Marine Ptolémaïque

Définition

Arienne King
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 19 juin 2024
Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol
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Police Boat on the Palestrina Mosaic (by Camelia.boban, CC BY-SA)
Bateau de police sur la mosaïque de Palestrina
Camelia.boban (CC BY-SA)

L'Égypte ptolémaïque était une puissance navale qui exerça son influence dans toute la Méditerranée orientale depuis sa fondation en 330 avant notre ère jusqu'à la défaite de Cléopâtre face à Auguste lors de la bataille d'Actium en 30 avant notre ère. Le royaume ptolémaïque produisit certains des plus grands navires à propulsion humaine de tous les temps, ainsi que les navires de guerre les plus grands et les plus avancés de l'époque.

La marine ptolémaïque était également utilisée pour patrouiller les routes commerciales de la Méditerranée, de la mer Rouge et du Nil afin de décourager la piraterie. Les expéditions exploratoires ptolémaïques contribuèrent à améliorer les connaissances géographiques grecques et romaines sur l'Arabie et le sous-continent indien. Malgré le déclin général de sa puissance militaire dans les conflits terrestres, elle resta une force navale importante jusqu'à la fin de la dynastie.

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Les origines

Alexandre le Grand (r. de 336 à 323 av. J.-C.) conquit l'Égypte en 332 av. J.-C. et, après la mort d'Alexandre le Grand en 323 av. J.-C., l'Égypte fut gouvernée par son général Ptolémée Ier (r. de 305 à 282 av. J.-C.). Le reste de l'empire d'Alexandre fut divisé entre ses autres généraux au cours des guerres des Diadoques. Les Diadoques et leurs successeurs se livrèrent à des guerres incessantes pour obtenir des territoires et des ressources, ce qui favorisa le développement de la marine ptolémaïque.

La marine ptolémaïque se développa vite avec des navires de guerre nouveaux et plus avancés pour devenir la puissance navale dominante en Méditerranée.

La marine de Ptolémée Ier se composait à l'origine des forces laissées par Alexandre le Grand en 331 avant notre ère. Il avait laissé 30 trières en Égypte, sous le commandement de l'amiral Polémon. Après avoir vaincu le général macédonien Thibron à Cyrène en 324 avant notre ère, Ptolémée absorba probablement ce qui restait de la flotte de Thibron. Il conclut également des alliances avec les souverains de Chypre, ce qui lui permit de construire de nouveaux navires de guerre.

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En 306 avant notre ère, Ptolémée Ier était en mesure de rassembler 210 navires de guerre et 200 navires de transport de troupes. Le frère de Ptolémée, Ménélas, dirigea cette flotte contre les forces de Démétrios Ier Poliorcète (c. 336 à c. 282 av. J.-C.) à Salamine, sur l'île de Chypre. Démétrios, dont la flotte contenait de plus grands navires transportant de l'artillerie, anéantit la flotte ptolémaïque. Démétrios saisit 40 navires de guerre et 8 000 marines ptolémaïques. Cette défaite catastrophique empêcha Ptolémée Ier de conserver le contrôle de Chypre et de la Cyrélie, perdues au profit d'Antigone Ier. En l'espace d'une décennie, Ptolémée Ier reconstitua une flotte de 150 navires qu'il utilisa pour reprendre Chypre et s'emparer de la Lydie, de Tyr, de Sidon et de la Pamphylie.

Il range encore sous son sceptre une partie de la Phénicie, de l'Arabie, de la Syrie, de la Libye et des noirs Éthiopiens. Il dicte des lois à toute la Pamphilie, aux braves Ciliciens, aux Lyciens, aux belliqueux Cariens et aux habitants des Cyclades. Ses vaisseaux invincibles fendent au loin les mers, car les mers, la terre et les fleuves rapides rendent hommage au puissant Ptolémée.

(Théocrite, Idylles, 17.86-95, Remacle)

Sous Ptolémée II philadelphe (r. de 282 à 286 av. J.-C.) et Ptolémée III (r. de 246 à 222 av. J.-C.), la marine ptolémaïque s'enrichit rapidement de nouveaux navires de guerre plus perfectionnés pour devenir la puissance navale dominante en Méditerranée. Cette marine permit à la dynastie ptolémaïque de capturer et de défendre des îles et des territoires côtiers qui s'étendaient de l'Égypte à la mer Égée, faisant du royaume ptolémaïque une thalassocratie. Les souverains ptolémaïques ultérieurs continueraient à accorder la priorité à l'entretien d'une flotte importante, mais à la fin de la dynastie, son pouvoir mondial s'était désintégré.

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Ingénierie navale

La flotte ptolémaïque était composée de navires grecs, notamment de navires de guerre pour les combats navals et de navires de transport de troupes pour l'acheminement des soldats. Ces navires pouvaient naviguer à la rame ou à la voile, selon les conditions, et se déplaçaient à une vitesse d'environ 50 miles par jour. Les différents types de navires utilisés dans la guerre navale grecque étaient généralement nommés en fonction du nombre de rangées de rames qu'ils possédaient. La trière (ou trirème), le navire de guerre classique de l'Antiquité, avait trois rangées de rames superposées. À l'époque hellénistique, différents États rivalisaient pour construire des navires plus grands, appelés polyrèmes, qui comportaient cinq rangées de rames ou plus.

Le royaume ptolémaïque était en tête de cette course, construisant des navires de guerre de 20, 30 et 40 rangées de rames. On pense que ces grands navires étaient des catamarans à double coque. L'architecte naval Pyrgotélès, fils de Zôes, conçut les navires de 20 et de 30 rames. Ptolémée II fut tellement impressionné par ces navires qu'il commémora Pyrgotélès avec ses propres statues dans le temple d'Aphrodite à Paphos. L'auteur hellénistique Callixène de Rhodes (IIe siècle av. J.-C.) et l'auteur romain Appien affirment que Ptolémée II possédait plus de 4 000 navires, mais ce chiffre était largement exagéré. La flotte de Ptolémée II comptait probablement au moins 300 navires de guerre, dont un tiers de polyrèmes.

Trireme Cross Section
Coupe transversale de trière
Mark Cartwright (CC BY-NC-SA)

Un grand nombre d'architectes, d'artisans et d'ouvriers du bâtiment étaient nécessaires pour construire et réparer en permanence ces navires. Les ingénieurs alexandrins repoussèrent les limites de la construction navale, des engins de siège et de l'artillerie de pont. L'ingénieur ptolémaïque Philon de Byzance (vers le IIIe ou le IIe siècle av. J.-C.) aborda divers aspects de la guerre navale et de la guerre de siège dans sa Syntaxe méchanique. Parmi les sujets abordés figurent la construction et le transport de l'artillerie et du matériel de siège, le stockage de l'eau en toute sécurité et la construction de ports.

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Les navires de guerre devaient être construits en bois solide et léger, comme le sapin ou le cèdre. La quille était généralement constituée d'une seule poutre en bois de chêne, que l'on avait forcé à pousser en forme incurvée. Les arbres d'une longueur et d'une qualité suffisantes pour la construction navale ne poussaient pas dans l'Égypte ancienne, si bien qu'il fallait importer du bois. Chypre était l'une des principales provinces productrices de bois du royaume ptolémaïque. La dynastie ptolémaïque se battit également contre l'empire séleucide pour le contrôle des territoires producteurs de bois en Cœlé-Syrie, en Cilicie et en Phénicie. Le coût de la construction des navires était généralement financé par les impôts royaux, mais il arrivait aussi que de hauts fonctionnaires contribuent de leur propre chef à la construction d'un navire de guerre.

L'équipage

La flotte pouvait employer 45 000 à 50 000 membres d'équipage en temps de paix, et 70 000 à 80 000 membres d'équipage en temps de guerre.

La majorité des membres de l'équipage d'un navire de guerre hellénistique étaient des rameurs, suivis par des marins et des fusiliers marins. Les marines antiques avaient pour mission d'attaquer les navires ennemis à l'aide de projectiles et, si possible, de tenter de les aborder. Une trière nécessitait un équipage d'environ 170 rameurs et 30 épibates (soldats de marine), tandis qu'une quinquérème nécessitait 270 rameurs et au moins 40 épibates. Le nombre d'épibates à bord variait. L'historienne Christelle Fischer-Bovet estime que la flotte aurait pu employer entre 45 000 et 50 000 membres d'équipage en temps de paix, et entre 70 000 et 80 000 membres d'équipage en temps de guerre.

Malgré leur taille, les navires ptolémaïques étaient des espaces exigus avec très peu d'espace de vie. Les membres d'équipage recevaient quelques rations, mais l'approvisionnement des grandes marines nécessitait une flotte de navires marchands transportant de la nourriture, de l'eau douce et d'autres fournitures. Sans lignes de ravitaillement adéquates, on risquait la famine, la maladie et la baisse de moral. Les flottes devaient également rester à proximité des côtes pour pouvoir se réapprovisionner et se reposer, ce qui était plus facile dans les régions où elles disposaient de bases alliées.

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Les trières n'étaient pas des embarcations particulièrement sûres et il y avait peu de place à bord pour la nourriture, l'eau et le bois de chauffage. Les équipages s'efforçaient donc de trouver chaque soir une plage accueillante pour préparer leurs repas et dormir. Cependant, les équipages et leurs navires pouvaient alors être la proie des forces terrestres ennemies.

(Rawlings, 120)

La majorité des Égyptiens du début de l'ère ptolémaïque servaient dans la marine plutôt que dans l'armée ptolémaïque, en particulier en tant qu'épibates et rameurs. Les capitaines et les amiraux étaient généralement macédoniens ou grecs. Les rameurs étaient souvent enrôlés dans le service obligatoire et avaient un statut social inférieur à celui des épibates, même s'ils recevaient un salaire assez élevé. Le mauvais traitement des membres d'équipage inspira des rébellions, qui conduisirent souvent le gouvernement à promettre un meilleur traitement aux rameurs et aux épibates.

Le salaire moyen d'un membre d'équipage pouvait s'élever à une drachme par jour, en fonction de son rang et de son expérience. Les équipages plus expérimentés nécessitaient moins d'entraînement et de préparation et pouvaient être déployés plus rapidement. Ils étaient également plus fiables au combat et mieux à même de réaliser des manœuvres tactiques complexes. C'est pourquoi l'issue des batailles navales de l'Antiquité était souvent déterminée par la qualité de l'équipage.

Ships on the Palestrina Mosaic
Navires sur la mosaïque de Palestrina
WolfgangRieger (Public Domain)

Patrouille et police maritime

Outre la guerre, la marine ptolémaïque était également utilisée pour patrouiller les mers et les fleuves sous contrôle ptolémaïque. Dans l'Égypte ptolémaïque, les forces de l'ordre protégeaient le commerce en surveillant les navires marchands et les ports. De petits navires agiles patrouillaient les rivières intérieures pour empêcher le banditisme et d'autres crimes, tandis que des flottes plus importantes patrouillaient la Méditerranée et la mer Rouge. La masse d'eau la plus importante était le Nil, qui traversait l'Égypte telle une autoroute. Le voyage sur le Nil étant nettement plus rapide que le voyage par voie terrestre, il constituait un important moyen de communication et de commerce, et sa surveillance était vitale.

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Malgré la réputation de puissance navale des Ptolémées, la marine n'avait pas de bons résultats dans les combats navals. En revanche, elle était bien meilleure pour soutenir le réseau ptolémaïque de possessions fortifiées tout autour de la Méditerranée et de la mer Égée, ainsi que sur la mer Rouge et le long du Nil. (Johstono, 265)

La côte égyptienne de la mer Rouge était économiquement importante en raison du commerce avec l'Afrique de l'Est, l'Inde et l'Arabie. La piraterie était une menace constante sur la mer Rouge, que la dynastie ptolémaïque utilisait sa marine et engageait des mercenaires pour l'empêcher. Un stratège et un épistratège de la mer Rouge et de l'océan Indien, équivalant à un amiral ou à un gouverneur, furent nommés après le IIe siècle avant notre ère. Le stratège était probablement chargé de protéger le trafic diplomatique et économique dans ces eaux.

En tant que chefs de file de la Ligue des insulaires au début du IIIe siècle avant notre ère, la marine ptolémaïque défendait également les cités-États grecques des îles Cyclades contre la piraterie dans l'ancienne Méditerranée. Parallèlement, de nombreux éléments indiquent que les rois et amiraux ptolémaïques s'allièrent parfois à des pirates. L'historien romain Strabon (de 62 av. J.-C. à 24 ap. J.-C.) rapporte que les rois ptolémaïques travaillaient avec des pirates qui réduisaient en esclavage des captifs provenant du territoire séleucide en Méditerranée orientale. Des accords similaires furent probablement conclus dans la mer Égée.

Exploration

La flotte ptolémaïque fut utilisée pour explorer les frontières maritimes du monde hellénistique, cartographiant des régions moins connues de l'Arabie et de l'Afrique. Le but de ces expéditions était de trouver de nouvelles sources de richesse ou de matériel de guerre pour l'État ptolémaïque. Ces voyages ayant permis d'atteindre des destinations jusque-là mystérieuses, leurs rapports furent extrêmement utiles aux géographes grecs et romains. Timosthène de Rhodes, amiral sous le règne de Ptolémée II, introduisit une rose des vents basée sur les directions cardinales et les origines géographiques de douze vents, qui devint largement utilisée dans la navigation antique.

12-Wind Compass Rose
Rose des 12 vents
ElectroKid (Public Domain)

Sous Ptolémée II, plusieurs expéditions navales dirigées par des amiraux ptolémaïques furent envoyées en mer Rouge pour explorer les routes commerciales et trouver une source fiable d'éléphants de guerre. L'amiral Ariston explora la côte arabe, tandis que l'amiral Satyros explora la côte égyptienne de la mer Rouge, à la recherche d'informations sur les meilleurs terrains de chasse à l'éléphant. Satyros y fonda la ville de Philotera nommée ainsi en l'honneur d'une des sœurs de Ptolémée II.

Le sous-continent indien fut également exploré au cours de cette période. Eudoxe de Cyzique effectua deux voyages en Inde entre 117 et 107 avant notre ère. Selon Posidonios (c. 135-51 av. J.-C.), le voyage d'Eudoxe avait été rendu possible grâce à un navigateur indien naufragé qui les avait aidés à comprendre comment naviguer directement vers l'Inde sans avoir à faire des arrêts fréquents le long de la côte arabe. Ces découvertes permirent d'intensifier le commerce et la diplomatie entre l'Inde et l'Égypte.

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Questions & Réponses

Quelle était la puissance de la marine ptolémaïque?

La marine ptolémaïque produisit certains des plus grands navires à propulsion humaine de tous les temps, ainsi que les navires de guerre les plus grands et les plus avancés de l'époque. La flotte pouvait employer entre 45 000 et 50 000 membres d'équipage en temps de paix, et entre 70 000 et 80 000 membres d'équipage en temps de guerre.

À quoi servait la marine ptolémaïque?

La marine ptolémaïque était utilisée pour les combats navals, pour patrouiller les routes commerciales et pour explorer les territoires côtiers.

Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Arienne King
Arienne King est une étudiante et rédactrice indépendante passionnée d'histoire, d'archéologie et de média numérique. En plus d'animer le blog Muses & Mayhem, elle occuppe le poste d'éditrice média au sein de l'Ancient History Encyclopedia.

Citer cette ressource

Style APA

King, A. (2024, juin 19). Marine Ptolémaïque [Ptolemaic Navy]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-23221/marine-ptolemaique/

Style Chicago

King, Arienne. "Marine Ptolémaïque." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le juin 19, 2024. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-23221/marine-ptolemaique/.

Style MLA

King, Arienne. "Marine Ptolémaïque." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 19 juin 2024. Web. 20 nov. 2024.

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