La bataille de la Moskova ou bataille de Borodino (7 septembre 1812) fut une bataille majeure qui se déroula lors de l'invasion de la Russie par Napoléon. La Grande Armée française de l'empereur Napoléon Ier (r. de 1804 à 1814 ; 1815) battit de justesse l'armée impériale russe commandée par Mikhaïl Koutouzov, avant de poursuivre sa route et d'occuper brièvement Moscou. Cette bataille fut la journée la plus sanglante des guerres napoléoniennes (1803-1815).
Origines
Le 24 juin 1812, l'empereur français Napoléon Ier franchit le fleuve Niémen avec sa colossale Grande Armée, entamant l'invasion de l'Empire russe. Bien que la France et la Russie aient formé une alliance seulement cinq ans auparavant, les intérêts conflictuels des deux empires entraînèrent une détérioration rapide des relations. Le point de rupture fut atteint en décembre 1810, lorsque le tsar Alexandre Ier de Russie (r. de 1801 à 1825) retira son pays du Blocus continental, l'embargo à grande échelle de Napoléon contre le Royaume-Uni. Furieux de cette apparente trahison, Napoléon passa l'année et demie suivante à rassembler la plus grande force d'invasion que l'Europe ait jamais vue: 615 000 hommes, 200 000 chevaux, 1 300 canons et un train de ravitaillement de 7 400 véhicules. Parmi les soldats de la Grande Armée, un peu moins de la moitié (302 000) étaient français; les autres (313 000) venaient de tous les coins du vaste empire européen de Napoléon et comprenaient des Polonais, des Autrichiens, des Prussiens, des Allemands, des Italiens, des Néerlandais, des Espagnols, des Portugais et d'autres encore.
Lorsque Napoléon conduisit cette armée multinationale à travers le Niémen, son objectif n'était pas de conquérir le territoire de la Russie, mais de forcer le tsar Alexandre à rejoindre le Blocus continental et à reconnaître la suprématie française. Pour ce faire, Napoléon devait détruire les armées russes en une série d'engagements rapides; l'empereur français prévoyait que cela prendrait moins de trois semaines. Les Russes, quant à eux, disposaient d'environ 250 000 hommes dans les provinces occidentales pour s'opposer à l'invasion française. Ces hommes étaient dispersés dans trois armées distinctes et risquaient donc d'être attaqués et vaincus au coup par coup avant de pouvoir s'unir. La première armée occidentale, forte de 129 000 hommes, était stationnée à Vilna (Vilnius) et était dirigée par Michel Barclay de Tolly, un soldat d'origine allemande et écossaise de la Baltique, commandant en chef des armées russes. La deuxième armée occidentale, forte de 58 000 hommes et dirigée par le fougueux prince géorgien Pyotr Bagration, se trouvait à environ 160 kilomètres au sud, tandis que la troisième armée occidentale d'Alexandre Tormassov marchait vers le nord depuis les Balkans.
Barclay de Tolly s'était rendu compte que s'il tentit de tenir bon face à la force supérieure de Napoléon, il serait certainement vaincu. Il ordonna donc à toutes les armées russes d'éviter d'engager le combat avec l'ennemi et d'entamer une retraite stratégique à l'intérieur du territoire russe. Au cours de leur retraite, les Russes reçurent l'ordre de mettre en œuvre la tactique de la terre brûlée qui consistait à détruire tout ce qui aurait de la valeur aux yeux des envahisseurs, y compris les récoltes, les moulins à vent, les ponts, les dépôts et le bétail. La retraite de Barclay, bien qu'approuvée par le tsar, était impopulaire parmi les soldats russes qui se sentaient déshonorés de devoir céder tant de territoire sans combattre. Bien qu'il se soit conformé aux ordres de Barclay, le prince Bagration lui-même se plaignit de la retraite, déclarant que "les Russes ne devraient pas s'enfuir. Nous devenons pires que les Prussiens" (Lieven, 151). Fin juillet, les soldats d'origine russe en vinrent à détester Barclay et les autres officiers allemands de la Baltique, qui, selon eux, ne se souciaient pas vraiment de la cause russe.
Néanmoins, le plan de Barclay fonctionna. Fin juillet, Napoléon s'empara de Vilna et de Minsk, mais se vit refuser la grande bataille dont il avait désespérément besoin. Au fur et à mesure que la Grande Armée avançait en territoire russe, ses rangs s'éclaircissaient sous l'effet de la famine, de la désertion et de la maladie. Un mois seulement après le début de la campagne, Napoléon avait déjà perdu environ 100 000 hommes. Malgré ce succès, l'opinion publique russe ne permit pas à Barclay de continuer à courir indéfiniment. Le 4 août, les armées de Barclay et de Bagration se rejoignirent à Smolensk, où les officiers russes firent pression sur Barclay pour qu'il prenne position, menaçant de se mutiner. La bataille de Smolensk (16-18 août) fut la première bataille d'envergure de la guerre; les Russes repoussèrent vague après vague les assauts français dans les faubourgs de la ville qui fut bientôt la proie des flammes. Barclay, conscient que ses troupes ne pouvaient tenir plus longtemps, décida de battre en retraite pour préserver son armée. Napoléon se retrouva donc à la tête de Smolensk, jonchée de cadavres : 10 000 Français et 12 000 Russes furent tués ou blessés.
Koutouzov prend le commandement
La décision de Barclay d'abandonner Smolensk sauva peut-être l'armée russe, mais elle coûta son poste à Barclay. À Saint-Pétersbourg, la noblesse russe fit pression sur le tsar Alexandre pour qu'il remplace l'Allemand Barclay par un ressortissant russe. La meilleure option était Mikhaïl Koutouzov, un vétéran de 65 ans issu d'une famille aristocratique très respectée, dont les cicatrices de combat sur le visage témoignaient des décennies de service militaire au sein de l'Empire russe. Bien qu'Alexandre lui-même n'ait pas été un grand admirateur de Koutouzov, le vieux soldat était apprécié tant par la noblesse russe que par les simples soldats. Koutouzov arriva pour prendre le commandement le 29 août, et l'excitation de l'armée fut rapportée par un lieutenant russe :
Le moment de joie était indescriptible: le nom de ce commandant provoqua une renaissance universelle du moral des soldats [...] les vétérans se souvenaient de ses campagnes à l'époque de Catherine II [la Grande], de ses nombreux exploits passés [...] ils se rappelaient sa blessure miraculeuse causée par une balle de mousquet qui lui avait traversé les deux côtés de la tempe. On raconte que Napoléon lui-même appelait Koutouzov le vieux renard et que Souvorov avait dit que "Koutouzov... ne peut jamais être trompé". De tels récits [...] renforçaient l'espoir des soldats en leur nouveau commandant, un homme au nom, à l'esprit et au cœur russes, issu d'une famille aristocratique bien connue et célèbre pour ses nombreux exploits (Lieven, 188).
Koutouzov prit le commandement en espérant qu'il irait se battre. Après avoir pris Smolensk, l'armée française se dirigea vers Moscou, une ville que les Russes ne pouvaient pas se permettre d'abandonner; en plus d'être la plus grande ville de l'Empire russe, Moscou revêtait une grande importance culturelle, historique et religieuse. Koutouzov lui-même avait fait remarquer que "la perte de Moscou entraînerait la perte de la Russie elle-même" et avait promis au tsar qu'il mourrait avant de laisser tomber la ville (Lieven, 210). Alors que l'armée russe continuait de reculer vers la ville, des officiers d'état-major furent envoyés en avant pour repérer les emplacements potentiels d'une position. Il fut déterminé que le meilleur emplacement défensif était la zone autour de Borodino, un village situé à environ 124 kilomètres à l'ouest de Moscou. Le 3 septembre, Koutouzov mit son armée en position et attendit l'approche des Français.
Prise de la redoute de Chevardino
Le champ de bataille de Borodino était principalement constitué d'une campagne ouverte, bien qu'entrecoupée de divers ruisseaux, ravins, forêts et hameaux. La rivière Kolocha, un affluent de la Moskova, était parallèle à la route Smolensk-Moscou, tandis que la Moskova elle-même coulait vers le nord-est. Comme le note l'historien David G. Chandler, le terrain "brisé et entrecoupé" était favorable aux défenseurs russes car "toute force attaquant par l'ouest aurait trouvé pratiquement impossible de manœuvrer sans rompre la formation" (795). Les Russes complétèrent les défenses naturelles en construisant des ouvrages en terre. Une "Grande Redoute" fut construite au centre de la ligne russe et était défendue par 20 canons. En outre, trois fortifications enforme de flèche furent construites au sommet de collines vers la gauche de la ligne russe. Elles furent baptisées "flèches de Bagration" en l'honneur du général russe.
Les Russes construisirent également une redoute de forme pentagonale au hameau de Chevardino, à l'extrême gauche de la ligne russe. Cependant, Koutouzov jugea cette position trop vulnérable et ordonna à son flanc gauche de se replier vers une position plus sûre. Le 5 septembre, alors que les Russes exécutaient cette manœuvre, la redoute de Chevardino fut attaquée par les éléments de tête de l'armée napoléonienne. Le prince Andreï Gortchakov et la 27e division russe défendirent obstinément la redoute pendant des heures, mais furent finalement contraints de se retirer lorsque les Français commencèrent à entourer la fortification. Cette action coûta 4 000 morts aux Français et 6 000 aux Russes. Elle sema également le désordre sur le flanc gauche des Russes qui furent contraints de former une position improvisée autour de la ville d'Utitsa.
Préparatifs
Le lendemain, 6 septembre, les deux armées se préparèrent à la bataille dans un silence inquiétant. Pour remonter le moral de ses hommes, Koutouzov fit transporter la célèbre icône de la Mère de Dieu de Smolensk le long de la ligne russe. L'icône, qui avait été sauvée des incendies de Smolensk, rappelait aux troupes russes le sort qui serait réservé à Moscou et à leur religion orthodoxe si les Français l'emportaient.
L'extrême droite de la ligne russe était ancrée au confluent de la Kolocha et de la Moskova. La position russe s'étendait le long de la Kolocha et se terminait autour d'Utitsa à l'extrême gauche; le centre et la gauche russes étaient occupés par des forêts denses. La première armée de Barclay était déployée sur la droite russe tandis que la deuxième armée de Bagration se trouvait sur la gauche; le village de Borodino lui-même servait de point de jonction où les deux armées se rencontraient. Le VIIe corps de Nikolaï Raïevsky défendait la Grande Redoute au centre du champ de bataille, tandis que le VIIIe corps de Mikhaïl Borozdine occupait les flèches de Bagration. Koutouzov lui-même commandait depuis son quartier général de Gorki, derrière les lignes russes. Les Russes disposaient d'environ 120 000 hommes et de 640 canons.
Ce jour-là, il n'y eut aucune cérémonie religieuse dans le camp français. Au lieu de cela, des officiers lirent une proclamation rédigée par l'empereur qui parlait de patriotisme et de gloire. Un portrait du jeune fils de Napoléon, le roi de Rome, fut placé à l'extérieur de sa tente afin que toute l'armée puisse contempler son futur empereur. Le fait qu'il ait été si loin de France fit hésiter Napoléon à planifier des manœuvres risquées, ce qui l'amena à rejeter une suggestion du maréchal Louis-Nicolas Davout d'envoyer 40 000 hommes pour une attaque nocturne contre le flanc gauche vulnérable des Russes. Au lieu de cela, Napoléon ordonna un assaut frontal sur toute la ligne russe, un plan que Chandler compara à "une série de coups de massue" (799). Le manque d'inspiration de ce plan n'était pas caractéristique de Napoléon, et les historiens ont depuis émis l'hypothèse que son jugement avait peut-être été inhibé par la forte fièvre et l'inflammation de la vessie dont il souffrait à l'époque. La Grande Armée comptait environ 103 000 fantassins, 28 000 cavaliers et 587 canons.
Début de la bataille
Le 7 septembre 1812, à 6 heures du matin, le silence tranquille de l'aube fut brisé par le grondement de 100 canons français dirigés contre le centre de l'armée russe. Une demi-heure plus tard, le beau-fils de Napoléon, le prince Eugène de Beauharnais, mena le quatrième corps d'armée français à l'assaut du village de Borodino. Dissimulée par d'épaisses brumes matinales, l'attaque d'Eugène prit par surprise le régiment de Jaeger de la Garde russe; les Russes furent chassés de Borodino avec de lourdes pertes. Le prince Eugène poursuivit sa route jusqu'aux hauteurs de Gorki, où il fut attaqué par les réserves russes. Après avoir subi des pertes sévères, Eugène fut contraint de revenir à Borodino, où il établit des positions défensives à 7h30 du matin.
Pendant ce temps, le maréchal Davout lança une attaque sur les flèches de Bagration, au centre gauche du champ de bataille. Davout engagea trois de ses meilleures divisions (22 000 hommes) qui subirent le feu concentré des canons russes à la sortie des bois. Malgré de lourdes pertes, les divisions de Davout poursuivirent leur progression et parvinrent jusqu'aux murs de terre des flèches. Au cours des violents combats au corps à corps qui s'ensuivirent, les troupes russes de Borozdine refusèrent de céder du terrain; un régiment de grenadiers russes fut anéanti au cours des combats, et Borozdine lui-même fut tué, mais l'obstination des Russes fut payante. Les multiples assauts français furent repoussés et plusieurs généraux français furent tués; Davout fut blessé, ainsi que son remplaçant, le général Jean Rapp. À 7h30, les troupes de Davout prirent le contrôle des trois flèches, mais elles furent rapidement repoussées par le prince Bagration qui mena une contre-attaque énergique. Le maréchal français Michel Ney relança l'assaut français, obligeant Bagration à demander de l'aide à Barclay.
Les flèches étant un point névralgique, Bagration fut en mesure d'attirer des renforts de gauche et de droite, ce qui affaiblit l'aile gauche russe à Utitsa commandée par Nikolaï Toutchkov. En conséquence, Toutchkov se retrouva à la peine lorsqu'il fut attaqué par les 10 000 soldats polonais du prince Joseph-Antoine Poniatowski. Poniatowski réussit à déborder les Russes et à forcer Toutchkov à quitter le village d'Utitsa; cependant, Poniatowski fut ensuite repoussé hors du village par une féroce contre-attaque russe, au cours de laquelle Toutchkov fut tué. Les combats autour d'Utitsa durèrent toute la journée, les Polonais de Poniatowski ayant été renforcés par les troupes westphaliennes du général Jean-Andoche Junot.
Attaque de la Grande Redoute
Pendant les deux heures qui suivirent la prise de Borodino, le prince Eugène déclencha un barrage d'artillerie sur les défenseurs russes de la Grande Redoute. À 8h30, Eugène lança un assaut, prit d'assaut la redoute et repoussa les troupes russes de Raevsky; cependant, le contrôle d'Eugène sur la Grande Redoute fut de courte durée car il fut rapidement repoussé par une contre-attaque russe. C'est à ce moment-là qu'Alexandre Koutaïsov, commandant de l'artillerie russe, fut tué, rendant les canons russes presque inutilisables pour le reste de la bataille. Pendant ce temps, les Français engagèrent des troupes supplémentaires contre les flèches; vers 10 heures du matin, le prince Bagration fut mortellement blessé, la jambe fracassée par un éclat d'obus. La nouvelle de sa perte découragea les troupes russes qui abandonnèrent les flèches.
Saisissant cette occasion, la cavalerie française fonça, mais la discipline russe résista et les troupes se reformèrent derrière un ravin près du plateau de Psarevo. La cavalerie française, sous les ordres de Joachim Murat, roi de Naples, lança plusieurs attaques pour les déloger, mais les troupes russes résistèrent à chaque charge. Murat se rendit rapidement compte que les Russes ne pourraient être brisés que par la Garde impériale de Napoléon, qui était la seule unité française à ne pas encore avoir été engagée dans la bataille. Murat supplia Napoléon d'envoyer la Garde, un appel bientôt repris par Eugène, Davout et Ney, mais à chaque fois, Napoléon refusa de le faire. Le refus de Napoléon d'envoyer la garde est depuis longtemps critiqué. S'il l'avait fait, certains historiens pensent qu'il aurait pu éliminer l'armée russe et peut-être même gagner la guerre, mais Napoléon ne voulait pas risquer de perdre la Garde si loin de chez lui, sachant qu'il en aurait besoin intacte en cas de retraite.
Le fait que Napoléon n'ait pas engagé la Garde permit à Koutouzov de resserrer sa ligne. Vers midi, les Russes remportèrent un petit succès lorsque 8 000 cavaliers sous les ordres du général Fiodor Ouvarov attaquèrent l'arrière du prince Eugène, ce qui leur permit de gagner du temps pour organiser leurs défenses sur la Grande Redoute. À 14 heures, 400 canons français ouvrirent le feu sur la redoute, suivis d'une charge de trois divisions des troupes d'Eugène. Alors que l'infanterie d'Eugène s'engageait dans un assaut frontal, le général Auguste de Caulaincourt dirigeait sa cavalerie pour frapper l'arrière des Russes. Bien que Caulaincourt ait été tué, cette manœuvre provoqua la panique dans les lignes russes et permit à l'infanterie d'Eugène de franchir les murs de la redoute. Les quatre régiments russes qui tenaient garnison dans la Grande Redoute furent presque tous tués avant qu'Eugène ne s'empare finalement de la fortification.
Cependant, Barclay avait réussi à établir une ligne défensive à l'est de la redoute, empêchant Eugène de tirer parti de ce succès. C'est à ce moment-là que Napoléon fut à nouveau pressé d'envoyer sa Garde pour balayer les Russes du champ de bataille, mais l'empereur refusa une fois de plus. Bien que Napoléon ait contrôlé le champ de bataille, il ne parvint pas à détruire l'armée russe qui se replia d'un demi-mille avant d'établir une nouvelle ligne de défense. Les Français bombardèrent la nouvelle position russe, mais les Russes étaient trop épuisés pour poursuivre. Après douze heures de combats acharnés, la bataille de Borodino était terminée.
Suites de la bataille
Borodino fut la journée la plus sanglante des guerres napoléoniennes; ce fut même la journée de bataille la plus sanglante de l'histoire militaire, qui ne serait surpassée que par la première bataille de la Marne, plus d'un siècle plus tard. La Grande Armée perdit au moins 32 000 tués ou blessés, des pertes qu'elle ne pourrait pas compenser si profondément au cœur de la Russie. Les Russes subirent des pertes encore plus lourdes, avec 45 000 tués ou blessés; 22 généraux russes furent tués, notamment le prince Bagration, qui mourrait de ses blessures le 24 septembre. Au total, on dénombra plus de 70 000 victimes en seulement douze heures.
Conscient qu'une nouvelle journée de combat pourrait lui coûter toute son armée, Koutouzov battit en retraite à la faveur de l'obscurité. Il se retira dans la ville de Fili, à la périphérie de Moscou, où, le 13 septembre, il tint un conseil de guerre pour répondre à une question: défendre Moscou ou sauver l'armée? Cette question suscita une vive polémique parmi les généraux russes qui ne voulaient pas voir le cœur de l'empire tomber aux mains des Français. Cependant, Koutouzov évalua correctement que si l'armée resistait et se battait, elle serait probablement détruite, et Moscou serait de toute façon perdue. Le cœur lourd, il décida d'abandonner Moscou pour permettre à l'armée de se battre un jour de plus. La ville fut évacuée et Napoléon y entra le 15 septembre.
L'occupation de Moscou par Napoléon ne durerait pas longtemps et il ordonnerait la retraite le 18 octobre, après avoir échoué à conclure un accord de paix avec le tsar. Alors que son armée se retirait de Russie, elle fut victime du rude hiver russe et fut harcelée par l'armée de Koutouzov qui la poursuivait. Lorsqu'elle retraversa le Niémen début décembre, la Grande Armée avait perdu un demi-million d'hommes, une catastrophe dont elle ne se remettrait jamais complètement.