Le massacre de Fort Mystic de 1637 (également connu sous le nom de "massacre des Pequots") fut l'événement central de la guerre des Pequots (1636-1638) en Nouvelle-Angleterre entre les Anglais (avec leurs alliés autochtones, les tribus Mohegan et Narragansett) et la tribu des Pequots de l'actuel Connecticut.
Le conflit fut initié par les Anglais qui accusèrent les Pequots et l'un de leurs tributaires, les Niantics, d'avoir assassiné des commerçants anglais. Bien que les gouverneurs Sir Henry Vane (1613-1662) et John Winthrop (c. 1588-1649) aient tous deux accepté l'explication du chef pequot Sassacus (c. 1560-1637) pour ces meurtres, ainsi que les wampums payé pour expier les morts, Vane envoya quand même John Endicott (c. 1600-1665) pour exiger davantage des Pequots en août 1636.
Endicott exigea plus de wampums, des enfants pequots à garder en otage pour garantir leur bonne conduite et les hommes responsables des meurtres. Devant le refus des indigènes, Endicott les attaqua en brûlant des villages niantics sur Block Island, un village pequot sur la rivière Connecticut, et en tuant un certain nombre de personnes. Les Pequots répliquèrent par des raids sur les colonies anglaises tout au long de l'automne 1636 et au printemps 1637 jusqu'à ce que les Mohegans et les Narragansetts ne conduisent les Anglais à la forteresse pequot tôt le matin du 26 mai 1637 où ils mirent le feu au fort et tuèrent presque tous les Pequots qui s'y trouvaient. Les estimations varient entre 500 et 700 personnes tuées par le feu, par balle alors qu'ils fuyaient les flammes ou par d'autres moyens, la plupart des spécialistes s'accordant sur le chiffre le plus élevé et, très probablement, sur un chiffre encore plus élevé que ça. Comme les guerriers et Sassacus étaient absents du fort à ce moment-là, la plupart des Pequots tués ce matin-là étaient des femmes et des enfants.
Sassacus dirigea une attaque contre les colons alors qu'ils rentraient chez eux, mais il n'avait pas assez d'hommes pour avoir le dessus. Il se retira avec ses membres survivants en Nouvelle Néerlande (l'actuelle ville de New York) pour demander l'aide de la Confédération iroquoise mais fut exécuté par les Mohawks qui renvoyèrent sa tête et ses mains aux Anglais. Sur les 3 000 Pequots qui vivaient dans le Connecticut avant le massacre, seuls 200 environ survécurent. Ils furent ensuite vendus comme esclaves ou absorbés par d'autres tribus et leurs terres furent divisées entre les vainqueurs par le traité de Hartford de septembre 1638.
Le massacre de Fort Mystic est considéré comme un événement décisif, non seulement dans l'histoire de la Nouvelle-Angleterre, mais aussi dans l'élaboration de la politique coloniale puis américaine à l'égard des autochtones. Les récits coloniaux du massacre encouragèrent la vision des indigènes en tant que sauvages sanguinaires et indignes de confiance qui devaient être réformés par la conversion au christianisme et éloignés du contact avec les colons anglais, puis américains. Cette politique se poursuivra jusqu'au 20e siècle et, subtilement, influence encore aujourd'hui les relations anglo-autochtones.
Conflit initial et guerre
En 1622, les Hollandais avaient établi un commerce avec les Pequots et construit un comptoir de commerce sur la rivière Connecticut. Le commerce entre les Hollandais et les Pequots était en cours depuis environ 1614, mais après la fondation de la colonie anglaise de Plymouth en 1620, les colons anglais commencèrent à faire concurrence aux Hollandais. Les conflits furent résolus par un traité entre les Anglais et les Hollandais en 1627, divisant les territoires et les tribus avec lesquelles chacun devait commercer.
En 1630, l'avocat anglais puritain John Winthrop arriva avec 700 colons et établit la colonie de la Baie du Massachusetts autour de sa capitale, Boston. Le gouverneur Winthrop ne connaissait pas ou choisit d'ignorer le traité de 1627 et établit un comptoir en amont des Hollandais sur la rivière Connecticut en 1633 pour intercepter les expéditions de fourrures, ce qui entraîna d'autres conflits entre les Anglais et les Hollandais et leurs partenaires commerciaux respectifs.
En 1634, le capitaine anglais John Stone (mort en 1634) fut tué avec sept de ses hommes, prétendument par des guerriers du Niantic occidental tributaires des Pequots, en réponse aux actions de Stone contre les autochtones, notamment des enlèvements. John Winthrop envoya son fils pour enquêter sur la situation et les Pequots comparurent devant les magistrats de la baie du Massachusetts. L'expert James A. Warren commente :
La baie du Massachusetts accepta d'établir des relations commerciales avec les Pequots... En échange, les Pequots livrèrent les assassins de John Stone et versèrent la lourde somme de quatre cents brasses de wampum et soixante-dix peaux de castor et de loutre à titre de tribut. La valeur du tribut équivalait à 250 livres sterling à l'époque, soit un peu moins de la moitié du total des impôts fonciers prélevés par le Massachusetts sur l'ensemble de sa population en 1634... Quelle qu'ait été sa valeur exacte, le tribut exigé était suffisamment draconien pour constituer une extorsion. Les autorités puritaines étaient probablement bien conscientes que le "tribut" ne pourrait jamais être payé en totalité dans les meilleures circonstances. (81)
Sassacus rejeta cette demande qu'il jugea déraisonnable, ce qui ne fit qu'accroître les tensions entre les Pequots et les Anglais. En 1636, le capitaine John Oldham (1592-1636) fut assassiné et, une fois de plus, les Niantics de Block Island furent considérés coupables. Vane envoya Endicott pour exiger la reddition des tueurs, plus d'enfants otages pour garantir leur bonne conduite future, et un paiement encore plus important en wampum et en fourrure. Les Pequots avaient déjà dit à Winthrop qu'ils avaient pris Stone pour un Hollandais et, en ce qui concernait Oldham, ils ne savaient rien de sa mort. Lorsqu'Endicott confronta les Niantics de Block Island, ils répétèrent la même chose, mais Endicott, célèbre pour son tempérament emporté et son manque de patience, les attaqua, tuant l'un d'entre eux et brûlant leurs villages ; il fit ensuite de même avec un village péquot le long de la rivière.
Les Pequots répondirent en attaquant la colonie de Fort Saybrook dans le Connecticut et d'autres ailleurs, de l'automne 1636 au printemps 1637. Ils essayèrent d'amener les Narragansetts à s'allier avec eux contre les Anglais, en leur faisant remarquer que, si les Pequots étaient vaincus, les Narragansetts et d'autres tribus seraient les prochains, car les Anglais n'allaient manifestement pas être satisfaits tant qu'ils n'auraient pas toutes les terres des autochtones. Les Narragansetts envisagèrent cette proposition mais furent convaincus de se ranger du côté des Anglais par Roger Williams (1603-1683), un exilé de la baie du Massachusetts qui avait vécu parmi eux et en qui ils avaient plus confiance qu'en Sassacus.
Le récit du massacre par Mason
En mai 1637, il fut décidé que les Pequots devaient être détruits et des milices furent organisées sous la direction des capitaines John Underhill (1597-1672) de la Baie du Massachusetts et John Mason (c. 1600-1672) de la Colonie du Connecticut, peut-être avec quelques volontaires fournis par le gouverneur William Bradford (1590-1657) de la Colonie de Plymouth. Ils furent conduits à l'emplacement du fort pequot par les Mohegans et les Narragansetts, et arrivèrent tôt le matin. Les capitaines Underhill et Mason - qui deviendront plus tard des héros nationaux célébrés par des récits et des statues - ont tous deux écrit des récits de l'action contre les Pequots, qui se recoupent bien. Une partie du récit du capitaine Mason suit, commençant par leur arrivée au fort Pequot, tel qu'il est donné dans Puritans in the New World : A Critical Anthology, édité par David D. Hall:
Le capitaine Underhill s'est avancé et est allé vers l'arrière et, nous recommandant à Dieu, il a divisé nos hommes. Comme il y avait deux entrées au fort, on avait l'intention d'entrer dans les deux à la fois, le capitaine Mason s'est dirigé vers celle du côté nord-est, et en s'approchant à moins d'un mètre, a entendu un chien aboyer et un Indien crier "Owanux ! Owanux !", ce qui signifie "Anglais ! Anglais !" Nous avons rassemblés nos forces avec toute la célérité voulue et nous avons tiré sur eux à travers la palissade ; les Indiens ont ainsi trouvé le repos, leur dernier repos. Puis nous avons fait demi-tour et sommes tombés sur l'entrée principale, qui était bloquée par des buissons d'une hauteur d'environ un mètre, sur lesquels le capitaine est passé, avec l'intention de faire irruption, encourageant les autres à suivre... Nous avions auparavant conclu de les passer par l'épée et de sauver le butin.
Le capitaine Mason, ne voyant pas d'Indiens, entra dans un wigwam où il fut assailli par de nombreux Indiens qui n'attendaient que l'occasion de mettre la main sur lui, mais qui n'y sont pas parvenus. Enfin, William Heydon, voyant la brèche dans le wigwam, supposant que des Anglais pouvaient s'y trouver, y entra ; mais en entrant, il tomba sur un Indien mort, mais se remit sur pied rapidement, les Indiens s'enfuirent, d'autres se glissèrent sous leurs lits. Le capitaine, en sortant du wigwam, vit de nombreux Indiens dans la ruelle ou la rue; il s'approcha d'eux, ils s'enfuirent et furent poursuivis jusqu'au bout de la ruelle, où ils tombèrent nez à nez avec Edward Pattison, Thomas Barber, avec quelques autres, et sept d'entre eux furent tués, selon leurs dires.
Le capitaine fit demi-tour, remonta à pas lents le chemin qu'il avait descendu, s'aperçut qu'il était très essoufflé et, en arrivant à l'autre bout, près de l'endroit où il était entré, vit deux soldats debout près de la palissade, leurs épées pointées vers le sol. Le capitaine leur dit que nous ne devrions jamais les tuer de cette manière. Le capitaine dit également: "Nous devons les brûler" et immédiatement, il entra dans le wigwam où il se trouvait auparavant, en sortit un tison et le mit dans les nattes dont ils étaient couverts, puis mit le feu au wigwam. Le lieutenant Thomas Bull et Nicholas Omstead, qui l'observaient, s'approchèrent et, lorsque le feu fut complètement allumé, les Indiens s'enfuirent en courant comme des hommes terriblement stupéfaits.
En effet, le Tout-Puissant fit tomber une telle terreur sur leurs esprits qu'ils s'enfuirent de nous et coururent vers les flammes, où beaucoup d'entre eux périrent. Et lorsque le fort fut complètement incendié, l'ordre fut donné de se retirer et d'encercler le fort, ce qui fut fait avec empressement par tous...
Le feu fut allumé du côté nord-est, au vent, et envahit rapidement le fort, à l'extrême stupéfaction de l'ennemi et à la grande joie de nous tous. Certains d'entre eux grimpèrent au sommet de la palissade, d'autres coururent vers les flammes, beaucoup d'entre eux se rassemblèrent au vent, nous bombardant de leurs flèches et nous leur rendîmes la monnaie de leur pièce. D'autres parmi les plus robustes sortirent, comme nous l'avions deviné, au nombre de quarante, et ils périrent par l'épée.
Ce que j'ai dit précédemment est conforme à ma propre connaissance, car il y a suffisamment de témoignages oculaires sur chaque point. (248-249)
Commentaire
Les récits d'Underhill et de Mason montrent clairement qu'il y avait peu de guerriers dans le fort et que les habitants, qui auraient dû être considérés comme des non-combattants puisqu'il s'agissait de femmes et d'enfants, fuyaient ou tentaient de se cacher plus souvent qu'ils ne se défendaient. Malgré tout, le massacre fut salué comme une grande victoire et John Winthrop déclara un jour d'action de grâce pour honorer le retour sain et sauf des braves soldats qui y avaient pris part. Les Anglais comptèrent deux morts et 26 blessés contre 700 Pequots qui n'avaient riposté qu'un minimum. Même si les récits de première main précisent les détails du massacre, celui-ci fut salué comme une grande victoire des forces du bien sur le mal. Le récit d'Underhill comprend le passage suivant:
Lorsqu'un peuple a atteint un tel degré de sang et de péché contre Dieu et contre l'homme, et que tous les complices sont impliqués dans l'action, [Dieu] n'a aucun respect pour les personnes, mais il les herse, les scie et les soumet à l'épée, et à la mort la plus terrible qui soit. Parfois, l'Écriture déclare que les femmes et les enfants doivent périr avec leurs parents. Parfois le cas diffère ; mais nous ne le contesterons pas maintenant. Nous avions suffisamment de lumière de la parole de Dieu pour nos actions. (Warren, 91)
L'association du massacre avec le Dieu chrétien et un jour d'action de grâce est à l'origine des protestations modernes des américains de souche contre le jour férié de Thanksgiving aux États-Unis, et ce à juste titre. S'inspirant des récits de l'Ancien Testament où les héros hébreux frappèrent les ennemis de Dieu, les colons anglais caractérisèrent les Pequots comme étant manifestement mauvais et dignes d'être détruits, même si les dirigeants de la colonie de la Baie du Massachusetts avaient auparavant accepté l'explication pour les meurtres de Stone et d'Oldham et, très probablement, compris que les Pequots ne pouvaient que très difficilement payer le tribut qui leur était demandé.
Influence du massacre des Indiens de 1622
Le massacre de Fort Mystic en 1637, loin d'être un triomphe du bien sur le mal, n'était rien d'autre que la solution anglaise pour démanteler l'accord commercial profitable entre les Pequots et les Hollandais et avoir accès aux terres des Pequots. Le seul semblant de justification de l'attaque était le souvenir que les colons anglais gardaient du soi-disant massacre indien de 1622 à la colonie de Jamestown en Virginie, qui les hantait. Le 22 mars 1622, Opechancanough (1554-1646), chef de la confédération Powhatan de Virginie, avait attaqué les colonies qui s'étaient développées après l'établissement de Jamestown, tuant 347 colons en une seule matinée. La nouvelle de cette attaque était parvenue en Nouvelle-Angleterre dans le mois qui suivit. La crainte d'une autre action de ce genre contre les colons de Nouvelle-Angleterre était constante et, après les raids des Pequots au cours des mois précédant le massacre, elle se serait sans doute intensifiée.
Cette crainte n'était pas non plus totalement infondée. Comme nous l'avons vu, les Pequots avaient essayé de convaincre les Narragansetts de s'allier à eux pour accomplir exactement ce qu'Opechancanough avait tenté à Jamestown en 1622: chasser les Anglais du territoire. William Bradford, dans son ouvrage Of Plymouth Plantation, décrit la proposition des Pequots:
Les Pequots... avaient cherché à faire la paix avec les Narragansetts et avaient utilisé des arguments très pernicieux pour les persuader: les Anglais étaient des étrangers, et commençaient à envahir leur pays, et les en priveraient à terme si on les laissait ainsi s'accroître. Si les Narragansetts aidaient les Anglais à soumettre les Pequots, ils ne feraient qu'ouvrir la voie à leur propre défaite, car les Anglais les subjugueraient à leur tour bientôt; mais s'ils écoutaient leurs conseils, ils n'auraient pas à craindre la force des Anglais, car ils ne leur feraient pas une guerre ouverte, mais mettraient le feu à leurs maisons, tueraient leur bétail et leur tendraient des embuscades pendant leurs déplacements, ce qu'ils pourraient faire sans grand danger pour eux-mêmes. (Livre II ; ch. 18)
Les colons eurent vent de cette proposition par l'intermédiaire de Roger Williams, qui parlait l'algonquin et servait d'interprète, mais on ne sait pas exactement quand ils l'apprirent. Cependant, même en tenant compte de la crainte d'une attaque organisée par les autochtones contre les colonies, le massacre de Fort Mystic ne peut en rien être justifié, car il s'agissait principalement d'une attaque contre des femmes et des enfants sans défense. Le fait de présenter le massacre à la lumière des récits bibliques, avec les milices coloniales comme l'instrument de la justice de Dieu, permit certainement aux colons de se sentir mieux par rapport à leurs crimes, mais les récits d'Underhill et de Mason montrent encore des signes de culpabilité persistante qu'ils durent supprimer par la suite.
Conclusion
Sassacus et ses partisans se retirèrent dans la région de la Nouvelle Néerlande après la guerre, mais la nouvelle du massacre se répandit rapidement et d'autres tribus cherchèrent rapidement à devenir les amis des Anglais. Les Mohawks exécutèrent Sassacus et envoyèrent sa tête et ses mains aux Anglais dans l'espoir d'établir de bonnes relations. Les Pequots qui l'avaient accompagné restèrent avec les Mohawks ou firent demi-tour pour être réduits en esclavage, certains envoyés aux Bermudes ou aux Antilles et d'autres donnés comme esclaves aux propriétaires terriens locaux ou divisés entre les Mohegans et les Narragansetts conformément au traité de Hartford du 21 septembre 1638 qui attribuait également les meilleures terres le long de la rivière Connecticut - anciennement territoire Pequot - aux Anglais. La plupart des spécialistes actuels reconnaissent pleinement que la guerre avait été déclenchée dans le seul but de s'emparer des terres des Pequots et que le massacre de Fort Mystic était totalement injustifié et indéfendable.
Le massacre de Fort Mystic allait influencer les actions de la guerre du roi Philippe (1675-1678) en Nouvelle-Angleterre, tout comme le massacre des Indiens de 1622 avait influencé le massacre de Fort Mystic. Les tribus de la confédération Wampanoag sous le commandement de Metacom (également connu sous le nom de roi Philippe, 1638-1676) - ainsi que d'autres, dont les Narragansetts, qui n'étaient pas des combattants - furent massacrés sans distinction aucune par les Anglais; ils furent réduits en esclavage, placés dans des réserves et leurs terres saisies pour la colonisation après la défaite des Wampanoag.
La guerre du roi Philippe, à son tour, définit la politique des colons pour l'avenir qui consista à expulser les tribus indigènes de leurs terres ancestrales et à les repousser de plus en plus loin des colonies anglaises, créant ainsi le système de réserves grâce auquel les anciens propriétaires des terres pouvaient être contenus et neutralisés en tant que menace potentielle. Heureusement, de nombreuses tribus indigènes ont survécu aux efforts génocidaires des Anglais et, à l'heure actuelle, elles font des progrès considérables pour récupérer leurs droits fonciers, leur langue et leur patrimoine culturel.