Au XVIIe siècle, de nombreux groupes de chrétiens britanniques se levèrent et luttèrent contre l'intolérance et la corruption religieuses. Les puritains cherchaient un retour à la religion biblique et une forme purifiée de christianisme en Angleterre. Cela donna lieu à la Révolution puritaine, ainsi qu'à une migration vers l'Amérique afin de trouver un endroit pour adorer Dieu de la manière qu'ils considéraient comme "correcte".
Un autre groupe, appelé les Quakers, qui abordait le christianisme à partir d'une interprétation spirituelle extrême, s'opposa également au statu quo. Ils étaient souvent critiqués et maltraités pour leur foi, tant par le monde religieux que par le monde civique. L'un de leurs membres, William Penn (1644-1718), joua un rôle important dans l'établissement de cette foi en Amérique et fut à l'origine de la création d'une colonie en Amérique où fut établi un gouvernement qui cherchait sérieusement et activement à protéger les droits religieux et civils. La spécialiste des quakers, Bonnelyn Young Kunze, écrit dans son article :
Le principal titre de gloire historique de William Penn est la fondation de la colonie quaker de Pennsylvanie, ainsi que ses écrits prolifiques pour défendre le quakerisme et la tolérance religieuse en Angleterre. (170)
Jeunesse
Les parents de William Penn étaient un mélange intéressant. Selon le sociologue et historien américain Harry Wildes, le père de Penn était amiral dans la marine royale et était "par conviction pro-anglican et royaliste" (Wildes, 10). C'était un homme sévère et sérieux qui vécut et travailla au milieu du chaos politique de l'époque. On ne sait pas grand-chose de la mère de Penn, si ce n'est qu'elle était "énergique, extravertie" (Wildes, 9) et qu'elle restait seule pendant de longues périodes pour élever ses enfants. Son style initial d'éducation était peu orthodoxe, mais plus tard, elle essaya d'améliorer son approche.
William Penn était décrit comme calme et introspectif, bien qu'il ait fait preuve d'une "forte tendance mystique". De son propre aveu, il eut des expériences mystiques dès l'âge de douze ou treize ans" (Dunn et Dunn, 4). Il ne fait aucun doute que cela serait un facteur déterminant dans son adhésion aux Quakers.
À cette même époque, Penn et son père avaient "des relations assez houleuses" (Dunn et Dunn, 4) qui sont documentées dans les correspondances entre eux deux. Il se rebellait souvent contre les souhaits et les exigences de son père à son égard. Cette tendance à la rébellion lui valut de nombreux problèmes dans sa jeunesse. Il fut expulsé d'Oxford en 1662 pour s'être opposé "au livre de prières et au rituel qui semblait trop papiste" (Dunn et Dunn, 7) et fut sévèrement puni pour son engagement auprès des puritains. Selon l'historien Hans Fantel, le père de Penn, espérant le séparer de la "compagnie des subversifs" (Fantel, 45), l'envoya à Paris, en France. Là, il se mêla à de nombreux grands hommes, dont le roi Louis XIV de France (r. de 1643 à 1715) et Moïse Amyraut (1596-1664), un célèbre humaniste chrétien protestant.
Au cours de cette période, contrairement à ce que son père espérait, Penn affina encore davantage ses opinions contestataires, mais il apprit un peu de tact et de diplomatie. Il rentra chez lui plus mûr et d'humeur égale (au grand plaisir de ses parents), mais il avait encore des questions. Son père, de son côté, se demandait pourquoi Penn perdait son temps avec tant de théologie et l'inscrivit à la faculté de droit. Heureusement pour Penn, il put passer plus de temps avec son père et l'observer dans ses fonctions militaires, ce qui influença sans doute l'administration ultérieure de la colonie de Pennsylvanie par Penn.
C'est également à cette époque que Penn fut introduit à la cour royale d'Angleterre, ce qui lui permit d'établir des contacts qui lui serviraient plus tard. En tant qu'adulte responsable, Penn se vit confier davantage de responsabilités familiales, et son père l'envoya en Irlande pour s'occuper de certains biens et domaines familiaux.
Penn se lie d'amitié avec les Quakers
Alors qu'il était loin de l'influence de sa famille, Penn commença à assister à des réunions de quakers. Ces réunions étaient interdites par le code Claredon, qui "interdisait toutes les réunions religieuses, sauf celles qui se déroulaient sous les auspices de l'église officielle d'Angleterre" (Fantel, 66). Une fois de plus, Penn se retrouva confronté à l'autorité concernant ses droits religieux. Au cours d'une réunion, Penn eut l'occasion d'écouter Thomas Loe, un célèbre leader quaker. Là, Penn fut profondément affecté par ce qu'il entendit.
[Penn] reconnaissait la réunion des quakers comme une communauté à travers laquelle une foi libre d'individus séparés pouvait prendre des formes socialement efficaces. ... Penn avait trouvé [...] une intersection pratique entre la foi et la société." (Fantel, 68)
Il finit par rejoindre les Quakers et fut arrêté et emprisonné après la découverte d'une de leurs réunions à laquelle il assistait. Un juge politiquement avisé lui donna la possibilité d'échapper à l'emprisonnement, mais il resta fidèle à ses idéaux. À l'âge de 22 ans, William Penn se déclara quaker, au grand chagrin et à la colère de son père.
La conversion de Penn était prévisible compte tenu de ses antécédents mystiques. Avec les Quakers, "il pouvait partager ... de puissants sentiments de possession par l'esprit et jouir d'une certaine liberté pour interpréter et agir sur ces sentiments de manière individuelle" (Dunn et Dunn, 5). En outre, cette nouvelle foi de Penn permit également de justifier une partie de sa belligérance envers ses parents. Le fait d'être quaker "donnait à Penn de bonnes raisons religieuses de désobéir à ses parents" (Dunn et Dunn, 6) si ceux-ci lui imposaient des exigences religieuses qui remettaient en cause ses croyances. Le résultat final fut de mauvaises relations avec son père jusqu'à la mort de ce dernier en 1670.
Penn non seulement eut des relations difficiles avec sa famille, il réussit également à s'attirer des ennuis avec l'Église d'Angleterre. Il fut emprisonné dans la Tour de Londres en 1667 pour avoir écrit un tract intitulé The Sandy Foundation Shaken Speaking Against the Doctrine of the Trinity. Pendant son séjour à la Tour, il écrivit No Cross, No Crown et Innocency with Her Open Face, puis, plusieurs autres ouvrages. Bon nombre de ces tracts avaient été écrits par Penn dans le but de défendre ses frères quakers ou la liberté religieuse. Selon l'historien quaker Melvin Endy Jr,
L'originalité de Penn en tant que tolérantiste consistait en grande partie dans l'ingéniosité avec laquelle il élaborait des variations d'arguments destinés à convaincre ses lecteurs qu'il était dans leur intérêt en tant qu'individus, citoyens et marchands de remplacer l'uniformité forcée par les bienfaits de la tolérance. (Endy, 323)
Penn commnça également prêcher, et en 1671, il fut arrêté et emprisonné pour avoir prêché lors d'un service religieux. Pourtant, "malgré la saleté et la promiscuité, Penn écrivit trois longs tracts et plusieurs épîtres sur la liberté de conscience" (Adams et Emmerich, 63). Il prenait la question de la liberté de religion très au sérieux et espérait mettre ses talents au service d'une cause juste et équitable. Il trouva cette cause dans l'établissement d'une colonie quaker en Amérique. Là, Penn espérait mettre ses convictions religieuses et politiques à l'épreuve dans une grande "sainte expérience".
La colonie de Pennsylvanie et la Sainte Expérience
En 1680, une ancienne dette du roi Charles II d'Angleterre (r. de 1660 à 1685) fut transmise de l'amiral Penn décédé à son fils, William Penn, mais au lieu de cet argent qui lui était dû, le jeune Penn demanda à recevoir "un titre de propriété sur un immense territoire en Amérique" (Dunn et Dunn, 41). Il demandait cela parce que "en obtenant la propriété d'une colonie quaker, il pourrait étendre considérablement son service à ses coreligionnaires et à la cause générale de la liberté religieuse et politique - et en même temps augmenter considérablement ses biens" (Dunn et Dunn, 42). C'était le profond désir de Penn de "créer une société théocentrique sans recourir à la contrainte en matière de religion" (Adams et Emmerich, 66). Dans cette société utopique, Penn "cherchait à concilier liberté et autorité dans son cadre de gouvernement" (Stern, 85).
Par conséquent, Penn établit cette colonie avec l'espoir que la tolérance religieuse serait maintenue sans abus par le gouvernement. Il "soutenait que l'intolérance était contraire à la raison. Sacrifier la liberté et la propriété d'un homme pour des causes religieuses ne gagnerait pas la loyauté de cet homme pour le prince. La conversion forcée ... ressemblait à un mariage forcé" (Beatty, 134). Bien sûr, en tant que propriétaire principal et gouverneur de ces exploitations en Amérique, Penn avait toute autorité, comme le stipulait la charte de la Pennsylvanie de 1681. Cependant, il utilisa cette position autant que possible pour procurer des libertés aux colons et non pour s'aider lui-même. Malheureusement, il ne réussit pas aussi bien qu'il l'avait espéré.
Le tout premier plan de gouvernement de Penn s'appelait les Fundamental Constitutions of Pennsylvania (Constitutions fondamentales de la Pennsylvanie). Ce document, probablement rédigé par Penn len personne, était le "plus libéral des premiers plans de gouvernement de la Pennsylvanie". Sa première section déclarait la liberté de religion pour tous les habitants" (Soderlund, 96). En outre, il était extrêmement démocratique dans son esprit et dans sa législation. Une grande partie du pouvoir reposait entre les mains du peuple, plutôt qu'entre celles du gouverneur et du conseil administratif.
Malheureusement, ce plan fut rejeté pour des raisons politiques de l'époque et ne fut ni ratifié ni signé par les nouveaux colons (pas même par Penn). Au lieu de cela, un nouveau cadre de gouvernement fut promulgué. Il s'agissait d'un style de gouvernement hiérarchique plus fort, la plupart des dispositions du plan précédent concernant la représentation démocratique extrême ayant été supprimées. Selon l'historien Jean Soderlund, il garantit toujours "la liberté de religion à tous les habitants qui croyaient en un seul Dieu" (119) et établit un système législatif électoral, interdit la taxation sans représentation et garantit le libre-échange.
Cette expérience de religion et de gouvernement s'épanouit avec l'arrivée de nouveaux colons de toutes les régions d'Europe. Il est intéressant de noter que les immigrants en Pennsylvanie n'étaient pas tous quakers. Il y avait beaucoup de puritains, de catholiques et de personnes d'autres sectes, mais le système de gouvernement de Penn les intégrait toujours. Les choses commencèrent à changer pour Penn et sa colonie, cependant, avec l'avènement de la Glorieuse Révolution (1688-1689).
L'association et l'amitié de Penn avec le roi d'Angleterre en fuite firent de lui un homme traqué, et il dut se cacher quelque temps pour sauver sa vie. Pendant cette période, le contrôle de la colonie de Pennsylvanie lui fut retiré en raison du manque de soutien militaire de ses colons pour la guerre franco-indienne. Penn finit par reprendre le contrôle de la colonie, mais à ce moment-là, il y avait un grand "désordre politique, un factionnalisme religieux et une Assemblée générale hostile à son pouvoir exécutif" (Adams et Emmerich, 68).
En tant qu'homme de paix, Penn approuva une Charte des privilèges en 1701 qui donnait à la législature de Pennsylvanie des pouvoirs encore plus importants. Il retourna également en Angleterre pour lutter contre un projet de loi du Parlement visant à rétablir le contrôle royal sur les colonies, et ne revint jamais plus dans sa colonie de Pennsylvanie. En 1718, il mourut en Angleterre des complications de plusieurs attaques débilitantes qu'il avait subies plus tôt cette année-là. Initialement, la charte de Penn fut partagée entre ses fils, mais finalement, la famille Penn la revendit à la Couronne.
Héritage
La Sainte Expérience de Penn se révéla fidèle à son nom. C'était un terrain d'essai pour des méthodes nouvelles et innovantes de gestion de la tolérance religieuse et de l'administration civique. Elle démontra que, du moins pour un temps, les deux royaumes de la foi et du gouvernement pouvaient coexister de manière libre et fructueuse. Cette forme de société pouvait prospérer et s'épanouir malgré les difficultés, les luttes militaires et la diversité religieuse.
La colonie de Pennsylvanie non seulement fut un succès en soi ; elle fournit le cadre et l'exemple à suivre pour les autres colonies d'Amérique. Plus encore, elle influença grandement la future constitution des États-Unis d'Amérique. Adams et Emmerich ont déclaré : "Aucune autre colonie n'a autant inspiré les fondateurs dans le domaine de la liberté religieuse que la Pennsylvanie" (68).
Cet encouragement ne se produisit pas tout seul ; William Penn fut la force responsable de la création de cette importante colonie. Comme le conclut Edward Beatty, "la grande entreprise de Penn dans le Nouveau Monde était un effort pour mettre en place un ordre social béni par la tolérance religieuse et contrôlé par des idéaux humanitaires" (305). Sans lui, le désir de créer un environnement propice à la culture des libertés religieuses n'aurait peut-être pas été aussi fort.