Ambiorix (c. 54/53 av. J.-C.) était le co-chef de la tribu des Éburons de Gallia Belgica (Gaule Belgique) qui mena une insurrection contre les forces d'occupation de César en Gaule durant l'hiver 54/53 av. J.-C.. On ne sait rien de sa jeunesse ni de son ascension au pouvoir; il entra et quitta l'histoire dans les pages des Guerres Gauloises de César desquelles les historiens plus tard puisèrent leurs propres récits du soulèvement. Même son nom est inconnu comme « Ambiorix » n'est qu'un titre signifiant « Riche Roi » ou une épithète signifiant « Roi à tous les effets». Cependant, il est connu sous ce nom, il partagea en fait le commandement des Éburons avec un dirigeant plus âgé, nommé Cativolcos, qui semble avoir été poussé à soutenir la révolte d'Ambiorix et regretta sa décision par la suite. Ambiorix acquit une renommée durable grâce à son astucieux stratagème contre la garnison romaine en Gaule sous le commandement de Quintus Titurius Sabinus (mort 54/53 de notre ère) et de Lucius Aurunculeius Cotta (mort 54/53 de notre ère) et l'embuscade subséquente qui détruisit une légion romaine.
Gaule de César
L'Insurrection des Éburons fut une surprise totale pour les forces romaines car elles croyaient qu'elles étaient en bons termes avec la tribu dans son ensemble et avec Ambiorix en particulier. Les Éburons faisaient partie des tribus les plus faibles de la région et étaient devenus les sujets de la tribu Aduatuque, plus grande et plus forte, à laquelle ils rendaient hommage et offraient des otages.
Après que César eût vaincu les Nerviens et leurs alliés à la bataille du Sabis vers 57 av. J.-C., il réforma les systèmes tribaux en Gaule, prétendument dans l'intérêt de l'égalité et de la paix, mais la réforme servit ses propres objectifs en diminuant le pouvoir et le prestige des tribus. Les Éburons en tirèrent profit car ils étaient libérés de leurs obligations envers les Aduatuques, et Ambiorix en profita personnellement vu que les otages membres de sa famille furent libérés. Les Romains se sentaient donc en sécurité dans leurs relations avec la tribu, même s'il était clair qu'ils étaient encore une force militaire d'occupation sur la terre des Éburons.
L'Insurrection
Une autre tribu de la région, les Trévires, supportait mal l'occupation romaine, et le peu de patience qu'ils avaient fut totalement perdue quand les Romains firent savoir que toutes les tribus devraient céder une partie de leurs vivres aux garnisons les plus proches. La sécheresse avait déjà créé une pénurie pour les tribus elles-mêmes, et la grande force romaine qui hivernait dans le pays rendait la situation encore plus difficile.
Le chef des Trévires, Indutiomaros, suggéra qu'Ambiorix conduise son peuple au soulèvement pour briser cette occupation. On ne sait pas comment il s'y prit pour convaincre le roi des Éburons, mais il est clair qu'Indutiomaros n'avait aucunement l'intention d'engager les Romains lui-même avant de voir si Ambiorix avait une chance de réussir. On ignore aussi ce que Cativolcos pensait du soulèvement à ce stade ou comment il fut convaincu d'engager sa moitié des Éburons dans le soulèvement, mais pendant l'hiver 54/53 av. J.-C., les deux rois menèrent une attaque contre le cantonnement romain sous le commandement de Sabinus et Cotta et le soulèvement commença.
Cependant les Romains avaient construit leur fort avec leur efficacité typique et les Éburons ne réussirent pas à le prendre. Ambiorix comprit qu'il devrait recourir à une tactique différente s'il espérait vaincre ses ennemis et décela un moyen de les tromper afin qu'ils quittent leurs fortifications.
Le piège est posé
Ambiorix apparut aux portes du camp romain demandant des pourparlers. Il assura aux commandants romains que lui, personnellement, agissait pour leur bien et qu'il était conscient de la dette qu'il devait à la grande bonté de César, mais il avait été contraint d'attaquer par ses compatriotes qui exerçaient un pouvoir énorme sur sa tribu. Si cela avait dépendu de lui, il n'aurait jamais songé à attaquer Rome mais, vu sa position, son peuple avait autant de pouvoir sur lui que lui sur son peuple. Les Gaulois avaient fixé une date pour un soulèvement général dans tout le pays, et il ne pouvait s'opposer à leur décision; il avait donc été contraint de monter son assaut sur le camp, mais lui était bien intentionné et était venu les avertir qu'une grande armée d'Allemands avait été embauchée par les Gaulois et qu'ils traversaient le Rhin, à l'instant même, et qu'il serait donc dans l'intérêt des Romains de quitter leur fort actuel — qui ne pouvait pas tenir contre une force aussi importante — et rejoindre leurs camarades à l'un des autres postes. Il conclut son discours en leur promettant un sauf-conduit sur ses terres.
Un conseil de guerre fut convoqué dans le camp après le départ d'Ambiorix pour choisir la meilleure marche à suivre. Beaucoup affirmèrent qu'il était stupide de suivre les conseils d'un ennemi qui venait de les attaquer, mais les excuses d'Ambiorix semblaient sincères. Les Romains, comme on l'a noté, considéraient les Éburons comme une tribu amicale mais, en outre, ils étaient aussi parmi les plus petits et les plus faibles, et il semblait irrationnel qu'ils choisissent de faire la guerre à Rome alors qu'ils n'avaient aucune chance de réussir.
Ambiorix leur avait promis un passage sûr, et ils n'auraient qu'à marcher 50 milles vers le nord pour atteindre le cantonnement sous le commandement de Quintus Tullius Cicero (102-43 av. J.-C., le frère cadet du célèbre écrivain) ou un autre commandé par Titus Labienus (c. 100-45 av. J.-C.), qui avait une force plus importante et était connu comme brillant commandant de cavalerie. L'un ou l'autre de ces forts, pensèrent-ils, était un meilleur choix que de rester sur place et d'attendre que les Allemands renforcent l'armée gauloise.
La bataille
Alors que les Romains débattaient sur la marche à suivre, Ambiorix préparait soigneusement une embuscade sur le chemin qu'il savait que ses ennemis devraient emprunter. Il plaça ses guerriers de chaque côté d'un ravin, à deux milles au nord du cantonnement. Les Romains, quant à eux, avaient quitté leur fort à l'aube et étaient en marche comme Ambiorix l'avait prévu. Il attendit que la moitié de la légion soit passée devant lui, puis donna le signal d'attaque.
L'embuscade prit complètement les Romains par surprise, et beaucoup furent tués avant même qu'ils ne puissent se rendre compte qu'ils étaient attaqués. Ils essayèrent de se mettre en formation pour se défendre, mais le ravin les en empêchait et, pendant ce temps là, des javelins pleuvaient sur eux. Ambiorix envoya ses hommes à la charge, mais ils furent bloqués, et il leur ordonna de se retirer puis d'attaquer de nouveau avec des barrages de javelot dont les Romains ne pouvaient pas se défendre car l'attaque venait de tous côtés et aussi au-dessus d'eux.
Sabinus reconnut leur impuissance face à cette situation et demanda à parlementer avec Ambiorix. On lui garantit un libre passage, mais quand il arriva pour les pourparlers, il fut tué avec son garde du corps. Cotta fut tué lorsque les Éburons poussèrent leur attaque et détruisirent la légion. Les Romains qui survécurent s'enfuirent dans le camp qu'ils venaient de quitter et en barrèrent les portes, mais ils furent poursuivis par les Éburons, et réalisant qu'ils ne pouvaient pas retenir l'ennemi, se donnèrent la mort. D'autres survivants traversèrent les forêts jusqu'au cantonnement de Labienus et lui racontèrent ce qui s'était passé.
Ambiorix rallie les tribus
Ambiorix dépouilla les morts de leurs armes et armures et ordonna à ses troupes de marcher rapidement vers les terres des Aduatuques où il raconta à leurs chefs sa grande victoire sur les Romains et montra les armes qu'il avait prises comme preuve. Les Aduatuques rejoignirent alors le soulèvement, puis les Nerviens firent de même. Des messagers furent envoyés à d'autres tribus avec la nouvelle de la défaite romaine et d'autres se joignirent à la cause. La force d'Ambiorix avait plus que doublé, et il était confiant qu'ils pouvaient facilement prendre le camp de Cicero.
Labienus n'avait pas envoyé d'avertissement à Cicero au sujet du soulèvement, peut-être parce qu'Ambiorix se déplaçait si vite, et ainsi le cantonnement de Cicero fut pris par surprise lorsque les forces gauloises ruèrent hors de la forêt autour du fort. Ceux à l'extérieur des murs furent tués instantanément, mais les portes furent rapidement fermées et sécurisées et une défense organisée. Comme pour la fois d'avant, Ambiorix ne réussit pas à franchir les murs et subit de lourdes pertes lors de cette tentative.
Comme le stratagème avait si bien fonctionné la première fois, il décida qu'il pourrait tout aussi bien essayer de nouveau et demanda de parler à Cicero. Il raconta exactement la même histoire, professant son innocence et sa réticence à attaquer, et exhorta les Romains à partir tant qu'ils le pouvaient avant l'arrivée des Allemands.
Ambiorix leur assurait un passage sûr dans n'importe quelle direction qu'ils choisiraient de prendre, mais Cicero refusa, déclarant que ce n'était pas la politique romaine d'accepter des conditions d'un ennemi armé. Si Ambiorix cessait les hostilités et dispersait son armée, alors Cicero informerait César de la situation et ils attendraient la décision de César et sa justice. Ambiorix revint à ses hommes et reprit la bataille.
Des messagers du fort furent rapidement envoyés à César, mais ils furent pris et tués. Un Nervien du camp nommé Vertico, ami de Cicero, suggéra d'envoyer un de ses fidèles esclaves, un Gaulois, qui pouvait facilement se glisser à travers les lignes. Promettant à l'homme sa liberté s'il réussissait, il l'envoya avec un message caché dans la hampe d'un javelot et l'esclave remit le message à César plus tard le même jour.
Réponse de César
Agissant avec sa détermination habituelle, César ordonna une marche forcée de ses troupes pour venir au secours de Cicero, envoyant des messagers aux officiers des autres cantonnements pour qu'ils lui envoient des renforts. Il envahit rapidement la région des Nerviens où il fit prisonnier plusieurs d'entre eux et apprit les détails du soulèvement d'Ambiorix et du siège du cantonnement de Cicero. Il choisit alors un Gaulois en qui il pouvait avoir confiance pour transmettre un message à Cicero, caché dans un autre javelot. Le Gaulois passa par les lignes ennemies et lança le javelot au-dessus les murs où il resta inaperçu pendant trois jours, mais quand il fut finalement remarqué, il fut amené à Cicero.
Cicero rassembla ses hommes et leur lut le message de César expliquant qu'il viendrait vite à leur aide, mais leur ordonna de ne pas montrer plus de détermination ni de changer de comportement de quelque façon que ce soit afin de ne pas alerter l'ennemi. Ambiorix était confiant qu'il serait de nouveau victorieux, puisqu'il n'y avait aucune preuve qu'un message était parvenu à César et aucun espoir d'aide pour la garnison, mais il devint méfiant quand il nota une vitalité renouvelée à la défense, et peu après, ses éclaireurs rapportèrent des feux de camp romains à quelques kilomètres de là.
Ambiorix rappela ses hommes d'attaque et ordonna une marche rapide sur la position de César. César les vit venir de loin et mit en place son propre piège. Il ordonna qu'un cantonnement fût construit sur le sol élevé d'une colline surplombant la vallée d'où viendraient les Éburons et ordonna qu'il soit le plus petit possible pour donner l'impression qu'il n'avait que quelques soldats au lieu des 7 000 qu'il commandait. Il ordonna alors à ses hommes de paraître effrayés par l'armée qui approchait, de ne faire que de courtes incursions au-delà des murs comme s'ils prévoyaient une attaque imminente, et de ne pas donner l'impression de quelque volonté de combattre que ce soit.
Ambiorix et son armée furent surpris de trouver une si petite force envoyée contre eux. Ils considéraient César lâche d'avoir arrêté sa marche et pensaient que le petit fort était une pitoyable tentative de défense. Pour encourager la confiance des Éburons, César envoya quelques-uns de ses hommes juste pour que les Éburons puissent les chasser à l'intérieur des murs. Une fois qu'Ambiorix eût formé son armée de l'autre côté de la colline pour charger le fort, et que César vit qu'ils n'avaient nulle part où se replier et se défendre, il ordonna l'attaque.
Chaque porte du fort où les Romains étaient bien tassés s'ouvrit et les Romains se précipitèrent en bas de la colline, la cavalerie en tête, brisant les lignes des Éburons et les jetant dans une panique totale. Les Éburons subirent de lourdes pertes lors de l'affrontement d'ouverture et ceux qui survécurent furent tués alors qu'ils tentaient de s'échapper. Les Romains continuèrent à massacrer tous ceux qui se trouvaient sur la colline, mais Ambiorix et quelques-uns de ses hommes les plus proches s'échappèrent dans la vallée et se dérobèrent à la cavalerie envoyée pour trouver et tuer les survivants.
Le soulèvement écrasé
César fit démanteler le fort puis rejoint Cicero dans son cantonnement après avoir envoyé la nouvelle de sa victoire à Labienus. Pendant ce temps, Indutiomaros des Trévires avait enfin entendu parler de la victoire antérieure d'Ambiorix et avait mis son armée en marche afin d'attaquer la position de Labienus. Il envoya un message aux Allemands qu'une victoire sur Rome était certaine s'ils le rejoignaient, mais ils refusèrent l'offre, notant comment on leur avait promis de telles victoires sur Rome par le passé. Il y a cependant des preuves qu'une force allemande fut bel et bien envoyée pour soutenir les Gaulois. Sans attendre l'aide allemande, Indutiomaros lança son attaque contre Labienus en toute confiance de victoire.
Labienus, cependant, était tout aussi confiant, et à juste titre. Un déserteur de l'armée d'Indutiomaros lui avait dit à quoi il ressemblait et où il serait positionné, et Labienus donna l'ordre à sa cavalerie qu'une fois lâchés sur les Trévires, ils devaient ignorer tous les guerriers jusqu'à ce qu'ils aient tué leur roi. Dès que la charge fut donnée, la cavalerie fonça tout droit sur Indutiomaros et le tua. La perte de leur chef démoralisa les troupes, ils brisèrent les rangs et s'enfuirent. L'historien Florus prétend que les Allemands, qui avaient peut-être marché pour soutenir Indutiomaros, s'en seraient retournés vers leurs propres terres.
La présence d'Ambiorix à cette bataille est incertaine, mais peu de temps après, il déserta sa tribu, avec quatre de ses gardes du corps, et traversa le rhin pour s'échapper en Allemagne. César voulut le capturer, et il envahit même l'Allemagne en personne pour participer aux recherches, mais Ambiorix avait disparu et ne fit plus jamais entendre parler de lui.
Retombées et héritage
S'il ne pouvait pas amener Ambiorix face à la justice romaine, avait estimé César, il pourrait apporter la justice romaine au peuple d'Ambiorix. Il enrôla un certain nombre d'hommes des tribus vaincues dans ses armées par la menace ou les gratifications et contrôla les tribus par les mêmes moyens. Il envoya alors ces guerriers en avant-garde pour tuer n'importe quel Éburon se trouverait sur leur chemin et, si possible, lui apporter Ambiorix. Les champs et les maisons furent brûlés et le bétail abattu, de sorte que ceux qui ne furent tués sur le coup furent laissés mourir de faim. Cativolcos, se repentant de son soutien au soulèvement, maudit Ambiorix pour la destruction de son peuple, puis s'empoisonna.
Bien que relativement inconnu pendant des siècles, Ambiorix devint le héros national de Belgique en 1830. Après son indépendance, la Belgique suivit la même voie que d'autres nations européennes et se tourna vers l'histoire antique pour se trouver un champion à la hauteur. Ambiorix fut choisi pour sa résistance à l'occupation romaine et considéré comme un combattant de la liberté, image qui convenait à la politique de l'époque, et les détails de l'extermination des Éburons furent ignorés. Une statue du roi fut élevée sur la place de la ville de Tongres en 1866, le représentant comme un noble guerrier gaulois, et elle 'y trouve toujours aujourd'hui.
Après le soulèvement de 54/53 av. J.-C., les Éburons disparurent de l'histoire tout comme Ambiorix lui-même. Leur mémoire fut préservée, ironiquement, par César dans ses Guerres Gauloises, puis par d'autres historiens romains utilisant cette œuvre comme source. Les Guerres Gauloises de César sont parfois perçues avec scepticisme par les historiens modernes pour l'inexactitude et l'exagération, mais elles se sont avérées assez exactes dans plusieurs cas, et il en est ainsi pour le récit du soulèvement des Éburons.
En 2000, une cache de 102 pièces d'or a été découverte près de Tongres, en Belgique, datant de l'époque du soulèvement d'Ambiorix. 72 de ces pièces proviennent de la tribu des Éburons, et toutes montrent qu'elles avaient été frappées rapidement car l'or avait été mixé avec du cuivre afin qu'il dure plus longtemps et que plus de pièces puissent être fabriquées. Cette cache, connue sous le nom de «trésor d'Ambiorix», se trouve actuellement dans le musée de Tongres et soutient le récit de César car les pièces avaient été frappées en Gaule uniquement pour payer des soldats et la dépréciation de ces pièces avec du cuivre suggère une action militaire imminente nécessitant de l'argent rapide. En outre, les pièces qui ne proviennent pas des Éburons proviennent des tribus que César rapportent comme étant ses alliés. Une autre cache de pièces similaires, en grande partie des Éburons, a été trouvée en 2008 EC, près de Tongres, et soutient en outre le récit de César d'un soulèvement qui fut écrasé si rapidement que les soldats n'eurent jamais la chance de recevoir leur solde.