Gaius Julius Caesar (alias Jules César, 100-44 av. J.-C.) assuma pour la première fois le rôle de dictateur en 49 av. J.-C., mais après s'être fait élire consul pour l'année suivante, il démissionna au bout de 11 jours. Après avoir vaincu Pompée à la bataille de Pharsale en 48 avant notre ère, il fut à nouveau nommé dictateur, cette fois pour un an. Il fut ensuite nommé dictateur pour dix ans en 46 avant notre ère, avant de prendre le pouvoir à vie peu avant sa mort, au début de l'année 44 avant notre ère.
Succès politiques et militaires
Né dans une famille patricienne le 13 juillet 100 avant notre ère, César commença sa carrière politique en 73 avant notre ère, lorsqu'il fut élu à un poste vacant au sein du collège des pontifes à la mort de Gaius Aurelius Cotta, cousin de sa mère. Après avoir été tribun militaire, il entra dans le cursus honorum, le parcours des honneurs des fonctions gouvernementales romaines, en 69 avant notre ère, en tant que questeur dans l'Espagne d'outre-mer: ce poste lui permit d'obtenir un siège très convoité au Sénat romain. Il fut élu édile en 65 avant notre ère et préteur en 62 avant notre ère. Un an plus tôt, en 63 avant notre ère, il avait été nommé pontifex maximus, c'est-à-dire prêtre en chef du collège des pontifes. Cette nomination lui permit de disposer d'une maison dans le Forum romain. Toutefois, sa candidature fut entachée de controverses et de pots-de-vin. En 60 avant notre ère, il se joignit à Cnaeus Pompée (106-48 av. J.-C.) et à Marcus Crassus (115-53 av. J.-C.) pour former une alliance politique: le premier triumvirat. Malgré les objections des optimates, plus conservateurs, César devint consul en 59 avant notre ère.
Pendant la majeure partie de la décennie suivante, il commanda ses légions dans la conquête de la Gaule et dans une tentative d'invasion de la Grande-Bretagne. Malgré le renouvellement de leur alliance, les tensions entre Pompée et César s'intensifièrent. Pompée était jaloux du succès et de la renommée de César, tandis que ce dernier souhaite revenir à la politique. Alors que Pompée devient le favori de Rome, César devient un paria. Le 7 janvier 49 avant notre ère, il est nommé ennemi de l'État par un décret du Sénat. Trois jours plus tard, César, avec une seule légion, franchit le Rubicon et déclenche ainsi une guerre civile. Dennison écrit qu'en franchissant le Rubicon, il est passé de la légalité à l'illégalité et "du statut de hors-la-loi héroïque à celui de traître" (34). Bien que des tentatives aient été faites pour empêcher la guerre, Pompée finit par quitter précipitamment Rome. César assume les pouvoirs d'urgence d'un dictateur pendant onze jours, suffisamment longtemps pour assurer son élection à un autre poste de consul.
Guerre civile et dictature
César poursuivit Pompée, toujours insaisissable, à travers l'Europe. Finalement, en 48 avant notre ère, il battit son ancien allié à la bataille de Pharsale, en Grèce. De retour à Rome, il fut à nouveau nommé dictateur, pour un an cette fois. Il lui fallut trois ans pour combattre et vaincre les forces républicaines de Caton le Jeune (95-46 av. J.-C.) à la bataille de Thapsus, l'armée du roi Pharnace II du Pont (vers 95-47 av. J.-C.) et les forces anti-César de Sextus Pompée en Espagne. Cette fois, César fut accueilli à bras ouverts à son arrivée à Rome. C'était une autre époque, et le peuple était fatigué de la guerre; il voulait simplement la paix. Il fut salué comme un héros. Les honneurs s'accumulèrent: un triomphe romain fut célébré pour chacune de ses campagnes: Gaule, Pont, Égypte et Afrique. Il fut qualifié de libérateur et de père de son pays (pater patriae). Un nouveau temple de Vénus fut inauguré et il offrit à ses concitoyens un festival, des jeux, des combats de gladiateurs et des pièces de théâtre.
En septembre 46 avant notre ère, il fut à nouveau nommé dictateur, mais cette fois pour dix ans. Cependant, en février 44 avant notre ère, (un mois avant sa mort), il fut nommé dictateur à vie (dictator perpetuo). Il s'agissait d'une nomination sans précédent, que beaucoup ne tarderaient pas à remettre en question. Il "accumula une liste extraordinaire d'honneurs, dont certains étaient sans précédent, et dont un trop grand nombre suggéraient qu'il visait un statut royal ou divin" (Rosenstein et al., 208). Selon Tom Holland dans son livre Rubicon, personne ne savait ce que César avait l'intention de faire parce que personne ne savait comment la République romaine allait être guérie des blessures de la guerre civile.
Alors que le pouvoir de César grandissait et qu'il devenait évident qu'il n'allait pas rendre à Rome sa gloire d'ancienne république comme il l'avait promis, le Sénat romain décida qu'il était nécessaire d'annuler certains des pouvoirs qu'il avait accordés. La noblesse romaine, naïve ou non, ne pouvait imaginer que César refuserait, mais selon Barry Strauss, "César n'avait pas l'intention de jouer le jeu des sénateurs"(The Death of Caesar, 31). Il ne se souciait plus de l'opinion du Sénat. Alors que beaucoup voulaient que Rome revienne à un gouvernement de lois, César n'était pas d'accord, estimant que "seul son génie offrait au peuple de l'empire la paix et la prospérité"(ibid., 32).
Dans son ouvrage Masters of Command, Strauss écrit que César voulait dominer Rome et donne deux raisons pour lesquelles il aurait franchi le Rubicon:
- il défendait les pouvoirs des tribuns, qu'il considérait comme les véritables représentants du peuple
- il pensait à son rang et à son honneur personnels
Bien qu'il ait par la suite augmenté la taille du Sénat, il estimait que celui-ci avait empêché Rome de procéder aux réformes nécessaires; ses opposants, les optimates, n'étaient pas d'accord. Pour eux, le Sénat avait rendu Rome "sage et libre". Curieusement, alors qu'il ne respectait pas son autorité, c'est le Sénat qui lui accorda tous ses honneurs. César croyait en sa propre intelligence et pensait que seul un homme de sagesse et de talent pouvait initier les réformes nécessaires. Et, dans son esprit, il était cet homme. Bien que César ait voulu disposer des pouvoirs d'un roi, il ne voulait pas de ce titre et refusait qu'on s'adresse à lui en tant que tel. Bien que son titre de dictateur à vie ait été contraire à la constitution romaine, il estimait qu'il servait le bien public. Son "monopole du pouvoir et de la gloire le rendait anathème pour les hommes qui se sentaient en droit de se considérer comme ses pairs" (Rosenstein et al., 208).
Les réformes
Selon Philip Freeman dans son livre Jules César, en 46 avant notre ère, César entama une révolution qui allait changer Rome à jamais. En tant que commandant militaire, César avait démontré qu'il n'était pas du genre à rester les bras croisés, et cette conviction se manifesta très tôt dans son rôle de dictateur. Au cours de cette période, il lança un certain nombre de réformes civiques et sociales qui touchaient presque tous les aspects de la vie quotidienne dans la Rome antique. Si ces réformes le rendirent populaire auprès des gens du peuple, elles semèrent la panique chez nombre de ses ennemis et même chez certains de ses amis.
Les recensements précédents ayant donné des chiffres inexacts, l'une des premières réformes fut de procéder à un véritable recensement; des auditeurs furent envoyés de porte en porte dans toute la ville. Un recensement correct était essentiel: la ville avait été ravagée par les guerres romaines et, en plus, pendant des années, les résidents non éligibles avaient obtenu des céréales gratuites, destinées aux citoyens romains les plus pauvres. En fin de compte, la distribution de céréales fut réduite de moitié, ce qui permit d'économiser de l'argent, mais les nouveaux chiffres du recensement choquèrent César qui s'inquiétait du déclin général de la population de la ville. Afin d'encourager les familles nombreuses et de fournir de la main-d'œuvre à l'armée romaine, César ne se contenta pas d'offrir des suppléments de céréales, il interdit également à tout homme romain âgé de 20 à 40 ans de s'absenter de Rome pendant plus de trois ans; bien entendu, les militaires en furent exemptés.
Suétone (de 69 à 130/140 de notre ère) écrit que "dans son administration de la justice, il était à la fois consciencieux et sévère" (20). Cela est évident dans sa façon de traiter le Sénat. Bien qu'il ait profondément dédaigné son autorité, César se rendit compte qu'il avait besoin du Sénat; il ne pouvait pas gouverner seul. Même si "cela signifiait que les familles dirigeantes traditionnelles devenaient minoritaires au sein de l'organe le plus éminent de Rome" (Freeman, 336), il augmenta le nombre de sénateurs à près de 900. Suétone estime que César renforça le Sénat. Les soldats, les fils d'affranchis et les étrangers qui l'avaient bien servi furent nommés sénateurs.
Il augmenta également le nombre de questeurs, d'édiles et de préteurs. Pour augmenter le nombre de professionnels de la classe moyenne, il accorda la citoyenneté aux médecins et aux enseignants qui s'installaient dans la ville. Il encouragea les grands propriétaires agricoles à embaucher davantage de travailleurs libres, afin de réduire leur dépendance à l'égard du travail des esclaves. Il interdit aux commissaires-priseurs, aux fossoyeurs, aux professeurs d'escrime, aux proxénètes et aux acteurs d'exercer la fonction de magistrat. Enfin, il exclut les membres de la classe inférieure des jurys. César étendit la citoyenneté romaine aux principaux citoyens de Gaule et d'Espagne et créa des colonies de citoyens. Les agriculteurs, les artisans qualifiés et les professions libérales furent invités à s'installer en Italie, tandis que les pauvres désœuvrés des bidonvilles romains furent incités à s'installer dans l'une des nouvelles colonies en Espagne, en Gaule, en Afrique ou en Grèce. La ville de Rome souffrant de violence et de corruption, César nettoya les rues dangereuses de la ville.
Sa réforme la plus célèbre concerna le calendrier. Suétone écrit que les pontifes l'avaient laissé tomber dans un tel désordre que les fêtes des moissons et des vendanges ne correspondaient plus à la saison appropriée. César profita de sa position de pontifex maximus de Rome pour passer du calendrier lunaire au calendrier solaire.
Parmi les autres réformes initiées par César figurait l'interdiction de tous les clubs et guildes non approuvés par le gouvernement, bien que les organisations anciennes aient été autorisées à poursuivre leurs réunions. Il construisit une nouvelle bibliothèque publique remplie d'ouvrages grecs et latins, dont Marcus Terentius Varro (alias Varron, 116-27 av. J.-C.) fut nommé premier conservateur chargé de la collecte et du catalogage. Il fut également prévu de codifier l'immense volume du droit romain, ce qui serait finalement achevé sous l'empereur byzantin Justinien Ier (r. de 527 à 565). Parmi ses projets figuraient la construction d'un nouveau port à Ostie et l'assèchement des marais Pontins et du lac Fucin. Il imposa de lourdes taxes sur les produits de luxe étrangers et plaça des gardes dans toute la ville pour saisir les marchandises importées illégalement. Les gardes étaient même envoyés dans les maisons privées.
Assassinat
Si beaucoup de Romains acceptèrent l'arrogance de César, ils en vinrent à penser qu'il devenait plus une figure divine qu'un dirigeant. "Même les réformes sociales positives de César, qui étaient nombreuses, parce qu'elles étaient imposées par l'ordre, suscitaient l'irritation" (Rosenstein et al., 208). Les Ides de mars, le 15 mars 44 avant notre ère, il fut assassiné par un groupe de conspirateurs dirigé par Marcus Junius Brutus (85-42 av. J.-C.). L'assassinat de Jules César ne ramena pas les jours de gloire du passé; au contraire, il provoqua une nouvelle guerre civile.