Un chérubin était un être divin qui vivait dans le royaume céleste des dieux, soit en tant que serviteur, soit en tant que médiateur entre les humains et le divin. Le mot est probablement dérivé de l'akkadien karabu ("bénir"). Les chérubins sont souvent associés à d'autres êtres connus sous le nom de séraphins qui gardaient et protégeaient les cours et les trônes des dieux. Au fil du temps, les chérubins et les séraphins ont été désignés sous le nom d'anges, du latin angelos ("messager").
Univers antique
Toutes les cultures anciennes avaient un concept d'univers à trois niveaux qui comprenait:
- les cieux - la demeure des dieux
- la terre - la demeure des humains
- le monde souterrain - le pays des morts.
Les cieux étaient densément peuplés de degrés de divinité, et un dieu supérieur, ou parfois un roi des dieux, régnait sur diverses divinités inférieures. Ces divinités inférieures avaient le pouvoir sur des éléments de la vie quotidienne, tels que l'agriculture et le processus de naissance (déesses-mères). Au niveau inférieur se trouvaient les démons qui étaient à l'origine neutres, mais que l'on a fini par accuser de faire le mal.
Toutes ces puissances étant supérieures aux humains, elles pouvaient influencer directement la vie des gens. Elles étaient également considérées comme transcendantes, ce qui signifie qu'elles avaient la capacité de naviguer dans les trois niveaux, y compris dans le pays des morts. Pour apaiser les puissances célestes et obtenir des avantages dans la vie quotidienne, les systèmes religieux anciens ont développé le concept des sacrifices.
Mésopotamie antique/Perse
Le territoire des deux bassins fluviaux du Tigre et de l'Euphrate, connu sous le nom de Mésopotamie, donna naissance aux premiers empires tels que les Akkadiens, les Hittites, les Assyriens, les Babyloniens et l'Empire perse. Les chérubins divins étaient représentés de manière anthropomorphique (à l'apparence humaine), grands et féroces pour inspirer la peur, avec en plus des casques de guerre et des ailes. Ils étaient également associés aux statues de griffons, des créatures ressemblant à des sphinx avec une tête humaine mais un corps de lion.
Chaque empire suivant absorba des traditions religieuses plus anciennes. Le culte d'État de la Perse était le zoroastrisme, qui affirmait que le dieu créateur originel, Ahura Mazda, émanait d'êtres jumelés dans l'univers qui étaient responsables de la création physique, les Amesha Spenta.
L'opposé polaire d'Ahura Mazda était le concept de druj (chaos), qui était sous le pouvoir d'Ahriman. Zoroastre enseignait que l'univers entier (y compris la vie sur terre) était une bataille constante entre ces forces du bien et du mal. Lorsque Babylone détruisit Jérusalem en 587 avant notre ère, les captifs juifs furent emmenés à Babylone, puis furent gouvernés par l'empire perse achéménide lorsque Cyrus II (r. environ 550-530 av. J.-C.) conquit les Babyloniens. Les Juifs empruntèrent de nombreuses idées antérieures, notamment le concept zoroastrien selon lequel chaque individu a un ange gardien (qui acquiert alors des ailes), tandis que la figure d'Ahriman est à l'origine de Satan, le diable.
Les Écritures juives
Les premiers niveaux de la littérature juive décrivent un être divin, le mal'ach ("messager"), qui apparaît sous une forme humaine. Bien que divins, ces messagers étaient toujours subordonnés à Dieu (Yahvé) et exécutaient sa volonté. Le terme chérubin apparaît 90 fois dans les Écritures juives. Ils sont souvent chargés de tâches spécifiques, telles que la garde de l'entrée du jardin d'Eden après l'expulsion d'Adam et Ève (Genèse 3:24). Au cours de la période connue sous le nom de judaïsme du Second Temple (de 450 av. J.-C. à 70 de notre ère), certains chérubins (et séraphins) reçurent des noms et furent élevés au rang d'archanges (Gabriel, Uriel, Michel). Dans Samuel 2:22 et le Psaume 18, ils aident à transporter Dieu lorsqu'il descend pour intervenir dans les affaires humaines sur terre.
Lorsque Moïse reçut les dix commandements sur le mont Sinaï, Dieu lui demanda de créer des images de chérubins pour construire l'arche d'alliance destinée à contenir les tablettes (Exode: 25:18-22). Dans toutes les représentations, deux chérubins sont assis au sommet de l'Arche, les ailes déployées. Ils étaient censés être sculptés dans l'or. Lorsque le roi Salomon fit construire le premier temple de Jérusalem (10e siècle av.J.-C.), cette iconographie était dominante dans le complexe du temple. Selon les traditions rabbiniques ultérieures, l'art apparaissait sur le rideau qui séparait le saint des saints (le tabernacle) du complexe plus vaste.
Cette période connut également le développement du concept du siège de miséricorde l'espace entre les chérubins, où l'on croyait que la présence physique et littérale de Dieu résidait dans le Temple, au-dessus des chérubins (1 Rois). Cette croyance s'associe à l'idée que la miséricorde peut être administrée par Dieu à la fois par le système sacrificiel et par sa présence. Il en résultait l'idée que le Temple était un espace sacré, nécessitant des états de pureté rituelle pour entrer dans les différentes zones.
La description la plus détaillée des chérubins se trouve dans le livre du prophète Ezéchiel (6e siècle av. J.-C.). Il s'agit d'un prêtre qui vécut l'exil juif à Babylone, où il avait déjà prophétisé la destruction du Temple et de Jérusalem par les Babyloniens (587 av. J.-C.). Sa description des chérubins les place sous le trône de Dieu:
Dans ma trentième année, le quatrième mois, le cinquième jour, alors que j'étais parmi les exilés près du fleuve Kebar, les cieux s'ouvrirent et j'eus des visions de Dieu ... Je regardai, et je vis une tempête de vent venant du nord, un immense nuage avec des éclairs et entouré d'une lumière brillante. Le centre du feu ressemblait à du métal incandescent et, dans le feu, il y avait ce qui ressemblait à quatre créatures vivantes. Leur apparence était humaine, mais chacun d'eux avait quatre visages et quatre ailes. Leurs jambes étaient droites; leurs pieds étaient comme ceux d'un veau et brillaient comme de l'airain bruni. Sous leurs ailes, de leurs quatre côtés, ils avaient des mains humaines. Tous les quatre avaient des faces et des ailes, et les ailes de l'un touchaient les ailes de l'autre. Chacun d'eux allait tout droit; ils ne se tournaient pas en avançant. Leurs visages ressemblaient à ceci: Chacun des quatre avait le visage d'un être humain, et sur le côté droit chacun avait le visage d'un lion, et sur le côté gauche le visage d'un bœuf; chacun avait aussi le visage d'un aigle. Tels étaient leurs visages. Ils avaient chacun deux ailes étendues vers le haut, chaque aile touchant celle de la créature de chaque côté; et chacun avait deux autres ailes qui couvraient son corps. (Ezéchiel 1:1-11)
Il est compréhensible que les artistes aient traditionnellement éprouvé des difficultés à représenter cette vision, avec ses mouvements simultanés. Les conceptions rabbiniques ultérieures du mysticisme de la Kabbale ont fourni beaucoup plus de détails sur ces chérubins dans un recueil de textes connu sous le nom de Zohar. Tous les chérubins sont nommés et décrits avec leurs domaines de domination.
Les chérubins dans le christianisme
Le terme "chérubin" n'apparaît pas dans le Nouveau Testament, mais il est inhérent au terme collectif "anges". Dans l'évangile de Matthieu, un ange apparaît plusieurs fois en rêve à Joseph. Ils protègent les justes (Matthieu 4:6) et sont des guerriers pour Dieu (26:53). Dans l'évangile de Luc, un ange apparaît au père de Jean-Baptiste, Zacharie, pour l'informer de la naissance d'un fils, et l'ange Gabriel apparaît à Marie pour lui annoncer la naissance de Jésus-Christ. Un chœur d'anges apparaît aux bergers dans les champs qui annoncent la bonne nouvelle. Dans les évangiles, Marc, Matthieu et Luc montrent des anges qui s'occupent de Jésus lorsqu'il est tenté dans le désert.
Dans sa parabole de l'homme riche et de Lazare, "le pauvre mourut et fut porté par les anges auprès d'Abraham" (Luc 16:22). Il s'agissait d'un concept dans lequel les divinités jouaient le rôle de psychopompe, de transporteur ou de conducteur d'âmes dans l'au-delà (comme le dieu Hermès dans la mythologie grecque). Marc, Matthieu et Luc montrent tous des anges sur la tombe de Jésus, et ce sont ces anges qui ont annoncé sa résurrection.
Les chrétiens ont adopté les concepts juifs de la hiérarchie de ces êtres dans le ciel, une hiérarchie céleste à neuf niveaux, mais avec les séraphins au plus haut niveau et les chérubins au second. Avec l'essor du culte des saints (les martyrs qui sont maintenant au ciel) au 4e siècle de notre ère, les anges et les saints peuvent agir en tant que médiateurs dans la cour de Dieu pour les croyants. Le théologien médiéval Thomas d'Aquin (1225-1274) affirmait que les séraphins étaient les plus zélés pour accomplir la volonté divine, tandis que les chérubins étaient associés à différents niveaux de connaissance.
L'islam et les religions non occidentales
Dans le texte sacré de l'islam, le Coran, les chérubins sont une classe d'anges dont la fonction première est de louer Dieu en permanence. Ils intercèdent également pour les humains. Les chérubins sont décrits comme habitant le sixième ciel ou autour du trône, où quatre d'entre eux sont porteurs du trône. Le prophète Mahomet (570-632) fit l'expérience d'un voyage extracorporel au paradis et décrivit différentes hiérarchies d'anges. Reprenant des éléments culturels/religieux, les divinités ont une apparence humaine, mais sont plus grandes et plus puissantes. La différence dans l'islam concernant ces êtres est que Mahomet enseigna que Dieu avait créé trois êtres sensibles capables de percevoir et de ressentir les choses: les djinns, les anges et les humains. Dans la mythologie arabe préislamique, les djinns étaient des puissances souvent rendues responsables des malheurs ou des maladies des humains. Les djinns et les humains disposaient d'un libre arbitre, ce qui n'était pas le cas des anges, qui étaient contraints d'exécuter la volonté divine.
De nombreuses autres cultures religieuses du monde ont des idées similaires concernant une diversité d'êtres divins qui habitent les cieux et servent de médiateurs dans le domaine humain. Les religions d'Asie, d'Afrique, d'Océanie et des Amériques se réclament d'êtres divins à la fois bienveillants et parfois malveillants. L'équivalent de la tradition occidentale des anges se trouve dans les devas de l'hindouisme, avatars de Brahma, Vishnu et Shiva. Les devas inférieurs contrôlent la nature.
Le Putto dans l'art de la Renaissance
Dans la tradition occidentale, l'iconographie la plus courante d'un chérubin est une œuvre d'art décrite en italien sous le nom de putto (pl. putti), un garçon nu et joufflu, souvent représenté avec des ailes. Ils étaient associés à Éros, le fils d'Aphrodite. Éros signifiait "désir", les besoins physiques du corps, et il jouait un rôle populaire dans la romance et l'amour, en lançant ses flèches qui motivaient le principe de procréation et le fait de tomber amoureux. Éros est devenu Cupidon dans la religion romaine. La figure du putto était souvent sculptée sur les sarcophages d'enfants où ils étaient représentés en train de danser et de jouer.
Au cours de la période connue sous le nom de Renaissance (XIVe-XVIIe siècle), les Européens redécouvrirent la philosophie, la littérature et l'art classiques. Cette période coïncide avec les premières découvertes de tombes et les fouilles de villas et de monuments plus anciens, où ces figures étaient populaires comme décorations murales, comme à Pompéi. La renaissance du putto est attribuée à Donatello (1386-1466) dans les années 1420, puis à Raphaël (1483-1520). La Madone Sixtine de Raphaël comporte deux chérubins en bas, très populaires dans la commercialisation de ces personnages. Cela reflète l'association moderne du Cupidon romain avec la fête de la Saint-Valentin. Ces chérubins ont parcouru un long chemin depuis les représentations des féroces gardiens des dieux jusqu'aux concepts mignons, charmants et espiègles de l'amour.