
La rébellion de Stono (également connue sous le nom de rébellion de Cato ou de conspiration de Cato, 9 septembre 1739) fut la plus grande révolte d'esclaves dans les colonies britanniques d'Amérique du Nord. Menés par un esclave instruit, Cato (également connu sous le nom de Jemmy), des Noirs asservis tentèrent de fuir la Caroline du Sud pour retrouver la liberté en Floride espagnole, mais ils furent rattrapés et vaincus par la milice locale.
Cato et d'autres membres du groupe initial de 22 personnes avaient été transportés depuis le royaume du Kongo (Angola et République démocratique du Congo modernes), qui entretenait un lucratif commerce d'esclaves. Aux XVIe et XVIIe siècles, les dirigeants du royaume du Kongo disposaient d'une armée permanente d'esclaves, et l'on pense que Caton et les autres étaient d'anciens soldats capturés à la suite d'un engagement et vendus comme esclaves.
On ne sait pas depuis combien de temps Cato était esclave, mais la rébellion fut plus tard imputée à un afflux récent d'esclaves en provenance d'Afrique, de sorte qu'il est probable qu'il n'était pas esclave depuis longtemps (bien qu'il s'agisse là d'une hypothèse). La révolte, imputée à l'arrivée de soldats africains réduits en esclavage, conduisit la Caroline du Sud à fermer ses ports de Charleston aux navires trafiquants d'esclaves pendant les dix années suivantes. Elle conduisit également à l'adoption du Negro Act de 1740, qui restreignait davantage la vie des esclaves, interdisait l'alphabétisation au sein de la population esclave et interdisait à leurs maîtres de les affranchir.
La rébellion de Stono inspira peut-être des révoltes ultérieures, notamment la rébellion de Gabriel (1800), le soulèvement de la côte allemande en 1811, la conspiration de Denmark Vesey (1822) et la révolte de Nat Turner en 1831. Même si elle n'avait rien à voir avec les soulèvements ultérieurs, la rébellion de Stono est importante en soi en tant qu'attaque contre l'institution de l'esclavage et prise de position en faveur de la liberté individuelle et collective.
Contexte
La Floride avait été revendiquée par l'Espagne après sa "découverte" par Juan Ponce de León en avril 1513. En 1559, de vastes régions avaient été colonisées par des colons espagnols. Les Anglais, eux, avaient établi la colonie de Jamestown en Virginie en 1607 et la colonie de Caroline en 1663. Lorsque les habitants de la Virginie s'étaient opposés à l'organisation politico-sociale de la Caroline - qui comprenait de grandes plantations de cultures commerciales telles que le coton, le riz et le tabac, ainsi que la suprématie politique des grands propriétaires de plantations - la colonie fut divisée en Caroline du Nord et en Caroline du Sud (la colonie du nord servant de tampon), chacune d'entre elles se livrant à l'importation d'esclaves.
La Géorgie, créée en 1733 par le réformateur anti-esclavagiste James Oglethorpe (1696-1785), rejetait les grandes plantations et l'institution de l'esclavage qui les rendait possibles. Pour maintenir la paix avec la Caroline du Sud, la Géorgie autorisa toutefois les traqueurs d'esclaves en fuite à opérer sur son territoire. Si un esclave de Caroline du Sud voulait s'échapper vers la liberté, il n'avait d'autre choix que de traverser la Géorgie pour rejoindre la Floride espagnole, en prenant bien soin d'échapper aux traqueurs d'esclaves.

La Floride accueillait volontiers les esclaves en fuite qui, à condition de se convertir au catholicisme et de servir dans la milice locale, obtenaient leur liberté. En 1738, Fort Mose fut établi près de St. Augustine et tenu par des esclaves en fuite, devenant ainsi la première colonie noire libre légalement reconnue en Amérique du Nord. La Floride envoya des cavaliers munis de proclamations écrites invitant tous les esclaves à se débarrasser de leurs chaînes et à se rendre dans le sud pour y trouver la liberté.
La rébellion
En 1708, la communauté noire asservie de Caroline du Sud était plus nombreuse que la population blanche, et l'on craignait un soulèvement des esclaves avec l'aide des Autochtones de la région. Le spécialiste Alan Taylor décrit comment les autorités de Caroline du Sud mirent en place une politique de "division pour mieux régner" afin de maintenir la paix:
Les premiers dirigeants de la Caroline ont conclu que la clé pour gérer les Indiens locaux était de les recruter pour attraper les esclaves en leur offrant des armes et des munitions en guise d'incitation... Pour payer les armes, les clients autochtones faisaient des raids sur d'autres Indiens pour trouver des captifs à vendre comme esclaves - ou ils traquaient et ramenaient les Africains fugitifs.
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Pourtant, en 1739, la crainte d'un soulèvement général persistait, ce qui encouragea l'adoption du Security Act (loi sur la sécurité) de 1739, qui obligeait tous les hommes blancs à se rendre armés à l'église. Le dimanche, les esclaves étaient autorisés à s'occuper de leurs jardins et à vaquer à leurs propres occupations. Il semble donc que l'on ait pensé que la population blanche devait être armée en particulier ce jour-là, au cas où les esclaves se révolteraient. Le Security Act n'avait pas encore été adopté au début du mois de septembre 1739, mais même si il l'avait été, il n'aurait rien fait pour empêcher la rébellion de Stono, car tous les citoyens blancs armés auraient de toute façon été à l'église avec leurs armes lorsque Cato rassembla les 22 autres rebelles à la rivière Stono.
Bien que les plans de Cato soient inconnus, on pense qu'il souhaitait conduire ses hommes sur un trajet de 150 miles (240 km) depuis la rivière Stono jusqu'à la Floride, probablement jusqu'à la communauté de Fort Mose. Les traqueurs d'esclaves seraient peu à peu dissuadés par le nombre des rebelles.
Les détails de la rébellion de Stono sont donnés ci-dessous dans deux récits, l'un par un auteur blanc anonyme de l'époque - An Account of the Negroe Insurrection in South Carolina, 1739 et A Family Account of the Stono Uprising, ca. 1937, donné par un descendant de Cato.
Texte
Le texte suivant est la traduction d'un extrait de Two Views of the Stono Slave Rebellion, South Carolina, 1739, publié par le National Humanities Center Resource Toolbox : Becoming American: The British Atlantic Colonies, 1690-1763, recoupé avec les mêmes documents dans Stono: Documenting and Interpreting a Southern Slave Revolt (2005) de Mark M. Smith.
Récit de l'insurrection des nègres en Caroline du Sud, 1739
Il y a quelque temps, une proclamation a été publiée à Augustine, dans laquelle le roi d'Espagne (alors en paix avec la Grande-Bretagne) promettait protection et liberté à tous les esclaves nègres qui s'y rendraient. Certains Nègres appartenant au capitaine Davis s'échappèrent à Augustine et y furent accueillis. Ils furent réclamés par le général Oglethorpe qui envoya le lieutenant Demere à Augustine, et le gouverneur assura le général de sa sincère amitié, tout en lui montrant ses ordres de la Cour d'Espagne, par lesquels il se devait d'accueillir tous les Nègres en fuite.
D'autres Nègres eurent vent de cela, comme on le croit, par les émissaires espagnols, quatre ou cinq qui étaient des chasseurs de chattel et qui connaissaient les bois, dont certains appartenaient au capitaine Macpherson, s'enfuirent avec ses chevaux, blessèrent son fils et tuèrent un autre homme. Ils marchèrent vers la Géorgie et furent poursuivis, mais les Rangers étant alors nouvellement réduits, les gens de la campagne ne purent les rattraper, bien qu'ils aient été découverts par les Saltzburghers, alors qu'ils passaient par Ebenezer. Ils atteignirent Augustine, un seul d'entre eux ayant été tué et un autre blessé par les Indiens dans leur fuite. Ils y furent reçus avec de grands honneurs, l'un d'eux reçut une commission et un manteau de velours.
Parmi les esclaves nègres, il y a un groupe venu du royaume d'Angola en Afrique, dont beaucoup parlent le portugais [langue aussi proche de l'espagnol que l'écossais de l'anglais], parce que les Portugais ont une implantation considérable, que les Jésuites ont une mission et une école dans ce royaume et que plusieurs milliers de nègres y professent la religion catholique romaine. Plusieurs Espagnols, sous divers prétextes, se promènent depuis quelque temps en Caroline; deux d'entre eux, qui ne veulent pas rendre compte de leur conduite, ont été arrêtés et mis en prison en Géorgie.
La bon accueil des Nègres à Augustine s'est répandu, plusieurs ont tenté de fuir vers les Espagnols, et ont été pris, l'un d'eux a été pendu à Charles Town. A la fin du mois de juillet dernier, Don Pedro, colonel de la cavalerie espagnole, s'est rendu en bateau à Charles Town sous prétexte d'envoyer un message au général Oglethorpe et au lieutenant-gouverneur.
Le 9 septembre dernier, dimanche, jour où les planteurs leur permettent de travailler pour eux-mêmes, des Nègres d'Angola, au nombre de vingt, dont l'un s'appelait Jemmy et était leur capitaine, ont surpris un entrepôt appartenant à M. Hutchenson à un endroit appelé Stonehow [Stono]; ils ont tué M. Robert Bathurst et M. Gibbs, pillé la maison et pris un grand nombre d'armes légères et de la poudre qui étaient à vendre. Ensuite, ils ont pillé et brûlé la maison de M. Godfrey et l'ont tué, ainsi que sa fille et son fils.
Ils ont ensuite fait demi-tour et ont marché vers le sud le long de Pons Pons, la route qui traverse la Géorgie jusqu'à Augustine. Ils sont passé devant la taverne de M. Wallace à l'aube et ont dit qu'ils ne lui feraient pas de mal, car c'était un homme bon et gentil avec ses esclaves, mais ils ont ouvert et ont pillé la maison de M. Lemy et l'ont tué, ainsi que sa femme et son enfant. Ils se sont dirigés vers la maison de M. Rose, résolus à le tuer, mais il a été sauvé par un Noir qui, après l'avoir caché, est sorti pour calmer les autres.
Plusieurs Noirs les ont rejoint et, au cri de "Liberté", ils se sont mis en marche, drapeaux déployés et deux tambours battant, poursuivant tous les Blancs qu'ils rencontraient et tuant homme, femme et enfant lorsqu'ils croisaient leur chemin. Le colonel Bull, lieutenant-gouverneur de Caroline du Sud, qui chevauchait alors le long de la route, les a découverts, a été poursuivi et, avec beaucoup de difficultés, s'est échappé et a alerté le pays.
Ils ont brûlé la maison du colonel Hext et tué son intendant et sa femme. Ils ont ensuite brûlé la maison de M. Sprye, puis celle de M. Sacheverell et enfin celle de M. Nash, toutes situées sur la route de Pons Pons, et ont tué tous les Blancs qu'ils ont trouvés. M. Bullock s'en est sorti, mais ils ont brûlé sa maison, alors que beaucoup d'entre eux étaient ivres du rhum qu'ils avaient pris dans les maisons. Ils augmentaient à chaque minute par l'arrivée de nouveaux Nègres, si bien qu'ils étaient plus de soixante, certains disent cent, sur quoi ils se sont arrêtés dans un champ et se sont mis à danser, à chanter et à battre du tambour pour attirer plus de Nègres à eux, pensant qu'ils étaient maintenant victorieux sur toute la province, ayant marché dix miles et brûlé tout devant eux sans opposition, mais la Milice ayant été alertée, les Planteurs les ont poursuivi avec beaucoup d'ardeur et lorsqu'ils sont arrivést, ils sont descendus de cheval et les ont chargé à pied.
Les Nègres ont été très vite mis en déroute, bien qu'ils se soient comportés avec hardiesse; plusieurs ont été tués sur le champ, beaucoup sont retournés en courant à leurs plantations, pensant que leur fuite n'avait pas été remarquée, mais ils ont été pris et fusillés; ceux qui ont été pris sur le champ ont aussi, après avoir été questionnés, été fusillés sur le champ; et ceci doit être dit à l'honneur des planteurs de Caroline, que malgré la provocation qu'ils avaient reçue de tant de meurtres, ils n'ont pas torturé un seul Nègre, mais les ont seulement soumis à une mort rapide.
Tous ceux qui se sont avérés obligés et qui n'avaient pas été impliqués dans les meurtres et les incendies ont été graciés. Ce courage soudain sur le terrain et l'humanité qui s'en est suivie ont eu un tel effet qu'il n'y a pas eu d'autres tentatives et que l'esprit même de la révolte semble avoir disparu. Une trentaine d'entre eux ont échappé au combat, dont dix ont marché environ 30 miles vers le sud et, rattrapés par les planteurs à cheval, se sont battus avec acharnement pendant un certain temps, avant d'être tous tués sur place. Les autres n'ont pas encore été rattrapés.
Au cours de cette action, environ 40 Noirs et 20 Blancs ont été tués. Le lieutenant-gouverneur a envoyé un compte-rendu au général Oglethorpe, qui a reçu les conseils à son retour de la nation indienne. Il a ordonné immédiatement la mise en place d'une troupe de Rangers pour patrouiller à travers la Géorgie, a placé quelques hommes dans la garnison de Palichocolas, qui avait été abandonnée auparavant et près de laquelle les Nègres étaient passés, car c'est le seul endroit où les chevaux peuvent traverser la rivière Savannah à la nage sur près de 100 miles, a ordonné que les Indiens les poursuivent et a chargé un détachement de la garnison à Port Royal d'aider les planteurs en toute occasion, et a publié une proclamation ordonnant à tous les hommes de loi de Géorgie de poursuivre et de saisir tous les Nègres, avec une récompense pour tous ceux qui seraient capturés. En espérant que ces mesures empêcheront les Nègres de descendre chez les Espagnols.
Récit d'une famille sur la rébellion de Stono, vers 1937
George Cato, un ouvrier noir résidant à l'arrière du 1010 Lady Street, à Columbia, en Caroline du Sud, déclare être l'arrière-arrière-petit-fils du défunt esclave Cato qui commanda la rébellion de Stono en 1739, au cours de laquelle 21 Blancs et 44 Noirs furent tués. George, aujourd'hui âgé de 50 ans, affirme que cette insurrection noire est transmise oralement dans sa famille depuis 198 ans. Lorsqu'on lui demande des détails, il sourit, invite son interlocuteur à s'asseoir et raconte l'histoire suivante:
"Oui, m'sieur! Je suis vraiment issu de ces ancêtres qui ont eu le malheur d'être esclaves mais qui ont décidé d'être des hommes, en même temps, et j'en suis très fier. Le premier esclave Cato dont on nous a parlé était prêt à sacrifier sa vie pour ce que lui croyait juste. C'est une bonne chose pour les Cato qui sont venus après lui. Mon grand-père et mon père m'en ont beaucoup parlé, alors que nous vivions dans le comté d'Orangeburg, non loin de l'endroit où les combats ont eu lieu il y a très longtemps.
"Mon grand-père était un fils du fils du commandant des esclaves de Stono. Il dit que son père l'emmenait souvent sur la route de la marche des esclaves rebelles, à l'époque où il y avait de gros problèmes dans cette région. En ce qui me concerne, je pense que le premier Cato a pris le risque de perdre la vie, non pas tant pour son propre bien que pour aider les autres. Il n'était pas comme certains esclaves, très maltraités par leurs maîtres. Mes proches, eux, n'ont pas été maltraités. C'est pourquoi, je pense, le capitaine des esclaves a été choisi par eux. Cato a appris à lire et à écrire avec son riche maître.
"Comment tout cela a-t-il commencé? C'est ce que je demande, mais personne ne m'a jamais raconté comment 100 esclaves entre les rivières Combahee et Edisto se sont retrouvés dans les bois, non loin de la rivière Stono, le 9 septembre 1739. Et comment ils ont élu un chef, mon ancêtre Cato, et, tard dans la journée, ont marché jusqu'à la ville de Stono, pénétré dans un entrepôt, tué deux hommes blancs qui en avaient la charge, et pris toutes les armes et les munitions qu'ils voulaient. Mais ils y sont parvenus. Après ce départ, ils ont tournét vers le sud et ont continué à marcher.
"Ils ont avancé vite, parcourant 15 miles, passant devant de nombreuses belles plantations, et à chaque fois, se sont arrêtés, ont pénétré dans les maisons et ont tué les hommes, les femmes et les enfants. Ensuite, ils ont pris ce qu'ils voulaient, à savoir des armes, des vêtements, de l'alcool et de la nourriture. Près du marais de Combahee, le lieutenant-gouverneur Bull, qui se rendait de Beaufort à Charleston, les a vus et a compris qu'il y avait anguille sous roche. Avant d'être vu par l'armée, il a fait un détour par les grands bois et y est resté jusqu'à ce que les esclaves rebelles soient passés.
"Le gouverneur Bull et quelques planteurs, entre les rivières Combahee et Edisto, sont montés rapidement à cheval et ont répandu l'alarme, et les miliciens n'ont pas tardé à se lancer à la poursuite de l'armée d'esclaves. Lorsqu'on les a trouvés, beaucoup d'esclaves chantaient et dansaient, et le capitaine Cato et d'autres chefs les engueulaient comme pas deux. Depuis ce jour jusqu'à aujourd'hui, aucun Cato n'a goûté au whisky, pour ne pas aller à l'encontre de l'avertissement de son père. Cette guerre a duré moins de deux jours, mais ça a été très chaud pendant ce temps-là.
"Je pense que ça a été chaud, parce qu'en moins de deux jours, 21 hommes, femmes et enfants blancs et 44 Nègres ont été tués. Mon grand-père dit que dans les bois et à Stono, où la guerre avait commencé, il y avait plus de 100 Noirs alignés. Lorsque la milice les a aperçus dans le marais de Combahee, les Nègres qui buvaient et dansaient se sont dispersés dans les broussailles et seuls 44 d'entre eux ont tenu bon.
"Le commandant Cato parle au nom de la foule. Il a dit : 'On n'aime pas l'esclavage. On voulait rejoindre les Espagnols en Floride. On va se rendre mais on veut pas être fouettés et pas convertis.' Les 43 autres hommes ont dit: "Amen". Ils ont été capturés, désarmés, et pendus par la milice. Bien avant ce soulèvement, l'esclave Cato avait écrit des laissez-passer pour les esclaves et avait fait tout son possible pour les envoyer vers la liberté. Il est mort, mais il est mort pour avoir fait ce qui était juste, selon lui."
Conclusion
On ne connaît pas le nombre de victimes de la rébellion. Le nombre habituel de 47 personnes asservies et de 23 à 28 Blancs est considéré comme trop faible. Le sort de Cato/Jemmy est également inconnu. Il fut probablement tué lors de l'attaque de Bull, après quoi la milice décapita les cadavres et les planta sur des pieux le long de la route en guise d'avertissement pour les autres. La tête de Cato se trouvait peut-être parmi ces cadavres, ou bien il se serait peut-être échappé et se serait rendu en Floride.
La réponse la plus immédiate à la rébellion de Stono fut l'adoption du Negro Act de 1740, qui restreignait davantage encore la vie des esclaves en Caroline du Sud. Apprendre à lire et à écrire à un esclave était considéré comme un crime, puisqu'il était entendu que Cato avait été alphabétisé. Les esclaves ne pouvaient plus se réunir librement ou entretenir leurs propres jardins, et les maîtres ne pouvaient plus libérer leurs esclaves de leur propre chef - cet acte devait être soumis à un conseil législatif.
Le Negro Act de 1740 comprenait également des mesures destinées à faciliter la vie des esclaves, mais elles étaient pour l'essentiel dénuées de sens. L'"école" créée pour les esclaves n'était qu'un endoctrinement dans l'interprétation du christianisme par le propriétaire de l'esclave, qui faisait comprendre aux "élèves" que c'était la volonté de Dieu qu'ils soient esclaves. Parmi les autres mesures figurait l'interdiction pour les maîtres ou les surveillants de faire travailler les esclaves trop durement ou de les battre trop sévèrement; mais comme le témoignage d'un esclave n'était pas recevable, il n'y avait aucun moyen de faire respecter cette interdiction.
La vie quotidienne des esclaves de Caroline du Sud pâtit considérablement de la rébellion de Stono, mais les mesures prises par les autorités amènèrent un plus grand nombre de personnes à reconnaître l'immoralité et le caractère néfaste de l'institution de l'esclavage et renforcèrent la résistance des esclaves, ce qui permit d'obtenir un plus grand soutien en faveur de l'abolition.