Bataille de Crécy

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Article

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 26 février 2020
Disponible dans ces autres langues: anglais
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La bataille de Crécy, qui se déroula le 26 août 1346, vit une armée anglaise vaincre une force française beaucoup plus importante lors de la première grande bataille de la guerre de Cent Ans (1337-1453). Édouard III d'Angleterre (r. de 1327 à 1377) et son fils Édouard le Prince Noir (1330-1376) menèrent leur armée professionnelle à la victoire grâce à un bon choix de terrain, à la discipline des troupes dans le feu de l'action, à l'utilisation de l'arme dévastatrice qu'était l'arc long et à l'inaptitude générale des dirigeants français sous le règne du roi Philippe VI de France (r. de 1328 à 1350). Crécy sera suivie d'une victoire encore plus impressionnante à la bataille de Poitiers en 1356, alors que l'Angleterre prenait son envol dans un conflit qui durerait 116 ans.

Battle of Crecy, 1346 CE
Bataille de Crécy, 1346
Unknown Artist (Public Domain)

La guerre de cent ans

En 1337, Édouard III d'Angleterre avait l'intention d'étendre ses terres en France et il avait l'excuse parfaite puisque, par l'intermédiaire de sa mère Isabelle de France (née vers 1289 et fille de Philippe IV de France, r. de 1285 à 1314), il pouvait revendiquer un droit au trône de France en tant que neveu de Charles IV de France (r. de 1322 à 1328). Naturellement, le roi en place, Philippe VI, n'était pas disposé à céder sa place et c'est ainsi que la guerre de Cent Ans entre la France et l'Angleterre commença. Le nom du conflit, dérivé de sa grande longueur, est en fait une étiquette du 19e siècle pour désigner une guerre qui se déroula par intermittence pendant bien plus d'un siècle, en fait, pour ne se terminer qu'en 1453.

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L'arc long anglais était alors l'arme la plus dévastatrice sur le champ de bataille médiéval.

La première action majeure de ces guerres eut lieu en juin 1340, lorsqu'Édouard III détruisit une flotte française à Sluys, dans les Pays-Bas. Ensuite, une armée dirigée par le comte de Derby reconquit la Gascogne pour la Couronne anglaise en 1345. Puis, pour préparer une campagne de terrain en territoire français, le fils aîné d'Édouard III, Édouard de Woodstock, alias Édouard le Prince Noir, fut chargé de brûler autant de villes et de villages français qu'il le pouvait le long de la vallée de la Seine jusqu'en juillet 1346. Cette stratégie, connue sous le nom de chevauchée, avait de multiples objectifs : terroriser les habitants, fournir de la nourriture gratuite à l'armée d'invasion, obtenir du butin et une rançon pour les prisonniers nobles, et s'assurer que la base économique de l'adversaire était gravement affaiblie, ce qui rendrait extrêmement difficile la constitution ultérieure d'une armée sur le terrain. Inévitablement, les troupes ordinaires profitaient également de l'occasion pour semer la pagaille et piller tout ce qu'elles pouvaient lors des raids. Il s'agissait d'une forme brutale de guerre économique et, peut-être aussi, était-elle destinée à provoquer le roi Philippe afin qu'il prenne les armes et affronte l'armée d'invasion, ce qui est exactement ce qui se passa.

King Edward III of England
Le roi Édouard III d'Angleterre
National Portrait Gallery (CC BY-NC-ND)

Troupes et armes

Les deux camps à Crécy disposaient d'une cavalerie lourde composée de chevaliers médiévaux et de fantassins, mais c'est l'arc long anglais qui s'avéra décisif - l'arme la plus dévastatrice sur le champ de bataille médiéval. Ces arcs longs mesuraient entre 1,5 et 1,8 mètre de long et étaient le plus souvent fabriqués en if et cordés avec du chanvre. Les flèches, capables de percer les armures, mesuraient environ 83 cm de long et étaient fabriquées en frêne et en chêne pour leur donner plus de poids. Un archer expérimenté pouvait tirer 15 flèches par minute, soit une toutes les quatre secondes. L'armée anglaise comprenait également un contingent d'archers montés qui pouvaient poursuivre un ennemi en retraite ou être déployés rapidement là où ils étaient le plus nécessaires sur le champ de bataille.

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Les Français, bien qu'ayant quelques archers, s'appuyaient davantage sur les arbalétriers car le tir à l'arbalète nécessitait moins d'entraînement. Le principal contingent de l'armée de Philippe était composé d'arbalétriers génois. L'arbalète, cependant, avait une cadence de tir beaucoup plus lente que l'arc long, environ un carreau pour cinq flèches en termes de vitesse d'exécution.

Pas moins de 15 vagues d'attaques de la cavalerie française furent repoussées et la discipline anglaise fit en sorte que personne ne s'écarte de sa formation défensive.

En ce qui concerne l'infanterie, les hommes d'armes les mieux équipés portaient une armure en plaques, en tissu ou en cuir renforcé par des bandes métalliques. L'infanterie ordinaire, généralement gardée en réserve jusqu'à l'affrontement avec la cavalerie, avait peu ou pas d'armure et maniait des armes telles que des piques, des lances, des haches et des outils agricoles modifiés. Enfin, l'armée d'Édouard pouvait vanter quelques canons rudimentaires - les premiers à être utilisés sur le sol français - mais leur impact aurait été limité compte tenu de la technologie médiocre de l'époque, car ils ne pouvaient pas, par exemple, tirer en descente.

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La bataille

Le 26 août 1346, les deux armées se rencontrèrent comme il se doit près de Crécy-en-Ponthieu, une petite ville au sud de Calais, après quelques escarmouches en cours de route. Le roi Édouard, menant son armée en personne, avait débarqué à Saint-Vaast-La-Hougue près de Cherbourg le 12 juillet et avait ensuite marché vers l'est. Il s'unit aux forces du Prince Noir et, peut-être en récompense de ses raids réussis, le prince fut fait chevalier par son père. Caen fut alors capturée le 26 juillet, et l'armée d'invasion tourna vers le nord à Poissy, juste à l'ouest de Paris, pour finalement arriver près de Crécy. Le roi Philippe, pendant ce temps, menait son armée depuis Abbeville.

Helmet & Shield of Edward the Black Prince
Heaume et écu d'Édouard le Prince Noir
Arthur Charles Fox-Davies (Public Domain)

Les chiffres de la bataille de Crécy sont contestés, mais les historiens s'accordent à dire que l'armée anglaise était nettement inférieure à celle des Français, peut-être environ 12 000 contre 25 000 hommes. Certains historiens estiment l'armée d'Édouard à 15 000 hommes. L'armée du roi Edouard tenta de surmonter son désavantage numérique en prenant une position défensive sur une petite élévation surplombant la rivière Maie. Les forces d'Édouard étaient divisées en trois divisions et les flancs étaient protégés d'un côté par une forêt et un terrain marécageux, et de l'autre par le petit village de Wadicourt. Les Français devaient à la fois réduire leurs lignes de troupes et attaquer en montant. Édouard rendit les choses encore plus difficiles pour la cavalerie ennemie en faisant creuser des trous dans le terrain ouvert devant ses propres lignes.

Juste avant le début de la bataille, le roi anglais prononça un discours enflammé à ses troupes, du moins selon le chroniqueur médiéval Jean Froissart (c. 1337 - c.1405) :

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Alors le roi sauta sur un palefroi, un bâton blanc à la main... il chevaucha de rang en rang, priant chaque homme de veiller ce jour-là à son droit et à son honneur. Il le dit avec tant de douceur, de bonne humeur et de gaieté que tous ceux qui étaient déconfits reprirent courage en le voyant et en l'entendant.

(cité dans Starkey, 231)

La cavalerie française chargea en premier mais perdit les pédales lorsque l'ordre d'avancer fut donné, puis elle se rétracta lorsque le roi français réalisa qu'elle chargeait avec un soleil bas de fin d'après-midi dans les yeux. Certaines cavaleries françaises continuèrent à avancer malgré tout tandis que d'autres battirent en retraite. Les arbalétriers génois employés par le roi Philippe avancèrent alors au son des tambours et des trompettes mais rompirent rapidement leurs rangs après avoir réalisé qu'ils étaient totalement exposés aux archers ennemis. Le roi français, voyant la retraite des Génois, ordonna à sa propre cavalerie de les charger et de traverser les rangs ennemis, causant une confusion encore plus grande. La cavalerie lourde française continua ensuite à attaquer par vagues, mais les archers gallois et anglais, probablement positionnés sur les flancs des hommes d'armes anglais, s'avérèrent dévastateurs.

Battle of Crécy Map
Carte de la bataille de Crécy
westpoint.edu (Public Domain)

Edouard utilisait la même formation de troupes qui lui avait valu son succès à Halidon Hill contre les Écossais en 1333. Les chevaliers français furent renversés de leurs chevaux et virent leurs armures percées par les puissantes flèches anglaises qui leur arrivaient de multiples directions. Les Français ne pouvaient tout simplement pas trouver de réponse à la portée, à la puissance et à la précision de l'arc long anglais. Alors que la bataille se prolongeait et devenait plus confuse, l'armée du roi Édouard bénéficiait de sa plus grande expérience de la bataille et de sa discipline, acquises à la dure lors des combats en Écosse et au Pays de Galles.

Pas moins de 15 vagues d'attaques de la cavalerie française furent repoussées, et la discipline anglaise fit en sorte que personne ne s'écarte de sa formation défensive pour poursuivre imprudemment la cavalerie en fuite, où elle aurait sûrement été abattue par l'infanterie française numériquement supérieure à l'arrière. En revanche, bien que les chevaliers français et leurs alliés européens aient été expérimentés, l'infanterie de Philippe était composée d'une milice mal entraînée et peu fiable, et même les chevaliers s'avérèrent totalement indisciplinés. Le roi anglais gagna alors en mobilité en faisant descendre ses chevaliers de leurs montures et en les faisant avancer vers l'ennemi en rangs serrés, soutenus par des piquiers et une avant-garde d'archers.

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Le prince Edouard, alors âgé d'à peine 16 ans, dirigea l'aile droite de l'armée anglaise aux côtés de Sir Godfrey Harcourt. Le prince se battit avec aplomb, mais il y eut un moment de grand danger lorsque les Français semblaient sur le point de submerger les troupes du prince. Sir Godfrey appella des renforts mais, selon les Chroniques du chroniqueur médiéval Jean Froissart (c. 1337 - c. 1405), lorsqu'il apprit la situation critique de son fils, le roi Édouard, qui observait la scène depuis un moulin, se contenta de déclarer que si son fils parvenait à se sortir de ses difficultés, il gagnerait ses éperons ce jour-là (les éperons étant une marque de chevalerie et devant vraisemblablement être remis à Édouard lors de la cérémonie d'adoubement lorsqu'il rentrerait chez lui). Le Prince Noir fut finalement sauvé par son porte-drapeau Richard Fitzsimon, et les Français furent repoussés.

Comme un grand nombre de nobles français avaient été tués et que les chefs de l'armée avaient été éliminés, la supériorité numérique de l'infanterie française ne devint qu'académique, car il n'y avait plus personne pour la commander. A la tombée de la nuit, le résultat était déjà clair. Le roi Édouard avait gagné la bataille avec environ 300 pertes contre 14 000 morts français, le massacre résultant du fait que les Français avaient levé leur bannière, l'Oriflamme, pour ne pas faire de quartier. La tradition veut que 1 542 chevaliers français aient trouvé la mort (certains historiens avancent le chiffre de 4 000). La fine fleur de la noblesse française et de ses alliés fut éliminée, notamment le roi Jean de Bohême (r. de 1310 à 1346), le roi de Majorque, le comte de Blois et Louis de Nevers, le comte de Flandre. Le roi Philippe, désarçonné de son cheval à deux reprises, eut la chance d'échapper à la débâcle. C'est après la bataille, du moins selon la légende, que le prince Édouard adopta l'emblème et la devise du roi de Bohême tombé au combat : une plume d'autruche et Ich Dien ou "Je sers". Avec le temps, les plumes d'autruche sont devenues trois, et elles sont encore aujourd'hui le symbole du prince de Galles.

Conséquences

La victoire de Crécy se transforma en légende, et la crème des chevaliers qui s'y étaient battus furent récompensés en devenant membres du nouveau club exclusif d'Édouard III : l'Ordre de la Jarretière (c. 1348), l'héritage le plus prestigieux de la chevalerie médiévale en Angleterre. Cette victoire signifiait également qu'enfin, l'Angleterre n'était plus l'inféodée à la France, une position qu'elle avait occupée depuis la conquête normande de l'Angleterre par Guillaume le Conquérant en 1066. Une autre commémoration qui survit aujourd'hui (ou du moins une commémoration partielle) est le vitrail de Crécy de la cathédrale de Gloucester, qui présente de nombreux personnages nobles impliqués dans la bataille ainsi que leurs armoiries.

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Crécy Window, Gloucester Cathedral
Vitrail de Crécy, cathédrale de Gloucester
David Iliff (CC BY-SA)

De retour sur le champ de bataille en juillet 1347, une armée anglaise s'empara de Calais après un long siège. Entre-temps, David II d'Écosse (r. de 1329 à 1371), allié de Philippe VI, avait envahi l'Angleterre en octobre 1346. Durham était la cible, mais une armée anglaise vainquit les Écossais à la bataille de Neville's Cross le 17 octobre 1346. Le roi David fut capturé et Édouard III semblait désormais inarrêtable. Dix ans plus tard, une autre grande victoire fut remportée contre les Français à la bataille de Poitiers en septembre 1356. Ce succès fut encore plus important que celui de Crécy car le roi de France fut capturé.

Après une période de paix à partir de 1360, la guerre de Cent Ans se poursuivit, Charles V de France, alias Charles le Sage (r. de 1364 à 1380) se montra beaucoup plus compétent que ses prédécesseurs et commença à récupérer les gains territoriaux anglais. En 1375, les seules terres françaises appartenant à la Couronne anglaise étaient Calais et une petite partie de la Gascogne. Sous le règne de Richard II d'Angleterre (r. de 1377 à 1399), la paix régna entre les deux nations, mais sous le règne d'Henri V d'Angleterre (r. de 1413 à 1422), les guerres reprirent de plus belle et une grande victoire anglaise eut lieu à la bataille d'Azincourt en octobre 1415. Henri V eut tant de succès qu'il fut même nommé héritier du roi français Charles VI (r. de 1380 à 1422). Henri V mourut avant d'avoir pu accéder à cette position, et l'arrivée de Jeanne d'Arc (1412-1431) en 1429 marqua le début d'une remontée spectaculaire de le camp français, le roi Charles VII de France (r. de 1422 à 1461) prenant l'initiative. Le faible règne d'Henri VI d'Angleterre (r. de 1422 à 61 et de 1470 à 1471) vit la défaite finale des Anglais qui perdirent tous les territoires français à l'exception de Calais à la fin de la guerre en 1453.

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2020, février 26). Bataille de Crécy [Battle of Crécy]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1510/bataille-de-crecy/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Bataille de Crécy." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le février 26, 2020. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1510/bataille-de-crecy/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Bataille de Crécy." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 26 févr. 2020. Web. 24 déc. 2024.

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