L'astrolabe était un instrument astronomique utilisé depuis le VIe siècle environ pour mesurer le temps et la position en déterminant l'altitude des corps célestes comme le Soleil et certaines étoiles. Les mesures étaient prises par rapport à l'horizon de l'observateur et au méridien, à l'aide d'une représentation ou d'une carte du ciel et d'une échelle de mesure gravée sur l'instrument lui-même.
Origines anciennes de l'astrolabe
Les origines de l'astrolabe sont obscures. L'instrument évolua probablement à partir de petits cadrans solaires portables de l'ancienne Méditerranée, qui comportaient parfois de multiples insertions de plaques afin d'assurer leur précision en différents endroits. Le plus ancien cadran de ce type provient de la ville romaine d'Herculanum, détruite par l'éruption du Vésuve en 79 de notre ère. L'historien R. Hannah note "Ces cadrans préfigurent l'astrolabe, la pièce d'horlogerie portable par excellence du Moyen Âge. Bien qu'aucun astrolabe antique n'ait survécu, l'instrument était très probablement une invention grecque tardive. Il utilisait la projection stéréographique pour représenter l'hémisphère céleste en deux dimensions" (Oleson, 751).
Le grand astronome antique Ptolémée (de 100 à 170 de notre ère) décrit la projection stéréographique et un astrolabe tridimensionnel composé d'anneaux semblables à la sphère armillaire dans son ouvrage du IIe siècle, Planisphaerium. Le dispositif pourrait avoir été inventé par Hipparque de Nicée (c. 190 - c. 120 av. J.-C.) au IIe siècle avant notre ère. L'Oxford Classical Dictionary note qu'"il est probable qu'Hipparque ait conçu l'astrolabe plan, dont le but était d'indiquer l'heure la nuit à partir de la position des étoiles" (188).
Les Grecs empruntèrent sans doute pour leur dispositif l'idée babylonienne de diviser un cercle en 360 degrés. D'autres auteurs anciens décrivent l'astrolabe en détail, notamment Jean Philopon (c. 490 - c. 570), qui écrivait au VIe siècle, mais qui utilisa le travail de Théon d'Alexandrie écrit deux siècles plus tôt. L'absence d'un exemple physique d'astrolabe dans le monde grec antique a donné lieu à des spéculations selon lesquelles l'appareil aurait pu être inventé ailleurs. Ce qui est plus certain, c'est que notre connaissance de l'astronomie ancienne et d'instruments tels que l'astrolabe n'est possible que parce que les textes grecs d'auteurs tels que Philopon et Théon ont survécu dans des traductions arabes avant de revenir en Europe au Moyen Âge et d'être traduits en latin.
La découverte en 1901, dans une épave près de l'île grecque d'Anticythère, du mécanisme d'Anticythère, datant du IIe ou du Ier siècle avant notre ère, prouve que les anciens peuples méditerranéens étaient capables de créer des dispositifs astronomiques aussi complexes. On pense que ce mécanisme était capable de prédire les mouvements des corps célestes à partir d'une position précise dans le présent. Contrairement au mécanisme d'Anticythère, qui est unique, l'astrolabe devint un instrument relativement courant.
Nous savons que les astrolabes furent largement utilisés à partir du VIe siècle et qu'ils se répandirent au Moyen Âge dans le monde arabe, dans l'Empire byzantin, en Inde et en Europe. Le transfert des connaissances vers l'Europe se fit par l'intermédiaire de l'Espagne islamique à partir de l'an 1000 environ. L'astrolabe devint ensuite un instrument crucial pour les études astronomiques pendant la Renaissance et la révolution scientifique. Les astrolabes étaient encore utilisés aux 18e et 19e siècles.
Objectif de l'astrolabe
L'astrolabe planisphérique était utilisé pour mesurer la position des étoiles, du Soleil et des planètes dans le ciel. En trouvant un point fixe, l'utilisateur pouvait alors tourner le cadran de l'astrolabe et obtenir une vue précise (bien que bidimensionnelle) de l'ensemble de l'hémisphère céleste. L'instrument pouvait être utilisé pour déterminer la hauteur d'éléments géographiques importants tels que les montagnes. Il pouvait également servir à mesurer le temps. Dans le monde musulman, les astrolabes étaient souvent équipés d'une carte spéciale qui permettait à l'utilisateur de trouver l'emplacement exact de La Mecque.
L'historien M. Latham donne la liste suivante, plus complète, des possibilités offertes par un astrolabe:
L'heure du jour peut être trouvée... d'autres éléments aussi faciles à déterminer sont l'heure de l'aube et du lever du soleil pour un jour donné; l'altitude méridienne du soleil, étant donné le degré du soleil; et, inversement, le degré, lorsque l'altitude méridienne est connue; la latitude de n'importe quel lieu; et les points cardinaux de la boussole. Les courbes des heures inégales au verso peuvent également être utilisées pour trouver l'heure du jour.
(167)
Au début de l'époque moderne, les navigateurs en mer utilisaient une adaptation de l'astrolabe comme aide à la navigation en mesurant les corps célestes afin de pouvoir calculer leur latitude. Cet instrument, connu sous le nom d'astrolabe de marine, était une adaptation simplifiée et plus lourde pour compenser le mouvement constant d'un navire en mer. Cette version de l'instrument comportait généralement de grands espaces au centre pour permettre au vent de souffler à travers l'instrument, ainsi qu'un métal plus épais à la base pour réduire le risque de balancement de l'instrument sous l'effet du vent. Parmi les navigateurs célèbres qui s'assurèrent d'avoir un astrolabe marin à bord de leurs navires, citons Christophe Colomb (1451-1506) et Amerigo Vespucci (1451-1512).
Le nom d'astrolabe est approprié à sa fonction puisque, selon les conservateurs du British Science Museum de Londres, le mot "astrolabe" signifie soit "preneur d'étoiles", soit "celui qui attrape les corps célestes". (Les historiens utilisent également le terme "astrolabe" pour désigner d'anciens textes cunéiformes babyloniens sur l'astronomie, ce qui n'a rien à voir avec l'instrument).
Comment utiliser un astrolabe
Les astrolabes étaient généralement fabriqués en métal et mesuraient moins de 50 cm, ce qui permettait de les tenir d'une main et de les transporter partout. Le laiton était le matériau le plus couramment utilisé, mais certains exemplaires conservés sont en cuivre ou en fer. Les pièces les plus fines sont souvent incrustées d'or ou d'argent et presque toutes sont circulaires.
La description la plus célèbre (en anglais) de l'utilisation d'un astrolabe est celle de Geoffrey Chaucer (c. 1343-1400). Chaucer écrivit une explication simple dans une lettre à son fils Lewis, âgé de dix ans à l'époque. Cet ouvrage, intitulé Tractatus de Conclusionibus Astrolabii et rédigé vers 1391, s'inspire d'un traité latin du IXe siècle de Messanhallah intitulé Compositio et Operatio Astrolabii. D'autres auteurs décrivirent l'utilisation d'un astrolabe, notamment Christopher Clavius (1612) et Adriaan Metius (1626 et 1633), mais c'est l'ouvrage de Johannes Stoeffler, Elucidatio fabricae ususque astrolabii, publié en 1510, qui est le plus souvent considéré comme l'ouvrage de référence pour tous les autres.
L'astrolabe est d'abord suspendu au pouce à l'aide d'un anneau et l'observateur regarde le long d'un bras de visée mobile (l'alidade) ou à travers deux boucles alignées vers l'objet désiré, par exemple une étoile spécifique. Si l'on mesure l'angle du Soleil, on regarde le faisceau de lumière solaire projeté sur l'instrument après qu'il a traversé les boucles. L'altitude est alors déterminée en se référant à une échelle de mesure gravée sur un côté de l'instrument. De l'autre côté de l'astrolabe se trouve une carte du ciel de l'hémisphère nord. Les étoiles sont représentées par un réseau ou un motif ouvert de pointeurs (araignée ou rète) qui peuvent être tournés autour d'un axe central pour correspondre à une grille de coordonnées (matrice) gravée située en dessous. Les modèles plus sophistiqués permettaient d'insérer des plaques de coordonnées gravées supplémentaires pour tenir compte des variations de la latitude de l'observateur. Une fois que la lecture d'une étoile particulière a été effectuée et que la position de l'observateur a été déterminée, la carte peut être utilisée pour fournir d'autres informations utiles en matière d'astronomie et de navigation.
Ces instruments complexes, avec leurs minuscules gravures et leurs pièces interchangeables, sont souvent aussi beaux qu'utiles. L'araignée, en particulier, témoigne souvent de la fantaisie artistique du fabricant, avec des pointeurs courbes et ornés, parfois de petites images telles que des animaux, et une police de caractères complexe pour le texte. Certains astrolabes furent dotés d'accessoires utiles, tels qu'une minuscule boussole magnétique ou un petit gnomon pour en faire un cadran solaire.
Héritage: Le sextant et au-delà
À partir de l'astrolabe, d'autres instruments ont évolué, comme l'astrolabe-quadrant, spécialement conçu pour mesurer le temps et les dates. Le télescope, inventé vers 1608 aux Pays-Bas, révolutionna l'observation du ciel et les instruments d'observation fixes furent bientôt équipés de viseurs télescopiques qui permettaient d'obtenir des mesures beaucoup plus précises. Mais c'est l'invention de l'octant, puis du sextant par l'Anglais John Bird dans les années 1750, qui entraîna la disparition progressive de l'astrolabe portatif. Le sextant s'imposerait jusqu'à l'arrivée des systèmes GPS dans les années 1980.
L'astrolabe est important dans l'histoire des instruments scientifiques parce qu'il fut conçu pour permettre à des non-mathématiciens d'effectuer des relevés précis. En outre, l'astrolabe perpétua l'idée que la précision était essentielle pour mieux comprendre notre monde et l'univers qui l'entoure. Désormais, n'importe qui, du marin à l'opérateur de canon, pouvait utiliser des instruments sans avoir à suivre une longue formation en mathématiques. En ce sens, l'astrolabe était le précurseur de l'ordinateur moderne, un outil offrant des raccourcis que l'on devait apprendre à utiliser correctement mais qui, une fois maîtrisé, pouvait fournir des réponses rapides et faciles à des questions extrêmement complexes.