La bataille de Naseby, dans le Northamptonshire, le 14 juin 1645, fut l'une des batailles les plus importantes des guerres civiles anglaises (1642-1651). Les royalistes, menés en personne par le roi Charles Ier, furent sèchement battus par la New Model Army des parlementaires, supérieure en nombre. Naseby ne marqua pas la fin de la guerre, mais la destruction de l'infanterie du roi signifiait que la victoire du Parlement était désormais inévitable.
La guerre civile jusqu'alors
Le roi Charles Ier d'Angleterre (r. de 1625 à 1649) s'était heurté au Parlement pendant des années, notamment au sujet de l'argent et des réformes religieuses, et une guerre civile avait finalement éclaté en 1642. Les "Roundheads" (parlementaires) et les "Cavaliers" (royalistes) s'affrontèrent au cours de plus de 600 batailles et sièges pendant toute la durée du conflit. Dès le début, Londres, le sud-est et la Royal Navy étaient aux mains des Têtes rondes, tandis que le roi contrôlait l'ouest et le nord de l'Angleterre.
L'année 1644 fut très compliquée pour les royalistes. Une lourde défaite à la bataille de Marston Moor, près de York, le 2 juillet 1644, fut suivie de la perte de York plus tard le même mois. Les parlementaires contrôlaient désormais tout le nord de l'Angleterre, à l'exception de quelques châteaux isolés, et ils s'étaient trouvés un nouveau commandant de cavalerie talentueux, Oliver Cromwell (1599-1658). Le roi contrôlait toujours le sud-ouest, et les Roundheads perdirent l'occasion d'infliger peut-être une dernière défaite à leurs adversaires lors de la deuxième bataille indécise de Newbury, le 27 octobre 1644. Le manque d'unité entre les commandants des Roundheads conduisit à un remaniement de l'armée du Parlement et à la création d'une nouvelle force professionnelle dotée d'une nouvelle structure de commandement. Il s'agissait de la New Model Army, dont le chef principal était Sir Thomas Fairfax (1612-1671) et le commandant en second Cromwell.
Au cours de la deuxième semaine de mai 1645, Charles mena une armée pour soulager le siège de Chester. Thomas Fairfax saisit l'occasion pour mener la New Model Army à assiéger Oxford, alors capitale royaliste et désormais sous-défendue. Fin mai, l'armée royaliste assiégea Leicester, dans l'espoir de détourner les forces parlementaires d'Oxford, au sud. Leicester fut capturée le 31 mai et Fairfax réagit en faisant marcher son armée vers le nord. Le roi Charles commit alors l'erreur fatale de diviser ses forces. Deux groupes de cavaliers royalistes partirent, l'un vers le sud-ouest et l'autre vers le nord de l'Angleterre, laissant à Fairfax une force largement supérieure s'il parvenait à trouver le roi avant qu'il ne parte à son tour. Le roi ne se mobilisa pas à temps et laissa passer une dernière chance, le soir du 13 juin, de quitter le Northamptonshire pour pouvoir pousuivre le combat à une date ultérieure. Le samedi 14 juin, les deux armées, qui occupaient chacune une crête basse, s'affrontèrent sur une vaste étendue de terrain relativement dégagé, juste au nord du village de Naseby, dont le moulin à vent constituait un point de repère utile.
Disposition des troupes
Les royalistes étaient commandés par Charles Ier en personne, son neveu le prince Rupert (1619-1682) et George, Lord Digby (1612-1677). Leur armée comptait entre 8 000 et 10 000 hommes, dont un peu plus de la moitié de cavalerie. Fairfax, quant à lui, commandait entre 14 000 et 15 000 hommes (dont un peu plus de 6 000 de cavalerie). Les deux armées disposaient de la cavalerie habituelle sur chaque aile et les troupes d'infanterie étaient disposées en deux rangées de carrés, comme sur un échiquier, au centre du champ de bataille. Les dispositions des parlementaires étaient peut-être plus compactes en raison des caractéristiques naturelles du terrain de leur côté du champ de bataille et de leur plus grand nombre. Les deux camps souhaitaient éviter les haies frontalières bordant la paroisse d'un côté et le terrain marécageux causé par deux ruisseaux de l'autre. Chaque bloc d'infanterie était composé d'un noyau central de piquiers et de flancs de mousquetaires. Le rôle des piquiers était de protéger les mousquetaires et, à ce stade de la guerre, le ratio typique était d'un piquier pour trois mousquetaires.
Engagement
La bataille commença vers 10 heures. Tout d'abord, il y eut un barrage d'artillerie inhabituellement court, peut-être parce que les royalistes n'étaient pas encore prêts et que les commandants parlementaires ne favorisaient généralement pas cette méthode d'attaque de toute façon. Il se peut également que le terrain accidenté ait rendu la visée de l'artillerie difficile. S'ensuivit l'inévitable affrontement des hommes en armes.
La cavalerie royaliste menée par le prince Rupert remporta des succès sur l'aile droite, repoussant l'aile gauche de la cavalerie parlementaire vers Naseby. Cette aile de la cavalerie parlementaire était dirigée par Henry Ireton (1611-1651), qui n'avait qu'une expérience limitée du commandement de grands corps de troupes. Au début de la bataille, Ireton fut blessé et même brièvement capturé par l'ennemi. Pendant ce temps, au centre du champ de bataille, l'infanterie royaliste, dirigée par Jacob Astley, surpassa d'abord l'infanterie parlementaire numériquement supérieure, dirigée par le très expérimenté Philip Skippon (c. 1600-1660), l'obligeant à perdre du terrain. En réalité, il se peut que l'infanterie royaliste ait été désavantagée en avançant et en exposant ses flancs aux ailes de l'armée parlementaire, d'autant plus qu'elle était en infériorité numérique. Prise sur trois fronts, l'infanterie royaliste fut obligée de se retirer de la poche, ce qui perturba sa formation et l'exposa encore plus.
La cavalerie d'Oliver Cromwell, sur l'aile droite de l'armée parlementaire, écrasa la cavalerie adverse, dirigée par Sir Marmaduke Langdale (1598-1661), la forçant à fuir complètement le champ de bataille. Cromwell mena alors ses hommes à l'assaut de l'infanterie royaliste au centre. Le prince Rupert, pour la première fois, ne fut pas en mesure de rivaliser avec la tactique de Cromwell, car sa cavalerie était impliquée dans une escarmouche avec le train de bagages des parlementaires, loin derrière les lignes ennemies. La question de savoir si Rupert était personnellement impliqué ou s'il était revenu aux côtés du roi pour commander son propre régiment d'infanterie, les Bluecoats, n'est pas tranchée. La cavalerie de Rupert ne réussit pas à chasser complètement la cavalerie parlementaire (son aile gauche) du champ de bataille, et ceux qui restèrent aidèrent Cromwell à attaquer l'infanterie de l'opposition sur ses flancs désormais complètement exposés.
L'infanterie royaliste fut alors submergée par l'infanterie de Fairfax qui avança régulièrement vers l'avant. Ici, au cœur de l'engagement, les combats étaient intenses et chaotiques, les mousquetaires étant obligés d'utiliser la crosse de leurs armes faute de munitions ou perdirent leurs formations de tir à la volée, du moins selon le compte-rendu officiel des royalistes:
Nos forces s'avancèrent alors sur la colline, les rebelles ne déversant que cinq pièces [canons] sur eux, mais ils tirèrent au-dessus, de même que leurs mousquetaires. Les fantassins des deux côtés s'apercevaient à peine avant d'être à portée de carabine et n'ont donc tiré qu'une seule volée; les nôtres, avec leur épée et la crosse de leur mousquet, ont remarquablement exécuté le tir...
(Hunt, 157).
Victoire des Parlementaires
Au début de l'après-midi, la supériorité numérique des parlementaires commença à se faire sentir et Charles fut contraint d'engager ses réserves dans une ultime tentative pour renverser le cours de la bataille. Le récit royaliste note que Charles était même prêt à se joindre à la mêlée:
Le roi, comme nous l'avons déjà dit, était sur le point de charger l'ennemi, à la tête de ses gardes, lorsque le comte de Carnwath, qui chevauchait à côté de lui, posa soudain sa main sur la bride du cheval du roi et, lâchant deux ou trois jurons écossais, dit: "Allez-vous partir vers la mort dans l'instant?" et, avant que sa majesté ne comprenne ce qu'il voulait dire, il fit faire demi-tour à son cheval.
(Hunt, 158)
Les forces royalistes étaient désormais privées de tout commandement, et même le retour de la cavalerie de Rupert était trop faible et trop tardif. L'infanterie royaliste avait depuis longtemps rompu sa formation et des groupes isolés menaient désormais un combat d'arrière-garde, souvent un groupe fournissant des tirs de couverture pendant qu'un autre reculait. Fairfax laissa d'abord son infanterie et sa cavalerie se reconstituer, puis se déplaça régulièrement sur le champ de bataille avec son armée, présentant un mur d'hommes et de tirs de mousquet. Les combats restèrent acharnés - Fairfax et Cromwell perdirent tous deux leur casque au cours de la bataille - mais une déroute s'ensuivit, et de nombreux royalistes en fuite furent poursuivis sur plusieurs kilomètres. Les parlementaires venaient enfin de remporter une grande et décisive victoire. L'infanterie royaliste fut détruite et des milliers de prisonniers furent capturés. Moins glorieuse fut l'attaque injustifiée contre environ 1 500 femmes, probablement des épouses et des prostituées qui faisaient partie du train de bagages royaliste. Pensant à tort qu'il s'agissait de catholiques irlandaises, alors qu'elles étaient en fait pour la plupart galloises, une centaine d'entre elles furent tuées, tandis que beaucoup d'autres furent mutilées, avec des coupures au visage.
Conséquences
Une capture encore plus précieuse que celle des prisonniers de Naseby fut l'armoire à écrire personnelle du roi. Les documents qui s'y trouvaient confirmaient ce qui n'était jusqu'alors qu'un terrible soupçon: le roi était prêt à conclure un accord avec les rebelles irlandais afin de disposer de troupes catholiques pour son armée en Angleterre. Il y avait également des preuves que Charles cherchait l'aide du pape et que ses précédentes ouvertures de négociation et de conciliation pour mettre fin à la guerre avaient été totalement fallacieuses. La valeur propagandiste de ces documents secrets ne fut en rien négligée et nombre d'entre eux furent imprimés à l'attention du public dans des collections telles que le pamphlet distribué à Londres peu après la bataille sous le titre racoleur de: Ouverture du cabinet du roi: ou certains paquets de lettres et de papiers secrets, écrits de la main même du roi.
Le roi avait réussi à échapper à Naseby et à fuir d'abord vers le Pays de Galles, puis vers le nord, mais il n'y avait désormais plus aucune chance de parvenir à un règlement négocié du conflit. Pour porter le coup de grâce à la cause royaliste en cet été fatidique, Fairfax reprit Leicester le 18 juin et rétablit ainsi le contrôle des Midlands par les parlementaires. Bristol fut prise par le Parlement en septembre 1645. Les royalistes se trouvaient dans une situation désespérée, mais ils n'étaient pas encore prêts à abandonner. La division de l'armée, qui avait fait que la force de Charles était si inférieure en nombre à Naseby avant le début de la bataille, lui redonna espoir en l'avenir et une autre armée fut levée à partir de ces morceaux disparates. Apparemment, peu importait le nombre de batailles remportées par les parlementaires, tant que Charles était en vie, ou du moins libre, la guerre civile se poursuivrait indéfiniment, même si les royalistes n'étaient plus en mesure de les égaler sur le terrain.