Lucius Verus fut empereur romain de 161 à 169 de notre ère. Lucius Verus était le frère adoptif et co-empereur de Marc Aurèle dont le passage sur le trône fut éclipsé par le règne du dernier des cinq bons empereurs. Au cours des dernières années de la Pax Romana, une période de près de deux siècles de paix et de stabilité relatives qui suivit le règne d'Auguste, un jeune philosophe stoïcien, Marc Aurèle, monta sur le trône en 161 de notre ère et, pour la première fois dans la courte histoire de l'empire, il choisit de faire régner quelqu'un à ses côtés : son frère adoptif Lucius Aurelius Verus.
Adoption et mariage
Le futur empereur Lucius Ceionius Commodus vit le jour en 130 de notre ère et grandit à Rome. Il était le fils aîné de l'ancien consul Lucius Aelius Caesar. L'empereur Hadrien (117 - 138), sans enfant, n'ayant ni successeur ni héritier, choisit, contre l'avis de beaucoup, Lucius Aelius, 35 ans, comme fils adoptif en 136. Aelius fut immédiatement envoyé dans la province romaine de Pannonie (située au nord, le long du Danube) pour y exercer la fonction de gouverneur. Malheureusement, Aelius mourut de tuberculose en janvier 138 de notre ère. À sa place, l'empereur choisit d'adopter son second choix d'héritier, Aurelius Antoninus Pius, également connu sous le nom d'Antonin le Pieux. Hadrien souhaitait que Marcus Aurélius (Marc Aurèle), beaucoup plus jeune, lui succède, mais il s'était rendu compte que Marcus était beaucoup trop jeune et préféra choisir le très respecté mais âgé Antonin - que beaucoup considéraient comme inoffensif - en attendant que le jeune Marcus mûrisse. Afin de garantir une succession ordonnée et comme condition de son adoption, Antonin adopta son neveu Marcus ainsi que le fils d'Aelius, Lucius. Le relativement jeune Lucius serait désormais connu sous le nom de Lucius Aelius Aurelius Commodus; il abandonnerait plus tard Commodus et ajouterait Verus après être monté sur le trône.
Comme son frère, Lucius n'était pas nouveau sur la scène politique romaine, puisqu'il avait été questeur en 153 de notre ère et consul en 154 et 161 de notre ère - cette dernière année avec Marcus. Ainsi, en mars 161 de notre ère, après un règne de 23 ans, la mort de l'empereur Antonin le Pieux porta Marc Aurèle sur le trône impérial, avec les titres d'Auguste et de Pontifex Maximus. Par respect pour la volonté de son père adoptif, il demanda immédiatement au Sénat romain de nommer son "frère" Lucius pour régner à ses côtés, lui conférant des pouvoirs de tribun ainsi que les titres de César et d'Auguste. Sous Antonin, les échanges et le commerce avaient prospéré, et son contrôle strict des finances avait permis à l'État de dégager un excédent à sa mort. Cependant, alors que le règne d'Antonin le Pieux avait connu des années de paix et de stabilité économique, le règne de Marcus et Lucius connut des guerres presque constantes au nord et à l'est ainsi qu'une peste dévastatrice qui balaya tout l'empire.
Outre leur adoption, le mariage permit aux deux hommes d'accéder au trône. Marcus divorça sagement de sa première femme et épousa Faustine la Jeune, la fille d'Antonin, tandis que Lucius épousa la fille de Marcus, Annia Aurelius Galeria Lucilla, à Éphèse en 164 de notre ère. Dans son Histoire romaine, l'historien Dion Cassius écrit:
Marcus Antoninus, le philosophe... était lui-même de corps fragile et consacrait la majeure partie de son temps aux lettres. ... Lucius, en revanche, était un homme vigoureux, plus jeune et mieux adapté aux entreprises militaires. Marcus en fit donc son gendre en le mariant à sa fille Lucilla et l'envoya mener la guerre contre les Parthes. (Vol. IX, 3)
Après la mort brutale de Lucius en 169 de notre ère, elle épouserait le commandant militaire Tiberius Claudius Pompeianus. Malheureusement, elle fut impliquée dans un complot contre son frère, l'empereur Commode (fils de Marc), et fut exilée puis exécutée.
Guerre des Parthes
Presque immédiatement après son accession au trône, des troubles - un dilemme que leur père adoptif avait réussi à éviter - se préparaient à l'Est. N'ayant pas la nature calme et l'habileté diplomatique d'Antonin le Pieux, les deux nouveaux empereurs s'engagèrent dans la guerre des Parthes. La guerre commença au sujet du contrôle de l'Arménie, un territoire que l'empereur Trajan avait nommé protectorat ou État-client romain. Le roi parthe Vologas IV (148-192 de notre ère) expulsa le gouverneur romain et plaça sur le trône un homme nommé Pacorus. Les Parthes vainquirent ensuite rapidement les gouverneurs romains de Cappadoce et de Syrie. Bien qu'il lui ait fallu neuf mois pour y parvenir, Lucius fut envoyé vers l'est à la tête des forces romaines. Ce retard coûteux fut attribué par certains à la maladie, tandis que d'autres mirent en avant son tempérament "amateur de plaisirs". Les auteurs de l' Historia Augusta ont écrit :
... pendant que les légions étaient massacrées, que la Syrie méditait la révolte et que l'Orient était dévasté, Verus chassait dans les Pouilles, traversait Athènes et Corinthe accompagné d'orchestres et de chanteurs. (207)
Lorsqu'il arriva enfin, Lucius passa une grande partie de son temps dans une station balnéaire près d'Antioche. Heureusement, les généraux romains étaient plus que compétents, et finirent par s'opposer aux Parthes et les vaincre. Le commandant Statius Priscus envahit l'Arménie, capturant et détruisant la capitale Artaxata tandis que le nouveau gouverneur de Syrie, Gaius Avidius Cassius, et le commandant Publius Verus se déplacèrent plus à l'est, en Mésopotamie, conquérant les villes d'Odessa, Nisibis et Nicephorium. La guerre s'acheva en 166 de notre ère par la prise et le sac des villes de Séleucie et de Ctésiphon; à Ctésiphon, le palais royal du roi parthe fut entièrement détruit. Par la suite, la Mésopotamie resterait un État-client romain.
Malgré son implication limitée dans la guerre, Lucius fut salué par un triomphe (le premier depuis Trajan) à son retour à Rome en octobre 166 de notre ère, triomphe qu'il partagerait avec son frère. En outre, lui et son frère (qui n'avait pas participé à la guerre) reçurent les titres supplémentaires d'Armeniacus, Parthicus et Medicus. Les deux frères furent également salués comme Pater Patriae (père du pays). La guerre contre les Parthes allait servir de prélude à leur action contre les tribus germaniques au nord.
La peste Antonine
Les problèmes au nord, le long du Danube, attirèrent l'attention de Marcus et Lucius après la fin de l'offensive à l'est; les préparatifs furent faits pour avancer vers la Germanie en 167 CE. Malheureusement, quelque chose d'imprévu était arrivé à Rome avec l'armée de retour de Mésopotamie, une peste connue à jamais dans l'histoire comme la peste Antonine. La peste se répandit dans toute l'Asie mineure, en Grèce et en Italie, avant de remonter vers le Rhin. Bien des années plus tard, on lui attribuerait l'affaiblissement partiel de l'empire. La peste, associée à une pénurie de nourriture, retarda les frères, de sorte que lorsqu'ils finirent par arriver pour livrer bataille, les envahisseurs s'étaient retirés. La peste tuerait dix pour cent (certains prétendent 30 %) de la population de l'empire. Le médecin romain Galien (129-199 de notre ère) décrivit ses symptômes comme étant la diarrhée, une forte fièvre et des pustules sur la peau. On a ensuite pensé qu'il s'agissait de la variole.
Alors que Marcus demandait une traversée des Alpes, son frère insistait pour un retour à Rome. Ils prirent leurs quartiers d'hiver à Aquileia. La peste s'étant répandue dans l'armée, ils décidèrent qu'il valait mieux retourner à Rome et se mirent en route en 169 de notre ère; cependant, à Altinum, Lucius tomba malade, eut une attaque et mourut, victime présumée de la peste. Son corps fut ramené à Rome où il fut enterré dans le mausolée d'Hadrien aux côtés d'Antonin le Pieux; il serait plus tard déifié. Pour protéger l'empire de la peste, Marcus, toujours philosophe stoïcien, fit appel au dieu romain Apollon dans son oracle de Claros, en Asie mineure orientale, pour chasser les démons.
Héritage
Marcus régna jusqu'en 180 de notre ère, date à laquelle son fils Commode monta sur le trône. La mort de Marcus mit fin à la paix romaine, car il était le dernier de ce que l'histoire appelle les cinq bons empereurs - Nerva, Trajan, Hadrien, Antonin le Pieux et Marcus Aurelius (Marc Aurèle). Les empereurs qui suivirent pendant le siècle suivant connurent une période de chaos et de déclin. Commode, le premier de ces empereurs ineptes, était non seulement sans scrupules et corrompu mais aussi assoiffé de pouvoir, se considérant comme la réincarnation du dieu grec Héraclès (Hercule). Bien que Commode ait considéré son règne comme un âge d'or romain, son manque d'intérêt pour les questions politiques, sa vie de loisirs et sa paranoïa extrême engendrèrent ce que d'autres pourraient considérer comme un règne de terreur. Il finit par être empoisonné (192 de notre ère) et, ayant survécu, fut étranglé.
Le règne de Lucius Verus a disparu au profit de celui de son frère Marc Aurèle. Bien qu'il ait participé, bien qu'en nom seulement, au conflit parthe, ses huit années de règne lui ont apporté peu de gloire. Il était le fils adoptif d'un fils adoptif, le fils de l'un des meilleurs empereurs, Antonin le Pieux. Si son nom est presque entièrement perdu pour l'histoire, ayant fait preuve de peu d'acuité militaire, il est surtout connu pour avoir été une des victimes de la peste.