Antisémitisme Chrétien au Moyen-Âge et pendant la Réforme

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Rebecca Denova
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 07 décembre 2023
Disponible dans ces autres langues: anglais, arabe, portugais, espagnol
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L'antisémitisme est un terme moderne qui décrit les préjugés et l'hostilité à l'égard des Juifs et du judaïsme. Les origines de l'antisémitisme chrétien dans les évangiles sont basées sur l'histoire d'un prédicateur juif itinérant du 1er siècle, Jésus de Nazareth, dans la province romaine de Judée.

Jews Being Burnt at the Stake
Juifs brûlés vifs
Korporation Luzern (CC BY-NC-SA)

Les évangiles expliquent le procès et la crucifixion de Jésus de Nazareth et affirment qu'il est mort en raison de divergences religieuses avec les dirigeants juifs, et non en tant que traître à l'Empire romain. Les premiers chrétiens ont affirmé que Jésus-Christ et ses disciples avaient été persécutés par les Juifs, ce qui a justifié la persécution et le meurtre des Juifs par les chrétiens au Moyen-Âge et au-delà. La théorie raciale et comportementale est devenue un élément supplémentaire au début de l'ère moderne.

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Débuts du christianisme

Lorsque les premiers missionnaires chrétiens apportèrent les enseignements de Jésus-Christ dans les villes de l'Empire romain d'Orient, les Gentils (non-Juifs, païens) furent plus nombreux que les Juifs à vouloir se joindre à eux. Des débats eurent lieu sur la question de savoir si ces nouveaux croyants (chrétiens païens) devaient se convertir entièrement aux exigences rituelles de l'identité juive, telles que la circoncision et les lois alimentaires juives. Certains chrétiens juifs continuèrent à insister sur leur conversion. Les lettres de Paul et les Actes des Apôtres contiennent de nombreuses apologia, c'est-à-dire des explications sur les raisons pour lesquelles les chrétiens païens n'étaient pas obligés de devenir juifs en premier lieu. De nombreux raisonnements opposaient le nouveau mouvement au judaïsme, en introduisant des innovations telles que la "foi" et l'expiation sacrificielle de la mort de Jésus.. Ces écrits définissent les paramètres de la séparation du christianisme et du judaïsme.

La littérature Adversus Judaeos continua à être utilisée pour justifier la persécution et le meurtre des Juifs.

Au IIe siècle, la résistance persistante des Juifs au nouveau mouvement a conduit les évêques chrétiens à créer la littérature Adversus Judaeos ("écrits contre les Juifs en tant qu'adversaires"). S'appuyant sur la polémique des évangiles et des lettres de l'apôtre Paul, ils affirmaient que, tout comme les Juifs avaient "persécuté" Jésus et ses disciples, ils continuaient à persécuter les chrétiens dans leur culture contemporaine. Toutefois, ces traités ne fournissaient aucune preuve contemporaine de la manière spécifique dont les Juifs "persécutaient les chrétiens" dans les villes, dans la vie de tous les jours, en dehors des nombreux débats. De l'Antiquité tardive au Moyen Âge et au-delà, ces écrits continuèrent à être utilisés pour justifier la persécution et le meurtre des Juifs.

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Relations judéo-chrétiennes dans l'Antiquité tardive

À la suite de sa conversion au christianisme, Constantin accorda aux chrétiens le droit légal de se réunir dans tout l'Empire romain par l'Édit de Milan en 313. L'empire ne devint pas chrétien du jour au lendemain, mais Constantin encouragea les chrétiens en leur accordant des allègements fiscaux et en finançant la construction d'églises. Lors du premier concile de Nicée, en 325, un "credo" fut élaboré pour définir ce que tous les chrétiens devaient croire et pratiquer dans l'ensemble de l'Empire romain, et qui était appliqué par l'État.

Diaspora Synagogues (1st - 2nd centuries CE)
Carte des Synagogues dans l'Antiquité (1er-2ème siècle ap. J.-C.)
Simeon Netchev (CC BY-NC-ND)

L'empereur romain Théodose Ier (r. de 379 à 395 de notre ère) est considéré comme un grand défenseur de l'orthodoxie. Théodose Ier fit du christianisme la seule religion légale de l'Empire en 381. Ce fut la fin officielle des cultes indigènes dans le monde antique et la création de l'Église catholique. En 396, Théodose interdit les Jeux olympiques, dédiés aux dieux, et ordonna la destruction ou la transformation en églises de tous les temples et sanctuaires indigènes. C'est à cette époque que les chrétiens inventèrent le terme pagianoi ("païens"), une injure négative à l'encontre de ceux qui ne s'étaient pas encore convertis.

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L'édit de Théodose Ier ne mentionne pas les Juifs. Cependant, il s'adressa à eux lorsqu'il mit à jour et codifia la loi romaine originale, les Douze Tables, achevées par l'empereur byzantin Justinien Ier en 597. Les juifs furent autorisés à continuer à fréquenter leurs synagogues, mais avec des interactions sociales et des opportunités économiques réduites:

  1. Le prosélytisme juif était puni par le bûcher. Il était interdit aux Juifs d'attaquer ou de harceler tout Juif devenu chrétien.
  2. Les juifs ne pouvaient pas posséder d'esclaves chrétiens et la circoncision des esclaves était interdite. Les Juifs qui circoncisaient des esclaves devaient les libérer. Cette mesure avait pour effet d'anéantir toute concurrence avec les entreprises chrétiennes qui dépendaient encore du travail des esclaves.
  3. Si un chrétien se convertissait au judaïsme, ses biens étaient saisis pour le trésor public. Toutefois, il était interdit de détruire ou d'attaquer une synagogue. Leurs biens étaient protégés car leurs communautés contribuaient à l'impôt de l'État.
  4. Les mariages entre juifs et chrétiens étaient interdits. Il était désormais considéré comme un crime d'adultère.
  5. Les juifs ne pouvaient plus avoir leurs propres tribunaux religieux, mais devaient porter toute action devant les tribunaux romains.
  6. Les synagogues n'avaient plus le droit d'utiliser l'hébreu, par mesure de précaution contre les conspirations contre l'Empire.
  7. Aucun Juif ne pouvait exercer la profession d'avocat ou de médecin, car les détails intimes de la vie d'une personne pouvaient être utilisés contre elle. Les juifs, les païens et les hérétiques n'avaient pas le droit de débattre publiquement des doctrines chrétiennes.
  8. Des sectes de chrétiens juifs avaient été bannies comme hérétiques en 325 et le restèrent.

Jean Chrysostome ("à la bouche d'or", 347-407 de notre ère), évêque d'Antioche, était célèbre pour ses prêches. Au cours de la semaine de Pâques 387, il était apparemment contrarié par le fait que ses chrétiens allaient à la synagogue le samedi et à l'église le dimanche. Dans une série de sermons, il dénonça les synagogues comme étant des bordels et déclara que leur immoralité sexuelle avait le même bruit que celui d'un porc en rut qui renifle. Tout en étant clairement anti-juifs, ces propos révèlent également quelque chose de très intéressant sur l'Antiquité tardive: ignorant les écrits de l'évêque contre les Juifs, les chrétiens ordinaires d'Antioche n'avaient apparemment aucun problème à se mélanger avec les Juifs, à partager leurs fêtes et leurs repas festifs. C'est ce que l'on retrouve dans plusieurs communautés à travers l'empire. Malheureusement, les sermons de Pâques de Jean furent conservés et cités contre les Juifs dans l'Europe médiévale.

The Growth of Christianity in the Roman Empire
Expansion du Christianisme dans l'Empire Romain
Simeon Netchev (CC BY-NC-ND)

L'Empire romain tardif connut diverses invasions de Goths, de Wisigoths, de Vandales et de Huns. Beaucoup de ces tribus s'étaient converties au christianisme mais étaient considérées comme hérétiques, car elles continuaient à suivre le concept arien de la Trinité. En fonction des opinions des différents empereurs romains, la législation contre les Juifs fut tantôt appliquée, tantôt ignorée.

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La découverte des ossements de saint Étienne à Jérusalem en 415 marqua le début de la distribution des reliques dans différentes villes. Lorsqu'elles arrivèrent sur l'île de Minorque, la communauté chrétienne brûla la synagogue. Cette action inclut le premier baptême forcé de juifs documenté.

Les Juifs dans l'Europe médiévale

Avec l'établissement de la papauté sous Léon Ier (400-461 de notre ère) et du nouvel Empire romain germanique sous Charlemagne (748-814), l'Église catholique domina à la fois le gouvernement et la vie quotidienne dans toute l'Europe. Au cours de ces siècles, les relations entre juifs et chrétiens varièrent en fonction du pape et de l'empereur du Saint Empire romain.

Pendant les croisades, il y eut plus de juifs morts en Rhénanie que de musulmans morts en Terre sainte.

Le pape Urbain II (r. de 1088 à 1099) lança la première de ce qui allait devenir les croisades chrétiennes contre les musulmans en Terre sainte afin de récupérer les lieux saints chrétiens. Les chrétiens se voyaient offrir l'absolution de leurs péchés s'ils s'engageaient dans cette cause. Il fallait plusieurs mois pour naviguer ou voyager par voie terrestre et beaucoup n'atteignaient pas leur but. Cependant, pour "combattre pour la cause du Christ", il fallait attaquer et tuer les juifs locaux. Des Juifs furent massacrés à Worms, Trèves et Metz. En Rhénanie, il y eut plus de juifs tués que de musulmans tués en Terre sainte.

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En 1215, le quatrième concile du Latran déclara que:

  • les Juifs (et les Sarrasins) devaient se distinguer des chrétiens par leur tenue vestimentaire
  • les juifs ne devaient pas occuper de fonctions publiques
  • les juifs convertis à la foi ne devaient pas conserver leurs anciens rites.

L'accusation de "diffamation par le sang" portée contre les Juifs, selon laquelle les Juifs exigeaient le sang d'enfants chrétiens pour leurs rituels, connut des variantes. Des crises telles que la mort noire (1346-1353) conduisirent à des massacres périodiques de Juifs dans diverses villes.

Persecution of Jews during the Black Death
Persécution des Juifs pendant la peste noire
Unknown artist (Public Domain)

L'Inquisition épiscopale fut instituée par le pape Grégoire IX en 1231, à l'origine pour combattre les nouvelles versions de l'hérésie gnostique dans le sud de la France (les Cathares) et les Vaudois dans les Balkans. Sous l'impulsion de Ferdinand II d'Aragon (r. de 1479 à 1516) et d'Isabelle Ire de Castille (r. de 1474 à 1504), l'Inquisition développa des relations privilégiées avec la couronne d'Espagne. Leur inquisiteur, Tomás de Torquemada, fut chargé de débarrasser l'Espagne des Maures et des Juifs, l'Afrique du Nord et certaines parties de l'Espagne ayant été sous l'influence de l'islam pendant des siècles. Il étendit également l'interdiction aux Marranes (convertis du judaïsme) et aux Morisques (convertis de l'islam), qui étaient chrétiens depuis des générations. Torquemada les accusa de continuer à pratiquer secrètement leur foi d'origine. Les juifs et les musulmans furent expulsés d'Espagne en octobre 1492.

C'est à ce moment-là que la théorie comportementale et la théorie raciale vinrent s'ajouter à la persécution des juifs et des musulmans. Leurs concepts et leurs comportements étant considérés comme inscrits dans leur sang, leur conversion serait toujours suspecte. Cette idée se répandit dans toute l'Europe et s'intégra aux théories raciales émergentes au fur et à mesure que les Européens rencontraient les populations autochtones par le biais du commerce. Venise fut la première ville à confiner officiellement les Juifs dans leur propre communauté physique, le ghetto, en 1516. Le pape Paul IV (1476-1559) créa le ghetto juif de Rome et publia la doctrine extra ecclesiam nulla salus ("il n'y a pas de salut en dehors de l'Église").

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Le Moyen Âge vit également le développement de l'iconographie dans l'art pour les brochures, les manuscrits et l'iconographie ecclésiastique pour ce qui est devenu l'image stéréotypée du juif: une barbe hirsute, un nez crochu, un sac de pièces de monnaie et des vêtements voyants. À l'origine, les chrétiens avaient cité le Deutéronome 23:19 pour qualifier l'usure de péché: "Ne demandez pas d'intérêt à votre compatriote, qu'il s'agisse d'argent, de nourriture ou de toute autre chose susceptible de rapporter un intérêt. Avec la diminution des opportunités économiques pour les juifs, ceux-ci étaient néanmoins autorisés à percevoir des intérêts sur les prêts. Cela était lié à l'incident du Temple décrit dans les évangiles, où Jésus avait renversé la table des changeurs. En tant que changeurs d'argent, on prétendait que les Juifs du Moyen Âge continuaient à "opprimer" le peuple par leurs péchés. Les juifs étaient dépeints comme étant motivés par le diable, et de nombreuses peintures de la Renaissance représentaient le moment où Judas trahit Jésus par un baiser. La représentation de scènes de la Passion tirées de la liturgie de Pâques, popularisa également les représailles contre les Juifs.

La Réforme

Du XIVe au XVIe siècle, la critique de l'institution de l'Église catholique commença à se répandre dans toute l'Europe. Les premiers réformateurs, tels que John Wycliffe (1330-1384) et Jan Hus (1369-1415), prônèrent la production de bibles dans les langues locales plutôt qu'en latin. L'invention de la presse à imprimer, attribuée à Johannes Gutenberg vers 1450, contribua à diffuser leurs idées dans plusieurs pays.

Martin Luther (1483-1546) était un professeur de théologie allemand, un moine et un prêtre augustin. En 1517, les 95 thèses de Martin Luther s'opposèrent au culte des saints, aux reliques, aux indulgences et à d'autres abus de l'Église médiévale. Luther déclara que la seule vraie connaissance se trouvait dans la sola scriptura ("l'Écriture seule"). L'Écriture peut être médiatisée par les credos et les conciles, mais les hommes sont faillibles et nous sommes sauvés par les Écritures divines et le don de la grâce de Dieu. Comme seul Dieu peut le faire, le clergé n'est pas un médiateur sacré entre Dieu et les hommes. L'Église ne l'est pas non plus.

Martin Luther
Martin Luther
Sergio Andres Segovia (Public Domain)

Les commentaires de Luther, en particulier sur les lettres de Paul aux Galates et aux Romains, mettent en évidence l'affirmation de Paul selon laquelle les païens sont sauvés non pas par les "œuvres de la Loi", mais par la foi, où il ajoute sola fide ("la foi seule"). Les "œuvres de la Loi" de Paul ne se référaient qu'aux distinctions physiques entre les croyants juifs et païens, mais comme beaucoup d'écrivains chrétiens avant lui, Luther prit les "œuvres de la Loi" pour l'ensemble du judaïsme. Les "œuvres de la Loi", et même les bonnes actions, ne permettent pas d'atteindre la justification ou la justice, qui ne peut être conférée que par Dieu à travers le Christ. Luther souligna les références de Paul aux juifs et au judaïsme comme étant son ancienne vie non éclairée, maintenant comprise comme une nouvelle dispensation de Dieu. En même temps, les références de Luther sur les Pharisiens devinrent des analogies de l'Église catholique, dont les œuvres, les rituels et les sacrements tombaient dans la même incompréhension des œuvres et du légalisme que, selon lui, Paul avait abrogés.

Refusant de renoncer à ses critiques, il fut excommunié par le pape Léon X et Charles Quint, empereur du Saint-Empire romain germanique, lors de la diète de Worms en 1521. En épousant Catherine de Bore (1499-1552), une ancienne religieuse, il renonça également au célibat des clercs et à la signification catholique des sacrements.

Les idées de Luther furent également diffusées par un autre réformateur, Jean Calvin (1509-1564), et sa communauté de Genève, en Suisse. Tous deux défendirent la doctrine de la prédestination de saint Augustin, selon laquelle Dieu sait déjà qui sera sauvé et qui sera condamné. Augustin d'Hippone (354-430 de notre ère) approuvait pleinement toutes les lois et interdictions visant les non-chrétiens et les hérétiques. Cependant, il soutenait que le judaïsme avait jeté les bases de l'Église et avait fourni les prémices de la compréhension de Dieu et du Christ. Augustin affirmait que l'un des objectifs de l'Église était de protéger cet héritage, qui donnait au christianisme des racines anciennes. En d'autres termes, le christianisme n'était pas une nouveauté, mais l'aboutissement de ce que le Dieu d'Israël avait toujours voulu par ses alliances.

Dans l'Antiquité tardive, avec ses guerres incessantes et ses invasions barbares, les scénarios de la fin des temps étaient tirés de l'Apocalypse. Paul avait écrit que lorsque le Christ reviendrait, "ses frères juifs" verraient la lumière et se convertiraient à ce moment-là (Romains 9-11). Augustin écrivit "ne les tuez pas"; les Juifs devaient survivre pour faire partie du scénario de la fin des temps, lorsqu'ils finiraient par se convertir et serviraient ainsi à valider le plan divin original de Dieu. C'est peut-être à cause du point de vue d'Augustin qu'au départ, Luther voulait convertir les Juifs. Il s'opposa à la section "Servitude des Juifs" du code de Justinien Ier, il écrivit des traités contre la législation antijuive dans plusieurs domaines, en se concentrant sur la conversion comme meilleure méthode, et en 1523, il publia un tract intitulé "Jésus-Christ est né juif " :

Si les apôtres, qui étaient également juifs, avaient agi avec nous, les païens, comme nous, les païens, agissons avec les juifs, il n'y aurait jamais eu de chrétien parmi les païens [...]. Lorsque nous sommes enclins à nous vanter de notre position [en tant que chrétiens], nous devrions nous rappeler que nous ne sommes que des païens, tandis que les Juifs sont de la lignée du Christ. Nous sommes des étrangers et la belle-famille; eux sont des parents de sang, des cousins et des frères de notre Seigneur. Par conséquent, si l'on doit se vanter de la chair et du sang, les Juifs sont en fait plus proches du Christ que nous... Si nous voulons vraiment les aider, nous devons être guidés dans nos relations avec eux non par la loi papale mais par la loi de l'amour chrétien.

La conversion des Juifs sera finalement l'œuvre de Dieu seul. En 1536, l'électeur de Saxe, Jean Frédéric, prince de Luther, promulgua un édit contre les Juifs, qui leur interdit d'habiter, de commercer et de passer dans son district. Un rabbin avait contacté un ami de Luther pour lui demander d'intercéder auprès de l'Électeur, mais Luther refusa en raison de "l'obstination des Juifs" à ne pas se convertir. Il revint ensuite complètement sur ses positions antérieures avec la publication de Sur les Juifs et leurs mensonges (1543). Il est difficile de comprendre pourquoi. Peut-être en raison des exigences de la politique ou pour rendre sa critique de l'Église catholique plus acceptable pour les princes locaux.

Dans Sur les Juifs et leurs mensonges, il présente une nouvelle législation antijuive:

  1. Incendier leurs synagogues et leurs écoles, "pour que Dieu voie que nous sommes chrétiens".
  2. Raser et détruire leurs maisons.
  3. Tous leurs livres de prières et leurs écrits talmudiques, dans lesquels sont enseignés l'idolâtrie, le mensonge, la malédiction et le blasphème, doivent leur être retirés.
  4. Il devrait être interdit aux rabbins d'enseigner sous peine de perdre leur vie et leurs membres.
  5. La sécurité sur les routes devrait être complètement abolie pour les Juifs, car ils n'ont rien à faire dans les campagnes.
  6. L'usure doit leur être interdite, et tout l'argent et le trésor en argent et en or doivent leur être retirés.
  7. Les Juifs jeunes et forts devraient gagner leur pain à la sueur de leur front.

Comme dans les écrits des Pères de l'Église, ce qui est notablement absent de ce traité, ce sont les détails de la vie juive dans l'Allemagne médiévale ou les détails sur la façon dont les Juifs continuèrent à persécuter les Chrétiens avec "le sang des enfants qu'ils ont versé depuis [la destruction de Jérusalem] (qui brille encore dans leurs yeux et sur leur peau)" (Sourcebook - Sur les Juifs et leurs mensonges). La seule référence est celle de Moïse qui avait prédit les malédictions contre les Juifs s'ils n'obéissaient pas à la nouvelle alliance au Sinaï (Deutéronome 28).

Les écrits de Luther sur les Juifs sont restés tristement célèbres. Sur les Juifs et leurs mensonges fut réimprimé dans le journal nazi Der Stürmer en 1937 et servit de justification à l'incendie des synagogues lors de la Nuit de Cristal en 1938. Les églises luthériennes et protestantes modernes ont vigoureusement renoncé aux opinions de Luther sur les Juifs et le judaïsme.

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Rebecca Denova
Rebecca I. Denova, Ph. D., est Professeur émérite de Christianisme Primitif au Département d'Études Religieuses de l'Université de Pittsburgh. Elle a récemment publié un ouvrage, "The Origins of Christianity and the New Testament" (Wiley-Blackwell).

Citer cette ressource

Style APA

Denova, R. (2023, décembre 07). Antisémitisme Chrétien au Moyen-Âge et pendant la Réforme [Christian Antisemitism in the Middle Ages & during the Reformation]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-2337/antisemitisme-chretien-au-moyen-age-et-pendant-la/

Style Chicago

Denova, Rebecca. "Antisémitisme Chrétien au Moyen-Âge et pendant la Réforme." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le décembre 07, 2023. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-2337/antisemitisme-chretien-au-moyen-age-et-pendant-la/.

Style MLA

Denova, Rebecca. "Antisémitisme Chrétien au Moyen-Âge et pendant la Réforme." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 07 déc. 2023. Web. 20 nov. 2024.

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