L'Empire portugais fut créé à partir du XVe siècle et finit par s'étendre des Amériques au Japon. Il s'agissait très souvent, de centres commerciaux côtiers dotés de fortifications défensives, mais il y avait également de plus grandes colonies territoriales comme le Brésil, l'Angola et le Mozambique. Les Européens blancs dominaient le commerce, la politique et la société, mais il y avait aussi un important mélange de races et, dans de nombreux endroits, des personnes d'ascendance mixte se hissèrent à des positions de richesse et de pouvoir dans les colonies.
Les Portugais donnèrent le départ de leur empire en partant à la recherche de l'or de l'Afrique de l'Ouest, puis en prenant part au commerce des épices de l'Orient. En outre, on espérait qu'il pourrait bien y avoir des États chrétiens en Asie qui pourraient devenir des alliés utiles dans les sempiternelles batailles du christianisme contre les califat islamiques. De nouvelles terres pour l'agriculture, de la richesse et de la gloire pour les aventuriers coloniaux, et les ambitions des missionnaires étaient d'autres motivations dans la formation d'un empire.
Les carraques créèrent un réseau maritime reliant Lisbonne à toutes ses colonies à l'ouest et à l'Estado da India («Empire portugais d'Asie») à l'est, non sous lequel l'empire portugais était connu à l'est du Cap de Bonne-Espérance. Des produits comme l'or, l'ivoire, la soie, la porcelaine Ming et les épices furent transportés et échangés dans le monde entier. Un autre commerce important était celui des esclaves, provenant d'Afrique de l'Ouest et du Sud et utilisés comme main-d'œuvre dans les plantations des îles de l'Atlantique Nord et des Amériques.
Les principales colonies
Les colonies les plus importantes de l'Empire portugais étaient :
- Madère (fondée en 1420)
- Açores (1439)
- Cap-Vert (1462)
- São Tomé-et-Principe (1486)
- Cochin portugais (1503)
- Mozambique portugais (1506)
- Goa portugais (1510)
- Malacca portugais (1511)
- Hormuz portugais (1515)
- Colombo portugais (1518)
- Brésil portugais (1532)
- Macao portugais (vers 1557)
- Nagasaki portugais (vers 1571)
- Angola portugais (1571)
Les îles de l'Atlantique Nord
Les Portugais étaient des marins intrépides et il est donc tout à fait approprié que leurs premières colonies aient été des îles relativement éloignées. À la recherche de nouvelles ressources et de nouvelles terres susceptibles de résoudre le déficit du Portugal en matière de blé, les marins naviguèrent vers le milieu de l'océan Atlantique inconnu. Les navigateurs portugais purent monter ces expéditions grâce à des soutiens aussi riches et puissants que le prince Henri le Navigateur (alias Infante Dom Henrique, 1394-1460). Un autre avantage incommensurable était la conception innovante des navires et l'utilisation de la voile triangulaire latine.
Le premier groupe d'îles colonisées fut l'archipel volcanique et inhabité de Madère. Avec un sol volcanique riche, un climat doux et des précipitations suffisantes, les îles étaient utilisées pour cultiver du blé, des vignes et de la canne à sucre. À bien des égards, la colonisation portugaise de Madère établirait le modèle que toutes les autres colonies copièrent par la suite. La Couronne portugaise divisa les îles et distribua des «capitaineries» (donatarias) dans le cadre d'un système féodal conçu pour encourager les nobles à financer le développement agricole et commercial. La Couronne conservait la propriété générale, mais chaque capitaine (donatario) se voyait accorder certains privilèges financiers et judiciaires et, à son tour, il donnait de plus petites parcelles de ses terres (semarias) pour le développement par ses hommes qui devaient défricher le terrain et commencer à cultiver avant un certain nombre d'années. Ces capitaineries devinrent héréditaires dans de nombreux cas. Les colons étaient attirés par l'espoir d'une vie meilleure, mais il y avait, comme il y en aurait dans toutes les futures colonies, d'autres immigrants moins désirables. Il s'agissait d'indésirables (degregados), de personnes non désirées par les autorités portugaises qui furent transportées de force dans les colonies telles que des condamnés, des mendiants, des prostituées réformées, des orphelins, des juifs et des dissidents religieux.
Les plantations de canne à sucre créées à partir de 1455 sont un autre exemple de la façon dont Madère devint un modèle colonial. Le succès de cette culture et son important besoin en main-d'œuvre conduisit à l'importation d'esclaves d'Afrique de l'Ouest pour y travailler. Le système de plantation esclavagiste devint un élément important de l'économie du Nouveau Monde, ce qui déboucha sur le terrible trafic humain qu'était la traite des esclaves à travers l'Atlantique.
Après Madère, et suivant le même schéma, il y a eut la colonisation portugaise des Açores et du groupe des îles du Cap-Vert. Ces colonies devinrent toutes des ports d'escale inestimables pour les navires en provenance de l'Inde et des Amériques. Les Portugais n'étaient pas sans rivaux pour ces colonies. Le Portugal et l'Espagne se disputèrent au sujet de la possession des îles Canaries, mais le traité d'Alcáçovas-Toledo de 1479-80 et le traité de Tordesillas de 1494 définirent deux sphères d'influence qui englobaient audacieusement le monde entier. L'imprécision de ces accords provoqua plus tard des problèmes tels que le droit du Portugal à de futures découvertes en Afrique et celui de l'Espagne vers des îles situées au-delà des Canaries, intérêts qui furent finalement identifiés comme les Caraïbes et même les Amériques.
Les îles de l'Atlantique Nord permirent à la Couronne portugaise d'accéder directement à l'or de l'Afrique de l'Ouest, évitant ainsi les États islamiques d'Afrique du Nord. Un obstacle important avait été le cap Bojador, qui semblait empêcher les voiliers de se rendre vers le sud, puis de rentrer chez eux en Europe. Les îles de l'Atlantique et la mise en place d'un cap audacieux loin de la côte africaine pour utiliser au mieux les vents, les courants et les zones à haute pression fournirent la solution idéale. Les navigateurs portugais pouvaient désormais naviguer vers le sud en toute confiance, et le résultat final fut l'ouverture de l'Asie aux navires européens.
Afrique de l'Ouest et l'esclavage
Les Portugais, désireux d'accéder au commerce ouest-africain de l'or et du sel, établirent plusieurs comptoirs de commerce fortifiés le long de la côte sud (Ghana moderne), comme à Elmina en 1482. Cependant, les maladies tropicales, le manque de main-d'œuvre et la réticence des dirigeants locaux à autoriser l'exportation d'esclaves mâles signifiaient que, au moins au début, les profits étaient limités. Les chefs africains étaient désireux d'échanger contre des armes à feu, mais les Portugais ne voulaient pas s'en séparer. Une meilleure stratégie se concentra sur les îles inhabitées de São Tomé-et-Principe, situées au large de la côte sud de l'Afrique de l'Ouest, colonisées à partir de 1486. Les deux îles furent fortement impliquées dans la traite des esclaves et, comme dans l'Atlantique Nord, le modèle des capitaineries fut utilisé.
Les colons des îles furent autorisés à commercer avec les communautés d'Afrique de l'Ouest, et ils se démontrèrent plus habiles que ceux qui firent des tentatives quelques décennies auparavant. Des colonies commerciales portugaises furent établies sur le continent aussi loin que Luanda au sud (dans l'Angola moderne) pour profiter du commerce africain bien organisé qui permettait de voyager à l'intérieur le long des principaux fleuves (les fleuves Gambie et Sénégal par exemple) jusqu'à la côte. Les biens acquis comprenaient l'or, l'ivoire, le poivre, la cire d'abeille, le caoutchouc et du bois tinctorial. Les esclaves (hommes et femmes) étaient acquis du Royaume du Kongo et du Royaume du Bénin, dont les dirigeants étaient avides de produits commerciaux européens comme le coton, les miroirs, les couteaux et les perles de verre. Les îles servaient de point de rassemblement pour les esclaves et de lieu d'embarquement des provisions pour les navires qui transporteraient la cargaison humaine. Un esclave sur cinq mourait à bord de ces navires, mais pas moins d'un esclave sur deux mourait entre la capture initiale et l'arrivée à leur destination finale. La traite des esclaves de l'Atlantique prit fin au milieu du XIXe siècle, mais même après cela, les esclaves continuèrent d'être importés à São Tomé-et-Principe jusqu'à la prohibition en 1908. Les esclaves furent ensuite remplacés par des ouvriers africains qui devaient être rapatriés après un certain nombre d'années, mais leurs conditions de vie étaient peu différentes de celles que leurs prédécesseurs d'esclaves avaient connues.
Il y eut peu de tentatives de conquête territoriale en Afrique de l'Ouest, car le commerce était prospère et les Européens ne possédaient pas les ressources militaires nécessaires à une telle politique. Certaines colonies furent fortifiées, mais cela se faisait généralement avec l'autorisation du chef tribal africain local. Les Européens et les Africains déplacés se marièrent sur les îles telles que le groupe du Cap-Vert, créant une culture afro-portugaise, qui avait une forte influence religieuse et artistique africaine. Ce sont très souvent ces cap-verdiens mixtes libres (mulâtres) qui s'installèrent dans les postes de traite de la côte africaine.
Il y eut des mesures visant à éliminer les chefs africains et à acquérir directement des esclaves de l'intérieur, mais cette politique détériora les relations avec le Kongo. La situation s'empira suite à une réaction contre les missionnaires chrétiens alors que les activités culturelles traditionnelles et les loyautés tribales se dégradaient. Les Européens furent obligés de se déplacer plus loin sur la côte vers la région de Ndongo, où leur ingérence entraîna une série de guerres dans une région qui allait bientôt devenir l'Angola portugaise.
Afrique de l'Est
Lorsque, en 1498, l'explorateur Vasco de Gama (c. 1469-1524) fit le tour du Cap de Bonne-Espérance et navigua dans l'océan Indien, les Portugais eurent soudain accès à un tout nouveau réseau commercial impliquant des Africains, des Indiens et des Arabes. Cela durait depuis des siècles, mais lorsque les Portugais arrivèrent, le commerce devint violent. À l'aide de navires et de canons de meilleure qualité, les Portugais se débarrassèrent des navires rivaux, les équipages furent arrêtés ou tués et leurs cargaisons confisquées. Le fait que la plupart des commerçants aient été musulmans était une motivation supplémentaire pour les Européens qui avaient toujours leur mentalité de Croisés.
Les attaques portugaises contre les villes commerciales indépendantes de la côte swahili et sur le royaume intérieur de Mutapa au sud (Zimbabwe/Zambie) n'apportèrent aucun avantage tangible car les commerçants se déplacèrent tout bonnement vers le nord ou les évitèrent. Lorsque les Portugais prirent et fortifièrent des villes telles que Malindi, Mombasa, Pemba, Sofala et Kilwa, ils découvrirent qu'ils avaient déjà perdu les partenaires commerciaux de ces ville-États. Ensuite, les Arabes omanais du golfe Persique arrivèrent. Soucieux de garder la mainmise sur leurs routes commerciales de la mer Rouge et de rétablir les réseaux commerciaux séculaire, les Omanais emménagèrent sur la côte swahili et saisirent de nombreuses villes, dont Mombasa portugaise en 1698. L'absence de succès en Afrique de l'Est conduisit finalement les portugais plus au sud vers le Mozambique, mais ils avaient déjà la tête ailleurs, vers le potentiel d'une région du monde nouvellement découverte: l'Inde.
L'Inde et les épices
L'un des principaux objectifs de Vasco de Gama était de trouver une route maritime vers l'Asie afin que le Portugal puisse accéder directement au commerce lucratif des épices. Des épices comme le poivre, le gingembre, les clous de girofle, la muscade et la cannelle atteignaient des prix élevés sur les marchés de l'Angleterre à la Chine. Quand il atteignit la côte indienne de Malabar, le marin trouva en effet un commerce soutenu et richissime. La ville de Calicut (Kozhikode) se révéla hostile, mais d'autres expéditions portugaises suivirent, et le grand rival de Calicut, Cochin (Kochi), semblait plus prometteur. Un accord fut conclu avec le dirigeant local, une forteresse fut construite en 1503, et les Portugais s'y installèrent pour faire de belles affaires. Malheureusement, ils firent face à un problème majeur: très peu de gens s'intéressaient à leurs produits européens. Par conséquent, ils adoptèrent la même stratégie que sur la côte swahili. Des navires et des canons de meilleure qualité furent utilisés pour s'emparer du réseau commercial de l'océan Indien par la force et établir un monopole sur le commerce des épices. D'autres villes côtières furent saisies ou établies, notamment Goa, qui remplaça Cochin comme capitale de l'Empire portugais d'Asie en 1530.
C'est à Goa que résidait le vice-roi portugais de l'Inde, il était le sommet d'une pyramide de pouvoir créée dans le but premier de contrôler le commerce. Le vice-roi était le gouverneur civil et militaire de l'Inde portugaise et n'avait de compte à rendre qu'au roi du Portugal. À Lisbonne, le conselho ultramarino conseillait le monarque sur les affaires des colonies d'outre-mer, tandis que la Casa da India était l'agence de la Couronne qui supervisait toutes les communications et les échanges commerciaux avec l'Asie.
À Goa et dans la plupart des autres colonies, il y avait une câmara, un conseil qui se prononçait sur les questions locales telles que les impôts. Les affaires religieuses étaient dirigées par un archevêque ou un évêque, et des églises, des monastères, des couvents et des hôpitaux furent créés par tous les principaux ordres religieux, mais en particulier par la Société jésuite. Les branches de la fraternité Misericórdia offraient des services de protection sociale essentiels aux pauvres. Les questions juridiques relevaient de la responsabilité de la Haute Cour de Goa et des tribunaux locaux de chaque colonie. Un capitaine dirigeait la force militaire locale qui résidait habituellement dans un fort, et un commissaire était responsable du commerce royal et de l'extraction des droits de douane lucratifs des autres types de commerce. Tel était le modèle colonial appliqué dans la plupart des colonies.
Les Portugais tentèrent sérieusement d'établir un monopole sur le commerce des épices entre l'Asie et l'Europe et au sein de l'Asie elle-même. Les mers n'étaient plus libres. Les commerçants sans permis étaient arrêtés ou exécutés et leurs marchandises confisquées. Certains ports étaient restreints, les navires devaient être munis d'un passeport délivré par le Portugal (cartaz) et étaient souvent obligés de voyager dans des convois protégés par le Portugal (cafilas). Les droits de douane étaient facturés dans les ports, et ils représentaient environ 60 % de l'ensemble des recettes portugaises en Orient. Néanmoins, de nombreux commerçants évitaient tout bonnement les Européens, certaines villes organisèrent une résistance armée, et l'empire était tout simplement trop grand et la main-d'œuvre était trop faible pour contrôler ne serait-ce qu'une petite partie du commerce oriental. Ces considérations pratiques amenèrent les Portugais à relâcher leur engouement pour les monopoles commerciaux au fur et à mesure que l'empire évoluait.
Extrême-Orient
Une autre stratégie portugaise visant à contrôler le commerce consistait à trouver la source de ces si précieuses épices. Nombre d'entre-elles provenaient d'un petit groupe insulaire d'Indonésie, des îles aux épices (les îles Maluku ou les Moluques). La plupart des épices de ces îles étaient expédiées à Malacca, sur la côte sud-ouest de la péninsule malaise qui contrôlait le détroit malais menant de l'océan Indien à la mer de Chine méridionale. Une flotte portugaise dirigée par Afonso de Albuquerque (1453-1515) prit le contrôle de Malacca en 1511, et les portugais purent acquérir le bois de santal depuis leurs colonies informelles du Timor dès 1512.
Les Portugais étaient désireux d'accéder au marché chinois de la soie et la colonie portugaise de Macao fut donc établie sur une péninsule du delta de la rivière des Perles, dans le sud de la Chine, près de Guangzhou (Canton). De même, la colonie de Nagasaki sur la côte nord-ouest de l'île de Kyushu, au Japon, fut fondée vers 1571, donnant accès aux biens commerciaux de ce pays, le plus important étant l'argent. Chargés de marchandises destinées au commerce, les navires portugais naviguaient régulièrement entre Lisbonne, Goa, Malacca, Macao et Nagasaki, leur colonie la plus à l'est. Le gouvernement japonais expulséa tous les étrangers du continent en 1639 dans le cadre d'une politique permanente d'isolement et de réaction contre la propagation du christianisme, et Nagasaki dut donc être abandonnée.
Le Brésil
Le Brésil fut «découvert» par les Portugais en 1500, et il deviendrait la plus importante de toutes leurs colonies. Le Brésil était riche en ressources naturelles telles que les feuillus, les diamants et l'or (de la région du Minas Gerais). Des capitaineries furent distribuées, et São Vicente devint le premier établissement portugais en 1532. Le premier gouverneur du Brésil fut nommé en 1549, et le Brésil devint une colonie officielle de la Couronne. La capitale fut établie à Salvador da Bahia (remplacée par Rio de Janeiro en 1763). Un vice-roi y fut nommé en 1572.
Le modèle de plantation coloniale avec des esclaves amérindiens puis africains fut introduit à une échelle beaucoup plus grande que partout ailleurs, et le Brésil devint le premier producteur mondial de sucre puis de tabac. Au cours du premier quart du XVIIe siècle seulement, 150 000 esclaves africains traversèrent l'Atlantique vers l'Amérique du Sud. L'abolition de la traite des esclaves par un Brésil indépendant en 1853 mit finalement fin au commerce transatlantique des esclaves.
Les Amérindiens Tupi-Guarani dont les villages et la culture furent systématiquement détruits, obligeant ceux qui restaient à fuir loin à l'intérieur de la forêt tropicale, furent également victimes de la colonisation. Il fallut attendre 1755 pour que les Amérindiens soient reconnus comme sujets libres à part entière de la Couronne portugaise.
Au Brésil, la société coloniale était, comme ailleurs, à couches multiples. Les Européens avaient le statut le plus élevé, et ils exhibaient leur statut social à travers des vêtements extravagants et le nombre de serviteurs, esclaves et hommes armés qu'ils possédaient. Les Européens étaient divisés en trois classes: les Européens, les Européens nés dans les colonies et les Européens de race mixte (il y avait très peu de femmes européennes dans les colonies). En plus de cela, il y avait quatre autres couches basées sur l'appartenance à la noblesse, le clergé, l'armée et tous les autres (subdivisés en mariés et célibataires). Il y avait également des Européens en visite, tels que des commerçants maritimes et des marchands locaux de la région au sens large. Ensuite, il y avait la population locale qui constituait de loin la majorité de la population de quelque colonie que ce soit, qui pouvait être divisée par ses propres rangs sociaux et par des facteurs tels que leur conversion au christianisme. Tout en bas de la société coloniale se trouvaient les esclaves.
Afrique australe
La région de l'Angola fut colonisée par les Portugais à partir de 1571, et elle devint la première colonie territoriale européenne en Afrique (par opposition à une simple cité-état ou une colonie côtière). Le Royaume de Ndongo (formé vers 1500) s'effondra, mais pas avant d'être exploité en tant qu'allié contre le Kongo au nord. Les Européens avaient l'avantage des armes à feu et la première conquête territoriale du Portugal avait donc commencé. C'était un prélude inquiétant à ce qui devait se passer dans toute l'Afrique au cours des siècles à venir.
Une fois de plus, les colons portugais se mêlèrent aux populations locales de la région de l'Angola pour créer une race mixte connue sous le nom de luso-africains. Les colons et leurs descendants, basés à Luanda et dans quelques autres colonies côtières, eurent du mal à affirmer le contrôle de l'intérieur de l'Angola où le tout nouveau royaume de Matamba était en plein essor. Un siècle de combats s'ensuivit, connu sous le nom de guerres angolaises. Cette colonie s' avéra être une vraie déception pour le Portugal. Les mines d'argent à l'intérieur du pays dont tant parlaient se révélèrent une simple légende, les ressources étaient limitées et les espoirs de répandre le christianisme étaient trop ambitieux. Certains colons et commerçants privés cependant prospérèrent, et ce sont eux qui assurèrent la poursuite du principal commerce de la colonie: les esclaves. À la fin du XVIe siècle, près de 10 000 esclaves par an étaient exportés de l'Angola pour être expédiés directement depuis Luanda vers le Brésil et ailleurs dans les Amériques. Les communautés angolaises, déjà touchées par la variole et d'autres maladies causées par les Européens, furent dévastées par ce commerce.
De l'autre côté de l'Afrique australe, les Portugais avaient créé une autre grande colonie territoriale: le Mozambique (en adoptant le nom d'Afrique orientale portugaise au XIXe siècle). Les premiers colons portugais arrivèrent sur l'île du Mozambique à partir de 1506 quand une capitainerie y fut créée. Le Mozambique n'était pas aussi riche en or qu'ils l'espéraient, mais il y avait de l'ivoire et des esclaves. Le Mozambique devint une partie de l'Empire portugais d'Asie à partir de 1571 (mais il en sortit en 1752), et les carraques échangeaient directement avec Goa dans le cadre de la route connue sous le nom de Carreira da India (route des Indes). À l'intérieur,du pays se développa un système connu sous le nom de prazo, où les chefs africains donnaient des terres, des droits de commerce et des hommages aux Portugais et aux Afro-Portugais, nomination alors officiellement reconnue par la Couronne portugaise. En retour, la personne nommée (un muzungo) devait veiller à ce que justice soit rendue sur son territoire, superviser les rituels traditionnels et approuver les chefs des petits villages de leur juridiction. Pour maintenir leur position, les muzungos avaient une armée privée de serviteurs (chicunda) qui pouvait compter plusieurs milliers d'Africains. En 1637, il y avait au moins 80 prazos et la plupart étaient complètement indépendants de la faible administration portugaise de la capitale Maputo.
La Couronne portugaise laissa ensuite que la colonie soit exploitée par des entreprises privées telles que la société Mozambique et la société Niassa. L'absence d'administration centrale et le succès des Britanniques en Afrique australe mirent également fin à leur rêve d'unifier leurs deux colonies africaines d'Angola et du Mozambique.
Déclin, décolonisation et héritage
Outre la menace souvent toujours présente par les dirigeants locaux, les Portugais étaient confrontés à une concurrence féroce de la part d'autres puissances maritimes européennes qui eurent très vite des vues sur leur empire. Cela était particulièrement vrai compte tenu du manque d'entretien des forts portugais et de l'isolement général des villes côtières qui n'avaient aucun soutien de la part de la population locale pour leur venir en aide. Les corsaires anglais et français prenaient un malin plaisir à attaquer les navires commerciaux portugais alors qu'ils naviguaient en haute mer. Une autre menace majeure survint, ironiquement, sous le couvert d'un explorateur portugais, Fernand de Magellan (c. 1480-1521), qui, au service de l'Espagne en 1519-1522, fit le tour de la pointe sud de l'Amérique du Sud et fut le pionnier d'une route maritime traversant l'océan Pacifique vers l'Asie de l'Est. L'expédition finit par faire le tour du globe, mais c'est l'accès au commerce des épices qui était crucial. D'autres pays européens suivirent le sillage de Magellan, et d'un jour à l'autre, les Portugais n'eurent plus aucun espoir d'obtenir un monopole commercial à l'Est.
La menace la plus grande et la plus répandue pesant sur les territoires portugais venait des Néerlandais qui attaquèrent le Mozambique au cours de la première décennie du XVIIe siècle, de Macao en 1622 et 1626, et de l'Angola en 1641. Dans les années 1620 et 1630, les Néerlandais attaquèrent et occupèrent certaines parties du nord du Brésil. Ils se saisirent de Malacca en 1641, Colombo en 1656 et Cochin en 1663. La Grande-Bretagne était une autre menace croissante, et ils aidèrent les Arabes à reprendre Hormuz en 1622.
Au XVIIIe siècle, les Portugais brésiliens furent obligés de conférer des droits commerciaux très favorables aux puissances maritimes supérieures de la Grande-Bretagne, de la France et des Pays-Bas. Les Britanniques occupèrent même Goa de 1799 à 1815. Les autres menaces étaient internes. Au Brésil, les citoyens voulaient des droits égaux pour tous les citoyens, et ils obtinrent l'indépendance en 1822. Ils déclarent Pedro Ier (r. 1822-1831) roi et premier empereur du Brésil. Pedro était le fils de João VI du Portugal (r. 1816-1826), et les deux pays forgèrent des liens étroits par la suite.
Au début XXe siècle, de nombreuses colonies portugaises avaient été perdues à causes des puissances rivales ou des guerres internes. Parmi celles qui restaient, Madère et les Açores étaient devenues des régions autonomes du Portugal, et Goa une partie de l'Inde en 1962. Le gouvernement portugais, alors dictature militaire sous António de Oliveira Salazar (r. 1932-1968), refusa de voir la futilité de la lutte contre les mouvements indépendantistes africains, et des guerres sanglantes eurent lieu en Angola et au Mozambique. Les îles du Cap-Vert, São Tomé-et-Principe, le Timor oriental, l'Angola et le Mozambique obtinrent tous leur indépendance du Portugal en 1975. Macao retourna à la Chine en 1999.
L'empire colonial portugais provoqua de nombreuses catastrophes sur les peuples autochtones: l'esclavage, la guerre, la perturbation des réseaux commerciaux, la fin des activités culturelles traditionnelles, la déforestation et les maladies, pour n'en citer que quelques-unes. Parmi les autres conséquences, mentionnons la prévalence continue de la langue portugaise et de la religion catholique dans de nombreuses régions du monde aujourd'hui. Les Portugais étaient également directement responsables de la propagation de la flore et de la faune dans le monde entier, avec parfois des effets désastreux sur les écosystèmes locaux, mais aussi avec des succès notables en tant que cultures comme le manioc, le maïs et la canne à sucre, qui sont devenues communes dans de nouveaux endroits. Enfin, les Portugais furent les premiers à bâtir un véritable empire mondial sur plusieurs continents, même s'il s'agissait d'un empire plutôt bancal et décousu. Leur plus grand héritage, peut-être, est le fait regrettable que d'autres puissances européennes comprirent alors, grâce à eux, les possibilités d'impérialisme et commencèrent à exploiter davantage les peuples du monde entier et le colonialisme devint non seulement une question de contrôle du commerce mais aussi du territoire, des ressources et de la population.