Les Enfants Ligotés

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Article

Joshua J. Mark
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 14 mars 2024
Disponible dans ces autres langues: anglais
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Les enfants ligotés est une légende sioux qui souligne l'importance d'un comportement correct, non seulement parmi les membres de la famille, mais aussi au sein de la communauté. La veuve, qui ne s'occupe pas correctement de ses enfants, est punie, ainsi que ceux qui la soutiennent, tandis que les enfants et la vieille femme qui les recueille sont récompensés.

Iktomi Sitting by the Fire
Iktomi assis près du feu
Gertrude Spaller (Public Domain)

Dans la culture sioux, comme dans la culture amérindienne en général, le bien de la communauté l'emporte sur les intérêts de l'individu. Les enfants ligotés se concentre sur ce thème, car la veuve néglige ses enfants - et donc sa responsabilité communautaire - pour poursuivre ses propres intérêts. Bien qu'elle semble réussir dans un premier temps, elle finit par échouer lorsque ses enfants, avec l'aide des vieilles femmes et de l'entité surnaturelle Unktomi, révèlent qui elle est vraiment. Dans cette histoire, contrairement à beaucoup d'autres, Unktomi ne sert que d'intermédiaire mais, fidèle à son caractère, agit comme un catalyseur de transformation.

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Commentaire

Même si l'histoire ne dit pas explicitement que la veuve connaît une mauvaise fin, cela est sous-entendu dans la conclusion par la façon dont elle est accueillie par la fille qu'elle a abandonnée (ainsi que plus tôt lorsqu'elle redevient elle-même aux yeux du fils du chef). La vieille femme qui a sauvé les enfants de la veuve reçoit l'honneur de devenir leur grand-mère et reçoit la meilleure viande, alors que leur mère, la veuve, n'a droit qu'au foie, "très sec et difficile à manger". La veuve, même si elle a réussi à s'élever en épousant le fils du chef, est considérée comme méritant une position sociale bien inférieure en raison de ses actes.

Au cœur de l'histoire se trouve le personnage d'Unktomi (également connu sous le nom d'Iktomi), l'esprit filou des croyances spirituelles et culturelles des Sioux, qui apparaît souvent sous la forme d'une araignée tissant des toiles et qui peut servir à aider ou à blesser, mais qui encourage toujours une certaine forme de transformation. Il est également représenté sous la forme d'un homme portant des vêtements traditionnels mais, même sous cette forme, il est toujours considéré comme un personnage dont il faut se méfier lors de toute rencontre. On dit qu'Unktomi est le fils aîné d'Inyan, le dieu primordial de la roche et de la pierre, né lors de la création du monde. En tant que tel, il va paradoxalement à l'encontre de l'idée que l'on se fait de la stabilité de la pierre et symbolise au contraire l'incertitude inhérente à l'acte de création. En créant quoi que ce soit, on ne peut jamais savoir comment cela va finalement tourner ou être reçu.

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Dans cette histoire, Unktomi sert d'intermédiaire entre ceux qui ont été lésés et ceux qui ont commis le péché.

Unktomi peut donc être une force pour le bien de ceux qui le rencontrent ou pour le mal, mais dans tous les cas, Unktomi n'est jamais entièrement bon ou mauvais; il est, tout simplement. Les circonstances qui découlent de son comportement ou de l'interaction avec lui sont laissées à l'interprétation de la personne ou des personnes concernées. Dans de nombreuses légendes sioux, comme la célèbre épopée Plume Blanche (à ne pas confondre avec l'histoire du même titre de la Confédération des Pieds-Noirs), Unktomi est un méchant, mais dans beaucoup d'autres, c'est un héros ou, du moins, il prête ses pouvoirs pour soutenir le bien commun. Dans cette histoire, Unktomi sert d'intermédiaire entre ceux qui ont été lésés et ceux qui ont commis le péché, en les réunissant simplement, sans avoir recours à des influences surnaturelles. En même temps, il reste fidèle à son personnage en ne disant à aucune des parties qu'il connaît déjà toute l'histoire depuis le début.

Le comportement juste de la vieille femme et la vertu de la fille abandonnée et de son frère sont finalement récompensés, car le village reçoit "une telle abondance de provisions qu'il en restait encore beaucoup", alors qu'auparavant, les gens mouraient de faim. Il est suggéré que les circonstances malheureuses antérieures ont été causées par le mauvais comportement de la veuve qui a choisi de se comporter de manière égoïste au lieu d'honorer sa responsabilité envers sa famille et, par extension, envers la communauté. Le public d'origine aurait compris le message du conte sans qu'il soit nécessaire de clarifier la morale.

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Texte

Le conte suivant est extrait de Mythes et Légendes Sioux (1916) de Marie L. McLaughlin, qui était un quart Sioux et qui mit par écrit les légendes et les histoires qu'elle avait entendues lorsqu'elle vivait dans la réserve des Sioux. La date de la composition est inconnue car elle fut transmise oralement par des conteurs sioux de génération en génération.

Il était une fois une veuve avec deux enfants, l'aînée étant une fille et le cadet un fils. La veuve porta longtemps le deuil de son mari. Elle se coupa les cheveux, laissa sa robe en désordre sur son corps et garda son visage non peint et non lavé.

Dans le même village vivait un grand chef. Il avait un fils qui venait d'atteindre l'âge de se marier. Le chef fit savoir qu'il souhaitait que son fils prenne femme, et toutes les jeunes femmes du village étaient désireuses d'épouser le jeune homme. Cependant, aucune d'entre elles ne lui plaisait.

La veuve se dit alors: "Je suis fatiguée de pleurer mon mari et de m'occuper de mes enfants. Peut-être que si j'arrête mon deuil et que je me peins en rouge, le fils du chef pourra m'épouser".

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Elle s'éloigna donc de ses deux enfants, se rendit jusqu'à la rivière et se créa un espace de bain à travers la glace. Lorsqu'elle eut lavé tous les signes de deuil, elle se peignit et s'habilla et se rendit au tipi du chef. Lorsque son fils la vit, il l'aima et un festin fut organisé en l'honneur de son mariage.

Lorsque la fille de la veuve se vit abandonnée, elle pleura amèrement. Au bout d'un jour ou deux, elle prit son petit frère dans ses bras et se rendit au tipi d'une vieille femme qui vivait à l'autre bout du village. Le tipi délabré de la vieille femme était fait d'écorce et sa robe et ses vêtements étaient de vieilles toiles de tente séchées par la fumée. Mais elle se montra bienveillante à l'égard des deux petits et les accueillit volontiers.

La petite fille était impatiente de retrouver sa mère. La vieille femme lui dit: "Je soupçonne ta mère d'avoir peint son visage en rouge. N'essaie pas de la retrouver. Si le fils du chef l'épouse, elle ne voudra pas s'encombrer de vous deux."

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La vieille femme avait raison. La jeune fille descendit à la rivière et trouva un trou creusé dans la glace autour duquel gisaient les saletés que la mère avait lavées de son corps. La jeune fille ramassa les saletés et continua son chemin. Elle arriva bientôt à un deuxième trou dans la glace. Là aussi, il y avait des saletés, mais pas autant qu'à l'endroit précédent. Au troisième trou, la glace était propre.

La jeune fille savait maintenant que sa mère avait peint son visage en rouge. Elle se rendit immédiatement au tipi du chef, souleva le battant de la porte et entra. Sa mère était assise avec le fils du chef pour leur repas de noces.

La jeune fille s'approcha de sa mère et lui jeta la saleté au visage.

"Voilà, s'écria-t-elle, toi qui abandonnes tes enfants sans défense et qui oublies ton mari, prends ça!".

Et aussitôt, sa mère devint une vieille femme hideuse.

La jeune fille retourna alors à la hutte de la vieille femme, laissant le camp en émoi. Le chef envoya bientôt de jeunes guerriers pour s'emparer de la jeune fille et de son frère, et ils furent amenés dans sa tente. Il était furieux.

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"Qu'on attache les enfants avec des cordes autour du corps et qu'on les laisse mourir de faim. Notre camp se déplacera", dit-il. Le fils du chef ne répudia pas sa femme, espérant qu'elle pourrait être guérie d'une manière ou d'une autre et redevenir jeune.

Tout le monde dans le camp se prépara à partir, mais la vieille femme s'approcha de la jeune fille et lui dit:

"Dans mon vieux tipi, j'ai creusé un trou et enterré une marmite avec de la paille, de l'acier, du silex et des paquets de viande séchée. Ils t'attacheront comme un cadavre. Mais avant de partir, je viendrai avec un couteau et je ferai semblant de te poignarder, mais en réalité je couperai la corde qui te lie pour que tu puisses la dérouler de ton corps dès que le camp sera hors de vue et d'ouïe."

Ainsi, avant le départ du camp, la vieille femme arriva à l'endroit où les deux enfants étaient attachés. Elle tenait à la main un couteau attaché à l'extrémité d'un bâton dont elle se servait comme d'une lance. Elle se plaça au-dessus des enfants et cria à haute voix:

"Méchante fille, qui as fait honte à ta propre mère, tu mérites tout le châtiment qui t'est infligé. Mais après tout, je ne veux pas vous laisser gésir et mourir de faim. Et avec son bâton, elle donna de nombreux coups de couteau, comme pour tuer, mais en réalité elle coupait la corde.

Le camp se remit en route, mais les enfants restèrent couchés sur le sol jusqu'à midi le lendemain. Ils commencèrent alors à se tortiller. Bientôt, la fille fut libérée, et elle lâcha son petit frère. Ils se rendirent immédiatement à la hutte de la vieille femme où ils trouvèrent le silex et l'acier ainsi que les paquets de viande séchée.

La jeune fille fabriqua un arc et des flèches pour son frère, avec lesquels il tua des oiseaux et d'autres petits gibiers.

Le garçon devint un grand chasseur. Ils devinrent riches. Ils construisirent trois grands tipis, dans l'un desquels étaient entreposés des rangées et des rangées de parflèches, des sacs de viande séchée.

Un jour, alors que le frère partait chasser, il rencontra un jeune et bel étranger qui le salua et lui dit :

"Je sais que tu es un bon chasseur, car je t'ai observé; ta soeur aussi est travailleuse. Laisse-moi la prendre pour femme. Alors, toi et moi, nous serons frères et nous chasserons ensemble."

Le frère de la jeune fille rentra chez lui et lui raconta ce que lui avait dit le jeune étranger.

"Frère, je ne veux pas me marier", répondit-elle. "Je suis heureuse avec toi."

"Mais tu seras encore plus heureuse mariée", répondit-il, "et le jeune étranger n'est pas d'une famille modeste, comme on peut le voir à son habillement et à ses manières".

"Très bien, je ferai ce que tu veux", dit-elle. L'étranger entra donc dans le tipi et devint le mari de la jeune fille.

Un jour, alors qu'ils étaient dans leur tente, un corbeau passa au-dessus d'eux en criant très fort:

"Kaw, Kaw,

Ceux qui ont abandonné les enfants n'ont pas de viande."

La jeune fille, son mari et son frère se regardèrent les uns les autres.

"Qu'est-ce que cela signifie? demandèrent-ils. "Envoyons chercher Unktomi (l'araignée). C'est un bon juge et il saura".

"Et je lui préparerai un bon dîner, car Unktomi a toujours faim", ajouta la jeune femme.

Quand Unktomi arriva, sa bouche jaune s'ouvrit de joie devant le bon festin qui lui était offert. Après avoir mangé, on lui raconta ce que le corbeau avait dit.

"Le corbeau veut dire, dit Unktomi, que les villageois et le chef qui vous ont lié et abandonné sont dans une triste situation. Ils n'ont presque rien à manger et sont affamés."

Lorsque la jeune fille entendit cela, elle fit un paquet de la meilleure viande et appela le corbeau.

"Apporte ceci aux villageois affamés", lui dit-elle.

Il prit le paquet dans son bec, s'envola vers le village affamé et déposa le paquet devant le tipi du chef. Le chef sortit et le corbeau cria fort:

"Kaw, Kaw !

Les enfants abandonnés ont beaucoup de viande, ceux qui les ont abandonnés n'en ont pas".

"Qu'est-ce qu'il veut dire?" s'écrièrent les villageois stupéfaits.

"Envoyons chercher Unktomi, dit l'un d'eux, c'est un grand juge, il nous le dira."

Ils partagèrent le paquet de viande entre les affamés, gardant le plus gros morceau pour Unktomi.

Après qu'Unktomi fut arrivé et eut mangé, les villageois lui parlèrent du corbeau et lui demandèrent ce que signifiaient les paroles de l'oiseau.

"Il signifie, répondit Unktomi, que les deux enfants que tu as abandonnés ont des tipis remplis de viande séchée pour tout le village.

Cette nouvelle plongea les villageois dans l'étonnement. Pour savoir si c'était vrai ou non, le chef appela sept jeunes gens et les envoya voir. Ils arrivèrent aux trois tipis et y rencontrèrent le frère et le mari de la jeune fille qui partaient à la chasse (qu'ils ne pratiquaient plus que pour le sport).

Le frère de la jeune fille invita les sept jeunes gens à entrer dans la troisième hutte, la hutte sacrée, et après qu'ils eurent fumé une pipe et enlevé les cendres d'un os de bison, le frère leur donna de la viande à manger, que les sept hommes dévorèrent avec avidité. Le lendemain, il les chargea tous les sept de paquets de viande en leur disant:

"Apportez cette viande aux villageois et conduisez-les ici."

En attendant le retour des jeunes gens avec les villageois, la jeune fille fit deux paquets de viande, l'un composé des meilleurs morceaux, l'autre de foie, très sec et difficile à manger. Quelques jours plus tard, le camp arriva. La mère de la jeune femme ouvrit la porte et entra en pleurant: "Oh, ma chère fille, comme je suis heureuse de te voir." Mais la fille la reçut froidement et lui donna le paquet de foie séché à manger. Mais lorsque la vieille femme qui avait sauvé la vie des enfants entra, la jeune fille la reçut avec joie, l'appela grand-mère et lui donna le paquet de viande de choix avec de la moelle.

Tout le village campa et mangea les réserves de viande pendant tout l'hiver, jusqu'à l'arrivée du printemps; malgré le fait qu'ils aient été si nombreux, les réserves étaient si abondantes qu'il en resta encore beaucoup.

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Questions & Réponses

De quoi parle le conte sioux "Les enfants ligotés"?

Le conte sioux "Les enfants ligotés" raconte l'histoire de deux enfants abandonnés par leur mère veuve et qui deviennent les sauveurs du village qui les a ligotés et laissés mourir.

Quelle est la morale de la légende sioux des Enfants ligotés ?

La légende sioux "Les enfants ligotés" souligne l'importance de la responsabilité individuelle envers sa famille et, par extension, envers sa communauté.

Quel rôle joue l'entité d'Unktomi dans l'histoire sioux de Les enfants ligotés?

Dans le récit sioux des Enfants ligotés, Unktomi joue le rôle d'intermédiaire mais, conformément à son caractère traditionnel, facilite la transformation.

Quelle est la date de composition originale du conte sioux Les enfants ligotés?

La date de composition du conte sioux Les enfants ligotés est inconnue, car il a été transmis oralement pendant des générations jusqu'à ce que Marie L. McLaughlin ne le mette par écrit en 1916.

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Joshua J. Mark
Joshua J. Mark est cofondateur et Directeur de Contenu de la World History Encyclopedia. Il était auparavant professeur au Marist College (NY) où il a enseigné l'histoire, la philosophie, la littérature et l'écriture. Il a beaucoup voyagé et a vécu en Grèce et en Allemagne.

Citer cette ressource

Style APA

Mark, J. J. (2024, mars 14). Les Enfants Ligotés [The Bound Children]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-2394/les-enfants-ligotes/

Style Chicago

Mark, Joshua J.. "Les Enfants Ligotés." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le mars 14, 2024. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-2394/les-enfants-ligotes/.

Style MLA

Mark, Joshua J.. "Les Enfants Ligotés." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 14 mars 2024. Web. 21 déc. 2024.

Adhésion