Hérodote sur le Sacrifice des Animaux en Égypte

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Thamis
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 18 janvier 2012
Disponible dans ces autres langues: anglais
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XXXVIII. Ils croient que les boeufs mondes (purs) appartiennent à Epaphus, et c'est pourquoi ils les examinent avec tant de soin. Il y a même un prêtre destiné pour cette fonction. S'il trouve sur l'animal un seul poil noir, il le regarde comme immonde. Il le visite et l'examine debout et couché sur le dos ; il lui fait ensuite tirer la langue, et il observe s'il est exempt des marques dont font mention les livres sacrés, et dont je parlerai autre part. Il considère aussi si les poils de la queue sont tels qu'ils doivent être naturellement. Si le boeuf est exempt de toutes ces choses, il est réputé monde; le prêtre le marque avec une corde d'écorce de byblos, qu'il lui attache autour des cornes ; il y applique ensuite de la terre sigillaire, sur laquelle il imprime son sceau ; après quoi on le conduit à l'autel ; car il est défendu, sous peine de mort, de sacrifier un boeuf qui n'a point cette empreinte. Telle est la manière dont on examine ces animaux.

XXXIX. Voici les cérémonies qui s'observent dans les sacrifices : on conduit l'animal ainsi marqué à l'autel où il doit être immolé ; on allume du feu ; on répand ensuite du vin sur cet autel, et près de la victime qu'on égorge, après avoir invoqué le dieu ; on en coupe la tête, et on dépouille le reste du corps ; on charge cette tête d'imprécations ; on la porte ensuite au marché, s'il y en a un, et s'il s'y trouve des marchands grecs, on la leur vend ; mais ceux chez qui il n'y a point de Grecs la jettent à la rivière. Parmi les imprécations qu'ils font sur la tête de la victime ceux qui ont offert le sacrifice prient les dieux de détourner les malheurs qui pourraient arriver à toute l'Égypte ou à eux-mêmes, et de les faire retomber sur cette tête. Tous les Égyptiens observent également ces mêmes rites dans tous leurs sacrifices, tant à l'égard des têtes des victimes immolées qu'à l'égard des libations de vin. C'est en conséquence de cet usage qu'aucun Égyptien ne mange jamais de la tête d'un animal, quel qu'il soit. Quant à l'inspection des entrailles et à la manière de brûler les victimes, ils suivent différentes méthodes, selon la différence des sacrifices.

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XL. Je vais parler maintenant de la déesse Isis, que les Égyptiens regardent comme la plus grande de toutes les divinités, et de la fête magnifique qu'ils célèbrent en son honneur. Après s'être préparés à cette fête par des jeûnes et par des prières, ils lui sacrifient un boeuf. On le dépouille ensuite, et on en arrache les intestins ; mais on laisse les entrailles et la graisse. On coupe les cuisses, la superficie du haut des hanches, les épaules et le cou. Cela fait, on remplit le reste du corps de pains de pure farine, de miel, de raisins secs, de figues, d'encens, de myrrhe et d'autres substances odoriférantes. Ainsi rempli, on le brûle, en répandant une grande quantité d'huile sur le feu. Pendant que la victime brûle, ils se frappent tous ; et, lorsqu'ils ont cessé de frapper, on leur sert les restes du sacrifice.

XLI. Tous les Égyptiens immolent des boeufs et des veaux mondes ; mais il ne leur est pas permis de sacrifier des génisses, parce qu'elles sont sacrifiées à Isis, qu'on représente dans ses statues sous la forme d'une femme avec des cornes de génisse, comme les Grecs peignent Io. Tous les Égyptiens ont beaucoup plus d'égards pour les génisses que pour le reste du bétail : aussi n'y a-t-il point d'Égyptien ni d'Égyptienne qui voulût baiser un Grec à la bouche, ni même se servir du couteau d'un Grec, de sa broche, de sa marmite, ni goûter de la chair d'un boeuf monde qui aurait été coupée avec le couteau d'un Grec. Si un boeuf ou une génisse viennent à mourir, on leur fait des funérailles de cette manière : on jette les génisses dans le fleuve ; quant aux boeufs, on les enterre dans les faubourgs, avec l'une des cornes ou les deux cornes hors de terre, pour servir d'indice. Lorsque le boeuf est pourri, et dans un temps déterminé, on voit arriver à chaque ville un bateau de l'île Prosopitis. Cette île, située dans le Delta, a neuf sciènes de tour ; elle contient un grand nombre de villes ; mais celle d'où partent les bateaux destinés à enlever les os des boeufs se nomme Atarbéchis. On y voit un temple consacré à Vénus. Il sort d'Atarbéchis beaucoup de gens qui courent de ville en ville pour déterrer les os des boeufs ; ils les emportent, et les mettent tous en terre dans un même lieu. Ils enterrent de la même manière que les boeufs le reste du bétail qui vient à mourir : la loi l'ordonne ; car ils ne les tuent pas.

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XLII. Tous ceux qui ont fondé le temple de Jupiter Thébéen, ou qui sont du nome de Thèbes, n'immolent point de moutons, et ne sacrifient que des chèvres. En effet, tous les Égyptiens n'adorent pas également les mêmes dieux ; ils ne rendent tous le même culte qu'à Isis et à Osiris, qui, selon eux, est le même que Bacchus. Tous ceux, au contraire, qui ont en leur possession le temple de Mendès, ou qui sont du nome Mendésien, immolent des brebis, et épargnent les chèvres. Les Thébéens, et tous ceux qui, par égard pour eux, s'abstiennent des brebis, le font en vertu d'une loi dont voici le motif : Hercule, disent-ils, voulait absolument voir Jupiter ; mais ce dieu ne voulait pas en être vu. Enfin, comme Hercule ne cessait de le prier, Jupiter s'avisa de cet artifice : il dépouilla un bélier, en coupa la tête, qu'il tint devant lui, et, s'étant revêtu de sa toison, il se montra dans cet état à Hercule. C'est par cette raison qu'en Égypte les statues de Jupiter représentent ce dieu avec une tête de bélier. Cette coutume a passé des Égyptiens aux Ammoniens. Ceux-ci sont en effet une colonie d'Égyptiens et d'Éthiopiens, et leur langue tient le milieu entre celle de ces deux peuples. Je crois même qu'ils s'appellent Ammoniens parce que les Égyptiens donnent le nom d'Amon à Jupiter. Les Thébéens regardent, par cette raison, les béliers comme sacrés, et ils ne les immolent point, excepté le jour de la fête de Jupiter. C'est le seul jour de l'année où ils en sacrifient un ; après quoi on le dépouille, et, de la même manière dont Jupiter s'en était revêtit lui-même, l'on revêt de sa peau la statue de ce dieu, dont on approche celle d'Hercule. Cela fait, tous ceux qui sont autour du temple se frappent, en déplorant la mort du bélier ; et puis on le met dans une caisse sacrée.

(Histoire, Livre II, trad. Larcher, Charpentier librairie-éditeur)

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

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Thamis. (2012, janvier 18). Hérodote sur le Sacrifice des Animaux en Égypte [Herodotus on Animal Sacrifice in Egypt]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-87/herodote-sur-le-sacrifice-des-animaux-en-egypte/

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Thamis. "Hérodote sur le Sacrifice des Animaux en Égypte." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le janvier 18, 2012. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-87/herodote-sur-le-sacrifice-des-animaux-en-egypte/.

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Thamis. "Hérodote sur le Sacrifice des Animaux en Égypte." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 18 janv. 2012. Web. 01 avril 2025.

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