Cloches en Bronze de Corée Antique

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Mark Cartwright
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 18 octobre 2016
Disponible dans ces autres langues: anglais
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Les métallurgistes de la Corée antique étaient des artistes hautement qualifiés et certaines de leurs plus belles œuvres sont les grandes cloches en bronze coulées pour les temples et monastères bouddhistes. Le royaume unifié de Silla et le royaume de Goryeo ont tous deux produit des cloches, mais l'exemple le plus célèbre est sans doute la cloche Émilé de 19 tonnes de Bongdeoksa, considérée comme l'un des trésors nationaux de Corée.

Origines et fonction

Les premières cloches en bronze furent fabriquées en Corée à l'âge du bronze, mais il s'agissait de petits objets à l'usage incertain. Elles n'étaient pas musicales et pouvaient être ajoutées aux harnachements des chevaux ou utilisées lors de cérémonies chamanistes, voire portées comme symbole d'autorité. Les cloches musicales furent introduites depuis la Chine en 1116 de notre ère, et elles faisaient partie de l'orchestre aak qui accompagnait les rites et les cérémonies confucéens. Les cloches les plus célèbres de Corée sont toutefois les grandes cloches coulées (pomjong) utilisées dans les temples et monastères bouddhistes. Elles aussi avaient été introduites de Chine pendant la dynastie Tang, mais comme pour d'autres arts tels que la fabrication du papier et de la céramique, les Coréens surpassèrent leurs maîtres et produisirent des exemplaires exceptionnellement grands et finement décorés.

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Sangwonsa Bell
Cloche Sangwonsa
Unknown (Public Domain)

Les grandes cloches en bronze de Corée n'avaient pas de battant, car elles étaient frappées depuis le côté à l'aide d'une poutre en bois horizontale suspendue par une corde. Les cloches elles-mêmes étaient suspendues au plafond d'un petit pavillon construit à cet effet près de l'entrée du temple. Les grandes cloches sonnaient pour annoncer les services au début et à la fin de chaque journée, tandis que les petites cloches annonçaient les autres services et sonnaient à chaque heure.

Les cloches de Silla

Les cloches en bronze les plus grandes et les plus célèbres de Corée proviennent du royaume de Silla qui régna sur le sud-est de la Corée de 57 av. JC à 668 de notre ère, puis, sous le nom de royaume unifié de Silla, sur l'ensemble de la péninsule coréenne jusqu'en l'an 935. Le travail du métal était depuis longtemps un art raffiné de Silla, comme en témoignent les couronnes en or provenant de diverses tombes et les figurines et statues en bronze doré de personnages bouddhistes. La période Silla unifiée vit se développer une nouvelle forme d'art, celle de la fabrication de grandes cloches en bronze coulé qui étaient suspendues dans les temples bouddhistes.

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L'ENSEMBLE DRAGON ET BOUCLE SUR Le sommet DES CLOCHES CORÉENNES EST UNE COMBINAISON UNIQUE DE CLOCHES SUSPENDUES ET DE CLOCHES À MAIN CHINOISES.

Comme pour les cloches chinoises, il y a quatre panneaux décoratifs carrés (yugwak) près du sommet, chacun comportant neuf boutons (ju) disposés en trois rangées de trois. Les cloches de Silla diffèrent toutefois des cloches chinoises de même usage en ce qu'elles comportent des paires d'apsaras volantes sculptées en relief - les êtres célestes féminins qui assistent Bouddha - et un design beaucoup plus élaboré pour la suspension de la cloche, le plus souvent sous la forme d'un dragon finement sculpté et d'un court poteau creux qui servait peut-être de tube sonore. L'ensemble dragon et boucle sur la couronne (wu) des cloches coréennes est donc une combinaison unique de cloches suspendues chinoises (chung) et de cloches à main (t'o).

Les décorations comprennent généralement des bandes de motifs floraux à la base et au sommet de la cloche (sangdae), utilisant le plus souvent un motif de chèvrefeuille ou la fleur pao-hsiang-hua. En outre, les cloches ont une grande rosette de lotus près de la base, là où le faisceau frappe la cloche, et une rosette sur le côté opposé.

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Korean Buddhist 'Emille' Bell
Cloche coréenne bouddhiste, dite Émilé
Steve46814 (CC BY-SA)

La plus ancienne cloche qui subsiste provient du temple Sangwonsa sur le mont Odaesan, près de Pyeongchang, et date de 725. La cloche mesure 1,67 mètre de haut pour un diamètre d'un peu moins d'un mètre et fut financée par une certaine Hyudori, épouse d'un aristocrate local. La décoration de la cloche comprend une flûte et deux harpistes, ainsi qu'un médaillon en forme de lotus entouré de chèvrefeuille.

La plus grande cloche de Silla est celle de Bongdeoksa (Pandok-sa), également connue sous le nom de cloche Émilé, qui fut coulée en 771 de notre ère en l'honneur du roi Seongdeok (r. 702-737). Une inscription sur la cloche nous informe du long processus nécessaire à la fonte de ces cloches géantes. Elle indique que le projet avait été lancé par le fils de Seongdeok, le roi Gyeongdeok, mais qu'il mourut en 765 alors que la cloche n'était pas encore prête et son fils Hyegong fut chargé de terminer le travail. Selon une légende contenue dans le Samguk yusa du XIIIe siècle, la tâche était si écrasante pour l'homme chargé de couler la cloche qu'il fut poussé à jeter sa propre fille dans le bronze en fusion dans l'espoir que son sacrifice permette à la cloche d'être enfin fabriquée. On pense que le son de la cloche, lorsqu'elle sonne, fait écho au cri de désespoir de la fille "Émilé" ("Maman"), lorsqu'elle fut jetée dans le bronze, d'où son surnom.

Un examen attentif de la surface de la cloche révèle que le moule était composé de plusieurs pièces différentes et que la couronne comportait dix trous de coulée. Haute d'environ 3,5 mètres et d'un diamètre de 2,27 mètres, elle est décorée de fleurs de lotus et d'êtres célestes avec la boucle de suspension classique de Silla en forme de dragon. Pesant près de 19 tonnes, la cloche est désormais exposée au musée national de Gyeongju. Même la cloche Pandok-sa aurait été éclipsée par certaines des plus grandes cloches qui n'ont malheureusement pas survécu. L'une d'elles, la cloche Hwangnyong-sa, aurait pesé 500 000 kun, soit plus de 300 tonnes.

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Dragon Bell Suspension, Sangwonsa Temple
Suspension de cloche en forme de dragon, Temple Sangwonsa
Unknown (Public Domain)

Les cloches de Goryeo

La dynastie Goryeo régna sur la Corée de 918 à 1392 et le bouddhisme resta la religion la plus importante de l'État. Il reste 70 cloches de cette période, dont 17 portent des dates, la plus ancienne étant celle de 963. De nombreux exemples se trouvent aujourd'hui au Japon, offerts en cadeau par le gouvernement Yi ou pillés lors de l'invasion de Hideyoshi au XVIe siècle. Les cloches de Goryeo sont plus petites que les cloches géantes fabriquées par le royaume de Silla, mais peuvent tout de même atteindre 1,7 mètre de haut. Elles étaient également coulées en bronze et décorées de dragons et de figures célestes, mais aussi, désormais, de bouddhas et de bodhisattvas. L'une d'entre elles, provenant du temple de Naesco, dans le sud-ouest de la Corée (1222), présente des pétales de feuilles de lotus dépassant du bord supérieur de la cloche, une bordure plus élaborée autour des neuf nodules carrés et quatre sphères ajoutées à la boucle de suspension du dragon. L'exemple le plus remarquable de Goryeo est sans doute la cloche de 1,7 mètre de haut qui se trouve actuellement au Musée des Beaux-Arts du Palais Toksu à Séoul.

Les cloches ne devaient pas être particulièrement appréciées par la population paysanne locale, qui était souvent contrainte par les monastères et les temples de "donner" ses objets en bronze pour qu'ils soient fondus et refondus en cloches. C'est probablement l'origine du monstre Bulgasari du folklore coréen. Son nom signifie "habitant des temples bouddhistes" et on pense qu'il se nourrissait de bronze et de fer qu'il faisait fondre avec son corps chauffé à blanc. Il était particulièrement friand d'aiguilles et promettait de chasser les autres monstres si son appétit était satisfait. Les cloches à main et les gongs de temple étaient également produits en métal pour être utilisés dans les monastères bouddhistes, et ces petites œuvres étaient souvent joliment incrustées de pièces d'argent ou d'or très fines.

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Bibliographie

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Mark Cartwright
Mark est un auteur, chercheur, historien et éditeur à plein temps. Il s'intéresse particulièrement à l'art, à l'architecture et à la découverte des idées que toutes les civilisations peuvent nous offrir. Il est titulaire d'un Master en Philosophie politique et est le Directeur de Publication de WHE.

Citer cette ressource

Style APA

Cartwright, M. (2016, octobre 18). Cloches en Bronze de Corée Antique [The Bronze Bells of Ancient Korea]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-961/cloches-en-bronze-de-coree-antique/

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Cartwright, Mark. "Cloches en Bronze de Corée Antique." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le octobre 18, 2016. https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-961/cloches-en-bronze-de-coree-antique/.

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Cartwright, Mark. "Cloches en Bronze de Corée Antique." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 18 oct. 2016. Web. 21 nov. 2024.

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