Wako

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 12 juin 2019
Disponible dans ces autres langues: anglais, Turc
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Wako & Chinese Naval Battle (by Unknown Artist, Public Domain)
Bataille navale entre Chine et Wako
Unknown Artist (Public Domain)

Wako (alias wokou et waegu) est un terme utilisé pour désigner les pirates japonais (mais aussi chinois, coréens et portugais) qui sévissaient sur les mers d'Asie orientale, de la Corée à l'Indonésie, en particulier entre le 13e et le 17e siècle. Outre la perturbation du commerce, la dévastation des communautés côtières et les milliers d'innocents vendus comme esclaves, les pirates provoquèrent des tensions importantes dans les relations diplomatiques entre la Chine, la Corée et le Japon tout au long de cette période. En effet, les pirates entachèrent sérieusement entaché la réputation du Japon aux yeux de ses voisins d'Asie de l'Est à l'époque médiévale. Ce n'est qu'après l'unification du Japon central par le seigneur de la guerre Toyotomi Hideyoshi (1582-1598) que le gouvernement finit par être assez fort pour s'attaquer efficacement au fléau des pirates et mettre fin à leur règne de terreur.

La piraterie en haute mer

Wako se traduit par "pirates nains" et, bien que nombre d'entre eux aient été originaires du Japon, le terme s'appliquait également à tous les marins louches en haute mer. Il pouvait donc s'agir de pirates basés sur les côtes de Corée, de Taïwan et de Chine, ainsi que d'aventuriers portugais, pour n'en citer que quelques-uns. Il est même prouvé que certains pirates se déguisaient en Japonais pour ne pas être repérés. Les Chinois appelaient ces pirates wokou et les Coréens waegu. Les pirates pillaient les navires dans toute l'Asie de l'Est depuis au moins le 8e siècle, mais c'est à partir du 13e siècle que les wako atteignirent de nouveaux sommets de rapine, aidés par la perturbation du commerce maritime légitime qui suivit les invasions mongoles de la Corée entre 1231 et 1259.

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Le repaire de pirates le plus connu était l'île japonaise de Tsushima, où il y avait de nombreuses criques facilement défendues.

Le repaire de pirates le plus connu était l'île japonaise de Tsushima (qui possédait également des ports légitimes), où il y avait de nombreuses criques facilement défendues. L'île étant rocheuse et montagneuse, les habitants avaient du mal à se nourrir tandis que les seigneurs féodaux locaux, les So, s'enrichissaient en parrainant les maraudeurs qui s'emparaient des marchandises en haute mer. D'autres bases de pirates importantes au Japon se trouvaient sur l'île d'Iki et à Matsura.

À leur apogée, au XIVe siècle, des centaines de navires pirates sillonnaient les détroits entre la Corée et le sud du Japon et effectuaient chaque année quatre ou cinq raids majeurs sur la péninsule sud-coréenne. De nombreux pirates se faisaient même un devoir de piller les navires et les ports côtiers de la partie occidentale de la péninsule coréenne, jusqu'à l'île septentrionale de Kanghwa. Aux 15e et 16e siècles, la côte chinoise devint une autre zone cible. Les pirates volaient tout ce qui avait de la valeur (métaux précieux, épées, armures, laques, etc.), mais surtout les marchandises en vrac, comme les tissus, les céréales et le riz, qui étaient expédiés comme tribut à l'empereur chinois.

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Les pirates attaquaient les ports et les établissements côtiers avec des flottes comptant jusqu'à 400 navires transportant des groupes de 3 000 hommes. Bien qu'ils n'aient été que légèrement armés - l'arme préférée étant l'épée - ils formaient des armées disciplinées et rencontraient peu d'opposition organisée. Comme les wako capturaient souvent des innocents pour les vendre comme esclaves à des seigneurs féodaux ou à des marchands d'esclaves portugais, de nombreuses communautés agricoles se retirèrent plus loin dans les terres, même si cela signifiait que les meilleures terres agricoles étaient abandonnées. Les risques encourus par les wako, outre une défense vigoureuse par les propriétaires légitimes, comprenaient l'exécution s'ils étaient pris par les autorités en Chine, en Corée ou au Japon.

Wako Raids During the 16th century CE
Raids wako au 16ème siècle
Yu Ninjie (CC BY-SA)

Identité

L'une des difficultés pour les autorités médiévales (et les historiens modernes) était d'identifier qui étaient exactement les wako. Les pirates s'engageaient parfois dans le commerce légitime et, sans doute, certains commerçants se livraient-ils à des actes de piraterie occasionnels. Les pirates avisés s'emparaient également de documents officiels tels que les concordes de la dynastie Ming (1368-1644), ou kango , qui étaient conçus pour montrer que le navire était un commerçant légitime ou un transporteur de tribut. Une partie du problème résidait également dans le fait que les pirates profitaient du déclin des relations commerciales légitimes entre la Chine, la Corée et le Japon, ce qui se produisait fréquemment à partir du 12e siècle, en fonction des événements internes de chaque pays. Dans ce cas, certains seigneurs féodaux des trois pays n'hésitaient pas à soutenir les pirates comme moyen d'augmenter leurs propres revenus. Il est également vrai que de nombreux wako, peut-être même la majorité au XVIe siècle, étaient chinois, beaucoup d'entre eux étant d'anciens commerçants mécontents des restrictions internes et des taxes sur le commerce imposées par le gouvernement Ming. La Corée avait également sa propre part de pirates indigènes et un autre groupe notable était constitué de commerçants portugais qui collaboraient souvent avec les pirates afin de faire entrer clandestinement leurs marchandises en Chine.

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La réponse coréenne

Au XIVe siècle, les Coréens rassemblèrent une flotte de navires armés de canons pour faire face au fléau des pirates. Une victoire notable fut attribuée à Choe Muson (m. 1395) contre une grande flotte de pirates à l'embouchure de la rivière Kum en 1380. Lors de cette bataille, Choe Muson put utiliser des canons grâce à ses efforts inlassables pour développer la poudre à canon. Cependant, malgré plusieurs autres victoires de la marine coréenne au fil des ans, notamment des attaques directes sur l'île de Tsushima en 1389 et à nouveau en 1419, où 700 pirates présumés furent exécutés, les maraudeurs ne purent être complètement éradiqués. Le gouvernement coréen imposa des peines sévères, y compris l'exécution, pour ceux qui étaient pris en train de collaborer avec les pirates, mais ils avaient besoin que le gouvernement japonais fasse plus de leur côté, et ils envoyèrent plusieurs ambassades à la cour japonaise dans ce but précis.

Chinese Junk Ship
Jonque chinoise
National Maritime Museum, Greenwich (CC BY-NC-ND)

La réponse chinoise

Les pirates causèrent suffisamment de problèmes aux Chinois pour justifier trois missions diplomatiques distinctes à la cour japonaise afin de voir ce qui pouvait être fait à leur sujet. Comme pour les missions coréennes, cependant, le véritable problème était que les Japonais n'avaient que peu de contrôle sur les repaires des pirates, même si les Chinois commencèrent à insister sur le fait que les accords commerciaux entre eux et le Japon dépendraient des efforts de ce dernier pour garder les pirates sous contrôle. Puis, comme on l'a vu, les pirates chinois se multiplièrent, ce qui ne fit qu'ajouter au problème de la sécurisation des mers pour les navires de commerce légitimes. Plusieurs groupes de pirates remportèrent même des batailles contre les armées Ming envoyées pour les démanteler. L'empereur Yongle (r. de 1403 à 1424) de la dynastie Ming exprima la frustration de tous lorsqu'il déclara :

Les navires ne pouvaient pas les atteindre facilement, pas plus que les lances ou les flèches ne pouvaient les toucher facilement. Nous ne pouvions pas les déloger en leur accordant des avantages, ni les impressionner en les pressant de notre force.

(Huffman, 50-1)

Conscients de la difficulté de patrouiller constamment dans de vastes zones maritimes et de déloger les pirates de leurs bases bien protégées, les Chinois préféraient largement une politique de défense robuste. En conséquence, des forts furent construits le long des zones côtières les plus vulnérables et tout commerce maritime fut interdit. En fait, tout navire non officiel pouvait désormais être considéré un bateau pirate. Au milieu du 16e siècle, une action encore plus déterminée fut entreprise contre les pirates. Les Chinois réformèrent leur système fiscal et, au lieu du service militaire, le paiement pouvait être effectué en argent. Grâce à ces recettes, une force navale défensive fut constituée pour patrouiller la côte et couler tous les pirates qu'elle rencontrait. En conséquence, de sérieuses défaites furent infligées aux pirates par les forces dirigées par deux généraux Ming réputés, Hu Tsung-hsien (mort en 1565) et Chi Chi-kuang (mort en 1587), et la capture du chef pirate le plus recherché, Wang Chih, en 1557.

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Map of Japan in the 16th Century CE
Carte du Japon au 16ème siècle
Zakuragi (CC BY-NC-SA)

La réponse japonaise

Au XIVe siècle, la faiblesse du gouvernement central, qui ne contrôlait pas encore toutes les îles du Japon, signifiait que les autorités ne pouvaient pas faire grand-chose pour contrôler la piraterie, même lorsqu'elles étaient sollicitées par les ambassades des pays voisins, à commencer par celle de la Corée en 1367.

En 1443, les gouvernements japonais et coréens finirent par se réunir et signèrent le traité de Kyehae, qui visait à légitimer le commerce entre les deux pays, en particulier entre l'île de Tsushima et les ports coréens de Tonnae, Ungchon et Ulsan, supprimant ainsi une partie des revenus des pirates. Malheureusement, le traité fut mis en pièces en 1510 suite à des troubles causés par des commerçants japonais dans les trois ports coréens. Un nouvel accord, mais de portée beaucoup plus limitée, fut rédigé deux ans plus tard. Ce traité édulcoré fonctionna pendant un certain temps, mais les pirates revinrent attaquer les ports coréens lors d'une grande offensive en 1544.

À la fin du XVIe siècle, les wako basés au Japon étaient sur le point de recevoir leur châtiment. Toyotomi Hideyoshi, chef militaire du Japon de 1582 à 1598, était déterminé à éradiquer la piraterie. Grâce à l'unification du Japon central, il avait désormais les moyens d'attaquer les wako. Pragmatique, Hideyoshi utilisa également de nombreux pirates pour son propre usage, en autorisant leurs navires à commercer légalement à partir de 1592, à condition qu'ils portent son sceau rouge personnel, d'où leur nom commun de shuin-sen ou "navires à sceau rouge". La même politique fut appliquée par son successeur Tokugawa Ieyasu (r. de 1603 à 1605). Enfin, les mers de l'Asie de l'Est avaient été (presque) libérées des pirates, mais le mal à la réputation internationale du Japon était déjà fait, et ce sera Hideyoshi en personne qui l'aggraverait davantage en attaquant la Corée entre 1592 et 1598, une invasion qui comprendrait les anciens wako et leurs navires.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2019, juin 12). Wako [Wako]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-18328/wako/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Wako." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le juin 12, 2019. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-18328/wako/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Wako." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 12 juin 2019. Web. 20 nov. 2024.

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