Les bijoux de la civilisation minoenne basée en Crète à l'âge du bronze démontrent, comme d'autres formes d'art visuel minoen, non seulement une connaissance technologique sophistiquée (dans le cas présent, le travail du métal) et une ingéniosité dans la conception, mais aussi une joie de représenter la nature dans toute sa splendeur et un amour des formes fluides et expressives.
Matériaux et technologie
Initialement influencés techniquement et artistiquement par l'Égypte et l'Orient, en particulier par les Babyloniens via la Syrie, les Minoens développèrent néanmoins leur propre art de la joaillerie. La technologie de la fonte permit d'affiner les métaux précieux et les joailliers minoens possédaient un répertoire complet de techniques qui transformaient la matière première en une gamme stupéfiante d'objets et de motifs. La majorité des pièces étaient fabriquées à la main, mais des pièces telles que les bagues étaient souvent réalisées à l'aide de moules à trois pièces et de la technique de la cire perdue. Les perles étaient parfois fabriquées de cette manière, ce qui permettait une certaine production de masse de ces objets.
Les matériaux utilisés dans la production de bijoux minoens comprenaient des métaux tels que l'or, l'argent, le bronze et le bronze doré. Des pierres semi-précieuses étaient également utilisées, comme le cristal de roche, la cornaline, le grenat, le lapis-lazuli, l'obsidienne et le jaspe rouge, vert et jaune. L'améthyste était également populaire et était importée d'Égypte où elle n'était plus à la mode dans les bijoux, ce qui illustre l'indépendance d'esprit des Minoens en ce qui concernait les matériaux et le design. La faïence, l'émail, la stéatite (pierre à savon), l'ivoire, le coquillage, la pâte de verre et la fritte bleue ou bleu égyptien (un produit synthétique intermédiaire entre la faïence et le verre) étaient également à la disposition des bijoutiers minoens.
L'or, très probablement importé d'Égypte, d'Anatolie ou même de Roumanie, était par conséquent une denrée rare et précieuse, sans doute réservée aux personnes d'un statut économique plus élevé. Il était utilisé sous de nombreuses formes: battu, gravé, gaufré, moulé et poinçonné, parfois avec des estampilles. D'autres techniques comprenaient le repoussé, le filigrane (fil d'or fin), l'incrustation, la couverture de feuilles d'or et, enfin, la granulation, où de minuscules sphères d'or étaient attachées à la pièce principale à l'aide d'un mélange de colle et de sel de cuivre qui, une fois chauffé, se transformait en cuivre pur, soudant ainsi les deux pièces ensemble.
Formes
Les bijoux prenaient la forme de diadèmes, de colliers, de bracelets, de perles (en verre, en coquillage, en pierres semi-précieuses et, dans le cas de l'or, souvent en forme de fleurs telles que les lys et, dans certains cas, avec des décorations incisées ou des spirales ajoutées en filigrane), de pendentifs (en particulier des feuilles, des haches et des cônes, mais aussi des animaux et des oiseaux), de bracelets, de bandeaux, d'ornements de vêtements (par exemple, des cercles d'or en feuilles très minces), d'étoiles et de cœurs qui étaient semés dans des feuilles d'or, (par exemple, des cercles, des étoiles et des cœurs en or très fin qui étaient cousus sur les vêtements), des épingles à cheveux (deux beaux exemples ont des têtes de fleurs de crocus) et des ornements de cheveux (le plus souvent sous forme de feuilles et de fleurs en or, dont un exemple exceptionnel est une grande marguerite en or provenant de Mochlos), des pectoraux, des chaînes (allant de lourds maillons en or à des exemples très fins avec de minuscules anneaux) et des boucles d'oreilles (les têtes de taureau en or massif sont parmi les plus beaux exemples qui subsistent).
Les bagues étaient également produites en grande quantité, le plus souvent en or. Elles méritent une mention spéciale car elles étaient non seulement décoratives mais aussi utilisées comme sceaux administratifs. Bien qu'il existe quelques exemples de chevalières en calcédoine, la plupart sont constituées d'un chaton ovale en or, légèrement convexe, formant un angle droit avec un anneau uni, également en or. Certaines sont souvent trop petites pour être portées au doigt et étaient donc probablement portées en pendentif. Bien qu'il existe des anneaux simples, les chatons des anneaux étaient le plus souvent gravés de scènes miniatures détaillées représentant des chasses, des combats, des sauts de taureaux, des déesses, des pratiques religieuses, des chars, des papillons, des paysages, des plantes, des animaux et des griffons mythiques. Ces pièces gravées illustrent également le goût des Minoens pour le remplissage de toute la surface disponible, même si les figures devaient être déformées pour y figurer. À cet égard, les scènes de l'anneau rappellent la décoration de la poterie minoenne et les fresques, qui présentent également des sujets similaires. Elles étaient également incrustées de lapis-lazuli, de verre ou de pierres colorées placées dans des alvéoles d'or - ce que l'on appelle le cloisonné.
Les anneaux utilisés comme sceaux servaient à imprimer un dessin reconnaissable en relief sur de l'argile molle ou de la cire. Les documents portant des sceaux comprenaient des commandes de marchandises, des reçus, de la correspondance politique entre villes ou servaient simplement à attribuer des responsabilités. Plus de deux cents anneaux et empreintes d'anneaux ont été conservés et il est prouvé que certains sceaux étaient transmis et utilisés de génération en génération. Parfois, des répliques d'anneaux étaient fabriquées afin que les sceaux puissent être utilisés par différentes personnes dans différents lieux, tout en représentant une seule autorité identifiable.
Exemples remarquables
Les plus anciens exemples de bijoux minoens ont été découverts dans des tombes de l'île de Mochlos, à l'est de la Crète, et datent de 2300 à 2100 avant notre ère. Parmi les objets en feuilles d'or minces, on trouve un diadème avec trois "antennes" et trois bouquetins crétois marqués au point-repoussé de manière abstraite, ainsi qu'un bandeau en or avec des yeux marqués au repoussé, qui était probablement placé sur le visage du défunt.
La fabrication de bijoux minoens atteignit toutefois son apogée entre 1700 et 1500 avant notre ère et deux des exemples les plus splendides datent de cette période: le pendentif en forme d'abeille et le pendentif du Maître des animaux; tous deux sont en or et démontrent tout le répertoire des orfèvres minoens. Le premier, trouvé à Malia, représente deux abeilles (peut-être aussi des guêpes ou des frelons) rendues avec beaucoup de détails et de réalisme, serrant entre elles une goutte de miel qu'elles s'apprêtent à déposer dans un nid d'abeilles circulaire et granulé. Au-dessus des abeilles, une cage sphérique filigranée entoure une sphère solide et, sous le pendentif, sont suspendus trois disques circulaires découpés, décorés de filigrane et de granulation.
Le pendentif du Maître des animaux provient d'Égine, bien que des recherches aient montré qu'il était d'origine crétoise et très probablement pillé à l'époque mycénienne. Le pendentif représente ce qui semble être un dieu de la nature ou un prêtre tenant dans chaque main le cou d'un oiseau aquatique ou d'une oie. Il est vêtu d'un costume minoen typique - ceinture, pagne et gaine frontale. Cinq disques sont suspendus à la base du pendentif.
Héritage minoen
Tout comme dans d'autres branches artistiques, les créations innovantes et l'utilisation des matériaux employés par les bijoutiers minoens eurent une forte influence non seulement sur les communautés égéennes contemporaines environnantes, telles que les îles des Cyclades, mais aussi sur les civilisations qui succédèrent aux Minoens, en particulier les Mycéniens de la Grèce continentale. Les bijoux mycéniens suivaient de près les styles et les conventions des joailliers crétois et, bien qu'ils aient élargi leurs sujets à des thèmes plus martiaux et montré un plus grand penchant pour l'or, ils continuaient néanmoins à représenter les sujets si chers aux Minoens tels que les plantes, les fleurs et la faune.