Dans l'Égypte ancienne, les femmes avaient plus de droits que dans toute autre civilisation de l'époque. Elles pouvaient posséder des terres, demander le divorce, posséder et gérer leur propre entreprise, devenir scribes, prêtres, voyants, dentistes et médecins. Même si, en règle générale, les hommes étaient dominants et occupaient les postes les plus importants de la société, il existe de nombreuses preuves de l'autorité des femmes sur les hommes. L'autorité des femmes est évidente dans les premières écoles de médecine, les femmes qui gouvernaient le pays sans consort masculin, les femmes voyantes et médecins, les premières brasseuses de bière et directrices de l'industrie textile, les "scelleuses" qui sauvegardaient les documents et les objets importants, et plus particulièrement dans la position de l'épouse du dieu Amon.
Même si les femmes s'occupaient de la maison, de la famille élargie et des enfants, elles étaient également libres - si elles en avaient les moyens - de laisser ces responsabilités à une servante ou à un autre membre féminin de la famille et de chercher un travail en dehors de la maison. Tout comme de nos jours, une mère élevait sa fille selon ses propres valeurs et son propre style de vie, et une femme qui donnait la priorité aux tâches ménagères et à la famille avait de fortes chances d'avoir une fille qui ferait de même; il n'y avait cependant aucune disposition culturelle interdisant aux femmes de travailler et d'occuper un certain nombre de postes importants.
De nombreuses femmes, en fait, qui avaient été élevées pour être des femmes au foyer, transformèrent ces compétences en emplois bien rémunérés dans les maisons de la noblesse et de la classe supérieure. D'autres, qui trouvaient les tâches ménagères gratifiantes et dont les maris et les fils pourvyaient amplement aux besoins de la famille, se contentaient de s'occuper du foyer et de la famille. Il n'y a aucune différence entre cette structure sociale et celle de nombreuses sociétés actuelles, si ce n'est que, dans l'Égypte ancienne, il était entendu que l'homme était le chef de famille et avait le dernier mot en matière de décisions. Malgré cela, de nombreuses preuves suggèrent que les hommes consultaient régulièrement leur femme et que le mariage était considéré comme un partenariat égalitaire.
Femmes au sein du foyer
Même si les hommes détenaient la place d'autorité, les femmes assuraient le fonctionnement du foyer, soit en personne soit en supervisant le travail des domestiques. Même si une femme avait un emploi à l'extérieur du foyer, elle était tout de même responsable de son entretien. Les hommes sont mentionnés comme aidant aux travaux ménagers, mais ce n'était pas leur principale responsabilité.
Une épouse et une mère avaient de nombreuses tâches quotidiennes, et ce, dès le lever du soleil. Elle devait réveiller son mari et ses enfants pour le travail ou l'école, entretenir l'autel familial, préparer le petit-déjeuner, nettoyer, ranger la maison, s'assurer que la maison était exempte de parasites et de rongeurs, apporter l'eau du puits, s'assurer que les réserves de céréales et autres fournitures étaient à l'abri de la contamination ou des parasites, s'occuper des enfants s'ils étaient jeunes, veiller aux besoins des autres membres de la famille élargie s'ils étaient âgés, nourrir les animaux domestiques et s'assurer qu'ils étaient en bonne santé, s'occuper de son jardin personnel, préparer le repas léger de l'après-midi, cuire le pain, brasser la bière, préparer le repas du soir, s'occuper du tissage et de la couture des vêtements, des draps, des couvertures et des vestes, faire la lessive, accueillir son mari et ses fils lorsqu'ils rentraient du travail ou de l'école, servir le dîner, débarrasser, nourrir les animaux domestiques, coucher les jeunes enfants et les préparer à aller au lit.
Certaines femmes choisissaient également de travailler à domicile, et donc, en plus de leurs tâches quotidiennes, elles devaient aussi trouver du temps pour leur travail. Le travail à domicile consistait généralement à faire de la pâtisserie, à brasser de la bière, à fabriquer des sandales, à tresser des paniers, à fabriquer des bijoux, à fabriquer des sceaux, à tisser des textiles et à fabriquer des charmes et des amulettes.
Il y avait généralement beaucoup d'autres femmes dans la maison auxquelles on pouvait faire appel pour aider à ces tâches, car les Égyptiens vivaient dans des familles élargies. Il n'y avait pas de cérémonie de mariage dans l'Égypte ancienne; une femme déménageait simplement avec ses affaires dans la maison de son mari ou de la famille de son mari. Un couple marié pouvait se retrouver à vivre avec la mère veuve, la tante, l'oncle et les cousins du mari lorsqu'ils fondaient leur foyer. Cette situation signifiait peu d'intimité mais un certain nombre de personnes à portée de main pour aider aux tâches ménagères.
Culte domestique
Chaque foyer avait son propre autel qui devait être tenu propre et soigné. Les gens ne se rendaient pas dans les temples de la ville pour vénérer leurs dieux mais organisaient des cérémonies et des rituels privés dans leurs maisons. Ces autels comportaient généralement l'image ou la statue d'un dieu ou d'une déesse, et les offrandes y étaient déposées avec des prières de demande ou de remerciement. Cette pratique était particulièrement répandue dans le Nouvel Empire d'Égypte (c. 1570-1069 av. J.-C.) et semble avoir donné naissance à des rituels que les spécialistes actuels appellent culte domestique ou cultes de la domesticité.
Ces cultes sont suggérés par les découvertes archéologiques et les inscriptions qui semblent indiquer un intérêt élevé pour l'appréciation du féminin en se concentrant sur les divinités féminines. On suppose que pratiquement chaque foyer possédait un autel personnel honorant les divinités protectrices et les ancêtres de la famille, mais ces autels comportent principalement des statuettes, des images et des amulettes de Rénénoutet (déesse de la protection sous forme de cobra), Taouret (déesse protectrice de l'accouchement et de la fertilité sous forme d'hippopotame), Bès (dieu protecteur de l'accouchement, des enfants, de la fertilité et de la sexualité) et Bastet (déesse des femmes, des enfants, du foyer, de la maison et des secrets des femmes). L'expert Barry J. Kemp note que, dans le village d'ouvriers de Deir el-Médineh, les murs des pièces situées à l'étage sont ornés de peintures qui "fournissent le centre de la féminité domestique" (305). On pense que ce culte se développa en réponse au rôle essentiel joué par les femmes dans la vie quotidienne du foyer.
L'égyptologue Gay Robins note que "les rites pratiqués dans le culte domestique peuvent avoir inclus l'offrande de nourriture, de libations et de fleurs à l'autel, comme dans d'autres cultes égyptiens" et que ces rituels "suggèrent que les femmes de la famille avaient un rôle important à jouer" (163). Bien que cela soit sans doute vrai et qu'il ait pu exister un "culte domestique", il est également possible que les autels domestiques du Nouvel Empire aient simplement célébré l'aspect féminin de la divinité et de la protection plus souvent que l'aspect masculin ou que ces types d'autels aient été retrouvés intacts plus souvent que les autres.
Il faut garder à l'esprit que les déesses occupaient une place plus importante dans les croyances et les histoires religieuses égyptiennes que dans celles d'autres cultures et qu'il n'est donc guère surprenant de trouver des autels domestiques honorant le féminin. Bastet n'était pas seulement une "déesse des femmes", mais l'une des divinités les plus populaires dans toute l'Égypte auprès des deux sexes, et le culte d'Isis devint si populaire qu'il survécut à tous les autres cultes égyptiens et ce, des centaines d'années de l'ère chrétienne. Les fêtes de déesses comme Bastet, Isis, Hathor et Neith étaient des événements nationaux auxquels tout le monde participait, tout comme pour des dieux comme Osiris, Ptah et Amon.
Femmes sur le lieu de travail
La culture égyptienne avait délégué du pouvoir aux femmes depuis le début de la période dynastique (c. 3150 - c. 2613 av. J.-C.) jusqu'à la période ptolémaïque (323-30 av. J.-C.), comme en témoignent les puissantes dirigeantes telles que Neith-Hotep dans la première dynastie et Cléopâtre VII dans la dynastie ptolémaïque. Il ne semble pas qu'il y ait eu besoin d'un culte particulier au Nouvel Empire pour élever le féminin, puisque les femmes participaient de manière presque égale à la société égyptienne depuis des milliers d'années.
Par exemple, à l'époque de l'Ancien Empire d'Égypte (c. 2613-2181 av. J.-C.), les femmes occupaient le poste de "scelleuses", qui était l'un des emplois les plus importants que l'on puisse occuper. À la 12e dynastie du Moyen Empire (2040-1782 av. J.-C.), les femmes occupaient toujours ce poste et cette pratique se poursuivit au Nouvel Empire. Robins explique:
Le scellement était l'une des tâches les plus courantes des hommes dans toute la bureaucratie car, en l'absence de serrures et de clés, les sceaux étaient utilisés pour sauvegarder les biens. Un scelleur portait le sceau autorisé permettant de sécuriser les conteneurs et les entrepôts contre toute entrée non autorisée. (118)
Les femmes en tant que scelleuses sont la preuve de leur égalité avec les hommes tout au long de l'histoire de l'Égypte. Même si, comme à la maison, les hommes étaient considérés comme les figures d'autorité dominantes, les femmes pouvaient évidemment occuper le même poste tant qu'elles ne supervisaient pas les hommes et ne leur donnaient pas d'ordres.
Cependant, même ce point n'est pas vrai à toutes les époques de l'histoire de l'Égypte, car il semble que la femme médecin Peseshet (c. 2500 av. J.-C.) était enseignante à l'école de médecine de Saïs et que la position d'Épouse d'Amon, qui devint de plus en plus importante au Moyen Empire d'Égypte, était le pendant féminin du Grand Prêtre masculin. Les femmes médecins auraient vu des patients masculins et féminins, les femmes voyantes auraient interprété les rêves et les présages des hommes comme des femmes, et les femmes dentistes auraient travaillé à soulager les douleurs dentaires des hommes aussi souvent que des femmes.
Les femmes furent également les premièrs brasseurs de bière et les premiers fabricants de textiles en Égypte et continuèrent à gérer des ateliers et des brasseries même lorsque les hommes prenaient en charge le fonctionnement quotidien de l'entreprise. Des peintures, des inscriptions et des statues montrent des femmes travaillant ou supervisant la fabrication et la distribution de marchandises. Les femmes qui en avaient les moyens pouvaient également être la Maîtresse de Maison, ce qui signifie qu'elles possédaient leurs propres terres, leurs produits et leurs moyens de récolte et de distribution.
Celles qui avaient acquis des compétences particulièrement impressionnantes en matière de gestion domestique pouvaient gagner leur vie en tant que Maîtresses de Maison dans les maisons des riches et des nobles. Ces femmes étaient chargées de superviser les serviteurs et de veiller à ce que chaque tâche soit accomplie de manière satisfaisante. Elles devaient également approvisionner la maison en fournitures et organiser les dîners et banquets officiels. Le titre de gardienne de la salle à manger était particulièrement important pour la haute noblesse qui recevait des diplomates étrangers et d'autres dignitaires, car le banquet préparé et servi devait être parfait en tous points.
Les femmes pouvaient accéder à ce type de poste en passant par le statut inférieur de servante, de domestique ou de cuisinière. L'égyptologue Joyce Tyldesley écrit:
Une femme égyptienne de bonne réputation pouvait toujours trouver un emploi de servante; l'absence de commodités modernes, telles que l'électricité et l'eau courante, signifiait qu'il y avait une demande constante de main-d'œuvre domestique non qualifiée. Le salaire d'une servante était relativement bon marché et la plupart des maisons des classes moyennes et supérieures avaient au moins une servante qui pouvait être formée aux techniques domestiques tout en aidant aux tâches ménagères les plus ardues. (134)
Les filles entraient dans le service à un jeune âge, parfois vers 13 ans, et si elles se montraient consciencieuses et loyales, elles pouvaient accéder à un poste plus élevé. Ces femmes étaient d'une importance vitale pour le maintien d'un foyer, comme en témoignent de nombreuses lettres et inscriptions. Une pratique courante dans l'Égypte ancienne consistait à écrire des lettres aux morts pour leur demander de l'aide dans une affaire quelconque. Ces lettres supposaient souvent que le problème était causé par une entité surnaturelle, généralement un fantôme ou un esprit en colère que le défunt pouvait raisonner ou affronter.
Dans l'une de ces lettres aux morts adressées par une épouse à son défunt mari, la femme demande son intercession en faveur d'une servante malade. Elle écrit:
Ne peux-tu pas lutter pour elle jour et nuit contre tout homme qui lui fait du mal, et toute femme qui lui fait du mal ? Pourquoi veux-tu que ton seuil soit déserté ? Lutte encore pour elle - maintenant ! - afin que son foyer soit rétabli et que des libations soient versées pour toi. Sans aide de ta part, ta maison sera détruite; ne sais-tu pas que c'est cette servante qui fait ta maison parmi les hommes ? Bats-toi pour elle ! Veille sur elle ! (Parkinson, 143)
Un bon serviteur était souvent considéré comme un membre de la famille et, à certaines époques, un couple sans enfant adoptait un serviteur comme héritier pour s'assurer que ses rites mortuaires seraient correctement exécutés et qu'il y aurait quelqu'un à qui laisser son héritage. Dans la lettre ci-dessus, la femme menace le mari de lui retirer ses offrandes de nourriture et de boisson ("pourquoi veux-tu que ton seuil soit déserté ?") s'il n'intercède pas en faveur de la jeune fille. Il s'agissait d'une menace très sérieuse, car on pensait que les morts avaient besoin d'une subsistance quotidienne dans l'au-delà, et cela montre à quel point cette servante était importante pour l'auteur de la lettre.
Si une femme n'était guère intéressée par les travaux domestiques, elle pouvait être artiste de spectacle. Des femmes musiciennes, chanteuses et danseuses, que ce soit en public ou pour les rituels du temple, ont été recensées. Les femmes pouvaient également être des chanteuses sacrées qui accompagnaient et assistaient l'épouse du dieu Amon à Thèbes et, dans certains cas, succédaient à ce poste. Pour devenir une épouse de dieu, la femme devait savoir lire et écrire et, bien que certains chercheurs affirment que les femmes ne possédaient pas cette compétence, elles semblent avoir été plus nombreuses qu'on ne le croit.
Les preuves d'alphabétisation des femmes proviennent d'ostraca (tessons de pot en argile) sur lesquels sont inscrites des notes relatives à l'accouchement, aux enfants, à la couture, à la lessive et à d'autres questions domestiques. Dans certains cas, ces ostraca sont l'équivalent antique de la liste des tâches à accomplir de nos jours, dans d'autres, ce sont des charmes de protection ou des textes d'exécution. Quelle que soit la forme qu'ils prennent, il ne fait aucun doute qu'ils furent écrits par des femmes.
Les femmes se voyaient refuser les postes élevés tels que ceux de vizir et, à quelques exceptions notables près, ceux de monarque, mais elles avaient certainement plus de possibilités de promotion personnelle et de gains financiers que leurs sœurs des pays voisins. Les femmes étaient des figures essentielles en tant que sages-femmes, voyantes et tatoueuses - bien que l'on ne sache pas si elles étaient payées pour ces services - mais elles occupaient également des positions importantes, le plus souvent occupées par des hommes. Les femmes de l'Égypte ancienne étaient en grande partie maîtres de leur destin et, dans de nombreux cas, la seule limite à leur réussite était leur propre talent et leur imagination.