Marie Stewart fut reine d'Écosse (r. de 1542 à 1567) et brièvement de France (r. 1559-1560). Obligée de fuir l'Écosse, la reine fut emprisonnée pendant 19 ans par Élisabeth I d'Angleterre (r. de 1558 à 1603) et finalement exécutée pour trahison le 8 février 1587.
Élevée en France, puis mariée à l'héritier du trône de France, Marie vit son univers bouleversé lorsque son mari François II mourut en 1560, un an après le début de son règne. La reine retourna en Écosse, mais ses opinions catholiques se heurtèrent aux protestants de la région. Deux autres maris et des complots d'assassinat discréditèrent davantage son règne. Après son abdication forcée par les nobles écossais, Marie s'enfuit en Angleterre où elle complota en vain pour évincer sa cousine Élisabeth I d'Angleterre.
Liens de parenté
Marie Stewart naquit le 8 décembre 1542 au palais de Linlithgow, près d'Édimbourg. Elle était la fille du roi Jacques V d'Écosse (r. 1513-1542) et de Marie de Guise (1515-1560). Lorsque Jacques V mourut le 14 décembre 1542, sans héritier mâle, Marie, alors âgée d'une semaine seulement, devint reine d'Écosse, la première reine à régner sur ce pays en son nom propre. Marie fut couronnée neuf mois plus tard, le 9 septembre 1543, au château de Stirling. Marie de Guise fit office de régente de la nouvelle reine.
Henri VIII d'Angleterre (r. de 1509 à 1547) avait brièvement envisagé de marier son fils Édouard à Marie pour rapprocher les deux pays, mais le Parlement écossais refusa la proposition, et en 1544, l'Angleterre et l'Écosse entrèrent de nouveau en guerre. Marie pouvait prétendre de loin au trône d'Angleterre car elle était la petite-fille de Marguerite Tudor (1489-1541), sœur d'Henri VIII d'Angleterre. Les anciens liens entre la France et l'Écosse furent alors mis en avant et, en 1548, Marie fut envoyée à la cour d'Henri II de France (r. de 1547 à 1549) pour y recevoir une éducation.
Reine de France
À la cour française, Marie fut prise en charge par les membres de la famille de sa mère et fut traitée comme la reine qu'elle était. Marie reçut une excellente éducation qui comprenait l'apprentissage du français, du latin, de l'espagnol et de l'italien. La jeune reine excellait en danse et devint également catholique, ce qui aurait de graves répercussions plus tard dans sa vie. C'est en France que Marie changea l'orthographe de son nom de famille de Stewart à la forme française, Stuart.
Le 24 avril 1558, Marie, alors âgée de 15 ans, épousa le prince François, âgé de 14 ans, qui deviendrait l'année suivante le roi François II de France (r. de 1559 à 1560). La cérémonie eut lieu dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. Un autre changement de significatif fut de placer les armoiries royales anglaises avec celles des Français dans un nouvel emblème qui symbolisait la revendication de Marie sur le trône anglais, désormais occupé par la fille d'Henri VIII, Élisabeth Ire d'Angleterre. Pour de nombreux catholiques anglais, Élisabeth était illégitime car ils ne reconnaissaient pas le divorce de son père avec sa première épouse, Catherine d'Aragon (1485-1536). Pour les conspirateurs catholiques, Marie, la plus proche parente de la reine d'Angleterre, serait une bonne alternative à la protestante Élisabeth.
Malheureusement, le mariage de Marie ne dura pas longtemps car François, qui n'avait jamais bénéficié d'une santé robuste, mourut en décembre 1560. Après la mort de François et celle de sa mère en juin de la même année, Marie, qui n'avait alors que 18 ans, décida de retourner en Écosse où elle continuerait à faire valoir ses droits au trône d'Angleterre. Les frictions entre les deux reines-cousines se multiplièrent, car Élisabeth, indignée par les nouvelles armes royales de Marie, refusa de lui garantir un sauf-conduit vers sa patrie. De son côté, Marie refusa de reconnaître le traité d'Édimbourg de 1560 qui avait officiellement accepté le droit d'Élisabeth à être reine d'Angleterre. Enfin, Élisabeth refusa de reconnaître Marie comme son héritière.
Retour en Écosse
La catholique Marie n'était pas la bienvenue en Écosse où les barons contrôlaient le gouvernement mais étaient eux-mêmes encore divisés en deux camps : les catholiques et les protestants. Les protestants remportaient la bataille dans l'esprit des Écossais, car l'Écosse connaîssait un changement radical de religion grâce aux efforts de personnalités telles que le ministre calviniste John Knox (c. 1514-1572). Knox était un personnage influent qui avait fondé l'Église presbytérienne d'Écosse et son point de vue selon lequel une femme ne devait pas gouverner, surtout si elle était de la "mauvaise" religion, fut adopté par beaucoup d'autres.
Malgré la partialité des nobles protestants, qui s'appelaient eux-mêmes les "seigneurs de la congrégation", Marie était déterminée à gouverner son royaume, et elle en visita de nombreuses parties en personne entre 1562 et 1566. La reine disposait de beaux revenus grâce à ses terres françaises et elle apportait une touche de glamour. Considérée comme une femme belle et vive, Marie animait sa résidence de Holyrood House par des parties de chasse et de danse.
La reine tente de concilier les clivages religieux de son pays en interdisant la tenue de la messe en public (elle assiste elle-même à une messe privée). Marie reconnut également l'Église réformée. Cependant, les soupçons subsistaient et furent exacerbés lorsque Marie épousa, le 29 juillet 1565, son cousin Henry Stewart, Lord Darnley (1545-1567), un protestant désormais favorable à la messe catholique. À partir de là, les choses commencèrent à tourner au vinaigre pour la reine. Tout d'abord, Darnley prit la tête d'un groupe de nobles qui assassina le secrétaire particulier de Marie, l'Italien David Rizzio (alias Riccio), le 9 mars 1566. Les "crimes" de Rizzio étaient d'être catholique et suspecté d'être un peu trop ami avec la reine, ce qui piquait la jalousie de Darnley. L'Italien fut traîné hors de la présence de la reine et poignardé 56 fois dans une pièce adjacente.
La vie privée de la reine entra alors dans une nouvelle phase désastreuse. Darnley lui-même fut assassiné le 10 février 1567, probablement à la connaissance de Marie, car la reine ne lui avait pas pardonné le meurtre de Rizzio. La reine avait eu un fils avec Darnley, James Stuart, né le 19 juin 1566 au château d'Édimbourg. Comme Élisabeth I ne s'était toujours pas mariée et n'avait pas eu d'enfants, James était désormais l'héritier des royaumes d'Écosse et d'Angleterre.
Le chef du complot d'assassinat de Darnley était James Hepburn, comte de Bothwell (c. 1535-1578), qui, le 10 février 1567, fit étrangler Darnley et le fit exploser avec Kirk O'Field House à l'aide de barils de poudre à canon. Marie épousa ensuite Bothwell le 15 mai 1567, ce qui alimenta les soupçons selon lesquels la reine aurait été impliquée dans le meurtre de Darnley. Pour ajouter au scandale et à l'intrigue, Bothwell emmena Marie au château de Dunbar et l'aurait prétendument violée (Marie fut peut-être complice de cette escapade). Ils se marièrent après cet étrange incident, mais les barons écossais protestants, qui bénéficiaient de l'aide matérielle d'Élisabeth I, en eurent plus qu'assez de leur reine catholique "française" et de sa vie privée douteuse. Les barons, menés par James Douglas, comte de Morton, vainquirent Mary et Bothwell sur le champ de bataille en juillet 1567, à l'est d'Édimbourg, sans que les deux armées n'aient échangé un seul coup de canon. Il semble que la reine ait perdu son soutien déjà limité et que son armée se soit évaporée. Marie fut alors emprisonnée dans un château situé sur une île du Loch Leven. C'est là qu'elle fit une fausse couche de jumeaux, Bothwell en étant le père présumé.
Marie fut formellement obligée d'abdiquer le 24 juillet 1567 en faveur de son fils qui devint Jacques VI d'Écosse (r. 1567-1625). Jacques n'avait qu'un an et, ayant reçu une éducation protestante, il pouvait être facilement manipulé par les barons qui régnaient en son nom. Bothwell, quant à lui, s'enfuit aux Orcades, le siège de son duché, et de là en Norvège, mais mourut dans la folie et l'obscurité dans un donjon danois en 1578.
Fuite en Angleterre
Craignant pour sa sécurité alors que la guerre civile faisait rage, Marie s'enfuit d'Écosse en mai 1568 et chercha refuge auprès de sa cousine Élisabeth en Angleterre. Lors de sa première tentative d'évasion du château de Loch Leven, Marie s'était déguisée en lavandière, mais elle fut dénoncée par les aristocrates. Une deuxième tentative, impliquant un bateau à rames, fut couronnée de succès. Ne renonçant pas tout à fait à son royaume, la reine fit une dernière tentative pour récupérer son trône en s'alliant à des clans solidaires (les Campbell, les Gordon et les Hamilton). Le régent, James Stewart, le comte de Moray (1531-1570), défit cette force à la bataille de Langside (13 mai 1568), et Marie s'enfuit au sud de la frontière.
La reine d'Angleterre ne savait pas quoi faire de Marie, qui était, d'une part, une parente de la famille et une homologue monarque de droit divin, mais, d'autre part, une sérieuse menace pour son propre trône. Comme dans de nombreux autres domaines de la politique, Élisabeth tergiversa et remit à plus tard la décision finale concernant le sort de Marie en l'assignant à résidence. Pour contrecarrer d'éventuels coups d'État, l'ancienne reine d'Écosse fut régulièrement déplacée dans différentes maisons de campagne et gardée sous étroite surveillance. Malheureusement pour Marie, cela se traduirait par près de 20 ans d'emprisonnement pendant lesquels elle ne verrait plus jamais ni l'Écosse ni son fils. Les deux reines ne se rencontrèrent jamais car Marie fut amenée depuis la frontière écossaise au château de Sheffield, au château de Tutbury et au château de Fotheringhay, entre autres. La présence d'un prêtre catholique lui étant interdite, Marie contourna cette interdiction en demandant à un prêtre de se déguiser en aumônier.
Même confinée, Marie représentait un danger pour Élisabeth. L'ancienne reine d'Écosse était devenue la figure de proue des complots d'inspiration catholique visant à destituer Élisabeth de son trône. En 1569, une rébellion éclata dans le nord de l'Angleterre à l'initiative des comtes de Northumberland et de Westmorland, tous deux fervents catholiques. Les comploteurs s'emparèrent de Durham et espèraient que Marie deviendrait reine et épouserait ensuite Thomas Howard, le duc de Norfolk. Élisabeth réagit énergiquement en envoyant une armée dirigée par le comte de Sussex, ce qui provoqua la fuite panique des chefs rebelles; 900 d'entre eux furent arrêtés et pendus. En 1570, le pape excommunia Élisabeth pour hérésie à la suite de ses réformes religieuses (le Règlement Élisabéthain). En conséquence de cette excommunication, tous les catholiques étaient désormais libérés de toute allégeance envers leur reine.
Vint ensuite le complot Ridolfi (du nom du banquier florentin Roberto di Ridolfi), en 1571. Le duc de Norfolk, qui avait été libéré après l'échec du coup d'État de 1569, complota avec l'Espagne pour envahir l'Angleterre et mettre Marie sur le trône. Cette fois encore, Norfolk n'eut pas de chance car la trahison fut découverte lorsque des lettres codées furent déchiffrées. Norfolk fut à nouveau emprisonné, puis exécuté en 1572. De Spes, l'ambassadeur espagnol, fut expulsé d'Angleterre. Le Parlement anglais était bien décidé à assurer le trône d'Élisabeth ; il avait déjà officiellement demandé à Élisabeth de se marier et ce à deux reprises (1559 et 1563). Une menace supplémentaire pesait sur la dynastie, celle de Marie qui désigna Philippe II d'Espagne (r. 1556-1598) comme son héritier. Les complots se poursuivirent, avec le complot Throckmorton de 1584, qui vit un ambassadeur espagnol travailler avec Marie pour tenter de remplacer Élisabeth.
Procès et exécution
Sir Francis Walsingham (c. 1530-1590), l'un des principaux ministres d'Élisabeth I et son maître espion, était déterminé à démontrer la trahison de Marie une fois pour toutes. Walsingham impliqua l'ancienne reine d'Écosse dans un nouveau complot contre sa cousine, cette fois dans un plan conçu par le noble Anthony Babington. Marie avait cherché à encourager Philippe d'Espagne à envahir l'Angleterre et à assassiner Élisabeth. En utilisant des agents doubles et en interceptant des lettres secrètes, Walsingham put rassembler des preuves indiscutables des intentions perfides de Marie. Marie fut jugée le 14 octobre 1586 et, bien qu'elle ait protesté de son innocence et nié le droit de la cour de juger une reine, elle fut condamnée à mort. Le Parlement avait déjà demandé deux fois à Élisabeth de signer l'arrêt de mort de Marie en novembre 1585, mais la reine avait encore hésité. Élisabeth signa finalement l'arrêt de mort le 1er février 1587, mais insista pour être consultée avant son exécution. Cette dernière condition ne fut pas respectée et Marie fut exécutée, à l'âge de 44 ans, le 8 février 1587, dans la grande salle du château de Fotheringhay, dans le Northamptonshire (aujourd'hui démoli). L'ancienne reine portait une robe noire et un jupon rouge en symbole de sa foi catholique; elle fut enterrée dans la cathédrale de Peterborough.
Élisabeth en voulut à ses ministres d'avoir exécuté Marie sans son dernier mot, mais étant donné la douceur avec laquelle elle traita les personnes concernées, il est probable qu'elle était vraiment soulagée de ne pas avoir donné elle-même l'ordre si redoutable. Pendant ce temps, Jacques VI d'Écosse adressa une plainte officielle à Élisabeth concernant la mort de sa mère, mais ne fit rien de plus. Bénéficiant d'un généreux salaire annuel et satisfait de rester roi et en paix avec l'Angleterre, Jacques attendit son heure. Lorsque Marie fut exécutée, Philippe d'Espagne eut une raison de plus d'attaquer l'Angleterre protestante, ce qu'il fit (sans succès) avec son Armada espagnole à l'été 1588.
En effet, lorsque la reine d'Angleterre mourut en 1603 et ne laissa pas d'héritier, Jacques VI d'Écosse fut invité à devenir roi, Jacques Ier d'Angleterre (r. de 1603 à 1625). Ce fut la fin de la Maison Tudor et le début de la Maison Stuart en Angleterre. Comme touche finale, le roi Jacques déplaça la dépouille de sa mère de Peterborough à un nouveau magnifique tombeau dans l'abbaye de Westminster.