Les chiens ont fait partie de l'histoire de l'humanité avant même que l'écriture n'ait existé. Dans l'ancien temple de Göbekli Tepe en Turquie, datant d'il y a au moins 12 000 ans av. JC, les archéologues ont découvert des restes de chiens domestiqués au Moyen-Orient qui sont liés à la preuve la plus ancienne de domestication, la tombe Natufiense (c. 12 000 av. JC) découverte à Ein Mallaha, en Israël, où ont été retrouvés les restes d'un vieillard enseveli avec un chiot.
Dans le sud de la France, les empreintes d'un jeune enfant marchant aux côtés d'un canidé, datant d'il y a 26 000 ans, ont été préservées dans la terre de la grotte Chauvet, et une étude de 2008 conclut que les chiens étaient domestiqués en Europe il y a environ 32 000 ans avec les restes de chiens les plus anciens du monde trouvés jusqu'à présent datant de 31 700 ans (Viegas, 1). Ce chien du paléolithique était semblable à un husky sibérien (Viegas, 1). Les résultats de l'étude de 2008 sont contestés par des restes de chiens trouvés dans les grottes de Goyet en Belgique qui datent d'il y a 36 500 ans.
Quel que soit l'âge du premier chien, ou comment ils sont venus à être domestiqués, ils sont devenus amis des humains assez tôt dans l'histoire et le sont restés. Dans de nombreuses cultures de l'Antiquité, les chiens avaient une place de premier plan, et étaient largement considérés de la même manière qu'ils le sont encore aujourd'hui: des compagnons fidèles, des chasseurs, des gardiens, des guides spirituels, et aussi des membres de la famille à part entière.
Les chiens en Mésopotamie
Dans la plus ancienne histoire du Proche-Orient, L'épopée de Gilgamesh de l'ancienne Mésopotamie (datant de 2150-1400 av. JC), les chiens jouent un rôle important en tant que compagnons de l'une des déesses les plus populaires de la région; la déesse Innana (Ishtar) voyage avec sept précieux chiens de chasse portant des colliers et en laisse. Bien que l'Égypte soit créditée de l'invention du collier pour chien, il est plus que probable qu'il ait été développé en Sumer.
On peut supposer que le développement du collier pour chien ait été suggéré peu de temps après leur domestication, ce qui se produisit en Mésopotamie avant l'Égypte. Un pendentif en or en forme de chien (de toute évidence un Saluki) datant de 3300 av. JC a été trouvé dans la ville sumérienne d'Urouk, et un sceau-cylindre de Ninive (c. 3000 av. JC) présente également un Saluki. Le chien du pendentif porte un large collier; preuve irréfutable de l'utilisation du collier à cette époque.
Dans la célèbre Descente d'Innana aux Enfers (une histoire considérée comme plus ancienne que Gilgamesh et n'en faisant pas partie), son mari, Dumuzi, garde des chiens domestiques comme rétinue royale. Les chiens occupent une place importante dans la vie quotidienne des Mésopotamiens. L'historien Wolfram von Soden le note en écrivant :
Le chien (nom sumérien, ur-gi ; nom sémitique, Kalbu) était l'un des premiers animaux domestiques et servait principalement à protéger les troupeaux et les habitations contre les ennemis. Malgré le fait que les chiens erraient librement dans les villes, le chien de l'Orient antique était en tout temps généralement lié à un seul maître et était pris en charge par lui. Bien sûr, le chien était aussi un mangeur de charognes, et dans les villages il fournissait le même service que les hyènes et les chacals. Pour autant que nous puissions le dire, il n'y avait que deux races principales de chiens: les grands lévriers qui étaient principalement utilisés pour la chasse, et les chiens très forts (du type Danois et mastiffs), qui dans l'Orient antique étaient de vrais adversaires pour les loups généralement plus petits et, pour cette raison, étaient particulièrement adaptés comme chiens de troupeau. Les sources distinguent de nombreuses sous-races, mais nous ne pouvons les identifier que partiellement. Le chien était souvent le compagnon des dieux de la thérapeutique. Bien que l'expression « chien méchant» ait été utilisée, le terme « chien » comme terme péjoratif était peu utilisé (91).
Les chiens sont représentés dans l'art mésopotamien comme des chasseurs mais aussi comme des compagnons. Les chiens étaient gardés à la maison et étaient traités de la même manière qu'ils le sont aujourd'hui par des familles attentionnées. Les inscriptions et les plaques incrustées représentent des chiens qui attendent leurs maîtres et, selon l'historien Bertman, écoutent même la musique jouée par leurs maîtres : « Les images sur des plaques incrustées, des sceaux en pierre sculptées et des reliefs sculptés nous transportent... Nous regardons un berger jouant de sa flûte alors que son chien est assis et écoute attentivement » (294).
Les chiens protégeaient la maison et des images amulétiques de canins - comme celles mentionnées ci-dessus originant d'Uruk - étaient portées à des fins de protection personnelle. Les célèbres chiens de Nimrod, des figurines en argile de canins trouvées dans la ville de Kalhu, avaient été enterrées sous ou près du seuil des bâtiments pour leur pouvoir protecteur. Cinq autres statuettes de chien ont été récupérées dans les ruines de Ninive et les inscriptions racontent comment ces figurines étaient imprégnées du pouvoir du chien pour protéger contre le danger.
De plus, les « dieux de la thérapeutique » que von Soden mentionne étaient les divinités impliquées dans la santé et la guérison et, plus particulièrement, la déesse Gula était régulièrement représentée en présence de son chien. La salive des chiens était considérée comme médicinale parce qu'il avait été observé que, lorsque les chiens léchaient leurs plaies, elle favorisait la guérison.
Les chiens en Perse
Les chiens étaient également associés au divin par les anciens Perses. L' Avesta (Écritures zoroastriennes) contient une section connue sous le nom de Vendidad qui décrit longuement les aspects bénéfiques du chien, la façon dont les chiens doivent être traités, les sanctions à l'encontre de ceux qui abusent les chiens et comment ces abus — ou, au contraire, soins — affecteront la destination finale de chacun dans l'au-delà. On dit que les chiens, en effet, montaient la garde sur le pont entre le monde des vivants et celui des morts; la façon dont on traitait un chien dans sa vie affectait ses chances d'atteindre le paradis.
Après la mort, l'âme traversait le pont de Chinvat où elle était jugée. Si une âme avait vécu une vie juste conformément aux préceptes de vérité, elle se voyait récompensée et recevait sa place au paradis dans la Maison des cantiques; si elle avait gaspillé sa vie à la poursuite d'intérêts personnels et du mal, elle était jetée en enfer de la Maison des mensonges. La façon dont on avait traité les chiens était une considération importante dans l'endroit où l'âme allait se rendre et tuer un chien lui garantissait une place dans la Maison des mensonges.
Les gens étaient encouragés à prendre soin des chiens comme ils le faisaient des autres êtres humains. Un chien blessé devait être soigné, on devait s'occuper d'une chienne enceinte comme de sa propre fille et ses chiots étaient pris en charge pendant au moins six mois après la naissance; après quoi ils devaient recevoir de bonnes maisons. Les chiens recevaient des rites funéraires équivalents à ceux des humains et jouaient également un rôle important dans les rituels mortuaires humains; ils étaient amenés dans la salle pour voir le défunt, probablement en raison de leur capacité à sentir ce que les humains ne pouvaient pas, afin de certifier que la personne était morte.
Les races de chiens persans comprenaient le Saluki, le Sarabi, l'Alabai (Berger d'Asie Centrale), l'Afghan et le Kangal. Ils étaient utilisés pour la chasse, comme chiens de garde et pour l'élevage des moutons, mais aussi comme compagnons. On pensait que l'âme d'un chien était constituée d'un tiers de bête sauvage, d'un tiers humain et d'un tiers divin, et donc les chiens devaient être traités avec respect et considération. Pendant les repas quotidiens, il était stipulé qu'il fallait toujours réserver trois bouchées de nourriture afin que son chien les reçoivent en reconnaissance de sa compagnie.
Les Chiens en Inde
Dans l'Inde antique, le chien était également très apprécié. Le Paria, chien qui existe encore aujourd'hui, est considéré par beaucoup comme le premier chien véritablement domestiqué de l'histoire et le plus ancien du monde (bien que cela n'ait été contesté). La grande épopée culturelle Mahabharata (c. 400 av. JC) présente de manière significative un chien qui aurait pu être l'un de ces chiens Paria.
L'épopée raconte, vers la fin, l'histoire du roi Yudisthira, plusieurs années après la bataille de Kurukshetra, en pèlerinage vers son dernier lieu de repos. Sur le chemin, il est accompagné de sa famille et de son chien fidèle. Un par un, les membres de sa famille meurent le long du chemin, mais son chien reste à ses côtés. Quand Yudisthira arrive enfin aux portes du paradis, il est accueilli pour la bonne et noble vie qu'il avait vécue, mais le gardien à la porte lui dit que le chien n'était pas autorisé à l'intérieur. Yudisthira fut choqué qu'une créature aussi loyale et noble que son chien ne serait pas autorisée au ciel et choisit donc de rester avec son chien sur terre, ou même d'aller en enfer, plutôt que d'entrer dans un endroit qui exclurait les chiens.
Le gardien à la porte dit alors à Yudisthira que ce n'était qu'un dernier test de sa vertu et que, bien sûr, le chien était aussi invité à entrer. Dans certaines versions de ce conte, le chien se révèlera être le dieu Vishnou, le gardien, qui avait veillé sur Yudisthira toute sa vie, reliant ainsi directement la figure du chien au concept du divin. Cette histoire fut utilisée comme intrigue dans un épisode appelé « La Chasse au Paradis » dans la célèbre série télévisée La Quatrième Dimension dans laquelle un agriculteur résiste aux tentations du diable dans l'au-delà en refusant d'entrer dans le « ciel » sans son chien. Dans cet épisode, comme à Mahabharata, les chiens sont plus que bienvenus dans le vrai paradis.
L'Égypte et les Chiens
Le lien du chien avec les dieux et la loyauté du chien aux êtres humains sont explorés plus en détail dans d'autres cultures. Dans l'Égypte ancienne, le chien était lié au dieu chien-chacal, Anubis, qui guidait l'âme du défunt vers la Salle de la Vérité où l'âme était jugée par le grand dieu Osiris. Les chiens domestiques étaient enterrés en grande pompe dans le temple d'Anubis à Saqqara et l'idée derrière cela semblait être d'aider les chiens décédés à passer facilement vers l'au-delà (connu en Égypte sous le nom de Champ des roseaux) où ils pouvaient continuer à profiter de leur vie comme ils l'avaient fait sur terre.
Le chien le plus connu enterré de cette façon est Abutiu qui fut honoré d'un grand enterrement dans l'Ancien Royaume (vers 2613-2181 av. JC) près du plateau de Gizeh. Abutiu était le chien d'un serviteur inconnu du roi, (dont l'identité est également floue) dont la dalle commémorative calcaire fut découverte en 1935 par l'égyptologue George Reisner. La dalle inscrite aurait autrefois fait partie de la chapelle commémorative du propriétaire et raconte comment « Sa Majesté ordonna qu'il [le chien] soit enterré de façon cérémoniale, qu'on lui donne un cercueil du trésor royal, du linge fin en grande quantité et de l'encens » (Reisner, 8).
Bien qu'Abutiu ait été particulièrement honoré, les chiens, en général, étaient très appréciés en Égypte comme faisant partie de la famille et, lorsqu'un chien mourrait, la famille, s'ils en avaient les moyens, le faisait momifier avec autant de soin qu'ils l'auraient fait pour un membre de la famille.
On portait le deuil pour la mort d'un chien et la famille se rasait les sourcils comme signe de ce chagrin (comme ils le faisaient aussi avec leurs chats). Les peintures des tombes du pharaon Ramsès II le dépeignent avec ses chiens de chasse (probablement dans le champ des roseaux) et les chiens étaient souvent enterrés avec leurs maîtres pour fournir ce genre de compagnie dans l'au-delà. La relation intime entre les chiens et leurs maîtres en Égypte est mise en évidence par des inscriptions qui ont été préservées :
Nous connaissons même de nombreux noms de chiens d' Égypte antique à partir de colliers en cuir ainsi que de stèles et de reliefs. Ils comprenaient des noms tels que Courageux, Fiable, Bon Berger, Vent du Nord, Antilope et même « Bon à Rien ». D'autres noms viennent de la couleur du chien, comme Noiraud, tandis que d'autres chiens ont reçu des numéros en guise de noms, tels que « le Cinquième ». Beaucoup de noms semblent représenter l'attachement, tandis que d'autres ne font que transmettre les aptitudes ou capacités du chien. Cependant, même comme dans les temps modernes, il pouvait y avoir des connotations négatives associées aux chiens en raison de leur nature en tant que serviteurs de l'homme. Certains textes contiennent des références aux prisonniers comme étant « les chiens du roi ». (Touregypt.com)
Le chien en tant que serviteur était le plus clairement représenté par ces colliers qui auraient servi à éduquer et à contrôler les animaux. La première preuve du collier de chien en Égypte est une peinture murale datant de c. 3500 av. JC d'un homme qui promenait son chien en laisse. La laisse semble être une simple corde, ou chiffon, attachée au collier. Les colliers de chien égyptiens étaient fabriqués à partir d'un seul morceau de cuir cousu et collé pour former un anneau qui était ensuite glissé sur la tête du chien.
À partir de simples anneaux en cuir, la conception des colliers devint plus élaborée à l'époque du Moyen Empire (2040-1782 av. JC) lorsqu'ils étaient ornés de clous de cuivre ou de bronze. Dans le Nouveau Royaume (1570-1069 av. JC) ils l'étaient encore plus avec des gravures élaborées. Ceci est notament observé sur le collier de chien de la tombe de Maiherpri, noble sous le règne de Thoutmose IV (1400-1390 av. JC) qui est un bracelet en cuir orné de chevaux et de fleurs de lotus et teint en rose pâle.
Les chiens en Grèce antique
De toute évidence, le chien était un élément important de la société et de la culture égyptiennes, mais il en était de même pour la Grèce antique. Le chien était, pour les Grecs, un compagnon, un protecteur et un chasseur et le collier à pointes, si connu aujourd'hui, fut inventé par les Grecs pour protéger le cou de leurs amis canins contre les loups. Les chiens apparaissent très tôt dans la littérature grecque dans la figure du chien à trois têtes, Cerbère, qui gardait les portes du royaume d'Hadès.
Dans les arts visuels, le chien est représenté sur des céramiques telles que l'hydrie de Caeré à figures noires montrant Héraclès et Cerbère datant d'environ 530-520 av. JC (actuellement au Musée du Louvre à Paris, France). En Grèce, comme dans l'ancienne Sumer, le chien était associé aux divinités féminines en ce que les déesses Artémis et Hécate gardaient des chiens (Artémis, chiens de chasse tandis qu'Hécate gardait des molosses noirs).
L'école philosophique du cynisme en Grèce antique tire son nom du grec pour « chien » et ceux qui suivaient cette école étaient appelés Kynikos (comme un chien) en partie en raison de leur détermination à suivre loyalement un seul chemin sans s'en détourner. Le grand philosophe cynique Antisthène enseignait dans un lieu connu sous le nom de Cynosarges (la place du chien blanc) et cela, peut-être, est une autre raison de leur nom.
Les chiens sont également présents dans le célèbre dialogue de la République de Platon. Dans le livre II,376b, Socrate affirme que le chien est un vrai philosophe parce que les chiens « distinguent le visage d'un ami et d'un ennemi seulement par le critère de savoir et de ne pas savoir » et conclut que les chiens doivent être amoureux de l'apprentissage parce qu'ils déterminent ce qu'ils aiment ou non se basant sur leur connaissance de la vérité. Le chien a appris qui est un ami et qui ne l'est pas et, sur la base de cette connaissance, répond de manière appropriée; tandis que les êtres humains sont souvent trompés quant à qui sont leurs vrais amis.
La plus célèbre l'histoire de chien de Grèce antique, cependant, est probablement celle d'Argos, le fidèle ami du roi Odysseus d'Ithaque du livre 17 de l'Odyssée d'Homère (c. 800 av. JC). Odysseus rentre à la maison après avoir été absent pendant 20 ans et, grâce à l'aide de la déesse Athéna, n'est pas reconnu par les prétendants hostiles qui essayent de gagner la main de sa femme, Pénélope. Argos, cependant, reconnaît son maître et se lève depuis là où il l'attendait fidèlement, agitant sa queue en guise de salut. Odysseus, déguisé, ne peut pas retourner le salut de peur de révéler sa véritable identité devant les prétendants et choisit donc d'ignorer son vieil ami et Argos se recouche et meurt.
Dans cette histoire et dans Mahabharata, la loyauté du chien est représentée exactement de la même manière. Bien qu'issu de cultures différentes et de centaines d'années d'écart, le chien est représenté comme l'ami fidèle et dévoué à son maître, que ce maître retourne sa dévotion ou non.
Les chiens à Rome
Dans la Rome antique, le chien était vu de la même manière qu'en Grèce et la mosaïque bien connue, Cave Canem (Méfiez-vous du chien) montre comment les chiens étaient appréciés à Rome comme gardiens de la maison comme ils l'avaient été dans les cultures antérieures et le sont encore aujourd'hui. Le grand poète latin Virgile, écrit : « Jamais, avec de tels gardiens, tu n'auras à redouter pour tes étables ni le voleur de nuit et les incursions des loups » (Georgique III, 404) et l'écrivain Varron, dans son travail sur la vie à la campagne, dit que chaque famille devrait avoir deux types de chiens, un chien de chasse et un chien de garde (Re De Rustica I.21). Les chiens protégeaient les gens non seulement contre les animaux sauvages et les voleurs, mais aussi contre les menaces surnaturelles.
La déesse Trivia (la version romaine de l'Hécate grecque) était la reine des fantômes, des carrefours hantés et des cimetières, et était associée à la sorcellerie. Elle s'approchait des gens en silence pour s'en saisir, mais les chiens étaient toujours les premiers à sentir sa présence; on pensait qu'un chien qui semblait aboyer dans le vide était censé avertir de l'approche de Trivia ou d'un autre esprit désincarné.
Les Romains avaient beaucoup d'animaux de compagnie, des chats aux singes, mais favorisaient le chien au-dessus de tous les autres. Le chien est présent dans des mosaïques, des peintures, de la poésie et de la prose. L'historien Lazenby écrit :
Il y a une grande série de reliefs grecs et romains montrant des hommes et des femmes avec leurs compagnons canins. Les reliefs gaulois montrent particulièrement une touche remarquablement humaine dans les scènes représentant ce favori domestique avec ses propriétaires. Nous y voyons de charmantes images d'une enfance saine et heureuse: un garçon s'inclinant sur un canapé et donnant à son chien son assiette pour qu'il la nettoie; ou encore une petite fille, Graccha, qui, selon l'inscription, ne vécut que 1 an et 4 mois, qui tient dans sa main gauche un panier contenant trois chiots et leur mère les regardant avec beaucoup d'inquiétude. (1)
Les chiens sont mentionnés dans le code de la loi romaine comme gardiens de la maison et des troupeaux. Dans un cas précis qui fut enregistré, un agriculteur traina son voisin en justice parce que ses chiens avaient sauvé les porcs du fermier de l'attaque des loups et le voisin revendiquait alors la propriété de ces porcs. La plainte, qui fut réglée en faveur de l'agriculteur, se lit comme suit :
Les loups emportèrent quelques porcs de mes bergers; le locataire d'une ferme voisine, ayant poursuivi les loups avec des chiens forts et puissants qu'il gardait pour protéger ses troupeaux, sauva les porcs des loups, ou les chiens les obligèrent à les abandonner. Quand mon berger revendiqua les porcs, la question s'est posée de savoir s'ils étaient devenus la propriété de celui qui les avait récupérés ou s'ils étaient encore à moi, car ils avaient été obtenus par une sorte de chasse. (Nagle, 246)
Varron affirma que toute ferme devait posséder deux chiens et qu'ils devaient être gardés à l'intérieur pendant la journée et laisser libre d'errer la nuit afin d'éviter une telle possibilité que celle évoquée ci-dessus. Il suggère également qu'un chien blanc soit choisi plutôt qu'un chien noir afin de pouvoir distinguer entre son chien et un loup dans l'obscurité ou le crépuscule du matin.
Les chiens en Chine
La Chine antique avait une relation intéressante avec le chien. Les chiens étaient les premiers animaux domestiqués en Chine (environ 12 000 av. JC) ainsi que les porcs et étaient utilisés pour la chasse et gardés comme compagnons. Ils étaient également utilisés, très tôt, comme source de nourriture et comme sacrifices. Les anciens os oraculaires (qui étaient des os d'animaux ou des carapaces de tortues utilisés pour prédire l'avenir) mentionnent les chiens à plusieurs reprises comme bons et mauvais présages selon la façon dont, dans quelle condition et dans quelles circonstances, le chien avait été vu.
Le sang d'un chien était un élément important lors des serments notament les serments d'allégeance, car on pensait que les chiens avaient été donnés aux humains comme un don du ciel et que leur sang était donc sacré. Comme don du divin, ils étaient honorés, mais il était entendu qu'ils avaient été fournis dans un but bien précis: aider les êtres humains à survivre en leur fournissant de la nourriture et du sang pour le sacrifice.
Les chiens étaient tués et enterrés devant une maison, ou devant les portes de la ville, pour lutter contre la maladie ou la malchance. Au fil du temps, les chiens de paille remplacèrent les chiens réels au fur et à mesure que la pratique de sacrifice des chiens devint moins populaire. On pensait que la maladie ou la mauvaise fortune qui menaçait la ville ou la maison était aussi facilement trompée par la figure du chien de paille, pensant que c'était un chien de garde, et s'enfuirait comme d'un vrai chien. La pratique consistant à fixer une statue ou une image d'un chien devant sa maison peut provenir de cette coutume d'enterrer un chien de paille dans sa cour pour se protéger contre les dangers.
Pour la protection personnelle, des amulettes en forme de chiens étaient portées. Elles étaient souvent fabriquées à partir de jade (néphrite) et, pendant la période de la culture Liangzhu (c. 3400-2250 av. JC), les amulettes de chien-jade étaient parmi les plus habilement sculptées. L'image ci-dessus est d'une amulette de chien-jade appartenant à M. Alfred Correya qui pourrait bien être la plus ancienne pièce de sculpture de chien au monde complètement intacte. L'état de la pièce suggère qu'elle fut enterrée en tant qu'objet funéraire et cela est conforme à l'ancienne tradition chinoise puisque le chien était un animal protecteur et que le jade était associé à l'immortalité. Un chien de jade dans une tombe protégeait et guidait l'âme dans l'au-delà.
Les chiens en Mésoamérique
Les Mayas avaient une approche aux chiens similaire à celle des Chinois. Les chiens étaient élevés dans des enclos comme source de nourriture, comme gardiens et animaux de compagnie, et pour la chasse, mais ils étaient également associés aux dieux. Comme les chiens étaient considérés comme de grands nageurs, on pensait qu'ils conduisaient les âmes des morts à travers l'étendue aqueuse jusqu'à l'au-delà, le monde souterrain de Xibalba. Une fois que l'âme était arrivée dans le royaume des ténèbres, le chien servait de guide pour aider les défunts à travers les défis posés par les seigneurs de Xibalba et pour atteindre le paradis.
Cela fut déduit des fouilles dans la région qui ont mis à jour des tombes dans lesquelles les chiens avaient été enterrés avec leurs maîtres et des inscriptions sur les murs des temples. Des inscriptions similaires dans les Codex mayas ayant survécu dépeignent le chien comme le porteur de feu au peuple et, dans le livre sacré Quiché Maya, le Popol Vuh, les chiens jouent un rôle déterminant dans la destruction de la race ingrate et inculte que sont les humains, que les dieux avaient produit avant de s'en repentir.
Les Aztèques et les Tarasques (ou Purépechas) partageaient cette vision du chien, y compris le chien comme guide dans l'au-delà pour les défunts. Les Aztèques avaient également une histoire dans leur mythologie concernant la destruction d'une race précoce d'êtres humains dans laquelle les chiens étaient présents. Dans cette histoire, les dieux noient le monde dans une grande inondation, mais un homme et une femme parviennent à survivre en s'accrochant à un rondin. Une fois les eaux reculées, ils grimpent sur des terres sèches et construisent un feu pour se sécher. La fumée de ce feu agace le grand dieu Tezcatlipoca qui leur arrache la tête, puis recoud les têtes aux extrémités arrière de l'homme et de la femme et, ce faisant, crée des chiens.
Selon ce mythe, les chiens datent d'avant la race actuelle des êtres humains et doivent donc être traités avec respect, de la façon dont on traiterait un aîné. Les Aztèques enterraient aussi des chiens avec leurs morts et leur dieu de la mort, Xolotl, était imaginé tel un chien énorme.
Les Tarasques, comme les Aztèques et les Mayas, gardaient les chiens comme animaux de compagnie, pour la chasse et pour la nourriture et les reliaient aussi aux dieux et à l'au-delà. Les âmes de ceux qui étaient morts sans enterrement approprié, comme ceux qui se s'étaient noyés ou perdus au combat ou qui étaient morts seuls lors d'une chasse, étaient retrouvées par des chiens esprits qui assuraient leur passage en toute sécurité vers l'au-delà.
Dans ces trois cultures (comme, d'ailleurs, dans les autres mentionnées ci-dessus), la croyance aux fantômes était très palpable. Un fantôme pouvait non seulement causer des ennuis dans sa vie quotidienne, mais aussi causer des dommages physiques et même causer la mort. L'histoire tarasque sur les chiens esprits dissipait la crainte que, si l'on n'avait pas réussi à enterrer convenablement un être cher, le fantôme du défunt reviendrait troubler les vivants. Les gens n'auraient rien à craindre parce que le chien s'occuperait du problème.
Les chiens celtiques et nordiques
Le chien était également associé à l'au-delà, à la protection et à la guérison dans les cultures celtes et nordiques. La déesse celtique-germanique de la guérison et de la prospérité, Nehalennia, est souvent représentée en compagnie d'un chien et les chiens eux-mêmes sont considérés semi-divins (la déesse celtique Tuirrean fut transformée par la jalouse reine des fées en tout premier lévrier irlandais). Comme dans d'autres cultures, le chien était associé à la protection après la mort et comme guide.
Ceci était également vrai dans la culture nordique scandinave où le chien Garm était censé garder l'au-delà de Hel, en gardant les âmes mortes à l'intérieur et les vivants dehors. Les chiens étaient associés à la divinité à travers la déesse Frigg, épouse d'Odin, qui est souvent représentée dans un char tiré par les chiens. Les chiens étaient souvent enterrés avec leurs maîtres comme protecteurs et guides dans l'au-delà et les chiens festoyaient aux pieds de leurs maîtres guerriers dans la grande hall du Valhalla après la mort. On trouva beaucoup plus de restes de chiens dans les sites de sépulture nordiques excavés que dans toute autre culture.
Conclusion
En Inde antique, en Mésopotamie, en Chine, en MésoAmérique et en Égypte, le peuple avait des liens profonds avec leurs chiens et, comme on l'a vu, cela était aussi courant en Grèce antique et à Rome. Les Grecs anciens considéraient les chiens comme des génies, comme « possédant un certain esprit élevé ». Platon parlait du chien comme un « amant de l'apprentissage » et une « bête digne d'émerveillement ». Le philosophe Diogène de Sinope aimait la simplicité de la vie du chien et encourageait les êtres humains à l'imiter.
Alors que d'autres animaux ont subi des changements significatifs dans la façon dont ils étaient perçus à travers l'histoire (le chat, notamment), le chien est resté un compagnon, un ami et un protecteur constant et a été dépeint de cette façon à travers l'art et dans les écrits de nombreuses cultures anciennes. La vieille affirmation selon laquelle un chien est le meilleur ami de l'homme est corroborée par les archives historiques, mais n'a besoin d'aucune preuve pour quiconque de nos jours a la chance de profiter de la compagnie d'un bon chien.
Note de l'auteur : Cet article est dédié à Sophia le Chien, mon vrai philosophe.
Note du traducteur: cet traduction est dédiée à Tootsie et Chester qui sont toujours dans mon cœur et à Phileas, mon Petit Prince.