Augustin d'Hippone

Définition

Rebecca Denova
de , traduit par Jerome Couturier
publié le 25 mars 2022
Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol
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Augustine of Hippo (by Fr Lawrence Lew, O.P., CC BY-NC-ND)
Augustin d'Hippone
Fr Lawrence Lew, O.P. (CC BY-NC-ND)

Saint Augustin d'Hippone (Aurelius Augustinus, 354-430 ap. JC) est le premier grand philosophe de l'ère chrétienne. Il était l'évêque d'Hippo Regius, en Numidie, pendant les années de déclin de l'Empire romain, et son œuvre la plus célèbre, La Cité de Dieu, décrit ce qu'il croit être la cause de ce déclin. Dans ses œuvres, il aborde également des questions telles que le péché originel ou le libre arbitre, et ses idées devaient avoir un profond impact non seulement de son vivant, mais aussi sur le développement de l'église médiévale et, plus tard, sur les théologiens de la Réforme Protestante. Il est reconnu comme un saint et un docteur de l'Église pour sa contribution à la théologie.

Jeunesse

Augustin naquit en 354 ap. JC dans la ville de Thagaste, en Numidie (aujourd'hui Souk Ahras, Algérie), dans une famille punique (de civilisation carthaginoise). Il fréquenta l'école à Madaure (50 km au sud de Souk Ahras) et à Carthage, où il étudia la grammaire et la rhétorique. Alors que sa mère était chrétienne, son père était païen; il se convertit au Christianisme tard, peut-être sur son lit de mort. Des années plus tard, dans ses Confessions, Augustin admettra avoir vécu la vie d'un 'libertin', et même avoir eu un enfant. Il est connu pour la citation "Seigneur, rends-moi chaste, mais pas tout de suite". Devenu désabusé, il rejeta le Christianisme à cause du style d'écriture de la Bible et du caractère rude de ses doctrines, et il se tourna vers les enseignements du prophète perse Mani (216-276 ap. JC). Le Manichéisme était un mélange de Bouddhisme, de Christianisme, de Judaïsme et de Gnosticisme, il enseignait le dualisme du bien et du mal, selon lequel l'humanité était en partie bonne et en partie mauvaise. Il en restera adepte pendant plus de neuf ans, retournant dans sa ville natale pour ouvrir une école, puis partant enseigner la rhétorique à Carthage.

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LES IDÉES DE PLOTIN ET LA PHILOSOPHIE NÉO-PLATONICIENNE FURENT ABSORBÉES DANS LA VISION DE L'ÉGLISE SUR LA NATURE DE LA RÉALITÉ, AVEC LA CONVICTION QUE SEULE LA FOI PERMET D'ATTEINDRE LA VRAIE SAGESSE.

En 383 ap. JC, il était à nouveau à la croisée des chemins, insatisfait du Manichéisme et de l'ancienne Académie de Platon à Athènes. Il se rendit à Rome où il obtint un poste de professeur municipal de rhétorique à Milan. Selon sa propre confession, à son retour à Rome, il vécut une expérience qui allait changer sa vie à jamais: il entendit la voix de Dieu. Pendant son séjour à Milan, il fit la connaissance du célèbre évêque théologien Ambroise (339-397 ap. JC), qui fusionna le Christianisme avec l'enseignement du philosophe athénien Platon. Avec une conscience renouvelée, Augustin commença à étudier les écrits de Platon et de Plotin, ce qui l'amena à s'intéresser au Néo-Platonisme. Il utilisera cette nouvelle passion pour défendre et affirmer la théologie chrétienne.

Dans sa Cité de Dieu, Augustin parle avec respect à la fois de Socrate et de Platon. Il voyait Socrate comme le "premier à canaliser l'ensemble de la philosophie dans un système éthique pour la réforme et la réglementation des mœurs". Il considérait Platon, le disciple de Socrate, comme étant à la fois "remarquable par sa brillance, au point de surpasser à juste titre tous les autres" et "un maître légitimement estimé au-dessus de tous les autres philosophes païens..." (Gochberg, 639/642). Augustin retourna aussi à un favori de son enfance et source d'inspiration: l'homme d'état et orateur romain Cicéron et son étude de la philosophie dans Hortensius. À l'âge de 32 ans, il revint au Christianisme, et en 387 ap. JC, il fut baptisé. Il se rendit à Hippone (actuelle Annaba, en Algérie), où il fut ordonné prêtre et devint évêque en 395 ap. JC.

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Œuvres

Les écrits d'Augustin se situent à la frontière entre la théologie et la philosophie. Auteur prolifique, ses œuvres majeures comprennent :

  • Les Confessions - œuvre autobiographique, écrite vers 400 ap. JC.
  • La Cité de Dieu - œuvre en 22 volumes, écrite entre 413 et 425 ap. JC.
  • Les Rétractations - une reconsidération de ses œuvres précédentes.

Parmi les écrits moins connus, citons:

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  • Contre les Académiciens
  • De la Grandeur de l'Âme
  • Du Libre Arbitre
  • Contre Fauste, le Manichéen
  • De la Grâce et du Libre Arbitre

Ses œuvres constituaient une justification philosophique du Christianisme, mais certains y voyaient une hérésie. Bien que les deux étaient une recherche de la vérité, Augustin pensait que seul le Christianisme était la vraie vérité et que, sans la foi, la philosophie ne pouvait jamais atteindre cette vérité. Les idées de Plotin et la philosophie Néo-Platonicienne furent absorbées dans la vision de l'Église sur la nature de la réalité, avec la conviction que seule la foi permettait d'atteindre la vraie sagesse. Exprimant une opinion qui devait influencer les futurs rationalistes, Augustin pensait que la foi venait en premier et qu'elle était ensuite clarifiée et soutenue par la raison.

Saint Augustine in His Cell
Saint Augustin dans sa cellule
Sandro Botticelli (Public Domain)

La Cité de Dieu

Son œuvre la plus célèbre, La Cité de Dieu, fut écrite après le sac de Rome par les Wisigoths en 410 ap. JC. Dans cette cité de Dieu, chaque individu est citoyen de deux mondes différents en même temps. L'un est le royaume de Dieu, immuable et éternel, l'autre, bien que cette idée ne soit pas nouvelle pour de nombreux Chrétiens, est le royaume du monde instable. Dans La Cité de Dieu, Augustin voulait réfuter les allégations païennes selon lesquelles le déclin de l'Empire Romain d'Occident était dû à la désertion par le peuple des anciennes divinités au profit du Christianisme. Dans sa réfutation, Augustin souligne le déclin progressif de la moralité dans tout l'empire. Bien que de nombreux Romains continuent de croire à leur version de l'effondrement de l'empire, Augustin affirme que le succès de l'empire n'était dû qu'à son désir de domination. Il écrit :

Bien qu'écrasés par l'ennemi, vous n'avez mis aucun contrôle sur l'immoralité, vous n'avez tiré aucune leçon des calamités; au plus profond des peines, vous vous vautrez encore dans le péché. ... Dans la cité du monde, les souverains dominent et les peuples qu'ils dominent sont dominées par la soif de domination, alors que dans la Cité de Dieu, tous les citoyens s'occupent les uns des autres dans la charité. (Gochberg, 630-631)

En résumé, il écrit que l'histoire est le résultat progressif de la volonté de Dieu, où les gens choisissent entre la Cité Céleste et une cité terrestre.

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La Question du Libre Arbitre

L'idée du libre arbitre est l'un des points sur lesquels Augustin fut critiqué. Si Dieu est omniscient, comment les humains peuvent-ils encore avoir le libre arbitre? Ce conflit frôlait celui de la prédestination (Dieu aurait choisi ceux qui auront droit à la vie éternelle), qui n'est pas officiellement acceptée par l'Église. Elle ne deviendra une théorie dominante qu'avec la Réforme et l'apparition de Jean Calvin. Augustin pense que Dieu est peut-être omniscient, mais cela n'a aucune incidence sur le libre arbitre. Dieu permet l'existence d'un certain mal. En fait, Augustin identifie deux types de maux: les maux moraux tels que le meurtre ou le pillage, et les maux naturels qui incluent les tremblements de terre et les raz-de-marée. Le mal moral est un choix, et l'on doit surmonter les tentations. Être vertueux, c'est contrôler sa volonté, Dieu sert seulement de guide.

St. Augustine
Saint Augustin
Sint-Katelijne-Waver (CC BY-NC-ND)

Augustin tenta aussi de clarifier le concept de péché originel. Le mal n'existait pas avant la 'Chute'. Adam et Eve choisirent de désobéir à Dieu, et la souffrance humaine fut le résultat de leur désobéissance. Dieu aurait pu arrêter la désobéissance d'Adam et Ève, mais cela aurait empêché l'humanité d'avoir le libre arbitre. Dans La Cité de Dieu, Augustin écrit :

En ce qui concerne le jardin d'Eden, le bonheur qui y était possible, la vie de nos premiers parents, leur péché et leur châtiment, beaucoup de choses ont été pensées, dites et écrites. ... En fait, je crois en avoir dit assez sur les problèmes vraiment sérieux et difficiles de l'origine du monde, de l'âme et de l'espèce humaine. En ce qui concerne l'humanité, j'ai pris une décision. D'un côté, il y a ceux qui vivent selon l'homme; de l'autre, ceux qui vivent selon Dieu. (Gochberg, 632)

L'un obtient la récompense du ciel tandis que l'autre reçoit le châtiment éternel.

Sainteté et Héritage

En 430 ap. JC, les Vandales mirent à sac Hippone, la ville natale d'Augustin, mais il ne vivra pas assez longtemps pour assister à la capitulation de sa ville. Alors que les Vandales assiégeaient Hippone, Augustin resta sur place, refusant de partir. Souffrant d'une fièvre, il demanda la solitude et l'isolement et mourut le 28 août 430 ap. JC. Après sa canonisation par le pape Boniface VIII (règne 1294-1303) en tant que saint patron des brasseurs et des imprimeurs, entre autres, l'Église Catholique devait reconnaître le 28 août comme sa fête.

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Après sa mort et la chute de l'Empire Romain d'Occident, l'Europe devait entrer dans ce que l'on appelle, selon Pétrarque, 'l'Âge des Ténèbres'. Cependant, cette période vit également la naissance de la religion organisée, et la théologie d'Augustin fit partie intégrante du développement non seulement du Christianisme mais aussi de la pensée intellectuelle occidentale. Les futurs théologiens devaient lire l'œuvre d'Augustin, et ce philosophe/théologien au franc-parler devait en influencer d'autres pendant des années : Boèce, Anselme de Cantorbéry, Thomas d'Aquin, et les penseurs de la Réforme tels que Martin Luther, Jean Calvin, Cornelius Jansen et Bernard de Clairvaux, furent parmi ceux qui furent influencés par Augustin et les futurs philosophes tels que René Descartes, Ludwig Wittgenstein, Arthur Schopenhauer et Friedrich Nietzsche devaient s'inspirer de ses idées.

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Bibliographie

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Traducteur

Jerome Couturier
Je suis médecin, spécialisé en Génétique. J'aime l'Histoire et l'Antiquité depuis mon plus jeune âge. J'ai toujours eu un interêt pour la recherche dans divers domaines scientifiques, dont l'archéologie.

Auteur

Rebecca Denova
Rebecca I. Denova, Ph. D., est Professeur émérite de Christianisme Primitif au Département d'Études Religieuses de l'Université de Pittsburgh. Elle a récemment publié un ouvrage, "The Origins of Christianity and the New Testament" (Wiley-Blackwell).

Citer cette ressource

Style APA

Denova, R. (2022, mars 25). Augustin d'Hippone [Augustine of Hippo]. (J. Couturier, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-19185/augustin-dhippone/

Style Chicago

Denova, Rebecca. "Augustin d'Hippone." Traduit par Jerome Couturier. World History Encyclopedia. modifié le mars 25, 2022. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-19185/augustin-dhippone/.

Style MLA

Denova, Rebecca. "Augustin d'Hippone." Traduit par Jerome Couturier. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 25 mars 2022. Web. 20 nov. 2024.

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