle sort. Le messager revient bientôt. À la septième porte, les frères sont morts l'un par la main de l'autre; la malédiction s'est réalisée.

Ainsi seront accomplis les funestes vœux d'un père. Thèbes est sauvée ; mais les deux rois conçus dans le même sein se sont mutuellement donné la mort, et la terre a bu leur sang. (101, ibid)

Des assistants apportent les corps des deux frères tués. Un héraut remarque:

Apprenez ce qu'a ordonné, ce qu'ordonne le sénat de la ville de Cadmus. Celui-là, Étéocle, aimait sa patrie : il sera enseveli avec honneur. (108, ibid)

Cependant, le traître Polynice doit être rejeté sans être enterré. Comme dans la pièce de Sophocle, Antigone déclare:

... si personne ne veut m'aider à l'ensevelir, je l'ensevelirai moi seule; j'en courrai le danger. Pour donner la sépulture à un frère, je ne rougis point de désobéir aux ordres de la cité. (109, ibid)

Le héraut se tient debout, lui interdisant de le faire, mais elle reste résolue. Antigone, avec la moitié du chœur, se tient auprès du corps de Polynice tandis qu'Ismène, avec la seconde moitié, se tient auprès du corps d'Etéocle. Ils partent tous enterrer les corps.

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Antigone with Polynices' Body
Antigone avec le corps de Polynice
VladoubidoOo (CC BY-SA)

Héritage

L'influence d'Eschyle se fit sentir longtemps après lui, et influença même profondément ses collègues tragédiens. Des références aux Sept contre Thèbes apparaissent à la fois dans les Grenouilles d'Aristophane et dans les Phéniciennes d'Euripide. La pièce survécut à l'époque byzantine et à la Renaissance. Malheureusement, sa forme actuelle n'est peut-être pas la même que celle écrite par Eschyle. De nombreux spécialistes pensent que certaines parties de la pièce furent réécrites des années plus tard afin de l'aligner sur l'Antigone de Sophocle, une pièce présentée 15 ans après la mort d'Eschyle. L'apogée de la pièce en témoigne: Antigone n'apparaît que dans les dernières lignes de la pièce pour exprimer son inquiétude au sujet du corps de Polynice qui n'a pas été enterré. Malgré cette conclusion plutôt abrupte, la pièce a résisté à l'épreuve du temps et a influencé non seulement ses collègues tragédiens, mais aussi d'autres personnes jusqu'à la Renaissance.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Donald L. Wasson
Donald a enseigné l’histoire antique et médiévale ainsi que l’histoire des États-Unis à Lincoln College (Illinois). Éternel étudiant en Histoire depuis qu’il a découvert Alexandre le Grand, il met toute son énergie à transmettre son savoir à ses étudiants.

Citer cette ressource

Style APA

Wasson, D. L. (2018, mai 25). Sept contre Thèbes [Seven Against Thebes]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-17045/sept-contre-thebes/

Style Chicago

Wasson, Donald L.. "Sept contre Thèbes." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mai 25, 2018. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-17045/sept-contre-thebes/.

Style MLA

Wasson, Donald L.. "Sept contre Thèbes." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 25 mai 2018. Web. 05 févr. 2025.

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