Bérénice II (C. 267-221 av. J.-C.) était une reine hellénistique de premier plan, qui régna avec son mari Ptolémée III Evergète (r. de 246 à 221 av. J.-C.), lorsque le royaume ptolémaïque était à l'apogée de sa puissance, dominant la plus grande partie de la Méditerranée orientale. Avant même son mariage avec Ptolémée III, elle s'était révélée être une jeune femme affirmée à Cyrène, sa ville natale. À Alexandrie, elle assura la régence en l'absence de son mari et dirigea une procession religieuse, à la suite de laquelle son nom fut donné à l'une des constellations canoniques. Son épithète, Evergète, la désigne comme "bienfaitrice" en remerciement de sa générosité. Bérénice fut donc reine à un moment important de l'histoire hellénistique et l'une des figures marquantes de la royauté hellénistique.
Bérénice, fille du dynaste macédonien Magas et de son épouse séleucide Apama, vit le jour à Cyrène, ville grecque de Libye. Ptolémée Ier avait installé Magas, fils de quatrième épouse Bérénice Ire, né d'un précédent mariage, au poste de gouverneur de la Cyrénaïque (la région côtière septentrionale de la Libye). Magas finit par obtenir une certaine indépendance vis-à-vis de la souveraineté ptolémaïque, mais il devait néanmoins reconnaître leur suzeraineté. Il fiança sa fille au fils et héritier de Ptolémée II en guise d'assurance diplomatique et dynastique. Sa femme Apama, à moitié perse, était la fille d'Antiochos Ier et de Stratonice. Après sa mort (vers 252/1 av. J.-C.), la veuve de Magas maria Bérénice au prince macédonien Démétrios Kalos - qui, cependant, offensa les soldats de l'armée cyrénéenne et fut assassiné dans la chambre à coucher d'Apama. La question de savoir si ce flagrant délit n'était en fait qu'un complot organisé par Bérénice en tandem avec sa mère reste un mystère. Cyrène tenta brièvement d'établir une république (vers 250/49-249/8 av. J.-C.).
Reine et régente à Alexandrie
Après cet intermède à Cyrène, Bérénice se réaligna sur l'Égypte et renouvela ses engagements matrimoniaux envers Ptolémée III. Après la mort naturelle de Ptolémée II (vers janvier 246 av. J.-C.), son fils accéda au trône, Bérénice le rejoignit à Alexandrie et ils se marièrent officiellement. Il avait 37 ans; elle venait d'en avoir 20. Environ six mois plus tard, le roi séleucide Antiochos II mourut et la succession était confuse: ses deux reines rivales, Laodicé et Bérénice (sœur de Ptolémée III), proclamèrent leurs fils respectifs comme héritiers du trône. Décidant d'intervenir en faveur de sa sœur, Ptolémée III envahit la Phénicie et la Syrie, déclenchant ainsi ce que les spécialistes modernes ont appelé la troisième guerre de Syrie (c. oct. 246 - mars 245 av. J.-C.). Peu après la mort de sa sœur dans une intrigue de palais (vers novembre 246), le roi ptolémaïque entra en Mésopotamie et assiégea Babylone, la capitale séleucide (janvier 245 av. J.-C.).
Pendant ce temps, en Égypte, Bérénice II régnait en tant que reine régente à la tête de la cour royale en l'absence de son mari. Les faibles inondations saisonnières laissaient présager de mauvaises récoltes et donc un risque de pénurie alimentaire peu de temps après. Au milieu de ces troubles, Bérénice donna naissance à une fille, Arsinoé III (vers novembre 246 av. J.-C.), plutôt qu'à un prince héritier tant désiré. La reine atténua la menace de famine en distribuant gratuitement des céréales importées. Certaines des plus grandes et des plus belles pièces de monnaie jamais frappées dans l'Antiquité, émises en son nom et portant son portrait, peuvent être associées à cette période critique. Elles représentent un buste voilé aux traits très individualisés, avec une coiffure dite "en melon", tirée en chignon et attachée par un filet royal. Bien qu'individualisés - et à la base de l'attribution de portraits sculptés - ces portraits sur pièces ne doivent pas être considérés comme fidèlement réalistes. L'œil anormalement globuleux, par exemple, exprime plutôt l'autorité divine de la reine.
Bérénice organisa une cérémonie publique, menant une procession d'Alexandrie au cap Zéphyrion, un promontoire sur la côte près de l'embouchure de la branche canopique du Nil. Là, elle fit un sacrifice au temple d'Arsinoé Zéphyrite, c'est-à-dire le prédécesseur divinisé de Bérénice, Arsinoé II, religieusement identifiée à la déesse Aphrodite. Elle offrit à sa "mère" une mèche de cheveux dans l'espoir que le roi revienne sain et sauf. C'est alors que les événements prirent une tournure curieuse. Selon la tradition, le lendemain, les prêtres du temple auraient constaté que la mèche de cheveux avait disparu et auraient suggèré que le vent l'avait emportée. Quelque temps plus tard, le mathématicien et astronome Conon affirma avoir redécouvert la mèche sous la forme d'une nouvelle constellation dans le ciel nocturne - entre le Lion et la Vierge, le Bouvier et la Grande Ourse. Il est impossible de déterminer si la disparition de la mèche de cheveux de la reine était prévue dans le cadre de la cérémonie ou non.
Le rôle de reine dans l'Égypte ptolémaïque
Les sources littéraires fournissent rarement plus que des informations biographiques de base sur les femmes, même sur les puissantes reines de la période hellénistique. Parmi les quatre épouses de Ptolémée Ier, seule l'influence de Bérénice Ire fut notée par les historiographes antiques. La position de la reine ptolémaïque changea radicalement lorsque Ptolémée II épousa sa seconde femme (et sœur) Arsinoé II. Ils furent divinisés en tant que Theoi Adelphoi ("Dieux de la fratrie"); elle reçut un culte à vie sous l'épithète Philadelphos ("qui aime son frère"), qui persista pendant des générations après sa mort. Leurs parents, Ptolémée Ier et Bérénice Ier, étaient également vénérés, tout comme Alexandre le Grand, qui devint en quelque sorte le fondateur de la dynastie.
Bien que Ptolémée III et Bérénice II aient été cousins (puisqu'ils partageaient la même grand-mère, Bérénice Ire), ils se proclamaient frères et sœurs en tant qu'enfants de Ptolémée II et d'Arsinoé II, peut-être à partir de leur mariage - ou du moins depuis la cérémonie au cap Zéphyrion. Ptolémée III était en fait le fils de la première Arsinoé (la première épouse en disgrâce de Ptolémée II). Ils contestèrent donc trois de leurs quatre parents afin d'adhérer à l'idéologie de l'inceste fraternel instaurée par Ptolémée II et Arsinoé II. L'inceste royal devint la norme, puisque seul Ptolémée V (qui n'avait pas de sœur) n'épousa pas sa plus proche parente (même si son épouse Cléopâtre Ire était encore sa cousine). Il est certain qu'aucune anomalie génétique ou congénitale n'est connue parmi les membres de la dynastie ptolémaïque (ce qui signifie qu'aucune mutation récessive ne fut transmise d'une génération à l'autre).
Grâce aux mariages incestueux, parfois fictifs, les Ptolémées pouvaient se présenter comme les descendants d'une lignée ininterrompue des deux côtés, légitimant ainsi leur règne deux fois plus. En outre, le mariage entre frères et sœurs était assimilé au mariage sacré de Zeus et Héra, et d'Isis et Osiris, déifiant ainsi le couple royal. Des temples furent construits avec des statues de culte, des prêtrises furent créées, des festivals avec des processions furent célébrés en l'honneur du roi et de la reine vivants. Les cruches à vin en faïence (imitations moins coûteuses de vases en argent doré) utilisées dans le culte ptolémaïque montrent Bérénice avec une corne d'abondance et un bol à libations apportant une offrande sur l'autel crénelé des Theoi Euergetoi ("Dieux bienfaiteurs"), l'épithète cultuelle donnée à elle et à son mari. Le règne du frère et de la sœur présentait en outre le roi et la reine comme étant égaux, régnant conjointement en tant que souverains divins en Égypte et au-delà.
Représentation dans l'art hellénistique
Sur l'un des reliefs de l'impressionnante porte du temple de Khonsou à Thèbes (Karnak), Ptolémée III et Bérénice II apparaissent du côté divin (et non mortel), recevant des millions d'années de règne de la part du dieu faucon Khonsou. Le roi porte un costume pharaonique traditionnel; la reine apparaît dans une robe de cérémonie enroulée sur son épaule et nouée entre ses seins. Leur divinité est donc affichée sur l'un des sites religieux les plus anciens et les plus importants d'Égypte, qui pourrait remonter à l'Ancien Empire. Cette scène est l'un des nombreux exemples par lesquels les Ptolémées manifestèrent leur soutien aux traditions et aux coutumes égyptiennes, à la religion et aux cultes, aux temples et aux prêtrises. La place prépondérante de la reine est cependant sans précédent.
Outre les statues et les reliefs, les vases et les pièces de monnaie, Bérénice est également représentée sur des mosaïques de sol (qui sont peut-être des reproductions de peintures murales). Sur l'une d'entre elles (illustrée en tête de cet article), découverte à Thmuis (l'actuelle Tell el-Timai) dans le Delta oriental, Bérénice II est représentée avec un visage corpulent et des yeux globuleux largement ouverts; elle porte des pendants d'oreille et un collier raffiné, une tunique sous une armure, par-dessus laquelle se trouve un manteau fixé par une broche sur l'épaule droite. La reine porte également un bouclier sur le dos; derrière son épaule gauche se trouve une vergue d'où s'échappent les extrémités d'un filet royal. Plus intéressant encore, elle est couronnée d'une proue de navire décorée de dauphins et de serpents marins, de bâtons de héraut et de cornes d'abondance. Bérénice est ainsi présentée comme la personnification des prouesses militaires et navales des Ptolémées.
La mèche de cheveux que la reine aurait offerte à sa "mère" Arsinoé-Aphrodite traversa les siècles. Le poète alexandrin Callimaque (Frag. 110) et plus tard le poète romain Catulle (Poème 66) immortalisèrent cette offrande cérémonielle. Pour les artistes de la Renaissance, Bérénice II était un sujet très apprécié dans les arts visuels comme dans les pièces de théâtre - et elle le resta pendant des siècles. En effet, sa mèche de cheveux (Coma Berenices) est l'une des constellations canoniques, et la seule qui porte le nom d'un être humain.
Une version de cet article a été initialement publiée sur AncientWorldMagazine.com.