Le Pérugin

Définition

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 17 septembre 2020
Disponible dans ces autres langues: anglais, italien, espagnol
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Delivery of the Keys to St. Peter by Perugino (by Pietro Perugino, Public Domain)
Remise des clés à Saint-Pierre par le Pérugin
Pietro Perugino (Public Domain)

Pietro Perugino (dit Le Pérugin, c. 1450-1523), de son vrai nom Pietro di Cristoforo Vannucci, était un artiste italien de la Renaissance qui réalisa des fresques pour la chapelle Sixtine du Vatican et était demandé dans toute l'Italie pour décorer l'intérieur des églises et réaliser des portraits de la classe dirigeante. Le Pérugin cherchait très souvent à créer une impression d'espace dans ses œuvres, en particulier entre l'action principale au premier plan et des exemples d'architecture rendus avec précision à l'arrière-plan. L'utilisation de l'espace et de la perspective par l'artiste influença de nombreux artistes de la Renaissance qui le suivirent, notamment son ancien élève Raphaël (1483-1520).

Jeunesse

Pietro di Cristoforo Vannucci vit le jour vers 1450 à Cittá del Pieve, près de Pérouse, en Italie centrale, d'où son nom plus connu de Pietro Perugino (Le Pérugin). Issu d'une famille modeste, le Pérugin vécut dans la pauvreté jusqu'à ce qu'il ne se fasse un nom en tant qu'artiste. Il est possible que le Pérugin ait étudié avec le célèbre artiste ombrien Piero della Francesca (c. 1420-1492), dont l'intérêt pour la couleur et la perspective mathématique aurait clairement influencé l'apprenti. Il semble également probable que le Pérugin soit devenu l'assistant de l'artiste florentin Andrea del Verrocchio (c. 1435-1488), qui forma également de futures stars de la Renaissance telles que Léonard de Vinci (1452-1519). En effet, le Pérugin apparaît pour la première fois dans les archives historiques en 1472 à Florence, alors la capitale de la peinture en Italie.

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À Pérouse, le Pérugin dirigea un atelier où étaient formés de jeunes artistes, dont, à partir de 1499, Raphaël.

Le style du Pérugin

Les peintures du Pérugin sont très différentes de celles des artistes florentins. L'artiste ombrien préférait placer ses personnages à l'avant de ses tableaux, avec un grand espace derrière, menant à des exemples d'architecture dessinés avec précision à l'arrière-plan. Le Thames and Hudson Dictionary of the Italian Renaissance résume comme suit ce qui caractérise exactement l'œuvre du Pérugin:

Statiques, non dramatiques, légèrement classiques dans leur pose et vêtues de matériaux souples et relativement lourds tombant en plis simples, ses figures marquent le changement par rapport à la linéarité du milieu du siècle précédent. De même, son architecture picturale se caractérise par une simplicité épurée et grave et par l'absence de détails inutiles. (244)

La chapelle Sixtine

En 1475, le Pérugin fut chargé de peindre des fresques à l'intérieur du palais communal de Pérouse. S'imposant comme un artiste de premier plan, sa réputation s'étendit au-delà de l'Ombrie et de la Toscane. Vers 1478, le pape Sixte IV (r. de 1474 à 1481) lui commanda une fresque pour la basilique Saint-Pierre (ancienne version) de Rome. Le pape dut être satisfait des résultats obtenus à Saint-Pierre car, vers 1481, il engagea l'artiste pour peindre une fresque sur le mur intérieur droit de la chapelle Sixtine à Rome. Il s'agissait d'une commande prestigieuse, car la chapelle devait accueillir un grand nombre des meilleurs artistes italiens de la Renaissance. Certains historiens suggèrent que le Pérugin aurait supervisé l'ensemble du projet de décoration de la chapelle.

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Pietro Perugino Portrait
Portrait de Pietro Perugino
Raphael (?) (Public Domain)

Le panneau de la chapelle Sixtine intitulé La Remise des clés à saint Pierre est un bon exemple de l'amour du Pérugin pour les scènes présentant un sens de l'espace. Dans ce cas, il semble y avoir des hectares d'espace entre les personnages du premier plan et l'église et les arcs de triomphe dessinés avec précision derrière eux. Les techniques de perspective comprennent les lignes convergentes dans le pavage du milieu du tableau et la réduction de la taille des personnages au milieu du tableau. L'équilibre précis de l'image - visible dans les arcs assortis, les caractéristiques architecturales de l'église et la disposition des personnages au premier plan - est renforcé par la ligne asymétrique des arbres à l'arrière-plan.

Ce chef-d'œuvre présente une autre facette intéressante: les textes d'accompagnement choisis par l'artiste. Au-dessus de la fresque et de son pendant à droite (la Cène de Cosimo Rosselli), une inscription se lit d'un seul trait sur le mur: "Défi à Jésus-Christ, porteur de la loi". Ensuite, pour rappeler la relation de soumission des artistes de la Renaissance à leurs illustres mécènes, les deux arcs de triomphe de la fresque portent la louange extravagante suivante: "Toi, Sixte IV, inégal en richesse, mais supérieur en sagesse à Salomon, tu as consacré ce vaste temple" (Paoletti, 305).

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Le Pérugin peignit également une fresque de l'Assomption de la Vierge sur le mur de l'autel de la chapelle Sixtine, mais celle-ci fut recouverte entre 1536 et 1541 par la fresque de Michel-Ange, Le Jugement dernier. Ce cas n'est pas unique et d'autres artistes subirent le même traitement au cours des décennies de la Renaissance. Heureusement, un dessin de la fresque perdue subsiste, probablement réalisé par un membre de l'atelier du Pérugin. On y voit le pape Sixte agenouillé en donateur, offrant sa chapelle décorée à la Vierge, tandis que saint Pierre lui touche l'épaule avec la clé des portes du Paradis.

atelier de Pérouse

Vers 1496, le Pérugin réalisa des fresques pour le Collegio del Cambio de Pérouse. Vint ensuite sa Crucifixion avec les saints pour l'église Santa Maria Maddalena de' Pazzi de Florence. En 1498, il peignit un célèbre retable représentant la Vierge à l'enfant avec saint Michel et saint Raphaël, aujourd'hui conservé à la National Gallery de Londres.

De retour à Pérouse, le Pérugin dirigea un atelier où étaient formés de jeunes artistes, dont, à partir de 1499, une future grande star de la Renaissance, Raphaël Sanzio. Raphaël adopterait l'intérêt de son maître pour la création d'un sens de l'espace dans ses peintures et ses fresques - voir, par exemple, son Mariage de la Vierge de 1504 (Pinacothèque de Brera, Milan). Le Pérugin dirigeait également un atelier à Florence, contemporain de celui de Pérouse. Demandé dans toute l'Italie, les commandes, notamment de portraits, continuèrent d'affluer de Mantoue, de Naples, d'Orvieto et de Sienne. Les retables représentant la Vierge Marie et les saints étaient un autre produit toujours populaire des ateliers du Pérugin, où lui et ses assistants réalisaient des dessins d'après des modèles réels. Ces dessins - de têtes, de torses, de postures diverses, etc. - étaient ensuite combinés pour créer un ensemble unique d'individus pour chaque projet de retable. Cette efficacité n'était pas très appréciée des critiques d'art, en particulier des Florentins rivaux qui se moquaient du fait que le Pérugin recyclait les idées artistiques qui lui avaient valu tant de succès au début de sa carrière. Michel-Ange n'était pas non plus très admiratif du travail du Pérugin, qu'il qualifiait de primitif. La pique fut suffisante pour que le Pérugin passe devant un magistrat pour cette affaire, mais cela n'améliora en rien sa réputation.

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Battle Between Love & Chastity by Perugino
Le Combat de l'Amour et de la Chasteté, Perugino
Web Gallery of Art (Public Domain)

Entre 1500 et 1504 le Pérugin reçut une commande qui dut le réjouir au plus haut point: une peinture pour la cathédrale de sa ville natale. Le sujet de cette œuvre, aujourd'hui conservée au musée des Beaux-Arts de Caen, en France, est le mariage de Joseph et de Marie. Ce choix était tout à fait approprié, car la relique la plus précieuse de la cathédrale était un anneau censé avoir été donné à Marie.

Dernières œuvres et mort

L'une des dernières œuvres majeures du maître fut le tableau Combat de l'amour et de la chasteté pour Isabelle d'Este (1474-1539), épouse de Gianfrancesco II Gonzaga (1466-1519), alors souverain de Mantoue. L'œuvre fut réalisée entre 1503 et 1505 et est aujourd'hui conservée au Louvre, à Paris. Comme d'autres artistes qui réalisèrent des peintures pour Isabelle, le Pérugin dut suivre des instructions très précises sur le sujet (une longue lettre d'Isabelle a été conservée), ce qui l'amena, comme d'autres artistes, à produire quelque chose de très différent de son travail habituel. Le tableau mesure 1,91 x 1,6 mètre (6'3.5" x 5'3"), ce qui est vraiment impressionnant. Elle montre Artémis/Diane et Athéna/Minerve, qui représentent la chasteté, luttant avec succès contre Aphrodite/Vénus et Cupidon, qui représentent la lascivité. La scène présente toujours la préférence du Pérugin pour une ligne de personnages au premier plan et il y a l'abondance habituelle d'espace derrière eux, mais les figures sont beaucoup plus fantaisistes que ce que l'on avait pu voir auparavant dans son œuvre. On remarque également l'absence d'architecture, le Pérugin n'étant même pas tenté de contrarier Isabella en ajoutant une ruine pittoresque à la scène.

En 1508, le Pérugin était encore suffisamment respecté pour obtenir une commande de peinture de médaillons décoratifs sur le plafond de la Stanza dell'Incendio du palais du Vatican. Cependant, c'est son ancien élève Raphaël, la nouvelle star de l'art de la Renaissance, qui remporta la commande la plus importante, celle des fresques murales de la même pièce. Travaillant jusqu'au bout, le Pérugin mourut de la peste à Fontignano, près de Pérouse, en 1523. Le Pérugin décrocha un chapitre dans la célèbre histoire des artistes de la Renaissance, Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes italiens (1550, révisé en 1568) de Giorgio Vasari (1511-1574), bien qu'il doive se contenter de partager ce chapitre avec, ô comble, l'élève qui fit de l'ombre à son œuvre de son vivant, Raphaël.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2020, septembre 17). Le Pérugin [Pietro Perugino]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-19153/le-perugin/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Le Pérugin." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le septembre 17, 2020. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-19153/le-perugin/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Le Pérugin." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 17 sept. 2020. Web. 21 févr. 2025.

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