Bataille de Marston Moor

Article

Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 16 décembre 2021
Disponible dans ces autres langues: anglais
Imprimer l'article

La bataille de Marston Moor, près de York, le 2 juillet 1644, fut l'un des engagements les plus importants des guerres civiles anglaises (1642-1651). Les parlementaires remportèrent la bataille qui, impliquant plus de 45 000 hommes, fut la plus importante de la première guerre civile anglaise (1642-1646). Un commandant de cavalerie "Roundhead" joua un rôle déterminant dans cette victoire et fit sa première apparition dans les pages de l'histoire: Oliver Cromwell (1599-1658).

Cromwell at Marston Moor
Cromwell à Marston Moor
Ernest Crofts (Public Domain)

La guerre civile jusqu'alors

Le roi Charles Ier d'Angleterre (r. de 1625 à 1649) s'était heurté pendant des années au Parlement, en particulier au sujet de l'argent et des réformes religieuses, et une guerre civile finit par éclater en 1642. Les "Roundheads" (parlementaires) et les "Cavaliers" (royalistes) s'affrontèrent au cours de plus de 600 batailles et sièges pendant toute la durée du conflit. Londres, le sud-est et la marine royale étaient aux mains des Roundheads, tandis que le roi contrôlait l'ouest et le nord de l'Angleterre.

Supprimer la pub
Publicité
Le prince Rupert, commandant de la cavalerie royale, vint brillamment au secours de York le 1er juillet 1644.

La première grande bataille de la guerre fut la bataille d'Edgehill, dans le Warwickshire, le 23 octobre 1642, qui se solda par un match nul mais empêcha le roi de marcher sur Londres. Des batailles de moindre envergure suivirent, et il y eut de nombreux sièges et attaques contre plusieurs grandes villes, notamment la prise de Bristol par les royalistes en juillet 1643 et la défense réussie de Gloucester par les parlementaires plus tard dans la même année. Une autre grande bataille se solda par un match nul, la première bataille de Newbury en septembre, également en 1643. En décembre, les parlementaires bénéficièrent d'un coup de pouce important lorsqu'une alliance militaire fut conclue avec les Covenantaires d'Écosse, qui jurèrent de défendre leur Église presbytérienne, une institution qui semblait gravement menacée si les royalistes remportaient la guerre en Angleterre.

Entre-temps, Charles avait convoqué son propre Parlement à Oxford, une petite assemblée mais avec des membres fidèles de l'ancien Parlement de Londres et quelques nouveaux venus. Il déclarait ainsi qu'il était le souverain légitime et non le Parlement de Londres. Le Parlement d'Oxford fut en mesure de lever des fonds pour l'armée du roi par le biais de taxes et d'impôts. Au même moment, les hostilités avec les rebelles catholiques cessèrent en Irlande, ce qui permit, bien que brièvement, de compléter l'armée du roi avec des hommes en armes qui étaient auparavant nécessaires à l'étranger. Alors que le roi consolidait son contrôle territorial et que les parlementaires bénéficiaient de ressources accrues, le conflit qui déchirait l'Angleterre restait finement équilibré.

Supprimer la pub
Publicité

Oliver Cromwell
Olivier Cromwell
Samuel Cooper (Public Domain)

Les parlementaires prirent un bon départ en janvier 1644 en remportant la bataille de Nantwich, dans le Cheshire, le 25 janvier. Cette victoire fut suivie d'une autre à la bataille de Cheriton, dans le Hampshire, le 29 mars. Ces défaites portèrent un coup sérieux aux projets que le roi Charles avait pour l'année en cours. Le grand événement suivant fut le siège de York, d'avril à juillet 1644, mais des événements graves se produisirent ailleurs dans le royaume, notamment sur un petit pont à Cropredy, dans l'Oxfordshire, puis sur la vaste étendue de Marston Moor, dans le Yorkshire.

Vers deux heures de l'après-midi, la grande artillerie des deux camps commença à jouer, mais sans grand succès pour l'un comme pour l'autre. Major Lion Watson

De York à Marston Moor

La victoire à Cropredy Bridge le 28 juin permit au roi de s'emparer d'Oxford et d'aller à la rencontre des parlementaires dans le sud. Les royalistes disposaient également de 11 canons capturés à Cropredy Bridge, mais ces événements furent largement éclipsés par ce qui se passait dans le nord du pays. Tout d'abord, le prince Rupert, comte palatin du Rhin et duc de Bavière, neveu de Charles et commandant de la cavalerie royale, annonça avec jubilation qu'il était brillamment venu au secours de York le 1er juillet. Cette ville vitale du nord était en sécurité, mais les armées parlementaires qui avaient assiégé la ville restaient une menace sérieuse pour l'armée de Rupert et/ou les forces royalistes plus au sud, en fonction de la direction qu'elles prendraient ensuite.

Supprimer la pub
Publicité

Les parlementaires avaient encerclé York, mais Rupert les avait encerclés à son tour, obligeant les Roundheads à se retirer de leur siège de deux mois de la ville. Le lendemain, Rupert prit la décision fatidique d'attaquer l'ennemi qui battait en retraite, dans une action typique de son approche audacieuse de la guerre sur le terrain. Rupert fut renforcé par l'arrivée indispensable d'une force en provenance de York même, dirigée par le marquis de Newcastle. En conséquence, le prince commandait une force totale d'environ 18 000 hommes, dont quelque 6 000 cavaliers. L'armée du marquis n'arriva cependant à Marston Moor que dans l'après-midi, après avoir passé la matinée à piller le camp des parlementaires, qui l'avaient quitté plus tôt dans la journée pour prendre leurs propres positions de combat. L'armée nordiste de Newcastle était connue sous le nom de "Whitecoats", car leurs manteaux étaient faits d'un tissu non teinté, leur seule décoration étant une croix occasionnelle. Rupert était mécontent du retard du marquis et n'hésita pas à le dire: "My Lord, j'aurais aimé que vous arriviez plus tôt avec vos forces. Mais j'espère que nous aurons une journée victorieuse" (Hunt, 127).

Oliver Cromwell at Marston Moor
Oliver Cromwell à Marston Moor
Unknown Artist (Public Domain)

Face aux royalistes, il y avait en fait trois grandes armées parlementaires totalisant environ 28 000 hommes: l'une dirigée par le comte de Manchester, l'autre par Sir Thomas Fairfax (alias Lord Fairfax, 1612-1671), et une troisième, une force écossaise d'environ 9 000 fantassins et 2 000 cavaliers sous le commandement général d'Alexander Leslie, comte de Leven (mort en 1661). Ensemble, les parlementaires étaient bien plus nombreux que les royalistes, mais l'avantage se situait surtout au niveau de l'infanterie, qui ne joua un rôle crucial dans la bataille qu'à ses derniers stades.

Après avoir pris conscience de la menace que représentait Rupert, les trois armées parlementaires firent demi-tour et l'affrontèrent au sud-ouest de York, sur une étendue de lande relativement plate et dégagée, entre les villages de Long Marston et de Tockwith. Le champ de bataille comportait un certain nombre de haies et de fossés à franchir, bien que certains d'entre eux aient été nettoyés en début d'après-midi. Les deux camps se firent face à travers la lande, mais il ne se passa pas grand-chose en dehors de quelques coups de canon tirés de part et d'autre au milieu de l'après-midi. Les régiments d'infanterie au centre, la cavalerie sur les deux ailes et les dragons (hybride d'infanterie et de cavalerie) aux extrémités des lignes se trépignaient d'impatience comme des chevaux de course attendant le départ.

Supprimer la pub
Publicité

Le major Lion Watson, un chef de troupe parlementaire, fit le récit suivant de ces premières heures étranges sur la lande et explique pourquoi les deux camps hésitaient à entamer le combat proprement dit:

Vers deux heures, la grande artillerie des deux camps commença à jouer, mais sans grand succès pour l'un ou l'autre; vers cinq heures, nous avons eu un silence général des deux côtés, chacun s'attendant à ce que nous commencions la charge, car il y avait un petit fossé et un talus entre nous et la lande, par lesquels nous devions passer si nous voulions les charger sur la lande, ou qu'ils devaient passer s'ils voulaient nous charger dans le grand champ de maïs, et ainsi de suite; C'était donc un grand désavantage pour celui qui commençait la charge, car le fossé devait quelque peu perturber leur ordre, et l'autre était prêt, en bon terrain et en bon ordre, à les charger avant qu'ils ne puissent le récupérer. (Hunt, 127)

La cavalerie de Cromwell

La bataille s'engagea finalement, et de manière inattendue, dans la soirée. Les deux armées royalistes, peut-être parce que Rupert et Newcastle n'étaient pas d'accord sur la manière de procéder, s'étaient alors retirées dans leurs camps respectifs. Vers 19 heures, les Parlementaires virent les feux de cuisson de l'ennemi, indiquant qu'ils se réservaient probablement pour le lendemain, et ils prirent la décision d'attaquer en force. Une tempête de pluie ajouta sans doute à la confusion dans les camps royalistes, mais ceux-ci avaient maintenu leur déploiement défensif et ne furent donc pas complètement submergés dès le premier assaut. La cavalerie parlementaire menée par Sir David Leslie et Oliver Cromwell attaqua l'aile droite de la cavalerie adverse qui se retrouva sur un terrain accidenté. La cavalerie royaliste fut totalement désorganisée et subit une défaite cuisante; même Rupert perdit son cheval et fut obligé de se cacher dans un champ de haricots. Le prince perdit son train de bagages et même son caniche de chasse bien-aimé, "Boye", fut tué dans le chaos. Cromwell n'en sortit pas indemne, blessé au cou, il dut quitter le champ de bataille le temps de panser sa blessure.

Battle of Marston Moor, 1644
Bataille de Marston Moor, 1644
John Barker (Public Domain)

Ailleurs sur le champ de bataille, il y eut un autre affrontement de cavalerie: Lord George Goring progressa de manière significative contre la cavalerie de Lord Fairfax sur l'aile droite de l'armée parlementaire. Cependant, au cœur du champ de bataille, l'infanterie royaliste composée de piquiers et de mousquetaires était désormais massacrée par la cavalerie de Cromwell qui les attaquait par l'arrière. L'un des parlementaires, un capitaine, décrivit la bataille qui faisait rage comme "les portes de l'enfer" et que l'infanterie "faisait un tel bruit de coups de feu et de clameurs que nous en perdions nos oreilles, et la fumée de la poudre était si épaisse que nous ne voyions d'autre lumière que celle qui sortait de l'embouchure des canons" (Gaunt, p. 60). Cromwell, dans une impressionnante manœuvre sur le champ de bataille, réunit sa cavalerie et la conduisit pour venir à l'aide de celle de Fairfax sur l'aile droite, où elle avait été prise dans un feu croisé de mousquetaires ennemis.

Supprimer la pub
Publicité

La victoire du Parlement

Une partie de l'infanterie nordiste de Newcastle continua à se battre, mais elle fut presque totalement anéantie (seuls 30 hommes survécurent), et ce qui restait des deux autres armées royalistes se retira vers York. Même alors, les parlementaires les poursuivirent, comme le nota un témoin oculaire: "Nous avions débarrassé le terrain de tous les ennemis, et nous les poursuivions [...] en les fauchant de telle sorte que leurs cadavres s'étendaient sur trois miles de long" (Gaunt, 62). À 21 heures, la bataille sanglante était terminée. Une grande partie de l'armée de Charles avait été détruite sur le terrain. Cromwell décrivit la bataille dans une lettre émouvante adressée à son beau-frère Valentine Walton, dans laquelle il annonça la mort de son fils:

[Nous n'avons jamais chargé, mais nous avons mis l'ennemi en déroute. L'aile gauche, que je commandais, composée de nos propres chevaux, à l'exception de quelques Écossais à l'arrière, a battu tous les chevaux du Prince. Dieu a fait d'eux du chaume pour nos épées, nous avons chargé leurs régiments de fantassins avec nos chevaux, nous avons mis en déroute tous ceux que nous avons chargés... sur 20 000, le Prince n'en a pas laissé 4 000... Monsieur, Dieu vous a enlevé votre fils aîné par un coup de canon. Il lui a cassé la jambe. Nous avons été obligés de la couper, et il en est mort... C'était un jeune homme courageux et très aimable. Que Dieu vous apporte son réconfort. (Hunt, 131-2)

Les parlementaires non seulement gagnèrent la bataille, tuèrent quelque 4 500 royalistes et firent 1 500 prisonniers, ils contrôlaient désormais le nord de l'Angleterre, avec seulement quelques châteaux isolés, mais néanmoins bien garnis, qui restaient fidèles au roi. Même York se rendit aux forces parlementaires le 16 juillet 1644.

Marston Moor Battle Monument
Monument de la bataille de Marston Moor
User: RRRR NNNN (CC BY-SA)

Suites de la bataille

La bataille de Marston Moor fut un désastre pour le roi Charles, mais comme la guerre l'a déjà montré, de lourdes défaites sur le terrain ne signifient pas nécessairement que la guerre est terminée. La bataille eut des conséquences importantes pour plusieurs des principaux commandants. Cromwell, qui n'avait cessé de gravir les échelons, put démontrer ses capacités en tant que lieutenant-général de la cavalerie de Manchester, et il ne ferait plus jamais marche arrière. De même, Sir David Leslie était devenu populaire et la victoire lui valut de nombreux éloges. En revanche, le prince Rupert avait terni sa réputation de vainqueur fulgurant, et sa décision d'attaquer une armée plus nombreuse qui battait en retraite fut considérée comme une folie. Le marquis de Newcastle s'enfuit, honteux, aux Pays-Bas, et sa ville éponyme tomba aux mains des parlementaires peu de temps après.

Vous aimez l'Histoire?

Abonnez-vous à notre newsletter hebdomadaire gratuite!

La deuxième bataille de Newbury, le 27 octobre 1644, n' apporta qu'un autre résultat indécis qui permit aux guerres civiles anglaises de se poursuivre. Ce n'est qu'après février 1645, date à laquelle les parlementaires formèrent la New Model Army, qu'il devint plus aisé de déterminer qui serait le vainqueur de ce conflit sanglant. La victoire de la New Model Army à la bataille de Naseby, dans le Northamptonshire, en juin, fut suivie d'autres victoires, notamment le siège de Bristol en 1645 et la prise de ce port vital. La situation du roi Charles, désormais en exil en Écosse, devint alors tout à fait désespérée.

Supprimer la pub
Publicité

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2021, décembre 16). Bataille de Marston Moor [Battle of Marston Moor]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1906/bataille-de-marston-moor/

Style Chicago

Cartwright, Mark. "Bataille de Marston Moor." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le décembre 16, 2021. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-1906/bataille-de-marston-moor/.

Style MLA

Cartwright, Mark. "Bataille de Marston Moor." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 16 déc. 2021. Web. 21 févr. 2025.

Adhésion