Les Romains construisirent des moulins pour l'agriculture, l'exploitation minière et la construction. Vers le IIIe siècle avant notre ère, les premiers moulins furent utilisés pour moudre le grain. Les développements ultérieurs et les percées dans la technologie de broyage étendirent leur utilisation au concassage des minerais dans les mines et à des activités de construction telles que la coupe du bois et du marbre. Les moulins devinrent un élément important de l'économie romaine, réduisant la dépendance à l'égard du travail humain et augmentant considérablement la productivité et l'efficacité dans de nombreux secteurs de l'économie romaine.
Moulins utilisés dans l'agriculture
Moulins à main
Dans le secteur agricole, les moulins permettaient de produire de grandes quantités de farine, essentielle à la fabrication du pain. Avant l'invention des moulins, les hommes broyaient les céréales à l'aide d'une pierre arrondie pressée manuellement contre un plateau de pierres plates. La première innovation significative dans le domaine du broyage intervint à la fin du Ve siècle avant notre ère en Grèce, avec l'introduction de la première machine à moudre: le moulin d'Olynthe, également connu sous le nom de moulin à trémie. Le moulin d'Olynthe se composait d'une pierre inférieure et d'une pierre supérieure de forme rectangulaire. La pierre supérieure était munie d'un long manche et était déplacée d'un côté à l'autre dans un mouvement de va-et-vient. Le moulin comportait également une cavité creuse (ou trémie) avec une fente étroite en son centre, par laquelle le meunier faisait passer le grain.
Les moulins à traction animale
Les moulins rotatifs représentaient une amélioration par rapport au moulin d'Olynthe, dans la mesure où des manivelles pouvaient être attachées à une bête pour le broyage. Le moulin rotatif à traction animale apparut vers le IIIe siècle avant notre ère en Italie, l'un des meilleurs exemples étant le moulin de Pompéi, souvent associé à l'essor des boulangeries commerciales. Ces moulins pompéiens étaient actionnés par deux ânes attelés à un cadre en bois. Le moulin se composait de deux parties: la pierre inférieure (la meta) et la pierre supérieure (le catillus), toutes deux faites de roche volcanique solide. Le catillus, concave et en forme de sablier, était tourné par des ânes. Il était percée d'un trou en son centre et surmonté d'une trémie dans laquelle le meunier versait le grain. Cette pierre tournait contre la meta, légèrement convexe et immobile. Le moulin rotatif à traction animale épargnait aux hommes la corvée du broyage et augmentait considérablement le rendement et la qualité de la farine, car les ânes pouvaient actionner le moulin pendant des heures d'affilée.
Moulins à eau
Le moulin à eau fut une autre invention importante qui, selon la plupart des historiens, apparut plus tard au cours du dernier siècle avant notre ère, ou un peu plus tôt. Dans cette version du moulin, des pales alimentées par de l'eau entraînaient le catillus avec une puissance bien supérieure à celle que pouvaient fournir les animaux. Les moulins à eau pouvaient donc produire des quantités de farine encore plus importantes.
De nombreux défis techniques avaient dû être relevés pour la construction de ces moulins. Par exemple, il fallait un approvisionnement constant en eau courante, avec la possibilité de l'arrêter pendant les inspections et les réparations. Les canaux des moulins, parfois longs de plusieurs kilomètres, étaient équipés d'un système de réservoirs et de vannes qui permettaient de limiter ou de couper la quantité d'eau admise dans les roues à aubes. Dans certains cas, ce sont des aqueducs, et non des canaux, qui permettaient d'assurer un approvisionnement constant en eau.
Un autre défi technique consistait à convertir le mouvement circulaire de la roue à aubes en une rotation du catillus ou "meule en pierre" en dehors du courant d'eau. Dans la version du moulin à roues horizontales, ce mouvement était transféré directement à la pierre au moyen d'un arbre vertical. Dans le moulin à roues verticales, le mouvement circulaire vertical de la roue à aubes était converti en une rotation horizontale par l'utilisation d'un engrenage à angle droit. L'engrenage à angle droit, inventé vers 270 avant notre ère, était un système de transmission composé de deux roues dentées qui augmentaient la vitesse de la meule en pierre générant ainsi une puissance supplémentaire.
Il existait trois variantes du moulin à roues verticales:
- le moulin par-dessous (l'eau alimente le bas de la roue)
- le moulin par-dessus (l'eau alimente les palettes en haut de la roue)
- la roue de poitrine (l'eau frappe le milieu de la roue).
Le moulin par-dessous était l'application la plus simple, la plus ancienne et la plus courante des trois.
Pour justifier les coûts de construction d'un moulin à eau, il fallait une concentration de population suffisamment importante (entre 200 et 400 habitants dans les environs). Lorsque la concentration de population était encore plus importante, des groupes de moulins étaient construits, comme les moulins du Janicule (début du IIIe siècle de notre ère) à Rome ou le complexe de Barbegal (début du IIe siècle de notre ère) dans le sud de la France. Au complexe de Barbegal, par exemple, un aqueduc pouvait alimenter en eau seize roues à aubes, tandis que sur le versant de la colline du Janicule à Rome, un grand nombre de moulins utilisaient également l'eau de l'aqueduc pour produire de la farine à l'échelle industrielle du IIIe au VIe siècle de notre ère.
Moulins utilisés dans les mines
Les bocards étaient utilisés dans l'industrie minière pour broyer le minerai provenant de gisements profonds et le réduire en petits morceaux avant de le traiter. Les minerais métalliques devaient être broyés jusqu'à la taille d'un pois ou d'une noix avant d'être fondus. Parfois, les moulins étaient également utilisés pour travailler le métal après la fonte, alors que le métal était encore chaud. La présence d'enclumes en pierre portant des marques de bocards à Dolaucothi et sur d'autres sites miniers romains antiques prouve que les bocards étaient largement utilisés pour piler le minerai extrait.
Ces bocards étaient constitués de roues hydrauliques, de cames et de marteaux-pilons (mola). Ils apparurent en Grèce vers le IIIe siècle avant notre ère, puis se répandirent en Italie au cours du premier siècle de notre ère. Avant cette invention, le broyage des minerais se faisait manuellement, ce qui nécessitait beaucoup d'hommes et d'efforts. Comme pour les moulins à grains, ces bocards permettaient d'économiser beaucoup de main-d'œuvre, tout en augmentant considérablement la vitesse de traitement des minerais. Les moulins à foulon étaient principalement utilisés dans les applications minières, mais parfois aussi pour piler et décortiquer le grain.
Comme l'eau alimentait ces machines à pilons, des aqueducs étaient souvent construits à proximité des sites miniers. Par exemple, dans les mines de Dolaucothi au Pays de Galles ou à Rio Tinto en Espagne, de longs aqueducs furent construits pour alimenter un certain nombre de ces moulins. L'eau des aqueducs était également utilisée pour les techniques d'extraction du minerai connues sous le nom de "brossage" et "lavage". Certains minerais métalliques, comme l'or, devaient être finement broyés afin de libérer les minuscules particules de métal des roches, des sels et des sables environnants. À cette fin, les Romains construisaient des moulins à eau semblables aux moulins agricoles mentionnés précédemment, mais ceux-ci étaient dotés de meules encore plus dures.
moulins utilisés dans la construction
Le moulin à scies est un autre exemple de machine étonnamment sophistiquée, composée d'une scie alternative actionnée par une roue à aubes. Elle pouvait couper de grandes quantités de bois ou de pierre, ce qui permettait d'économiser énormément d'efforts et de travail. La roue hydraulique était reliée à une tige reliée à une ou plusieurs scies actionnées par une manivelle. La plus ancienne scierie connue est celle de Hiérapolis, qui date de 250-300 de notre ère. C'est la première machine connue à utiliser une manivelle avec un mécanisme de bielle. Un relief sur le sarcophage de Marcus Aurelius Ammianos (datant de 250-300 de notre ère), dans la cité antique de Hiérapolis près de l'actuelle Pamukkale en Turquie, donne une représentation claire de son fonctionnement.
Les moulins à scies étaient également couramment utilisées pour tailler le marbre. Dans un poème épique sur la Moselle, en Allemagne, à la fin du IVe siècle de notre ère, le poète romain Ausone décrit le bruit strident d'une scierie actionnée par l'eau et utilisée pour tailler le marbre. Ces scieries étaient également utilisées pour couper d'autres types de pierres. Des scieries datant du VIe siècle de notre ère ont également été découvertes à Gerasa (dans l'actuelle Jordanie) et à Éphèse (dans l'actuelle Turquie). On peut donc affirmer qu'elles étaient utilisées dans tout l'empire romain pour divers usages.
Conclusion
L'invention de la technologie du broyage mécanique, et plus tard des moulins à eau, permit de réduire la dépendance à l'égard du travail humain et d'améliorer considérablement la productivité dans de nombreux secteurs de l'économie romaine, améliorant ainsi la vie quotidienne des Romains. Les moulins à eau, comme ceux du Janicule à Rome, permirent la production de farine et de pain à l'échelle industrielle. Les bocards accélérèrent le traitement du minerai sur les sites miniers de tout l'empire, tandis que les scieries permirent de tailler le marbre et d'autres pierres avec précision et à des vitesses record. La technologie romaine du broyage passa des moulins manuels aux moulins rotatifs actionnés par des animaux au 1er siècle avant notre ère, puis aux moulins à scies plus complexes actionnés par l'eau et par des manivelles au 3e siècle de notre ère. De nombreux principes utilisés dans la construction de ces premières machines sont encore appliqués aujourd'hui dans la conception des moulins modernes. Ces moulins sont des exemples supplémentaires de l'ingéniosité, de la conception impressionnante et des compétences de fabrication des Romains.