Théodoric le Grand

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Définition

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 09 octobre 2014
Disponible dans ces autres langues: anglais, portugais
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Nuremberg Chronicle (Theodoric and Odoacer) (by Schedel1, Public Domain)
Chronique de Nuremberg, Théodoric et Odoacre
Schedel1 (Public Domain)

Théodoric le Grand (c. 454-526, r. de 493 à 526, également connu sous le nom de Flavius Theodoricus) était le roi des Ostrogoths qui, encouragé et dirigé par l'empereur romain Zénon, envahit l'Italie, déposa le roi Odoacre et régna sur un royaume composé de Romains et de Goths de 493 à 526. Il s'appelait à l'origine Dietrich (ou Diederich) et est passé dans les légendes allemandes sous le nom de Dietrich von Bern, le héros de nombreux récits de la littérature du moyen haut allemand, bien que cette identification ait été contestée par un certain nombre d'érudits.

Il était chrétien arien et sa tolérance à l'égard du christianisme trinitaire, malgré les tensions entre les deux groupes, ainsi que sa politique prudente concernant les droits de ses sujets, firent de lui un souverain efficace jusqu'à la fin de sa vie. De plus en plus entouré d'ennemis, il commença à souffrir de paranoïa aiguë et se lança dans des persécutions contre des trinitaires de haut rang à sa cour, tels que le philosophe Boèce et le beau-père de Boèce, Symmaque. Son mausolée à Ravenne est toujours debout aujourd'hui, et on se souvient de lui comme d'un souverain bienveillant, sage et juste.

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Jeunesse et ascension au pouvoir

Théodoric vit le jour vers 454 de notre ère, fils du roi Thiudimir des Ostrogoths et de l'une de ses concubines. Il fut baptisé sous le nom de Dietrich mais, à l'âge de huit ans, il fut envoyé à Constantinople, siège de l'Empire romain d'Orient, en tant qu'otage pour garantir le respect par son père d'un traité entre les Romains et les Goths, et son nom fut romanisé en "Théodoric". Il resta à la cour, où il fut éduqué aux valeurs gréco-romaines, pendant dix ans sous la protection de l'empereur Léon Ier (qui régna de 457 à 474), puis de l'empereur Zénon (qui régna de 474 à 475, puis de 476 à 491). Il n'apprit jamais à lire ou à écrire, mais adopta les normes culturelles romaines et fut plus tard décrit par le scribe Sidoine Apollinaire comme étant très raffiné dans sa vie privée et publique.

Epic of Dietrich von Bern, Sintram, and the Dragon
L'épopée de Dietrich von Bern, Sintram et le Dragon
Marc Auer from France, uploaded by Edelseider (CC BY-SA)

Selon Jordanès (VIe siècle), il appartenait à la famille Amal, qui régnait sur les Goths depuis l'Antiquité et était de sang royal (bien que cette affirmation, comme la plupart des travaux de Jordanès, ait été contestée). C'était un chasseur passionné et un excellent tireur à l'arc. En outre, il semble avoir fait preuve très tôt d'un talent pour le commandement. Il fut nommé maître des soldats sous Zénon en 483 et, un an plus tard, fut élu consul et reçut le nom de Flavius Theodoricus.

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Ces récompenses lui furent accordées pour les services qu'il avait rendus à l'empire en tenant à distance un autre chef ostrogoth, Theodoric Strabon ("le Louche"), qui harcelait l'empire lorsqu'il ne se battait pas pour sa cause. Théodoric l'Amal et Théodoric Strabon étaient tous deux considérés comme les rois de leurs factions respectives de Goths et rivalisaient l'un avec l'autre pour obtenir les faveurs de l'empire, tout en retournant et en ravageant les terres de l'empire lorsqu'ils estimaient qu'on ne leur accordait pas assez de respect ou qu'ils n'étaient pas suffisamment utilisés. Le spécialiste Guy Halsall écrit:

Entre 474 et 488, un manège complexe d'alliances, de trahisons, de meurtres et d'intrigues a constamment modifié l'équilibre du pouvoir. L'empereur avait parfois besoin du soutien des Goths contre d'autres factions, mais il ne pouvait pas leur permettre de devenir trop puissants. L'empereur Zénon, lui-même Isaurien mais confronté aux rébellions de son propre peuple, qui souhaitait dominer la cour de Constantinople, joua les deux Théodoric l'un contre l'autre avec une certaine habileté, jusqu'à ce qu'en 483-484, il ne tire trop sur la ficelle. Strabon fut tué dans un accident lorsqu'il tomba de son cheval sur une lance, et dans la foulée, Zénon encouragea Théodoric l'Amal (qu'il récompensa par des honneurs considérables, y compris le consulat) à assassiner le fils de le Louche, Recitach. Au lieu d'éliminer l'une des factions problématiques, cela conduisit simplement les Goths de Recitach à rejoindre les Amal... Au lieu de deux groupes goths concurrents, Zénon fut alors confronté à une seule grande et très puissante force. (286-287)

La campagne d'Italie

Après la mort de Recitach et la consolidation des forces gothiques sous sa direction, Théodoric fut envoyé par Zénon contre son rival, le général Illus, qui avait soulevé une révolte parmi les Isauriens en Asie Mineure. Après avoir vaincu Illus et réprimé la révolte, Théodoric fit marcher son armée vers Constantinople. Ayant vaincu à la fois ses rivaux goths et les Isauriens, il était désormais le chef militaire le plus puissant de la région et décida de prendre à Zénon ce qu'il estimait mériter mais qu'on ne lui avait pas offert: une attribution de terres pour son peuple et la reconnaissance officielle de son statut de roi. Il entama une campagne systématique contre l'empire et l'empereur qui l'avait porté au pouvoir. Ayant été élevé à la cour, Théodoric comprenait bien comment la puissance militaire se traduisait en pouvoir politique et lança des raids contre les villes et les villages qu'il avait auparavant protégés. Halsall écrit:

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Les Goths menaçaient Constantinople et ravageaient les Balkans, mais ne pouvaient pas prendre la capitale, tandis que Zénon, en sécurité derrière la célèbre triple ligne de murailles de la ville, n'était pas en mesure de chasser complètement les Goths de ses territoires. Il fallait trouver une solution acceptable pour les deux camps: les Ostrogoths de Théodoric devaient se rendre en Italie et se débarrasser du "tyran" Odoacre. En 488, les Ostrogoths prirent la longue route vers l'ouest (287).

La question de savoir si l'invasion de l'Italie avait été initialement proposée par Zénon ou par Théodoric a été débattue, mais il est plus que probable qu'il s'agissait de la solution de Zénon à deux problèmes urgents.

Bien que Théodoric ait été analphabète, il était un grand protecteur de l'éducation, appréciait les discussions philosophiques et encourageait l'alphabétisation du peuple.

Odoacre (r. de 476 à 493) était roi d'Italie, avec la permission de Zénon, depuis 476, mais il posait de plus en plus de problèmes à Zénon. Odoacre avait soutenu la révolte d'Illus, avait annexé la région de Dalmatie en toute impunité et se comportait davantage comme un monarque indépendant d'un pays qu'en tant que dirigeant d'une province romaine. Zénon devait se débarrasser à la fois d'Odoacre et de Théodoric, et l'on pense qu'il aurait considéré cette solution comme la meilleure, car l'un des deux était certain de tuer l'autre et il n'aurait alors plus eu qu'un seul problème à régler.

Théodoric, quant à lui, saisit l'occasion d'acquérir une nouvelle gloire militaire et, en cas de victoire, une terre pour son peuple et son propre pouvoir légitime. Il envahit l'Italie, ravageant le pays, et rencontra une première résistance de la part des Gépides au fleuve Vuka en 488. On ne sait pas s'ils étaient alliés à Odoacre ou s'ils protégeaient simplement leurs terres de l'invasion, mais ils furent rapidement vaincus et massacrés par les forces de Théodoric. Théodoric poursuivit sa marche et fit face aux forces d'Odoacre lors d'une bataille au pont de l'Isonzo le 28 août 489, où Odoacre fut vaincu. Il se retira à Vérone avec Théodoric à sa poursuite et ils s'affrontèrent à nouveau le 29 septembre 489; Odoacre fut à nouveau vaincu. Il se réfugia alors à Ravenne et prépara les défenses de la ville, tandis que Théodoric poursuivit sa conquête du pays. Le spécialiste Herwig Wolfram écrit:

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La marche de Théodoric vers l'Italie semblait destinée à une victoire rapide et décisive. À Milan, dont Théodoric s'empara après Vérone, les dignitaires laïques et ecclésiastiques l'accueillirent en tant que représentant de l'empereur. Même le commandant en chef d'Odovacer, Tufa, et une grande partie de l'armée vaincue se joignirent au vainqueur. (281)

Se fiant au geste de soumission et d'allégeance de Tufa, Théodoric l'envoya à la tête de ses troupes d'élite à Ravenne pour capturer Odoacre. Cependant, Tufa n'avait fait que feindre la loyauté envers le conquérant et trahit les troupes aux soldats d'Odoacre; la force d'élite fut détruite et "Théodoric subit sa première défaite sérieuse sur le sol italien" (Wolfram, 281). Odoacre quitta Ravenne et livra bataille à l'ennemi qui le repoussa à plusieurs reprises. Tufa affronta Frédéric des Ruges lors d'une bataille en août 491 et tous deux furent tués.

Les hostilités se poursuivirent jusqu'au 25 février 493, date à laquelle Jean, l'évêque de Ravenne, conclut un traité par lequel Odoacre et Théodoric gouverneraient conjointement. Théodoric entra à Ravenne le 5 mars 493 et, le 15 mars, lors d'un dîner officiel organisé pour célébrer le traité, Théodoric assassina Odoacre en le poignardant à mort. Les dernières paroles d'Odoacre furent: "Où est Dieu ?", ce à quoi Théodoric répondit: "Voilà ce que tu as fait à mon peuple", en référence à sa supposée oppression des Goths en Italie et à sa décimation de la tribu des Ruges, qui était apparentée aux Goths. Wolfram décrit les conséquences de la mort d'Odoacre:

La nature délibérée et méthodique de l'acte de Théodoric est clairement révélée par les événements ultérieurs: Odovacer ne fut pas autorisé à recevoir une sépulture chrétienne et sa femme Sunigilda mourut de faim. Hunulf, le frère d'Odovacer, se réfugia dans une église et servit de cible aux archers goths... Le jour du meurtre d'Odovacer, ses partisans et leurs familles furent attaqués. Partout où les Goths purent mettre la main sur eux, ils trouvèrent la mort. Au cours de l'année 493, Théodoric était devenu le maître incontesté de l'Italie. (284)

Odoacre avait gouverné l'Italie avec prudence et Théodoric hérita d'un royaume d'une grande richesse. Cependant, les terres avaient été détruites par des années de guerre, et la première priorité de Théodoric fut donc de les faire revivre.

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Débuts du règne de Théodoric et légitimation

Théodoric entreprit de consolider son règne tout en réparant le pays qui avait été dévasté entre 488 et 493. De nombreuses forêts avaient été détruites, soit décimées lors des batailles, soit abattues pour la défense, et sans arbres pour absorber l'eau de pluie, un certain nombre de régions étaient régulièrement inondées tandis que d'autres, dépouillées de leur sol superficiel par les batailles, étaient arides. Théodoric fit assécher les marécages, planter des arbres et employa des foreurs experts pour forer des puits, créer des fossés d'irrigation et cultiver la terre.

Theodoric
Théodoric
Mark Cartwright (CC BY-NC-SA)

Il régna sur une population hétérogène de Goths et de Romains et promulgua des édits pour garantir une représentation équitable devant la loi. En outre, le pays était divisé selon des critères religieux, la plupart des Romains adhérant au christianisme trinitaire et la plupart des Goths à la conception arienne du christianisme. Théodoric, lui-même arien, prônait la tolérance à l'égard des différences religieuses et espérait unifier complètement son royaume sous son autorité, quelles que soient la nationalité ou les croyances religieuses de ses sujets. Pour ce faire, on pense qu'il devait légitimer son passé et créer pour lui et son peuple un pedigree digne d'un roi qui serait respecté à la fois par les Goths et les Romains.

La source principale de l'histoire des Goths est la Getica de Jordanès, datant du VIe siècle, qui fut rédigée en tant que résumé de l'œuvre antérieure de Cassiodore (c. 485-c. 585), le maître des offices de Théodoric et, par conséquent, son principal scribe. Cassiodore était romain et imprégna donc son histoire des Goths d'idéaux romains et d'un récit susceptible de plaire à un public romain (comme Jordanès le ferait plus tard). Le spécialiste Roger Collins écrit:

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L'intérêt d'établir la continuité d'une lignée royale était bien plus le produit des présupposés romains sur le fonctionnement des sociétés germaniques que quelque chose d'intéressant pour ces sociétés elles-mêmes. Dans la première moitié du VIe siècle, le régime ostrogoth d'Italie avait besoin d'une histoire et d'un rôle constitutionnel qui correspondent aux attentes intellectuelles des classes supérieures romaines dont la bonne volonté et la coopération dépendaient largement, et qui aimaient aussi imaginer de grandes continuités familiales entre elles et les aristocraties de la République et du début de l'Empire. (104-105)

L'histoire gothique de Cassiodore (aujourd'hui perdue) aurait repris certains aspects authentiques de l'histoire des Goths et les aurait encadrés dans une forme narrative romaine traditionnelle, en y ajoutant les éléments que l'auteur jugeait souhaitables, afin de créer une histoire noble du parti au pouvoir en Italie. Il a été noté que Jordanès lui-même écrivit qu'il avait "transformé l'origine des Goths en histoire romaine" et, comme il suivait l'exemple de Cassiodore, on pense que le premier l'avait également fait.

L'impact des travaux de Cassiodore sur la population en général n'est pas entièrement connu, mais ils permirent de rehausser la stature de Théodoric au sein de l'élite et, étant un membre de la famille Amal (et si cette dernière avait réellement accompli ce que les travaux de Cassiodore prétendaient), il était désormais considéré comme un dirigeant romain légitime et non plus comme un roi barbare. Zénon était mort lorsque Théodoric assassina Odoacre et qu'Anastase Ier devint empereur. En 497 de notre ère, Anastase Ier reconnut officiellement Théodoric comme roi des Goths et des Romains.

Politiques et programmes

Bien que légitimé sur le papier et désormais officiellement reconnu par l'Empire romain, Théodoric comprit qu'il avait besoin de plus pour s'établir solidement sur le trône. Il avait envoyé l'une de ses filles, Theodegotha, épouser le roi Alaric II des Wisigoths vers 494 et une autre fille, Ostrogotha, épouser Sigismond des Burgondes en 496. Il avait lui-même épousé Audoflède, sœur du roi Clovis Ier des Francs, peu après sa victoire sur Odoacre en 493. Par ces alliances, il espérait former un royaume dans lequel tous les anciens peuples connus par les Romains sous le nom de "tribus barbares" pourraient vivre ensemble en paix. L'encyclopédie catholique commente ce fait en déclarant:

Fier de sa nationalité gothique, Théodoric croyait possible de concilier les intérêts romains et germaniques. Son peuple lui paraissait égal aux Romains en termes d'ancienneté, de descendance et de renommée militaire, et il se rendait compte que son pouvoir reposait uniquement sur les prouesses des Goths. En apparence, son royaume était une continuation de l'Empire romain; en réalité, sa politique était en contradiction directe et fondamentale avec la conception romaine, selon laquelle toute individualité nationale devait se perdre dans l'État dans son ensemble. Théodoric s'opposait à cette théorie de gouvernement qui cherchait à supprimer les nationalités; il avait un profond respect pour l'indépendance nationale et avait pris les armes à plusieurs reprises pour la maintenir. (1)

Palace of Theodoric Mosaic
Mosaïque du palais de Théodoric
Nick Thompson (CC BY-NC-SA)

Sa cour comprenait des hommes de toutes les nationalités et, comme Odoacre avant lui, il s'efforçait de maintenir la paix entre ses sujets en ne favorisant pas son propre peuple au détriment des autres. L'Edictum Theodorici regis de 512 réforma ses lois antérieures afin de préciser que tous les habitants de son royaume avaient accès aux mêmes droits en vertu de la loi, en l'occurrence le droit pénal. Bien qu'il n'ait su ni lire ni écrire, il était un grand protecteur de l'éducation et appréciait les discussions philosophiques. Il encouragea l'alphabétisation du peuple et garda à sa cour le philosophe Boèce (480-524). Il offrait régulièrement à ses sujets des divertissements dans le cadre de la renaissance des cirques de Rome et lança un programme dans le cadre duquel les pauvres recevaient gratuitement du maïs.

Il employa également une proportion importante de la population dans ses programmes de construction, comme le note Collins:

Le programme de construction et de restauration de Théodoric était bien plus étendu [que celui d'Odoacre] et comprenait la création ou la réparation d'aqueducs, de bains publics, de murailles et de palais - ces derniers étant des centres d'administration plutôt que des résidences privées - dans diverses villes, dont Rome, Ravenne, Vérone et Pavie. (108)

Sa politique de tolérance religieuse encouragea également la paix parmi ses sujets et permit de comprendre que chaque croyance religieuse avait la même valeur, tandis que ses talents diplomatiques assurèrent la paix avec les royaumes voisins.

Déclin et mort de Théodoric

Malgré tous ces succès, Théodoric dut faire face à des défis et à des revers. En 507, Clovis Ier battit Alaric II, allié de Théodoric, et le tua. Les Francs refusèrent ensuite d'intervenir lorsque les Burgondes, qui auraient dû être des alliés, entamèrent des incursions contre l'Italie sur la côte. Théodoric envoya ses forces contre les Burgondes et sécurisa son royaume, tout en élargissant ses territoires, en 513. Il jongla continuellement avec ses alliés supposés pour tenter de maintenir la paix tout en reconnaissant l'importance de satisfaire Rome à l'est. L'une de ses autres préoccupations était son incapacité à produire un héritier mâle pour lui succéder, ce dont il savait qu'il aurait besoin pour que sa dynastie soit reconnue par les autorités romaines.

Incapable de produire cet héritier, il désigna son petit-fils Athalaric en tant que successeur. Athalaric était le fils de la fille de Théodoric, Amalasonte, et du prince wisigoth Eutharic. Eutharic mourut au début du mariage et Amalasonte resta veuve. Le jeune prince Athalaric était donc le seul choix possible, mais surtout, en le nommant héritier, Théodoric soumettait le royaume wisigoth à son autorité, puisque leur prince était désormais l'héritier de son trône.

Se sentant plus sûr de son pouvoir, Théodoric semble alors avoir changé sa vie politique, tant privée que publique. Halsall écrit: "Il adopta de plus en plus un style quasi-impérial. Théodoric n'avait pas été au-dessus de ce type de posture au début de son règne, mais cela devint plus visible dans les dernières étapes, et associé à un changement d'idéologie" (290). Ce changement d'idéologie se traduisit en partie par une adhésion plus stricte à son propre arianisme, au détriment des trinitaires.

L'empereur Anastase Ier était mort en 518 et Justin Ier (r. de 518 à 527), puis son jeune neveu Justinien Ier (r. de 527 à 565) lui avaient succédé. Sous le règne de Justin, Justinien avait joué un rôle actif dans la politique, notamment en persécutant les chrétiens ariens à Constantinople. Justinien Ier était trinitaire et considérait l'arianisme comme une hérésie et un danger pour la "véritable Église". En réponse, Théodoric entama sa propre persécution des trinitaires en Italie, ce qui provoqua bien sûr des tensions entre son royaume et Constantinople.

En 523, l'ex-consul Albinus fut accusé de trahison pour une prétendue correspondance avec l'empereur Justin. Le philosophe Boèce prit sa défense et fut également accusé puis exécuté; son beau-père Symmaque le suivit peu après. La purge des catholiques trinitaires se serait sans doute accélérée, mais la santé de Théodoric commença à décliner et il mourut en 526 après 30 ans de règne.

Mausoleum of Theodoric, Ravenna
Mausolée de Théodoric, Ravenne
F. Tronchin (CC BY-NC-SA)

Suites et héritage

Après sa mort, son petit-fils Athalaric lui succéda mais, n'ayant que dix ans à l'époque, il ne put régner et c'est la fille de Théodoric, Amalasonte (c. 495-535), qui monta sur le trône en tant que régente. Partisane de la sensibilité et de la culture romaines, elle confia son fils à des tuteurs romains qui profitèrent de leur position pour initier le prince à la boisson, ce qui aurait contribué à sa mort prématurée en 534; entre 534 et 535, Amalasonte régna en tant que reine.

Elle avait déjà entamé des négociations avec Justinien Ier à Constantinople pour tenter de consolider sa position, mais elle ne reçut pas de réponse adéquate. Elle fit alors appel à un cousin de confiance, Théodat, pour régner conjointement avec elle, ce qu'il fit volontiers. Amalasonte fut ensuite arrêtée et exilée dans un domaine sur l'île de Martana où, sous les ordres de Théodat, elle fut étranglée par ses serviteurs dans son bain en 535.

Son gendre, Vitigès se souleva alors contre Théodat, le fit assassiner et devint roi en 536. Il régna sur l'Italie jusqu'à sa défaite et son emprisonnement par Bélisaire en 540. Après la victoire de Bélisaire sur Vitigès, les Goths souhaitèrent le couronner roi, mais Bélisaire, fidèle à l'empereur Justinien Ier, piégea les chefs de cercle en faisant semblant d'accepter, puis les fit tous arrêter. Bélisaire revendiqua alors toute l'Italie pour Justinien Ier et l'Empire romain d'Orient.

Bien que Théodoric n'ait pu maintenir sa politique de tolérance religieuse ni son expertise diplomatique dans ses relations avec Constantinople, il est resté dans les mémoires comme "le grand" pour sa tentative d'unifier la population sous son règne en un seul peuple et pour avoir essentiellement reconstruit l'Italie, que ce soit en plantant des arbres, en cultivant des champs, en construisant de nouveaux bâtiments ou en maintenant les forces hostiles à distance. Sa vision d'un royaume composé de nationalités unifiées, bien qu'indépendantes, vivant harmonieusement sous un même régime, était révolutionnaire pour l'époque.

Même Alexandre le Grand, qui, la plupart du temps, permettait aux régions conquises de conserver un certain degré d'autonomie tant qu'elles soutenaient sa cause, n'avait pas encouragé le type de fierté nationale indépendante que le peuple de Théodoric était autorisé à avoir. Pendant trente ans, Théodoric réunit les Goths et les Romains sous son règne, maintint la paix et travailla au bien-être de son royaume, faisant passer l'Italie de la ruine à la stabilité, puis à la prospérité et même au luxe.

Il fut enterré avec tous les honneurs dans son mausolée de Ravenne et, bien que celui-ci ait été profané à la suite de la victoire de Bélisaire sur les Goths en 540, il fut réparé et se trouve toujours dans la ville aujourd'hui. On se souvient de Théodoric le Grand pour sa revitalisation de l'Italie et ses efforts pour gouverner une population diverse sans tenter d'assimiler l'une ou l'autre culture à l'autre.

Son héritage se perpétue aujourd'hui en tant que grand roi qui gouverna son peuple avec sagesse, avec la vision d'un royaume uni de populations séparées mais égales. Sa persécution ultérieure des chrétiens trinitaires est attribuée à sa réaction émotionnelle aux politiques anti-ariennes de Justinien à Constantinople plutôt qu'à une politique de discrimination clairement réfléchie, et sa mémoire continue d'être honorée pour sa vision et les efforts fournis pour en faire une réalité.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Joshua J. Mark est cofondateur et Directeur de Contenu de la World History Encyclopedia. Il était auparavant professeur au Marist College (NY) où il a enseigné l'histoire, la philosophie, la littérature et l'écriture. Il a beaucoup voyagé et a vécu en Grèce et en Allemagne.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2014, octobre 09). Théodoric le Grand [Theodoric the Great]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-725/theodoric-le-grand/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Théodoric le Grand." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le octobre 09, 2014. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-725/theodoric-le-grand/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Théodoric le Grand." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 09 oct. 2014. Web. 11 déc. 2024.

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