Jean Cabot (John Cabot ou Giovanni Caboto, c. 1450 - c. 1498 EC) était un explorateur italien qui visita la côte est du Canada en 1497 et 1498 EC à bord de son navire le Mathew (également épelé Matthew). Parrainé par Henri VII d'Angleterre (r. 1485-1509) pour chercher une route maritime vers l'Asie, les expéditions de Cabot « découvrent » ce que l'italien appelait «Newe Founde Launde» (Terre Neuve). Cabot fut probablement le premier Européen depuis les Vikings à débarquer et à explorer l'Amérique du Nord. Incapable de trouver un passage depuis ce continent vers l'Asie, Cabot soit mourut lors de son deuxième voyage, soit retourna en Angleterre et replongea dans l'anonymat vers 1500 EC; les raisons de sa disparition, d'une façon ou d'une autre, restent un mystère.
Homme mystérieux
La vie de John Cabot est entourée de mystère et de confusion. Nous ne connaissons pas la date ou le lieu précis de sa naissance. Nous ne savons même pas comment épeler son nom correctement - les variations incluent Chabotto, Gaboto, Caboto, Talbot et, bien sûr, le Cabot anglicisé. Même ce que lui-même utilisait comme prénom tout au long de sa vie est contesté; les possibilités incluent John, Giovanni, Joanes, Johannes, Juan, Zuan, Zuam et Zoane (toutes les variantes du même nom dans différentes langues). Où exactement il partit naviguer, où il toucha terre pour la première fois, et comment il mourut sont encore plus de points d'incertitude. L'explorateur ne laissa aucun document écrit, et il n'y a pas de portraits contemporains qui subsistent de lui. Même les cartes et les exploits de Cabot, obtenus par dur labeur et expérience, furent très vite perdus et oubliés à l'époque des Tudors. Jean Cabot est l'exemple même que, pour entrer dans la postérité de façon précise, il faut avoir la chance d'attirer l'attention d'un historien et mémorialiste quasi-contemporain pour lui raconter sa vie en détail. Cabot n'avait pas eu cette chance. Heureusement pour nous, outre d'autres experts passés et présents, le projet international et collaboratif Cabot du Département d'histoire de l'Université de Bristol est inlassable dans ses recherches pour chercher à comprendre qui était John Cabot et quels furent vraiment ses exploits.
Enfance
Nous savons que Cabot est né en Italie vers 1450, et Gênes est la ville la plus souvent citée comme lieu de naissance. Il vécut à Venise, y travailla comme commerçant et devint citoyen de cette puissance maritime en 1476. Cabot prit ses concurrents de vitesse en se rendant directement à La Mecque et aux postes de commerce établis tout autour par voie terrestre au lieu d'échanger les marchandises venues d'orient à Alexandrie, en Égypte comme de coutume. Nous savons que Cabot épousa une Vénitienne appelé Mattea et eut trois fils: Ludovico (écrit « Lewes » dans les documents anglais), Sebastiano et Sancio.
Cabot semble alors avoir eu quelques difficultés financières et a peut-être fui Venise pour cette raison. Déjà ambitieux d'explorer l'océan Atlantique et ayant désespérément besoin de riches mécènes, Cabot passa un certain temps en Espagne au début des années 1490, résidant à Valence et à Séville. Dans cette dernière ville, il participa à une opération de construction de ponts qui fut aussi infructueuse que ses tentatives de trouver des bailleurs de fonds pour le voyage qu'il proposait.
Toujours impliqué dans le commerce et peut-être dans une autre tentative d'éliminer les intermédiaires inutiles, Cabot s'installa en Angleterre vers le milieu des années 1490. Cabot rejoignit la communauté des Vénitiens qui avait pris résidence permanente à Bristol, port le plus animé d'Angleterre à l'époque. Bristol, comme Venise, était un autre endroit riche en histoire maritime et des pêcheurs et des explorateurs intrépides avaient déjà pris la mer de cet endroit pour se rendre en Islande et au Groenland à la recherche de plus grandes prises de pêche. Cabot mourait d'envie de suivre leurs traces et de naviguer encore plus loin au-delà de l'horizon occidental. Comme la plupart des navigateurs de l'époque, Cabot croyait qu'en traversant l'Atlantique Nord, il pourrait bien trouver ce qui deviendrait plus tard connu sous le nom de passage du Nord-Ouest vers l'Asie et plus particulièrement les Indes orientales avec ses produits exotiques lucratifs comme la soie et les épices. Cette route serait beaucoup plus courte et plus sûre que toute autre alternative connue à l'époque. Cabot était convaincu que Christophe Colomb (1451-1506 EC) n'avait rien découvert de plus important que quelques îles mineures lors de son voyage de 1492. Tous ignoraient encore qu'un continent massif se situait entre l'Europe et l'Asie. Cabot croyait que la meilleure route maritime vers l'Asie était beaucoup plus au nord que ce que Colomb avait exploré et que c'était là qu'il irait naviguer.
Premier voyage dans les Amériques
Cabot semble s'être installé à Londres, vivant de nouveau avec la communauté vénitienne dans cette ville. Il proposa ensuite à Henri VII un voyage en Amérique du Nord et le roi anglais lui accorda une licence en 1496. Le monarque décrit l'italien comme « notre bien-aimé John Cabot, citoyen de Venise » (Hale, 65). Le but était non seulement de trouver le passage du Nord-Ouest, mais aussi de rechercher de nouvelles terres que les Européens ne connaissaient pas encore et d'établir le commerce avec tous les peuples autochtones que Cabot pourrait rencontrer; Henri recevrait un pourcentage de 20% des bénéfices de ce commerce. Malgré ce soutien royal, l'expédition fut financée en grande partie par une banque italienne à Londres qui espérait probablement obtenir un profit équivalent à la fin du voyage. Les marchands de Bristol furent également probablement impliqués compte tenu du libellé de la licence royale d'Henri VII.
Cabot partit pour la première fois le 2 mai 1496, mais une série de très fortes bourrasques mirent fin à l'expédition et forcèrent son navire à rentrer au port de Bristol faute de provisions. Nullement découragé, Cabot partit de nouveau le 20 mai 1497 à bord de son navire le Mathew, une caravelle à trois mâts de 24 mètres de longueur (78 pi). Le Mathew, pesant près de 50 tonnes, n'avait pas été spécialement conçu pour l'expédition et avait déjà servi dans le commerce maritime (et le ferait de nouveau après le voyage de Cabot). Les navires de type caravelle étaient légers, rapides, manoeuvrables et ne nécessitaient pas un grand équipage, ce qui en faisait un choix idéal pour l'exploration en eaux inconnues.
Il traversa l'Atlantique au cours des cinq semaines suivantes, il atteignit probablement ce qui est aujourd'hui l'île du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, le 24 juin 1497. Cabot navigua ensuite vers le nord, explorant le littoral de ce qu'il appelait « Newe Founde Launde », qui est l'origine de Terre-Neuve dans l'est du Canada. Cependant, le premier point de débarquement de l'explorateur, les arrêts subséquents et la route côtière précise ne sont pas connus et beaucoup contestés par les historiens. Cabot lui-même pensait avoir atteint la côte est de l'Asie, probablement le Japon, alors connu sous le nom de Cipango. Peu importe où il pensait être, il était le premier Européen en Amérique du Nord depuis les Vikings. L'explorateur débarqua sur la terre ferme et planta une croix pour marquer l'événement. Il déploya ensuite la bannière royale d'Henri VII, et les bannières du pape et de saint Marc de Venise. Il y avait des preuves évidentes de peuples autochtones vivant dans cette région, comme de vieux feux de camp, des outils simples et des gravures sur les arbres, mais il ne les vit pas en personne.
C'est dans ces eaux que Cabot nota l'abondance de morue, découverte qui serait bientôt exploitée par les flottilles françaises et anglaises (mais qui était déjà familière aux pêcheurs portugais et bretons). L'explorateur rentra alors rapidement à bon port grâce à des vents favorables, débarquant à Bristol le 6 août. La nouvelle de grandes bancs de morue fut aussitôt annoncée, car les marins de retour se vantèrent à leurs collègues sur les quais qu'ils « rapporteraient tellement de poissons qu'ils n'auraient plus besoin de l'Islande » (Williams, 14). Pendant ce temps, Cabot rapporta à Henri VII qu'il avait découvert l'extrême côte ouest de l'Asie, ce qui semblait opportun pour une courte traversée vers ce continent qui pourrait être exploitée à des fins commerciales. Le roi anglais était notoirement prudent avec ses fonds, et il accorda à Cabot, comme l'indiquent les archives royales, la somme dérisoire de £10 pour son exploit (mais encore environ un an de salaire pour un artisan à l'époque). Peut-être se sentant un peu coupable d'avarice, d'autant plus que les ambassadeurs étrangers à la cour étaient tous en effervescence à la nouvelle que l'Angleterre avait des droits sur une nouvelle terre en Amérique du Nord, Henri accorda plus tard à Cabot une pension annuelle de £20.
Deuxième voyage aux Amériques
Cabot était maintenant en mesure de démontrer aux investisseurs le potentiel de sa découverte et il organisa donc un deuxième voyage. Celui-ci était plus une entreprise commerciale avec un consortium de marchands anglais qui constituèrent une flotte de cinq navires et les remplirent de marchandises commerciales. Le roi s'impliqua également de nouveau et approvisionna l'un des navires. Cette fois, un certain nombre de frères italiens suivirent comme missionnaires, dont un certain Giovanni de Carbonariis. Cabot quitta de nouveau Bristol en 1498, s'arrêtant peut-être au Groenland (bien qu'il ne s'agisse que d'une pure légende) pour rejoindre Terre-Neuve, peut-être même explorant aussi loin au sud que la baie de Chesapeake (dans le Maryland et la Virginie, États-Unis) ou même les Caraïbes.
C'est lors de ce deuxième voyage que Cabot mourut peut-être, mais les circonstances précises de son décès ne sont pas connues, seulement qu'il disparut complètement de l'Histoire. Certains spécialistes modernes, notamment l'un des plus éminents experts sur John Cabot, Alwyn Ruddock, ont suggéré que Cabot serait retourné en Angleterre vers 1500 EC, mais qu'il disparut ensuite des archives historiques parce que son deuxième voyage avait été un échec commercial et/ou son incursion dans les Caraïbes alors sous contrôle espagnol étaient une source d'embarras que les autorités anglaises voulaient étouffer. Les archives indiquent que la pension de Cabot fut payée en 1498 et 1499 EC, mais bien sûr, cette pension avait peut-être été versée à sa veuve. La fin de Cabot est donc un mystère, et aggravée par un second: la décision incompréhensible de Ruddock, qui préparait un livre sur Cabot depuis plus de 20 ans, de faire détruire toutes ses recherches inédites suite à sa mort en 2005.
Héritage
Une petite entreprise privée ne réussit pas à partir de Bristol et à suivre les pas de Cabot, et il y eut donc une longue pause dans les exploits maritimes de l'Angleterre qui dura pendant la totalité des règnes des trois successeurs d'Henri VII. Les revendications de l'Angleterre sur le territoire des Amériques établies par Cabot ne seront pas poursuivies avant le règne d'Élisabeth Ière d'Angleterre (r. 1558-1603 EC), plus précisément à partir des années 1570. Cependant, le virus des voyages que l'explorateur Cabot avait relâché avait finalement contaminé de nombreux nouveaux explorateurs anglais à l'époque élisabéthaine et au-delà. Les voyages de Cabot suscitèrent en particulier un plus grand intérêt pour la recherche du passage du Nord-Ouest, notamment les trois expéditions de Martin Frobisher (c. 1535-1594) entre 1576 et 1578.
Un autre héritage de Jean Cabot fut les aventures de son fils Sebastian Cabot (1474-1557) qui avait accompagné son père dans le Nouveau Monde. Sebastian explora ensuite Terre-Neuve en 1508-1509, avec le soutien d'autres monarques d'Europe continentale, les côtes du Brésil et la rivière Plate entre 1526 et 1530. Sebastian Cabot retourna ensuite en Angleterre et prit la tête de plusieurs expéditions commerciales en Russie dans les années 1550.
Une réplique grandeur réelle du Mathew de Jean Cabot a été construite en Angleterre en 1996 pour marquer le 500e anniversaire du premier voyage de l'explorateur. Le navire est amarré en permanence au port de Bristol, mais effectue parfois des sorties vers d'autres ports. Enfin, comme nous l'avons mentionné plus haut, le projet Cabot de l'Université de Bristol continue de mener des recherches sur la vie et les voyages de Jean Cabot, ainsi que sur celle de Sebastian Cabot et d'autres navigateurs de renom qui ont pris le large depuis Bristol aux XVe et XVIe siècles de notre ère.