Trésor et Butin à l'Âge d'Or de la Piraterie

9 jours restants

Investissez dans l'enseignement de l'Histoire

En soutenant notre organisation reconnue d'utilité publique, World History Foundation, vous investissez dans l'avenir de l'enseignement de l'Histoire. Votre don nous aide à transmettre à la nouvelle génération les connaissances et les compétences dont elle a besoin pour comprendre le monde qui l'entoure. Aidez-nous à démarrer la nouvelle année prêts à publier des contenus historiques fiables et gratuits pour tous.
$3407 / $10000

Article

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 29 septembre 2021
Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol
Écouter cet article
X
Imprimer l'article

Pendant l'âge d'or de la piraterie (1690-1730), les pirates recherchaient avant tout de l'or, de l'argent et des bijoux, mais s'ils ne pouvaient s'en emparer, ils s'emparaient de la cargaison d'un navire pour la revendre dans un repaire de pirates. Partagé entre les membres de l'équipage, l'appât du gain poussa de nombreux marins à la piraterie dans l'espoir d'échapper au labeur et aux difficultés de la vie ordinaire sur un navire et de profiter des plaisirs éphémères de la terre ferme. Si la majorité des pirates gaspillaient rapidement leurs gains mal acquis, certains d'entre eux touchèent le jackpot en capturant un navire au trésor et s'emparèrent, en quelques heures, de richesses qu'un honnête marin n'aurait jamais gagnées en une vie passée devant le mât.

Treasure Chest
Coffre au trésor
leigh49137 (CC BY-ND)

Pièces de monnaie

Le butin le plus recherché par les pirates était l'or, l'argent et les pierres précieuses. Les lingots et les bijoux pouvaient être vendus à un marchand dans un repaire de pirates mais les pièces de monnaie étaient encore plus pratiques car elles pouvaient être dépensées directement. Pendant l'âge d'or de la piraterie, les pièces de monnaie qu'un pirate pouvait espérer trouver comprenaient des réales espagnols en argent (0,12 oz / 3,43 g chacun), des pesos en argent (équivalant à huit réales et donc souvent appelés "pièces de huit"), des ducats en or et en argent (frappés à l'origine à Venise mais largement utilisés ailleurs; la version en or valait environ 10 réales) et des doublons espagnols (la plus grosse pièce d'or, connue sous le nom de pièce de 8 escudos, et pesant environ 1 oz / 28 g).

Supprimer la pub
Publicité
souvent, les pirates prenaient le contrôle du navire capturé et abandonnaient leur précédent navire.

Cargaison

En réalité, trouver une boîte verrouillée débordant d'or, d'émeraudes et de perles était une sorte de jackpot. Les vaisseaux-trésors espagnols que les corsaires et les boucaniers avaient pillés aux XVIe et XVIIe siècles étaient désormais trop bien protégés par les convois pour être considérés des cibles potenetielles par la grande majorité des pirates, et peu d'autres navires transportaient de telles richesses. Pendant l'âge d'or, un pirate avait beaucoup plus de chances de tomber sur un navire transportant des marchandises ordinaires qui devaient être revendues. Les rouleaux de soie et les épices pouvaient atteindre des prix élevés, mais la majorité des cargaisons capturées étaient constituées de produits plus ordinaires comme le tabac, le sucre, l'indigo, les spiritueux comme le rhum et le brandy, le vin, le lin, les peaux, les barils de farine, la fourrure et le bois de construction. Même les navires négriers étaient visés. Un navire chargé de tout cela permettait à un équipage pirate de s'adonner à la nourriture, à la boisson et aux prostituées pendant un bon moment à terre avant que l'argent ne s'épuise et qu'il soit obligé de partir à la recherche d'une nouvelle victime. Parfois, les navires marchands transportaient de riches passagers qui étaient généralement dépouillés de leurs objets de valeur personnels et même de leurs vêtements de luxe pour être revendus à terre. Les denrées alimentaires destinées à l'équipage et la pharmacie du navire étaient également prises.

Outre ces objets tant convoités, les pirates, comme tous les marins, avaient besoin de remplacer constamment le matériel nautique comme les cordes, les palans, les voiles et les ancres. Les armes, les outils et les instruments de navigation étaient également très recherchés. En tant qu'hommes recherchés, les pirates ne pouvaient pas se procurer ce matériel dans un port et se contentaient donc de le voler sur les navires capturés. Un bateau de pêche pouvait être attaqué pour cette seule raison, sa cargaison de poissons n'ayant que peu de valeur pour des pirates. Il arrivait aussi souvent que les pirates prennent le contrôle du navire capturé et abandonnent le précédent, soit parce qu'il n'était pas en état de naviguer et avait désespérément besoin d'être réparé, soit parce que le nouveau navire était plus grand et disposait de plus de canons.

Supprimer la pub
Publicité

Henry Every and a Jewel Fence
Henry Every et un receleur de bijoux
Howard Pyle (Public Domain)

Les pirates vendaient les cargaisons capturées à des marchands sans scrupules qui s'étaient installés dans les différents repaires des pirates dans les Caraïbes, comme Port Royal (Jamaïque), Tortuga (Hispaniola), New Providence (Bahamas) et, dans l'océan Indien, à Madagascar. Les marchands y gagnaient puisqu'ils acquéraient des marchandises à un prix bien inférieur à celui des navires marchands légitimes dans n'importe quel autre port, et les pirates étaient heureux de recevoir leur argent, même s'ils étaient obligés de vendre à un prix bien inférieur à la valeur réelle. Les marchands introduisaient ensuite clandestinement leurs marchandises douteuses dans les ports légitimes où elles étaient vendues par les canaux qu'elles auraient atteints si les pirates n'avaient pas interrompu le processus commercial.

L'argent issu de la vente d'une cargaison était réparti entre les membres de l'équipage selon une hiérarchie stricte.

Le butin était la seule rémunération d'un pirate, et si il n'y avait pas de prise, ils mouraient de faim, mais généralement pas avant d'avoir remplacé leur capitaine dans l'espoir d'une meilleure cueillette. Même en cas de prise de butin, la patience était de mise, car l'intendant était chargé de cataloguer et de protéger tout butin jusqu'à ce qu'il y en ait suffisamment pour qu'il soit vendu à terre.

Supprimer la pub
Publicité

Lorsque les autorités, sous la pression des entreprises légitimes, fermèrent des repaires comme New Providence en 1718, la piraterie dans les Caraïbes devint beaucoup plus difficile, car il n'y avait nulle part où vendre les marchandises volées. Les pirates se mirent donc à piller les navires uniquement pour leurs objets de valeur et à détruire les cargaisons pour le simple plaisir. Comme le note l'historien A. Konstam: "Du point de vue des pirates, si vous ne pouvez pas le manger, le boire, le fumer ou le dépenser, le pillage n'a absolument aucune valeur" (1998, 51). Certains pirates tentèrent d'établir de nouveaux refuges, comme Edward Teach, alias Barbe Noire (mort en 1718) sur l'île d'Ocracoke, en Caroline du Nord, mais la Royal Navy était de plus en plus présente dans l'Atlantique occidental, et lorsque les autorités apprenaient qu'un commerce illégal était en cours, elles intervenaient rapidement à l'aide de leurs navires de guerre. À la même époque, dans l'océan Indien, la Compagnie des Indes orientales commença à utiliser des convois et à protéger plus agressivement ses biens en mer.

Pieces of Eight from the Whydah
Pièces de huit du Whydah
Theodore Scott (CC BY)

La base de Barbe Noire fit l'objet d'un raid après la mort au combat du redoutable pirate en 1718. Les autorités consignèrent ce qu'elles trouvèrent, et cela montre à quel point le butin des pirates était généralement peu glorieux. L'historien D. Cordingly en donne un résumé éloquent:

Barbe Noire pilla une vingtaine de navires au cours de ses deux années de piraterie, mais aucune de ses prises n'était spectaculaire en termes de trésor. Après la bataille d'Ocracoke Inlet, le butin récupéré sur ses navires et à terre dans une tente se compose de "25 têtes de porc de sucre, 11 tierces [tonneaux] et 145 sacs de cacao, un baril d'indigo et une balle de coton". Avec la vente du sloop de Barbe Noire, cette somme s'élevait à 2 500 livres sterling, ce qui n'était pas très impressionnant pour un pirate aussi célèbre. (191)

D'autre part, l'épave du Whydah, le navire de Sam Bellamy, offre une autre vision du pillage pirate. Bellamy avait capturé le navire négrier Whydah dans les Bahamas alors qu'il rentrait en Angleterre. Il était chargé de butin et Bellamy en fit son propre navire avant qu'il ne s'échoue dans une tempête à Orléans, Massachusetts, en 1717. Cordingly mentionne à nouveau les marchandises trouvées :

Supprimer la pub
Publicité

[Les plongeurs] ont remonté du fond de la mer une quantité impressionnante de pièces de monnaie, de lingots d'or et de bijoux africains. Il y a 8 397 pièces de monnaie de différentes dénominations, dont 8 357 pièces d'argent espagnoles et 9 pièces d'or espagnoles, qui totalisent 4 131 pièces de huit. Il y a 17 lingots d'or, 14 pépites d'or et 6 174 morceaux d'or, ainsi qu'une quantité de poussière d'or. L'or africain comprend près de 400 bijoux akans, principalement des perles, des pendentifs et des ornements en or.(Ibid)

Distribution

L'argent provenant de la vente d'une cargaison était réparti entre les membres de l'équipage selon une stricte hiérarchie: la plupart des hommes recevaient une part, certains marins qualifiés et officiers recevaient une part et un quart ou une part et demie, et le quartier-maître et le capitaine recevaient deux parts chacun. Les objets de fantaisie, comme les vêtements, qui ne pouvaient être divisés, étaient parfois vendus aux enchères devant le mât. Dans le cadre du système de distribution curieusement démocratique des pirates, et avant que le pot commun ne soit divisé, les pirates qui avaient été blessés au cours du voyage recevaient des paiements supplémentaires. Les paiements étaient distribués comme suit :

  • Perte d'un bras droit : 600 pesos
  • Perte du bras gauche : 500 pesos
  • Perte de la jambe droite : 500 pesos
  • Perte de la jambe gauche : 400 pesos
  • Perte d'un œil : 100 pesos
  • Perte d'un doigt : 100 pesos (Breverton, 237)

Capture of the Galleon by Howard Pyle
Capture du galion par Howard Pyle
Howard Pyle (Public Domain)

Plus belles prises

Bien que la plupart des pirates aient dû se contenter de capturer des cargaisons et, à l'occasion, des coffres-forts remplis d'objets de valeur, la période fut marquée par la capture de très grandes prises. Le Ganij-i-Sawai, capturé en 1695, fut l'une des plus belles prises jamais réalisées par un pirate. Appartenant à l'empereur moghol, la cargaison valait plus de 95 millions de dollars aujourd'hui, et c'est Henry Every (né en 1653) qui s'en empara. Le butin se composait d'or, d'argent, de pierres précieuses, de pièces de monnaie, d'épices précieuses et de rouleaux de soie. Il y avait aussi des produits manufacturés de luxe, comme une selle incrustée de diamants. La part de chaque homme de l'équipage d'Every équivalait au salaire d'une vie entière. Contrairement à la plupart des autres pirates qui furent fusillés ou pendus quelques années après le début de leur carrière, le capitaine Every prit une décision intelligente en abandonnant immédiatement la piraterie. On n'entendit plus jamais parler de lui.

Supprimer la pub
Publicité
Dans de nombreuses histoires de pirates, le méchant capitaine enterre son butin CRIMINEL dans un coffre au trésor sur une île déserte.

Le butin de Every était gigantesque, mais pas unique. Le capitaine Thomas Tew (mort en 1695) captura un navire marchand qui rentrait à Bombay (aujourd'hui Mumbai) en 1693. Une fois réparti, le butin valait 3 000 livres sterling pour chaque membre de l'équipage (plus de 800 000 dollars d'aujourd'hui). De même, l'équipage d'Edward England dut se réjouir de la capture d'un navire portugais dans les Mascareignes, près de Madagascar, vers 1720. La cargaison capturée comprenait des diamants d'une valeur de 3 à 4 millions de dollars.

La plus grosse prise jamais réalisée fut celle de John Taylor, commandant le Cassandra, et d'Olivier La Bouche, commandant le Victory en avril 1721. Ensemble, ils s'emparèrent d'un carrack portugais, le vaisseau-trésor Nostra Senhora de Cabo, à l'île de la Réunion. Le butin comprenait 500 000 livres sterling en diamants, or et autres objets de valeur, tandis que la cargaison ajouta 375 000 livres sterling au butin. Aujourd'hui, ces richesses équivaudraient à plus de 250 millions de dollars.

Trésor enfoui

Dans de nombreux récits de pirates, le méchant capitaine enterre son butin criminel dans un coffre au trésor sur une île déserte, dans un endroit secret révélé uniquement par une carte au trésor énigmatique. Ce capitaine peut également avoir tué quelques-uns de ses hommes sur place afin de pouvoir retourner seul à son navire, seul détenteur de l'endroit secret. Malheureusement, tout cela n'a pas grand-chose à voir avec la réalité des pirates. Les pirates dépensaient leur butin dès qu'ils le pouvaient, le gaspillant dans des réjouissances excessives dans les repaires de pirates où l'éphémère atmosphère de vin, de femmes et de chansons qui régnait vidait les poches et les bourses plus vite qu'il n'était possible de dire "épisser l'armature principale". Les jeux d'argent étaient un autre moyen rapide de vider les poches d'un pirate. Le trésor enterré des pirates apparaît surtout dans le roman de Robert Louis Stevenson L'île au trésor, publié en 1883, et il est depuis lors un élément très copié des récits de pirates. Bien qu'il s'agisse d'un événement rare dans la pratique, l'idée du trésor enfoui de Stevenson pourrait avoir été inspirée par un véritable pirate, le capitaine Kidd (1645-1701).

Vous aimez l'Histoire?

Abonnez-vous à notre newsletter hebdomadaire gratuite!

Captain Kidd Burying His Treasure
Le capitaine Kidd enterrant son trésor
Howard Pyle (Public Domain)

Le capitaine Kidd avait d'abord été corsaire avant de devenir pirate dans l'océan Indien. Kidd réussit à capturer une prise fantastique en 1698, le Quedah Merchant, un navire de 400 tonnes, au large des côtes indiennes. Une partie de la cargaison du navire, composée de soie, de calicot, de sucre, de fer et d'opium, fut vendue pour 10 000 livres sterling (environ 2,5 millions de dollars d'aujourd'hui). Kidd finit par rentrer à Boston, sa ville natale, dans l'espoir d'être gracié, mais avant cela, il s'arrêta quelque part, probablement dans le New Jersey, à Long Island ou à Gardiners Island. C'est là qu'il enterra une partie de son butin, un fait connu parce que le gouverneur, qui refusa d'accorder la grâce, récupéra plus tard une partie de ce trésor à la suite d'une confession de Kidd. Ce trésor récupéré comprenait de l'or, de l'argent et des pierres précieuses. Cependant, la valeur des biens récupérés ne correspondait pas au manifeste du Quedah Merchant ni au butin que Kidd avait dû capturer sur d'autres navires. C'est ainsi que naquit la légende du trésor enfoui du capitaine Kidd, qui n'a toujours pas été découvert et qui, depuis lors, a séduit et déçu tout autant de chasseurs de trésors.

Outre la passion du capitaine Kidd pour la dissimulation du butin, il y eut un autre épisode notable de trésor pirate enfoui, une histoire qui a fait naître une lueur d'avarice dans l'œil de bien des chercheurs de trésors d'aujourd'hui. En novembre 1720, à l'embouchure de la rivière York, en Virginie, le capitaine Stratton quitta son navire, le Prince Eugène, à bord d'une chaloupe chargée à ras bord de trésors. Stratton n'était pas un pirate, mais il venait de commercer avec un pirate et avait acquis six coffres en bois et six sacs remplis de pièces d'argent. Arrivé sur la plage, Stratton enterra ses biens mal acquis. Cependant, l'un des membres de l'équipage informa plus tard les autorités de la ville voisine de Yorktown, et Stratton fut arrêté. On ne sait pas ce qu'il advint de son trésor. Une réponse possible est que les autorités le cherchèrent et le trouvèrent grâce aux informations de l'informateur. Une réponse romantique est qu'il ne fut jamais trouvé et qu'il repose donc toujours là aujourd'hui, l'argent incorruptible attendant patiemment sa chance de croiser à nouveau la paume d'une quelconque personne.

Supprimer la pub
Publicité

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2021, septembre 29). Trésor et Butin à l'Âge d'Or de la Piraterie [Treasure & Booty in the Golden Age of Piracy]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1842/tresor-et-butin-a-lage-dor-de-la-piraterie/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Trésor et Butin à l'Âge d'Or de la Piraterie." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le septembre 29, 2021. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1842/tresor-et-butin-a-lage-dor-de-la-piraterie/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Trésor et Butin à l'Âge d'Or de la Piraterie." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 29 sept. 2021. Web. 22 déc. 2024.

Adhésion