Gaius Valerius Catullus (alias Catulle, 84-54 avant J.-C.) était un poète romain dont les poèmes sont considérés comme l'un des meilleurs exemples de poésie lyrique de la Rome antique, malgré son jeune âge et sa mort précoce. Catulle a écrit dans le style néotérique à l'apogée de la littérature et de la culture romaines, et ses poèmes n'ont pas seulement été lus et appréciés de son vivant, mais ont influencé des poètes respectés de l'époque augustéenne comme Ovide, Virgile et Horace. Ses œuvres comprennent des poèmes courts, des poèmes plus longs et des épigrammes ; 25 poèmes d'amour sont adressés à une femme qu'il appelle "Lesbie".
Enfance
Catulle naquit vers 84 avant J.-C. dans la ville de Vérone, en Italie du Nord, au sein d'une famille distinguée et riche de l'ordre équestre. Il n'existe aucune biographie de lui, aussi les détails connus proviennent-ils des écrits d'autres personnes et de sa propre poésie.
Espérant que son fils bénéficierait de la riche culture de la ville, le père de Catulle envoya son jeune fils à Rome. Grâce à ses poèmes, on pense que, pendant qu'il vivait à Rome, il fit la connaissance de plusieurs des principaux hommes politiques de l'époque, notamment Cicéron (106-43 avant J.-C.), qui méprisait ses poèmes, et le bon ami de son père, Jules César (100-44 avant J.-C.). Suétone (c. 69 - c. 130/140 de notre ère) relate dans ses Douze Césars une confrontation entre César et Catulle. Le poète aurait diffamé César dans l'un de ses poèmes. César aurait réagit en affirmant qu'il s'agissait d'une tache sur son nom, mais après que Catulle se soit excusé, il fut invité à dîner. Peu intéressé par l'arène politique, le jeune poète n'avait pas apprécié sa brève aventure dans le service public (57-56 avant J.-C.) en tant que membre du personnel de Gaius Memmius, gouverneur de la province romaine de Bithynie.
Style d'écriture
Il retourna à Rome et consacra le reste de sa vie à la poésie. C'est à cette époque qu'il se rapprocha d'une nouvelle race de poètes, les néotéristes. Se détournant de la poésie épique classique d'Homère (c. 750 avant J.-C.), ce nouveau genre se fondait sur l'esthétique de l'Alexandrie hellénistique et sur les écrits du poète Callimaque, du IVe siècle avant J.-C. qui utilisait un langage familier et des traits d'esprit, et basait ses poèmes sur des expériences personnelles. L'historien Norman Cantor a écrit dans son livre Antiquity que la poésie de Catulle servait de "contrepoids" à l'idéalisme, à l'esprit public et à l'optimisme de son contemporain Marcus Tullius Cicéron. Catulle reconnaissait la mortalité comme une partie essentielle de la condition humaine et exposait une facette différente de la vie romaine : l'existence du pessimisme et de l'individualisme.
La classiciste Edith Hamilton, dans son livre The Roman Way, écrit qu'il pouvait "écrire un charmant vers sur tout ce qui lui plaisait, son voilier... un dîner, le chagrin d'un ami ou autre chose" (108). Cependant, il pouvait aussi être aussi grossier et violent que tout ce que l'on trouve dans la littérature. Catulle "déverse ce qu'il ressent avec une passion brûlante qui ne veut rien d'autre que l'expression la plus simple" (108). Pour illustrer son propos, elle cite un de ses poèmes écrits à sa bien-aimée Lesbia :
Vivons pour nous aimer, ô ma Lesbie ! et moquons-nous des vains murmures de la vieillesse morose. Le jour peut finir et renaître; mais lorsqu'une fois s'est éteinte la flamme éphémère de notre vie, il nous faut tous dormir d'un sommeil éternel.
Bien qu'il ait passé une grande partie de sa vie à Rome, où il finit par posséder une petite villa dans le faubourg romain de Tibur, nombre de ses poèmes se déroulent à Vérone. Bien qu'il ait évité le service public et l'implication dans l'arène politique - comme beaucoup de ses collègues néotéristes - beaucoup de ses poèmes reflètent encore le caractère de la République romaine, sa politique, sa vie sociale et sa culture. Ses poèmes représentent un peuple plus intéressé par sa vie privée que par la responsabilité publique.
Lesbie
Après son arrivée à Rome, il tomba amoureux d'une jeune femme supposée être Clodia Metelli, la sœur de l'ennemi de Cicéron, Publius Clodius Pulcher (93-52 avant J.-C.), et l'épouse d'un sénateur romain décédé. Bien qu'elle ait été accusée d'avoir la pire des réputations, les détails de sa relation avec elle, et le fait qu'elle ait été pleinement réciproque ou non, sont inconnus. On suppose qu'elle est la Lesbie de ses poèmes d'amour - un hommage rendu à la poétesse grecque Sappho (c. 620-570 avant J.-C.) de l'île de Lesbos.
Hamilton a écrit que Catulle ne voyait rien d'autre dans son univers que Lesbie et qu'il était capable de parler avec simplicité parce qu'il ne ressentait rien qui ne soit pas simple. Cicéron pensait différemment, la détestant, l'appelant la "Médée du Palatin" et l'attaquant (elle soutenait la politique de son frère) dans plusieurs de ses discours. Catulle écrivit 25 poèmes dédiés à sa "Lesbie". L'un de ces poèmes, intitulé My Sweetest Lesbia, est l'expression de son amour profond pour elle :
Vivons, ma Lesbie, aimons-nous,
Et traitons comme rien tous ses propos jaloux
De la trop sévère vieillesse.
Le soleil meurt & reparaît sans cesse ;
Mais quand meurt notre flamme éphémère, il faut tous
Dormir de même une nuit éternelle.
Donne-moi cent baisers, & puis mille, & puis cent,
Mille encor, que leur nombre aille toujours croissant,
Encor mille, encor cent... Que le compte s'emmêle,
Et par milliers embrouillons-le si bien
Que nous ne se sachions plus nous-mêmes, maîtresse,
Et qu'aucun envieux ne sache de combien
De milliers de baisers est faite notre ivresse!
Œuvres
Les poèmes de Catulle ont survécu bien qu'ils aient failli être perdus pendant le Moyen Âge. Un manuscrit oublié a survécu, a été retrouvé, copié, copié à nouveau, puis perdu à nouveau. Enfin, il a été retrouvé et compilé dans la présente collection. Trois copies "originales" existent - une à Paris, une à Rome et une à Londres. Cependant, la mauvaise qualité des copies et l'état déplorable du manuscrit original ont laissé plusieurs poèmes mutilés et incomplets. Des discussions persistent sur le nombre exact de poèmes que Catulle a écrits, les estimations allant de 113 à 116. On suppose qu'au moins cinq poèmes ont été complètement perdus. Certains poèmes sont incomplets ; 14 d'entre eux présenteraient des lacunes d'au moins une à huit lignes. De même, des fragments de certains poèmes ont été arbitrairement rattachés à d'autres poèmes. Et, certains poèmes plus longs pourraient même avoir été divisés en deux. D'autres, attribués au jeune poète, ne sont peut-être pas vraiment de lui - 18, 19 et 20 par exemple.
Ses poèmes les plus courts varient de 5 à 25 lignes tandis que d'autres sont plus longs, allant de 48 à plus de 400 lignes. Il y a même des épigrammes de 2 à 12 lignes. Certains sont assez émouvants tandis que d'autres sont considérés comme obscènes. Les 60 premiers poèmes sont courts, adressés à ses amis, à ses amants et même à ses ennemis. Si certains d'entre eux sont amicaux et passionnés, d'autres peuvent être injurieux:
Ô la fille, salut! Tu n'as pas le nez fin,
Ni le pied élégant, ni l'œil noir, ni la main.
Aux longs doigts minces, ni la bouche bien séchée,
Et ta langue n'est pas non plus trop recherchée,
Maîtresse de ce grand dévoreur Formien !
Et pourtant, en province, on te prétend jolie !
On t'ose comparer avec notre Lesbie?
Oh! mauvais goût du jour! Temps qui n'y connaît rien!
Les huit poèmes du milieu (poèmes 61-68) sont réputés de style alexandrin ou grec ; quatre sont des élégies. L'une est consacrée au mariage de Pélée et de la déesse de la mer Thétis, parents du héros de guerre Achille connu dans la mythologie grecque, tandis qu'une autre parle de la mort précoce de son frère.
Les autres poèmes (69-116) sont des épigrammes sur l'amour et le chagrin. Dans l'un d'eux, il est évident que sa chère Lesbie l'a rejeté :
Vois où tu as réduit mon âme par ta faute, ma Lesbie ; vois à quel degré de misère elle est tombée par sa fidélité : quand tu deviendrais la plus honnête des femmes, je ne pourrais te rendre mon estime, ni cesser de t'aimer, quand tu ferais tout pour cela.
(Onze Poèmes, Poème 75)
Dans l'un de ses poèmes les plus connus, il parle de son tourment continu :
Je hais et j'aime. - Comment cela se fait-il ? demandez-vous peut-être. - Je l'ignore ; mais je le sens, et c'est là un supplice.
(Onze poèmes, poème 85)
Héritage
La cause et la date exacte de sa mort sont inconnues, mais le théologien et historien saint Jérôme, du IVe siècle de notre ère, soutient que le jeune poète mourut vers 54 avant notre ère, à l'âge de 30 ans. Bien qu'elle ait été presque perdue, sa poésie a survécu et a influencé de nombreux poètes qui l'ont suivi. Sa popularité s'est poursuivie au Moyen Âge et à la Renaissance anglaise. Hamilton résume la beauté de ses poèmes en les comparant aux sonnets de William Shakespeare, écrivant qu'il était capable de mettre en mots le ravissement d'un amoureux. "Dans sa vie comme dans son amour, il était la quintessence de l'amoureux, il est mort jeune". (115)