Chacchoben

Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Alex Nolk
publié le 29 janvier 2019
Disponible dans ces autres langues: anglais, portugais
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Temple 1 at Chacchoben (by Betsy Mark, CC BY-NC-SA)
Temple 1 à Chacchoben
Betsy Mark (CC BY-NC-SA)

Chacchoben est un site maya datant d'environ 700 ap. J.-C dans l'État de Quintana Roo, au Mexique. Autrefois grand centre religieux urbain, la ville fut abandonnée vers 900-950, à peu près en même temps que les autres grandes cités mayas, et fut peu à peu engloutie par la forêt environnante. Les ruines furent découvertes en 1942 par un fermier qui construisit alors sa maison à proximité et protégea le site jusqu'en 1972, date à laquelle un archéologue américain le découvrit et le porta à l'attention du gouvernement. Le nom Chacchoben est une appellation moderne qui signifie «Lieu du Maïs Rouge». On ignore le nom que portait la ville dans l’Antiquité.

Le site, qui n'a été que partiellement fouillé, comprend quatre grands temples et les ruines de la place du marché et du quartier résidentiel. D'autres structures restent enfouies sous la végétation mais ont été identifiées comme étant, en principe, des temples, ce qui indique que Chacchoben était autrefois un centre religieux important. Le fait que l'une des énormes structures excavées sur le site soit désignée sous le nom de Temple 24 donne une idée de la grandeur de la ville. Les archéologues précisent qu'il ne s'agit que du nombre de temples identifiés jusqu'à présent, et non du total possible, sans compter les autres bâtiments. Des objets tels que des brûleurs d'encens trouvés dans l'un des temples montrent clairement que les gens continuaient à se rendre et à prier sur le site longtemps après son abandon. Aujourd'hui, Chacchoben est un parc archéologique ouvert au public.

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Peuplement précoce et construction

Le site présente des traces d'occupation humain remontant à environ 200 av. J.-C, mais la région environnante (connue sous le nom de Région des lacs) fut colonisée bien plus tôt, vers 1000 av. J.-C, les lacs, les lagunes et les marais fournissaient à la population de l'eau douce, du poisson et du gibier, et les bâtisseurs de la ville vivaient très probablement dans de petites huttes au toit de chaume. Vers 700, la construction de la ville était achevée, mais on ne sait pas pourquoi un complexe aussi gigantesque avait été construit, ni quelle était précisément sa signification religieuse. Comme pour d'autres sites mayas, les raisons de son abandon ne sont pas non plus connues, mais pourraient être liées à la surpopulation, à la surexploitation des terres ou à la conquête militaire.

UN ASPECT INHABITUEL DE CHACCHOBEN, EN PLUS DE L'ABSENCE D'ORNEMENTATION, EST QU'IL NE PRÉSENTE AUCUNE INSCRIPTION.

Chacchoben fut construit dans le style architectural Peten que l'on retrouve dans des sites plus célèbres comme Uxmal et Palenque, mais avec une différence remarquable: les structures sont dépourvues d'ornementation. Les bâtiments et les temples de sites mayas tels que Tulum, à seulement 177km au nord, Uxmal, Chicken Itza et bien d'autres sont très ornementés alors que ceux de Chacchoben sont austères. S'il est certainement possible que les temples et autres structures qui n'ont pas encore été mis au jour soient aussi richement décorés que ceux des autres sites, cela semble peu probable car ceux qui ont été fouillés étaient manifestement d'une grande importance.

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Les structures et les zones fouillées sur le site:

  • Temple 24 et Plaza B
  • La Gran Plaza (Grande Place)
  • Le Gran Basamento (Grand sous-sol)
  • Templo de Las Vasijas (Temple des Vases)
  • Templo 1 (Temple 1)
  • Temple de Las Vias (Temple des Wayob)

Aujourd'hui, ces bâtiments sont entourés de forêts, mais ils n'étaient autrefois qu'une petite partie d'un vaste complexe de temples, de maison et de centres administratifs.

Temple 24 at Chacchoben
Temple 24 à Chacchoben
Betsy Mark (CC BY-NC-SA)

Temple 24 et Plaza B

Le Temple 24 est une imposante pyramide à degrés construite dans le style architectural de la période classique maya (250-950 ap. J.-C.) et située sur la Plaza B. Les Mayas avaient perfectionné l'utilisation du ciment hydraulique quelque temps avant 250 av. J. -C. Les fours transformaient leur abondante réserve de calcaire en poudre de ciment qui, mélangée à de l'eau, des pierres de l'argile, devenait du béton. Le temple 24 témoigne de l'habileté des anciens ouvriers dans l'utilisation du béton entres les couches de pierre.

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Lorsqu'un nouveau souverain accédait au trône, il construisait son palais et son temple sur les travaux de l'ancien roi. Il s'agissait d'une démonstration concrète de pouvoir - le nouveau roi dominait l'ancien - mais cela était peut-être aussi symbolique car le nouveau roi reconnaissait ainsi les fondements du pouvoir sur lesquels il s'appuyait. Le temple 24 suit ce modèle puisque la structure actuelle est construite sur une structure plus ancienne.

Sur de nombreux sites, tels que Kohunlich, les archéologues peuvent dater une ville grâce aux inscriptions laissées sur ces structures par la série de rois. Un autre aspect inhabituel de Chacchoben, outre l'absence d'ornementation, est l'absence d'inscriptions. On sait seulement que le temple 24 fut construit sur un temple antérieur en raison de la différence d'âge du béton et d'une altération du schéma de placement des pierres.

La Plaza et les Temples du Gran Basamento

La Grande Place, place du marché et centre de la ville, était divisée par une large artère. Les ruines des anciens étals et des résidences de la classe supérieure sont encore visibles de part et d'autre de cette voie, bien que beaucoup soient masquées par la végétation. Les villes mayas pratiquaient le commerce entre elles et il est fort probable que des produits importés étaient proposés sur le marché de la ville, mais tout comme de nos jours, ils étaient plus chers et réservés à la classe supérieure. Les marchandises vendues régulièrement sur le marché étaient essentiellement des produits de première nécessité et de petit luxe que tout le monde pouvait s'offrir.

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Ruins of Market Place, Great Plaza of Chacchoben
Ruines de la Place du Marché, Grande Place de Chacchoben
Betsy Mark (CC BY-NC-SA)

Dans toute ville maya. La classe supérieure vivait dans des maisons en pierre au centre, tandis que ceux de la classe populaire logeaient dans des huttes au toit de chaume à la périphérie de la ville. Ce même paradigme est évident à Chacchoben où les maisons en pierre bordant la rue principale appartenaient aux citoyens les plus riches. Bien que la place paraisse étroite aujourd'hui, en raison de l'empiètement de la forêt, elle était assez large à l'époque et comprenait le terrain de jeu de balle (une caractéristique typique des villes mayas) où l'on jouait au Poc-a-Toc, le jeu de balle mésoaméricain.

L'astronomie et l'astrologie étaient d'égale importance pour les mayas et leurs villes étaient construites en accord avec l'alignement céleste.

Un large escalier, taillé dans la roche de la colline avoisinante, mène de la Grande Place à ce que l'on appelle le Gran Basamento, un plateau sur lequel se trouvent le Temple des Vases, le Temple 1 et quelques ruines de fondations de bâtiments plus petits. L'astronomie et l’astrologie étaient d'importance égale pour les mayas et leurs villes étaient construites en fonction de l'alignement céleste. En haut de ces escaliers se trouvent deux piliers de pierres connus sous le nom de Los Gemelos (les jumeaux). L'un des piliers est percé d'un trou qui concentre le soleil couchant du solstice d'hiver sur une petite zone de la Grande Place. Les archéologues pensent qu'il y avait autrefois une statue ou une stèle à cet endroit que ce rayon de soleil aurait éclairée. De la même manière, au solstice d'été, la lumière du soleil levant se diffuse à travers le sommet du Temple 1, illuminant un endroit du sol désormais vide pendant cinq minutes.

Le plateau du Gran Basamento était un site important pour les rituels religieux menés au Temple 1; les diverses coupes, pichets, bols et assiettes, utilisés lors de ces rituels étaient conservés dans le Temple de Vases situé à proximité. Les bâtiments plus petits, dont il ne reste plus aujourd'hui que quelques pierres, des contours dans la terre ou de murs de fondation, étaient probablement les habitations des prêtres et des ouvriers du temple.

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Stairs of the Gran Basamento at Chacchoben
Escaliers du Gran Basamento à Chacchoben
Betsy Mark (CC BY-NC-SA)

La religion maya était complètement intégrée à la vie quotidienne des gens. Les dieux étaient toujours présents, mais ils vivaient à l'écart des êtres humains, au sommet des montagnes ou au fond des grottes. Les Mayas construisaient leurs énormes pyramides au centre de leurs villes comme des montagnes artificielles, les demeures des dieux, et plaçaient les temples au sommet. On pensait que les dieux reconnaitraient ces monuments comme leurs demeures naturelles et qu'ils vivraient parmi les gens.

Des grottes artificielles étaient également créées à l'intérieur de ces monuments pour la même raison. Ces «grottes» étaient parfois des tombes, mais plus souvent de petits temples avec des autels pour les offrandes sacrificielles. Comme beaucoup de cultures anciennes, les Mayas croyaient que les dieux les protégeaient et prenaient soin d'eaux en permanence mais, contrairement à la plupart des autres cultures, les dieux ne garantissaient à personne une vie éternelle pleine de bonheur après la mort.

Pour les Mayas, la vie était un voyage qui ne s'achevait pas à la mort du corps. L'âme continuait à vivre et se rendait dans le sombre monde souterrain de Xibalba. Dans ce pays de la nuit éternelle, l'âme essayait de se frayer un chemin à travers les labyrinthes d'éviter les ruses et les pièges des divinités du monde souterrain et de trouver l'arbre de vie dont les racines s'enfonçaient profondément dans l'ombre de la terre. Une fois l'âme parvenue à l'arbre, elle pouvait grimper à travers les neuf couches d'obscurité pour revenir sur terre et continuer son ascension jusqu'au paradis.

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Maya Stele in Grand Plaza Chacchoben, Mexico
Stèle maya sur la Grand Place Chacchoben, Mexique
Betsy Mark (CC BY-NC-SA)

Les seules âmes exclues de ce voyage étaient celles des femmes mortes en couches, des victimes sacrificielles volontaires, des guerriers morts au combat, des athlètes morts en jouant au jeu de Poc-a-Toc et des suicidés. Les Mayas considéraient l'acte de suicide comme rationnel et honorable et avaient même une déesse (Ixtab) dédiée au soin de ces âmes.

Pour les Mayas, il suffisait que les dieux donnent aux gens de quoi vivre et se nourrir pendant leur vie; ils n'étaient pas censés continuer à guider quelqu'un après la mort. Ce travail incombait à d'autres, comme les âmes des parents décédés, les entités surnaturelles ou les chiens spirituels. Les chiens étaient très appréciés par les Mayas, tout en étant une source de nourriture, en raison de leur relation avec le divin. Le chien n'était ni complètement sauvage ni complètement domestiqué et était donc considéré comme une sorte de lien entre le monde des hommes et celui des dieux.

On pense que des sacrifices, y compris des sacrifices humains, étaient pratiqués au Temple 1. Le sang étant la nourriture des dieux, il était recueilli dans des bols ou des pichets provenant du temple des Vases, puis était "servi" à une statue ou à l'image d'un dieu au temple 1.

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Le Templo de la Vias

En redescendant les escaliers du Gran Basamento et en descendant l'ancienne rue principale, on arrive au Templo de las Vias, dédié aux esprits gardiens qui aidaient chaque individu tout au long de sa vie. Dans la croyance maya, les Wayob (Way au singulier) sont des esprits protecteurs qui guident les vivants. Les Mayas croient que chaque jour possède sa propre énergie particulière propice à une activité ou à une autre. Si l'énergie d'une journée convient au travail, on sera plus productif que si l'énergie de la journée est mieux adaptée aux loisirs. Chaque personne a un Way qui l'aide dans sa vie, attire son attention sur l'énergie d'une journée, et qui la guidera également dans l'au-delà à travers Xibalba.

Temple of The Ways, Chacchoben
Templo de las Vias, Chacchoben
Betsy Mark (CC BY-NC-SA)

Les Wayob apparaissent dans les rêves avec des messages du monde spirituel et, dans le rêve, on est amené au Wayib (le lieu du rêve) où l'on peut converser avec les dieux et les âmes des défunts. Le Templo de las Vias était peut-être une maison d'incubation, comme les anciens Égyptiens, où l'on se rendait pour trouver la solution à un problème.

À l'époque de l'Égypte ancienne, si une femme avait des difficultés à concevoir, elle se rendait dans une maison d'incubation du dieu de la fertilité Bès qui venait à sa rencontre et s'occupait du problème. De la même manière, un Maya pouvait se rendre au Templo de las Vias pour établir un contact plus clair avec son Way particulier et résoudre une difficulté ou recevoir un message sur l'avenir.

Chacchoben resta un important centre de pèlerinage même après l'abandon de la ville. Des brûle-parfums ont été découverts au Templo de las Vias lors de fouilles; ils dataient d'environ 950 à 1518, date à laquelle les explorateurs espagnols et leurs missionnaires arrivèrent pour la première fois. Bien qu'il n'existe aucune preuve de cette affirmation, il est possible que Chacchoben ait été un centre religieux aussi important que Tantun Cuzamil sur l'île de Couzumel, connue aujourd'hui sous le nom de San Gervasio, où la déesse Ix Chel s'adressait autrefois au peuple depuis sa statue.

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Tantun Cazumil était le lieu de pèlerinage le plus populaire à l'époque des anciens Mayas et cela est bien documenté. Malgré cela, les brûle-encens et autres objets trouvés à Chacchoben suggèrent fortement que le site avait une profonde importance religieuse pour les habitants des environs qui continuaient à faire des pèlerinages au moins dans ce temple bien longtemps après que la ville eut été abandonnée à la forêt et aux animaux sauvages. Ce site, par conséquent, aurait pu être tout aussi populaire, voire plus, que Tantun Cuzamil.

Découverte

Avec la colonisation européenne des Amériques à partir du XVIe siècle et la conversion des Mayas au christianisme qui en résulta, Chacchoben fut oublié et disparut sous les vignes, les arbres, la mousse entre autres formes de végétation. En 1942, un homme nommé Servilliano Cohuo, un Maya yucatèque, cherchait un endroit pour y établir une ferme. Il se rendit à la lisière de la jungle et se retrouva au milieu d'une ancienne villa cachée sous une végétation plus que centenaire. Cohuo défricha une partie du site, se construisit une maison, laboura la terre et démarra sa ferme. Il se maria et eut des enfants qui grandirent en jouant dans les ruines de leur arrière-cour.

Des années plus tard, en 1972, le Dr Peter Harrison, un archéologue américain, survolait la région en hélicoptère et remarqua quelque chose d'étrange dans la topographie au-dessous de lui: il y avait de grandes collines dans une région par ailleurs plate. Harrison partit explorer la zone et trouva Cohuo et sa famille. Cohuo était ravi de montrer le site à l'archéologue mais était incapable de lui dire quoi que ce soit à son sujet.

C'est Harrison qui, pour la première fois, data l'habitation humaine dans la zone environnante vers 1000 avant J.-C. et les premiers développements structurels du site vers 200 avant J.-C. Cohuo donna à Harrison la permission d'informer le gouvernement mexicain de l'existence des ruines et Harrison le fit, en demandant que Cohuo soit autorisé à rester dans sa ferme pour le restant de ses jours. Harrison effectua ensuite la première fouille professionnelle du site et le cartographia.

En 1978, Cohuo fut nommé gardien officiel de Chacchoben, alors que les fouilles continuaient de révéler des vestiges de la cité antique et attiraient les curieux. Il décéda en 1991 et, à sa mort, sa famille dut quitter sa maison et fut relogée à proximité. L'Institut national mexicain d'anthropologie et d'histoire a pris en charge les fouilles et la restauration du site en 1994.

Le site a été ouvert au public en 2002 et est devenu depuis une attraction touristique de plus en plus populaire. La signification de l'ancienne cité pour ses bâtisseurs reste inconnue car les magnifiques ruines qui se dressent dans la forêt mexicaine sont jusqu'à présent muettes à ce sujet, mais c'est précisément ce qui rend le site si attractif pour les touristes: les gens aiment le mystère et il existe peu de sites mayas aussi mystérieux que Chacchoben.

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Bibliographie

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Traducteur

Alex Nolk
Intern (Jan - March 2025) at WHE

Auteur

Joshua J. Mark
Joshua J. Mark est cofondateur et Directeur de Contenu de la World History Encyclopedia. Il était auparavant professeur au Marist College (NY) où il a enseigné l'histoire, la philosophie, la littérature et l'écriture. Il a beaucoup voyagé et a vécu en Grèce et en Allemagne.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2019, janvier 29). Chacchoben [Chacchoben]. (A. Nolk, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-17823/chacchoben/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Chacchoben." Traduit par Alex Nolk. World History Encyclopedia. modifié le janvier 29, 2019. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-17823/chacchoben/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Chacchoben." Traduit par Alex Nolk. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 29 janv. 2019. Web. 21 févr. 2025.

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