Robert II d'Écosse régna de 1371 à 1390. Né Robert Stewart, il succéda à David II d'Écosse (r. de 1329 à 1371), sans héritier, et fonda ainsi la maison royale des Stewart. Répartissant les domaines écossais entre ses nombreux descendants, Robert redessina la carte politique de son royaume et remplaça effectivement la moitié de la noblesse par sa famille et ses alliés, un processus souvent appelé la "stewarisation" de l'Écosse. Bien qu'il ait été dans sa jeunesse un dirigeant plus compétent que les historiens médiévaux n'ont voulu le dépeindre, le règne de Robert fut marqué par un déclin de la richesse de la Couronne et par la création d'âpres rivalités entre les grandes familles baronniales qui allaient causer de nombreux problèmes à son successeur, son fils Robert III d'Écosse (r. de 1390 à 1406).
Jeunesse
Robert Stewart vit le jour le 2 mars 1316 à Paisley dans des circonstances exceptionnelles. Sa mère ayant été victime d'un accident d'équitation mortel, Robert naquît par césarienne. La mère de Robert était Marjorie (née vers 1295), fille du roi Robert le Bruce (r. de 1306 à 1329) et d'Isabel de Mar. Cela faisait de Robert le neveu de David II d'Écosse, même s'il était plus âgé de plusieurs années. Le père de Robert était Walter Stewart, un puissant baron écossais. Le nom de famille était une subtile altération de "Steward", un titre que la famille de Robert portait depuis le XIIe siècle en tant que Grands Intendants héréditaires d'Écosse. Le père de Robert était le 6e High Steward d'Écosse, un titre alors purement honorifique. À la mort de son père en 1327, Robert devint l'intendant suivant et le propriétaire de domaines qui lui conféraient un rang égal à celui des familles les plus puissantes du royaume, telles que les Bruce et les Douglas.
Robert passa la majeure partie de son enfance sur la côte ouest de l'Écosse. À l'âge de 17 ans, il participa à la bataille de Halidon Hill le 19 juillet 1333. Lors de cette bataille, Édouard III d'Angleterre (r. de 1327 à 1377) battit sévèrement l'armée écossaise. Robert, ainsi que d'autres nobles, se réfugia à Dumbarton, mais il lança ensuite une campagne soutenue pour récupérer certains des châteaux et domaines perdus de sa famille.
Un chroniqueur médiéval décrit Robert comme suit : "un jeune homme d'apparence plus attrayante que celle des fils des hommes, large et grand, aimable avec tout le monde, modeste, généreux, joyeux et honnête" (Oram, 143). Robert épousa sa maîtresse Elizabeth Mure en 1336 (et à nouveau après la dispense papale de 1347 qui déclara enfin leur union valide). Vers 1337 (ou en 1340), Robert eut son premier fils, John. Elizabeth mourut un peu avant 1355, et Robert se remaria en mai de la même année, cette fois avec Euphémie, comtesse de Moray. Robert aurait 21 autres enfants, légitimes et illégitimes. John, quant à lui, devint l'héritier présomptif officiel en 1371.
Régence pour David II
David II avait succédé à son père Robert le Bruce, mais comme il était mineur, son royaume était dirigé par un tuteur. Robert Stewart devint ce tuteur en 1338. Le jeune roi dut également faire face à un prétendant rival, Édouard Balliol (1283-1364), fils du roi John Balliol (r. de 1292 à 1296). Édouard bénéficia du soutien d'Édouard III d'Angleterre et put ainsi s'emparer brièvement du trône écossais à deux reprises (1332 et 1333-1336). David II fut alors contraint à l'exil en France, mais il revint en 1341. À son retour, David dut faire face à Robert Stewart, qui s'imposa comme l'un des principaux nobles du royaume. Robert sut tirer parti de l'alternance chaotique des trônes entre Balliol et David, en agrandissant considérablement ses propres domaines et en établissant un réseau utile d'alliés à travers l'Écosse. Robert réussit également à reprendre le château d'Édimbourg à sa garnison anglaise et à assiéger le château de Stirling.
En 1346, le roi David attaqua imprudemment le nord de l'Angleterre et fut tristement capturé à la bataille de Neville's Cross. Les archers anglais avaient remporté la victoire et les Écossais avaient subi d'importantes désertions, notamment celle de Robert Stewart qui s'était retiré dès que la bataille avait basculé en faveur de l'ennemi. Le roi écossais passa les onze années suivantes à la Tour de Londres et, en son absence, Robert se hissa à la tête de l'Écosse en tant que régent et devint l'héritier présomptif du roi.
Les Balliol avaient toujours de puissants et nombreux partisans, mais David II aussi, même lorsqu'il croupissait en prison. De nombreux Écossais restaient fidèles à leur roi et ne souhaitaient pas voir une marionnette d'Édouard III sur leur trône. Édouard Balliol avait même promis au roi anglais d'être son vassal et de lui céder de vastes pans du sud de l'Écosse. David II bénéficia également d'un soutien important de l'étranger, notamment du roi de France, Philippe VI de France (r. de 1328 à 1350). Cependant, Robert Stewart, qui se présentait désormais comme le lieutenant du roi, ne semblait pas particulièrement pressé de réunir l'énorme rançon qu'Édouard III exigeait pour la libération de David.
Au cours des années de détention du roi, Stewart et plusieurs parlements écossais avaient fermement refusé d'accéder à la demande du roi David de désigner la famille royale anglaise comme héritière de l'Écosse s'il n'avait pas lui-même d'héritier et d'échapper ainsi au paiement d'une rançon aussi onéreuse. La régence de Robert Stewart se caractérisa par de nombreuses querelles intestines entre nobles écossais et une terrible négligence des finances de l'État. L'arrivée de la peste noire, qui tua 25 à 30 % de la population, n'arrangea en rien le sort des Écossais.
Retour de David II
David II fut finalement libéré en octobre 1357 dans le cadre du traité de Berwick, où les Écossais acceptèrent de payer une rançon et de respecter une trêve de dix ans avec l'Angleterre. Robert Stewart restait cependant un rival dangereux et, bien que son roi l'ait nommé comte de Strathearn, il tenta en vain un coup d'État. En effet, ce n'est qu'en 1363 qu'il se soumit officiellement à son roi. Malgré les frictions entre les deux hommes, Robert resta l'héritier présomptif de David, faute d'un meilleur candidat. Le reste du règne de David vit une certaine prospérité revenir en Écosse, mais le roi échoua dans le domaine que tous les rois médiévaux ne pouvaient se permettre de négliger pour maintenir la paix: produire un héritier.
Succession et stewartisation
Lorsque David II mourut le 22 février 1371, il ne laissa pas d'héritier et c'est Robert Stewart qui devint roi sous le nom de Robert II d'Écosse. Robert avait alors 55 ans et il s'assura le droit au trône en achetant son principal rival, le comte William Douglas. C'est ainsi que fut fondée la maison royale des Stewart (qui deviendraient plus tard les Stuart), qui régnerait sur l'Écosse jusqu'en 1603 et, par la suite, sur l'Angleterre et l'Écosse réunies. Le couronnement de Robert eut lieu à l'abbaye de Scone le 26 mars 1371. Le nouveau roi donna rapidement des terres, des rentes et des pensions à ses fidèles, donna des titres et des domaines à ses nombreux descendants mâles (légitimes ou non) et maria ses filles pour lier la famille royale à d'autres dynasties puissantes. Certains historiens ont appelé cette stratégie la "Stewartisation" de la noblesse, qui eut pour conséquence que les Stewart contrôlaient la moitié des comtés d'Écosse. Nombre de ces nobles royaux se révélèrent incontrôlables, notamment Alexander Stewart, le "loup de Badenoch", qui exploita ses domaines d'une main ferme et ignora délibérément les lois du pays. Pour légitimer davantage son droit de régner, Robert entreprit également de fabriquer l'histoire d'une Écosse unifiée dont son grand-père Robert le Bruce serait le plus grand héros, allant même jusqu'à commander le célèbre poème The Bruce (Le Bruce ) à John Barbour.
Bien que la première partie du règne de Robert ait été marquée par une grande continuité, tant au niveau des fonctionnaires que des politiques, les finances de l'État commencèrent à décliner sérieusement à partir du milieu des années 1370. Le commerce de la laine, qui générait des droits de douane lucratifs pour la Couronne, avait connu un essor considérable au cours des deux décennies précédentes, mais en 1390, il avait diminué de moitié. L'imposition directe avait pris fin en 1373 et les shérifs - responsables de la collecte des impôts - évitaient d'alimenter l'Échiquier alors que certaines régions d'Écosse devenaient de plus en plus anarchiques et que les barons Stewart ne s'occupaient que de leurs propres intérêts.
En termes de politique étrangère, Robert entreprit d'abord de reconquérir les régions du sud de l'Écosse que ses prédécesseurs avaient perdues au profit de l'Angleterre. Le roi, peut-être sous la pression de la France, ancienne alliée de l'Écosse, lança ensuite plusieurs attaques contre le nord de l'Angleterre et remporta une célèbre victoire en août 1388 à la bataille d'Otterburn. Cette victoire était d'autant plus belle que l'armée anglaise était dirigée par le célèbre chevalier médiéval Sir Henry "Hotspur" Percy (1364-1403). Robert ne dirigeait pas ses armées en personne et, comme ni les dirigeants écossais ni les dirigeants français ne parvenaient à se mettre d'accord sur une stratégie pour affronter l'Angleterre, une trêve précaire fut rétablie entre l'Écosse et l'Angleterre.
Vers la fin de son règne, Robert semblait peu enthousiaste à l'égard de la politique, laissant la plupart des questions de gouvernement à son fils aîné John, comte de Carrick, tandis qu'il se retira dans sa résidence préférée, le château de Rothesay, sur l'île de Bute. John, avec le soutien du comte James Douglas (fils de William Douglas et nouveau chef de ce clan), avait même lancé un coup d'État contre son père en 1384, mais il finit par s'installer à la tête de l'Écosse dans les faits sinon sur le papier..
Mort et successeur
Robert mourut le 19 avril 1390 au château de Dundonald, dans l'Ayrshire, et fut enterré à l'abbaye de Scone. Son fils aîné, lui succéda sous le nom de Robert III d'Écosse. Le nom de John était considéré comme inapproprié, car les Balliol, grands rivaux des Bruces, avaient eu un roi portant ce nom, et il était également considéré comme malchanceux pour un monarque écossais. Toute tentative de gagner les faveurs de la bonne fortune était déjà un peu tardive, car Jean/Robert avait été frappé par un cheval en 1388 et avait donc passé le reste de ses jours comme invalide. Robert III fut donc contraint de laisser le gouvernement à d'autres, notamment à son frère Robert, comte de Fife (alias duc d'Albany, 1339-1420).
Le royaume de Robert III fut déchiré par les rivalités amères créées par la politique de redistribution des terres et des titres de Robert II et par sa nombreuse progéniture. L'instabilité inhérente au royaume se manifesta notamment lors de la bataille des clans à Perth en 1396, au cours de laquelle un certain nombre de Mackay et de Mackintosh s'affrontèrent jusqu'à la mort. Plus grave pour l'Écosse, l'Angleterre passa une fois de plus à l'offensive contre son voisin du nord, mais les Stewart continuèrent de s'accrocher au pouvoir, et la maison fondée par Robert II régnerait sur l'Écosse jusqu'en 1714.