La rébellion de Monmouth de juin-juillet 1685 impliqua James Scott, duc de Monmouth (1649-1685), fils illégitime de Charles II d'Angleterre (r. de 1660 à 1685) qui tenta de s'emparer du trône de son oncle Jacques II d'Angleterre (r. de 1685 à 1688). La fragile armée de Monmouth fut vaincue par une armée royaliste professionnelle à Sedgemoor dans le Somerset le 6 juillet.
Bien que de nombreux protestants n'aient pas vraiment voulu de Jacques II, fervent catholique, en tant que roi, aller jusqu'à organiser une rébellion armée pour le détrôner était un pas de trop pour la plupart d'entre eux. Jacques avait déjà promis que ses filles et ses héritiers seraient élevés en bons protestants, et beaucoup étaient donc prêts à attendre leur heure. Le duc de Monmouth fut capturé après la répression de la rébellion et, bien qu'il ait plaidé pour sa vie, son oncle ne montra aucune pitié et le fit exécuter. Le roi veilla également à ce que des centaines de rebelles ou de personnes soupçonnées de les soutenir soient pendus, fouettés ou déportés dans les colonies pour affronter une vie de travaux forcés.
La maison des Stuart
Lorsque Charles II d'Angleterre mourut sans héritier en 1685, la couronne fut transmise à son frère cadet qui devint Jacques II d'Angleterre (et Jacques VII d'Écosse). Il y avait pourtant eu un autre choix : James Scott, duc de Monmouth (né le 9 avril 1649), le fils illégitime de Charles II (bien que certains historiens modernes se demandent si Monmouth était bel et bien son fils). Monmouth devint le favori de son père qui le reconnut comme son fils et accorda le duché au beau jeune homme en février 1663. Cette faveur n'empêcha pas le duc d'essayer de s'emparer du trône, ou du moins de faire en sorte qu'un groupe d'anciens combattants de la guerre civile anglaise, les Roundheads (parlementaires), complotent en son nom. Le complot de Rye House de 1683, du nom d'une ferme de Hoddesdon, dans le Hertfordshire, tenta de renverser Charles II en capturant le roi et son frère James sur le chemin du retour des courses de Newmarket à Londres. Cette escapade mal planifiée échoua grâce à un caprice du destin. Un incendie se déclara à l'hippodrome et la course fut annulée, ce qui permit aux souverains de rentrer chez eux plus tôt et de manquer le rendez-vous de leurs ravisseurs. Les conspirateurs furent arrêtés et exécutés, mais Monmouth fut traité avec clémence et ne fut qu'envoyé qu'en exil aux Pays-Bas.
L'historien N. Jones décrit Monmouth comme "un séducteur charmant mais faible" (351). La force de la revendication renouvelée de Monmouth en 1685 résidait en fait dans le fait qu'il était protestant, alors que Jacques II s'était converti au catholicisme en 1668 et que sa seconde épouse, Marie de Modène (d. 1718), était également catholique. Depuis les règnes troublés des Tudors, l'Angleterre était un pays protestant, mais il y avait encore de nombreux catholiques qui rêvaient de rétablir leur foi en tant que foi officielle du royaume. Les deux chambres du Parlement étaient également divisées, les "Whigs" de la Chambre basse souhaitant promouvoir le protestantisme et les "Tories" de la Chambre des Lords voulant maintenir la ligne de succession des Stuart telle qu'elle devait être. En 1679, Jacques avait même été exclu de la succession par le Parlement en raison de sa foi, mais son frère l'avait fait réintégrer. La condition était que Jacques s'assure que ses deux enfants légitimes survivants, Marie (née en 1662) et Anne (née en 1665) - tous deux issus de son premier mariage - soient élevés dans la religion protestante.
La rébellion protestante
Le roi Jacques avait au moins minimisé ses sympathies catholiques dans sa cérémonie de couronnement en éliminant la partie de la communion. Pourtant, les rumeurs selon lesquelles il avait l'intention de ramener l'Angleterre au catholicisme n'avaient pas disparu. Certains prétendaient même que la reine était en fait la fille d'un pape, tant l'atmosphère de suspicion est grande.
En mai 1685, le comte d'Argyll prit la tête d'un soulèvement anticatholique en Écosse. Impliquant principalement les Campbells protestants, dont Argyll était le chef, le soulèvement fut de faible ampleur et s'éteignit après la capture d'Argyll lors de sa marche vers Glasgow. Les exilés protestants aux Pays-Bas étant impliqués dans les rébellions d'Argyll et de Monmouth, il est probable qu'elles aient été planifiées pour défier simultanément Jacques II au nord et au sud.
Monmouth avait rassemblé autour de lui environ 80 exilés qui se berçaient d'illusion en pensant qu'ils pourraient obtenir un large soutien des protestants en Angleterre. Pour renforcer ses prétentions à la légitimité, Monmouth affirma, ou plus exactement encouragea la rumeur, que son père avait en fait épousé sa mère Lucy Walter à La Haye et que la preuve de ce mariage se trouvait dans une mystérieuse boîte noire. Monmouth décrivit Jacques II tel un tyran absolu et son Parlement comme étant rempli de flagorneurs.
En juin 1685, le groupe de rebelles navigua sur trois navires jusqu'à Lyme Regis dans le Dorset et recruta les partisans qu'il put dans le sud-ouest de l'Angleterre. Cette région du royaume fut tout particulièrement choisie parce qu'elle était un bastion du protestantisme et du républicanisme (Monmouth promettait une monarchie moins autoritaire). Ils réussirent à réunir 3 à 4 000 combattants, mais il s'agissait d'un néfaste mélange d'amateurs, d'aventuriers et de fermiers. Ils appartenaient tous aux classes inférieures, mais parmi eux se trouvait un certain Daniel Defoe (c. 1660-1731), futur auteur de Robinson Crusoé. La cavalerie de Monmouth n'était guère meilleure que son infanterie, composée de chevaux de qualité inférieure. Il n'y avait pas non plus de preuve d'un quelconque soulèvement de sympathisants ailleurs, comme à Londres par exemple. Néanmoins, il n'y avait plus de retour en arrière possible, le Parlement avait même mis une prime de £ 5000 sur la tête du duc. Ce qui serait connu comme la rébellion de Monmouth avait pris forme.
Bataille de Sedgemoor
L'armée de Monmouth, à l'allure minable, se débrouilla plutôt bien au début, battant la milice du comté dans plusieurs batailles mineures. Londres semblait être une cible trop importante pour les rebelles, et Monmouth choisit donc d'essayer de prendre l'important port de Bristol à la place. Le 6 juillet, une armée royale professionnelle les affronta à Sedgemoor, près de Bridgewater dans le Somerset, et l'histoire fut totalement différente des escarmouches avec la milice locale. Les royalistes étaient dirigés par John Churchill, le futur duc de Marlborough, bien que le commandement sur le champ de bataille ait été entre les mains du comte de Feversham. Monmouth espérait utiliser la surprise à son avantage, et c'est ainsi qu'il lança l'attaque. Malheureusement pour les rebelles, un fossé rempli d'eau leur barrait la route et entrava leur progression à tel point que les forces de Feversham furent alertées. Les royalistes ne firent qu'une bouchée de la cavalerie rebelle, et lorsque celle-ci fuit la lande, l'infanterie rebelle fut massacrée. Environ 500 personnes furent tuées et 1 500 furent faites prisonnières.
Monmouth réussit à échapper au carnage dès le début en s'enfuyant à cheval. Le duc se cacha dans les "Rhines", les terres marécageuses du Somerset. Se déplaçant vers la côte sud et traversant la New Forest, Monmouth fut obligé de chercher de la nourriture pendant une semaine. Enfin, l'homme qui voulait se faire roi fut surpris en train de dormir dans un fossé, il était déguisé en berger et ses poches étaient pleines de pois.
Vengeance
Monmouth demanda une audience à son oncle pour solliciter son pardon, mais bien que le roi lui ait accordé une telle rencontre au cours de laquelle Monmouth se jeta aux pieds de son souverain, Jacques ne se laissa pas attendrir. Monmouth proposa de révéler les noms de ses compagnons rebelles, mais le roi était déterminé à en finir avec celui qui avait osé le défier. Manifestement coupable de trahison et déclaré ainsi par le Parlement, aucun procès n'était nécessaire conformément à la la loi anglaise. Le jour de l'exécution de Monmouth fut fixé au 15 juillet. Ce jour fatidique était le jour de la Saint Swithun, du nom de l'évêque du IXe siècle, grand faiseur de miracles, mais Monmouth lui ne bénéficierait d'aucun sursis miraculeux. L'exécution fut l'une des décapitations les plus maladroites jamais réalisées, nécessitant cinq coups de hache, et ce malgré le fait que Monmouth avait donné un pourboire de six guinées à Jack Ketch, son bourreau, pour qu'il fasse un travail décent. En réalité, le bûcheron dut abandonner à mi-chemin, et la tâche macabre fut achevée à l'aide d'un couteau de boucher. Le cadavre de Monmouth fut emmené de Tower Hill, sa tête fut rattachée à son corps, puis il fut enterré sous le sol de l'église de Saint Pierre-aux-Liens dans la Tour de Londres.
De nombreux meneurs de la rébellion furent également condamnés à mort. Au total, 333 personnes furent condamnées à mort, beaucoup d'entre elles furent exécutées par pendaison et éviscérées alors qu'elles étaient encore conscientes. Environ 850 rebelles furent transportés pour une longue période de travaux forcés (servitude sous contrat) dans des plantations des Caraïbes. Tous ceux qui avaient eu le moindre lien avec la rébellion - hommes, femmes et enfants - furent condamnés à des peines moins sévères, comme la flagellation. La sévérité des décisions du Lord Chief Justice, George Jeffreys, fut telle que ces procès sont connus sous le nom d'"Assises sanglantes", ce qui n'améliora en rien la popularité du roi.
Les suites de la rébellion
Après la rébellion, Jacques commença à devenir plus ouvertement pro-catholique. Il nomma des catholiques à des postes clés du gouvernement, des tribunaux, de la marine et de l'armée ; même les nominations à l'université avaient une nette teinte catholique. Le roi ignora également certaines lois, en étoffa d'autres et renonça à des condamnations lorsqu'elles s'appliquaient à des individus catholiques qu'il favorisait, ce que l'on appellerait ses pouvoirs de dispense et de suspension. Des mesures officielles furent prises pour améliorer le statut des catholiques, comme la Déclaration d'indulgence d'avril 1687 (également appelée Déclaration de la liberté de conscience), qui améliorait en fait la tolérance religieuse pour toutes les confessions. Puis un procès important de l'archevêque de Canterbury et de plusieurs autres évêques se retourna contre lui et rendit le roi encore plus impopulaire.
Lorsque le roi finit par avoir un fils en juin 1688, Jacques François Édouard, les protestants virent la possibilité très réelle que le prochain monarque soit également catholique. Par conséquent, le protestant Guillaume d'Orange, petit-fils de Charles Ier d'Angleterre et époux de la fille de Jacques II, Marie (m. 1677), fut invité à envahir l'Angleterre et à devenir roi. Ce qu'il fit remarquablement facilement, sans effusion de sang, puisque le roi Jacques décida de fuir en France. Le prince d'Orange devint Guillaume III d'Angleterre (et Guillaume II d'Écosse, r. de 1689 à 1702), et régna conjointement avec son épouse, désormais reine Marie II d'Angleterre (r. de 1689 à 1694). Ce fut la Glorieuse Révolution de 1688, et bien que le Parlement ait vu ses pouvoirs s'accroître par rapport à la monarchie, la "révolution" réussit par le biais de moyens pacifiques là où la rébellion de Monmouth avait échoué : assurer la continuité permanente d'une monarchie protestante en Angleterre, en Écosse et en Irlande.